Kenya : information sur la violence fondée sur le genre, en particulier la violence familiale, y compris le traitement réservé aux personnes survivantes par la société et les autorités; la protection offerte par l’État et les services de soutien offerts aux personnes survivantes, particulièrement à Nairobi (2022–octobre 2024) [KEN202019.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Violence familiale

D’après les rapports sur les pratiques des pays en matière de droits de la personne (Country Reports on Human Rights Practices for 2023) publiés par le Département d’État des États-Unis, les autorités ont affirmé que la violence familiale était la [traduction] « première cause de décès non accidentels évitables chez les femmes » au Kenya (É.-U. 2024-04-22, 27). Selon Freedom House, [traduction] « les viols et la violence familiale demeurent fréquents et font rarement l’objet de poursuites judiciaires » (2024-02-29, sect. G3). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, LVCT Health, une ONG de Nairobi qui offre des programmes de santé à la population kényane, entre autres en ce qui concerne le VIH, la santé sexuelle, la santé maternelle et la violence fondée sur le genre (LVCT Health s.d.a), a signalé que la violence sexuelle et la violence fondée sur le genre sont [traduction] « généralisées » au Kenya, et que les taux varient d’une communauté et d’une région à l’autre (LVCT Health 2024-09-05).

Dans le cadre de l’Enquête sur la démographie et la santé au Kenya (Kenya Demographic and Health Survey - KDHS) [1] de 2022, 16 926 femmes et filles âgées de 15 à 49 ans ont été interrogées pour le module sur la violence fondée sur le genre, et il en ressort que 34 p. 100 d’entre elles ont déjà subi de la violence physique depuis l’âge de 15 ans (KNBS du Kenya & ICF 2023-01, 83, 84). La même source fournit les statistiques suivantes sur la violence physique ou sexuelle subie par les femmes et les filles âgées de 15 à 49 ans :

Âge Pourcentage de répondantes ayant subi de la violence sexuelle depuis l’âge de 15 ans Percentage de répondantes ayant subi de la violence physique depuis l’âge de 15 ans
15–19 7,2 19,5
20–24 11,3 29,0
25–29 13,1 36,9
30–39 15,2 40,2
40–49 17,5 41,7

État matrimonial Pourcentage de répondantes ayant subi de la violence sexuelle depuis l’âge de 15 ans Percentage de répondantes ayant subi de la violence physique depuis l’âge de 15 ans
N’a jamais été mariée ni eu de partenaire intime 3,0 12,3
N’a jamais été mariée et a déjà eu un partenaire intime 12,3 25,2
Mariée/habite avec un partenaire 12,9 37,0
Divorcée/séparée/veuve 26,5 58,4

(KNBS du Kenya & ICF 2023-01, 84, 88)

Selon les données de la KDHS, chez les femmes et les filles âgées de 15 à 49 ans qui avaient [traduction] « déjà été mariées » ou avaient eu un partenaire intime, leur époux ou partenaire actuel était l’auteur de la violence physique dans la majorité des cas (53,9 p. 100), suivi de leur ancien partenaire (34 p. 100); pour les femmes qui n’avaient jamais eu de partenaire intime, la violence avait été infligée le plus souvent par leur mère/belle-mère (24,8 p. 100) et des enseignants (32,5 p. 100) (KNBS du Kenya & ICF 2023-01, 86).

Une analyse des cas de féminicide signalés dans les médias kényans en anglais, menée conjointement par trois organisations [2], a montré que 75 p. 100 des 502 féminicides recensés entre janvier 2016 et décembre 2023 avaient été commis par une personne qui connaissait la victime, comme un partenaire intime, un membre de la famille ou un ami (ADH et al. [2024-01]).

1.1 Attitude de la société

Les statistiques présentées dans le paragraphe suivant sont tirées d’Afrobarometer, un réseau de recherche [traduction] « non partisan » et sans but lucratif qui a son siège au Ghana et effectue des enquêtes en personne dans les pays d’Afrique selon un cycle de deux à trois ans (Afrobarometer s.d.).

Afrobarometer a interrogé 2 400 Kényans à la fin de 2021 et a constaté que :

  • 81 p. 100 des personnes sondées ont déclaré que les hommes n’avaient [traduction] « jamais de raison valable » d’employer la force physique contre leur épouse;
  • 69 p. 100 des personnes sondées estimaient que la violence familiale était une affaire à régler en privé, et non au moyen de procédures criminelles;
  • 59 p. 100 des personnes sondées ont déclaré qu’il est « plutôt probable » ou « très probable » qu’une femme qui signale un viol, de la violence familiale ou une autre forme de violence fondée sur le genre se fasse « critiquer, harceler ou humilier » par d’autres membres de la communauté (2022-10-06, 2, 6).

Dans le cadre de leur rapport sur l’accès à la justice pour les survivantes de violence fondée sur le genre, le Centre pour l’éducation et la sensibilisation aux droits (Centre for Rights Education and Awareness - CREAW), une ONG kényane de défense des droits des femmes (CREAW s.d.), et la fondation Wangu Kanja (Wangu Kanja Foundation - WKF), une autre ONG kényane qui aide les survivantes de violence sexuelle (WKF s.d.), ont interrogé 45 fournisseurs de services tels que des avocats, des policiers, des professionnels de la santé et des juges, et 24 personnes survivantes de violence sexuelle ou de violence fondée sur le genre, et a conclu que les personnes survivantes et leur famille subissent l’opprobre de la communauté ou de leurs proches, et qu’elles subissent aussi des [traduction] « représailles » de la part de la communauté et de leurs agresseurs et perdent leur statut social (CREAW & WKF [2022-05], 6, 30).

Selon les Country Reports 2023 publiés par les États-Unis, [traduction] « les groupes de défense des droits de la personne » signalent que le gouvernement n’a pas « réellement » fait appliquer les lois qui criminalisent les agressions sexuelles, « particulièrement dans les régions pauvres ou rurales », et que les gens se tournaient « fréquemment » vers des méthodes traditionnelles de règlement des conflits (2024-04-22, 26). Au cours d’un entretien avec la Direction des recherches, un agrégé de recherche à la London School of Hygiene and Tropical Medicine qui mène des recherches sur la santé publique, entre autres sur la violence fondée sur le genre au Kenya, a affirmé que les femmes qui subissent de la violence fondée sur le genre ou de la violence familiale au Kenya se font dire par leur famille qu’elles doivent [traduction] « endurer » la situation, et qu’elles peuvent subir la « réprobation » de la communauté, qui « ne comprend peut-être pas » leurs besoins psychologiques (agrégé de recherche 2024-08-27).

2. Cadre juridique

Un rapport sur la violence envers les femmes et les filles au Kenya, publié par une coalition de trois ONG néerlandaises de défense des droits des enfants, contient le tableau suivant qui résume le cadre juridique national du Kenya en ce qui concerne la violence fondée sur le genre :

[traduction]

Loi Résumé
Loi de 2006 sur les infractions de nature sexuelle (The Sexual Offenses Act, 2006) L’article 3 prévoit expressément des garanties contre le viol; l’article 5 prévoit une protection et des voies de droit contre les agressions sexuelles, et l’article 6, contre les actes sexuels indécents; l’article 12 interdit les actes sexuels avec des enfants, et les articles 13 à 18 offrent une protection contre la traite d’enfants, le tourisme sexuel impliquant des enfants, la prostitution juvénile, la pornographie juvénile et l’exploitation sexuelle d’enfants ainsi que la prostitution. L’article 23 protège les personnes du harcèlement sexuel au travail.
Loi sur la prévention et le contrôle du VIH et du SIDA (HIV & AIDS Prevention and Control Act) Interdit la discrimination délibérée au travail au motif de la séropositivité d’une personne, quel que soit son genre.
Loi de 2010 sur la lutte contre la traite de personnes (Counter Trafficking in Persons Act, 2010) Prévoit des mécanismes visant à prévenir, à éliminer et à punir la traite de personnes, en particulier des femmes et des enfants.
Loi de 2001 sur l’enfance (The Children Act, 2001) Prévoit expressément l’obligation de veiller à l’intérêt des enfants et la protection contre le travail des enfants et les mariages d’enfants, et devrait donc être adoptée et mise en œuvre par des entreprises des secteurs public et privé.
Loi de 2011 interdisant la mutilation génitale des femmes (Prohibition of Female Genital Mutilation Act 2011) Interdit la pratique de la mutilation génitale des femmes [(MGF)] et protège les personnes contre les atteintes à leur intégrité mentale et physique.
Loi de 2015 sur la protection contre la violence familiale (The Protection Against Domestic Violence Act, 2015) Le paragraphe 3a) prévoit des garanties contre les mariages d’enfants, la pratique de la MGF sur les jeunes femmes et les filles, les mariages forcés de filles et la transmission forcée de l’épouse par voie de succession, ainsi qu’une protection et des voies de droit pour les jeunes femmes et les filles contre la violence sexuelle dans le mariage, les tests de virginité et la purification des veuves.

(Plan Netherlands et al. 2019-04-09, ix, 32, italiques ajoutés)

Selon le rapport du Centre pour l’éducation et la sensibilisation aux droits (Centre for Rights Education and Awareness - CREAW) et de la fondation Wangu Kanja (Wangu Kanja Foundation - WKF), la loi de 2015 sur la protection contre la violence familiale fournit pour le Kenya la [traduction] « définition la plus complète de la violence », qui s’inspire de la façon dont l’OMS définit la violence ([2022-05], 9).

2.1 Loi n° 2 de 2015 sur la protection contre la violence familiale (Protection Against Domestic Violence Act, No. 2 of 2015 - PADVA)

La PADVA, une loi parlementaire visant à [traduction] « apporter une protection et une assistance aux victimes de violence familiale » et « la protection de l’époux et de tout enfant ou de toute autre personne à charge » (Kenya 2015, préambule), prévoit les dispositions suivantes :

[traduction]

3. Définition de la violence familiale.

Pour l’application de la présente loi, « violence » s’entend de —

  1. la maltraitance qui inclut —
    1. le mariage d’enfants;
    2. la mutilation génitale féminine;
    3. le mariage forcé;
    4. la transmission forcée de l’épouse par voie de succession;
    5. l’ingérence des beaux-parents;
    6. la violence sexuelle dans le cadre du mariage;
    7. le contrôle de la virginité;
    8. la purification de la veuve;
  2. le dommage matériel;
  3. le déflorement;
  4. le fait de priver la partie demanderesse de l’accès aux installations liées à son lieu de résidence, de restreindre son accès à de telles installations ou de l’empêcher de jouir dans une proportion raisonnable des installations en question;
  5. la maltraitance économique;
  6. la maltraitance émotionnelle ou psychologique;
  7. le fait de s’introduire de force dans la résidence de la partie demanderesse lorsque les parties ne vivent pas sous le même toit;
  8. le harcèlement;
  9. l’inceste;
  10. l’intimidation;
  11. la maltraitance physique;
  12. l’agression sexuelle;
  13. la traque;
  14. les mauvais traitements verbaux;
  15. toute autre conduite à l’égard d’une personne, lorsque ladite conduite cause un préjudice ou peut causer un préjudice imminent à la sécurité, à la santé ou au bien-être de cette personne.

(2) « Violence familiale », à l’égard de toute personne, s’entend de la violence commise contre ladite personne, ou de la menace de violence ou de danger imminent envers ladite personne, par toute autre personne avec qui ladite personne se trouve ou s’est trouvée dans une relation familiale (Kenya 2015, art. 3, en gras dans l’original).

La PADVA comporte aussi les dispositions suivantes sur les fonctions des agents de police en lien avec la violence familiale :

[traduction]

6. Fonctions des policiers en lien avec la violence familiale.

(1) Toute personne qui reçoit une plainte de violence familiale ou qui fait enquête sur une telle plainte —

  1. informe l’auteur de la plainte de toutes les mesures d’aide à la disposition de l’auteur de la plainte, y compris l’accès à un refuge et l’assistance médicale, ou porte assistance à l’auteur de la plainte de toute autre manière appropriée;
  2. informe l’auteur de la plainte de son droit de demander de l’assistance au titre de la présente loi et lui explique comment déposer une plainte au pénal.

(2) Si l’auteur de la plainte le souhaite, la personne à qui l’auteur de la plainte fait sa déclaration peut être une personne du même sexe que l’auteur de la plainte.

[…] (Kenya 2015, art. 6, en gras dans l’original).

En ce qui a trait aux ordonnances de protection, la PADVA prévoit les dispositions suivantes :

[traduction]

8. Demande d’une ordonnance de protection.

(1) Une personne qui se trouve dans une relation familiale avec une autre personne peut présenter une demande au tribunal en vue d’obtenir une ordonnance de protection à l’encontre de cette autre personne.

[…]

19.Contenu de l’ordonnance de protection.

(1)Une ordonnance de protection peut interdire la personne mise en cause de faire une ou plusieurs des choses suivantes —

  1. agresser physiquement ou sexuellement ou menacer d’agresser la personne protégée;
  2. endommager, ou menacer d’endommager, les biens de la personne protégée;
  3. se livrer, ou menacer de se livrer, à un comportement, y compris des actes d’intimidation ou de harcèlement, qui constitue de la maltraitance psychologique à l’égard de la personne protégée;
  4. encourager toute personne à se livrer à un comportement à l’égard de la personne protégée qui, si ce comportement était adopté par la personne mise en cause, serait interdit par l’ordonnance;
  5. se livrer, ou menacer de se livrer, à un comportement qui inclut l’intimidation, le harcèlement ou la traque qui constitue de la maltraitance émotionnelle, verbale ou psychologique à l’égard de la personne protégée;
  6. se livrer, ou menacer de se livrer, à la maltraitance économique de la personne protégée;
  7. se livrer, ou menacer de se livrer, à des rites ou pratiques culturels ou coutumiers qui constituent des agressions contre la personne protégée.

[…]

21. Durée de l’ordonnance de protection.

Une ordonnance de protection demeure en vigueur pour la période précisée par le tribunal et peut être revue, si besoin est, selon les circonstances.

22. Manquement à une ordonnance de protection.

Une personne mise en cause qui s’est vu signifier une copie d’une ordonnance de protection et qui contrevient à l’ordonnance de quelque façon que ce soit se rend coupable d’une infraction et est passible d’une amende maximale de cent mille shillings [1 160 $CAN] et d’une peine d’emprisonnement maximale de douze mois, ou l’une de ces peines.

23. Arrestation pour manquement à une ordonnance de protection.

(1) Un policier peut, sans mandat, s’il a des motifs raisonnables de penser qu’une personne a commis une infraction au titre de l’article 22, arrêter et détenir ladite personne.

(2) Sans limiter la portée du paragraphe (1), un policier qui exerce les pouvoirs conférés par ledit paragraphe prend en considération -

  1. la menace à la sécurité ou aux biens de la personne protégée;
  2. la gravité de l’acte qui constitue un manquement;
  3. le temps écoulé depuis le manquement présumé (Kenya 2015, art. 8, 19, 21-23, en gras dans l’original).

De plus, la PADVA comporte l’information suivante au sujet du soutien et de l’indemnisation des personnes survivantes :

[traduction]

14. Counselling.

(1) Le tribunal peut, en tenant compte des circonstances propres à chaque affaire, ordonner aux parties de participer à des programmes de counselling et de conciliation ou à tout autre programme que le tribunal juge acceptable.

[…]

32. Indemnisation.

(1) Lorsqu’une victime de violence familiale subit des lésions corporelles, des dommages matériels ou des pertes financières à cause de la violence familiale, le tribunal qui instruit la demande d’indemnisation peut accorder l’indemnisation pour les lésions, les dommages ou les pertes qu’il juge juste et raisonnable.

[…] (Kenya 2015, art. 14, 32, en gras dans l’original).

2.2 Viol conjugal

Selon des sources, les lois kényanes ne criminalisent pas [[traduction] « expressément » (É.-U. 2024-04-22, 26)] le viol conjugal (CREAW & WKF [2022-05]; CIJ 2023-12-13; É.-U. 2024-04-22, 26). Dans un article rédigé par le chapitre kényan de la Commission internationale de juristes (CIJ), une ONG qui œuvre à la défense des droits de la personne et à la promotion de l’État de droit dans le monde entier (CIJ s.d.), on peut lire que le paragraphe 43(5) de la loi de 2006 sur les infractions de nature sexuelle prévoit une [traduction] « exemption » pour le viol conjugal (CIJ 2023-12-13).

La loi sur les infractions de nature sexuelle est ainsi rédigée :

[traduction]

43. Actes intentionnels et illégaux

(1) Est intentionnel et illégal tout acte commis :

  1. dans un contexte de coercition;
  2. sous de faux prétextes ou par des moyens frauduleux;
  3. sur une personne qui n’est pas apte à comprendre la nature de l’acte qui constitue l’infraction.

[…]

(5) La présente disposition ne s’applique pas dans le cas où les personnes en cause sont légalement mariées l’une à l’autre (Kenya 2006).

2.3 Mise en application des lois sur la violence familiale

D’après les US Country Reports 2023, bien que le viol, les relations sexuelles avec une personne n’ayant pas l’âge du consentement et la violence familiale soient criminalisés, la mise en application des lois demeure [traduction] « limitée » (É.-U. 2024-04-22, 26). L’agrégé de recherche a affirmé qu’il reste [traduction] « énormément à faire pour assurer la mise en œuvre efficace de ces lois Kenya », en dépit du « cadre juridique solide » en place dans le pays pour protéger les femmes contre la violence fondée sur le genre et la violence familiale (2024-08-27). Selon des militantes interviewées pour un article d’Al Jazeera, les politiques gouvernementales ne sont [traduction] « guère efficaces » (2024-01-27). L’agrégé de recherche a ajouté que les cas de violence fondée sur le genre et de violence familiale se règlent souvent par le recours à des mécanismes traditionnels de règlement des conflits, avec l’aide d’aînés de la famille ou de chefs de tribu, plutôt que par voie judiciaire (2024-08-27).

3. Attitude des autorités

Selon le CREAW et la WKF, [traduction] « [b]on nombre de personnes survivantes se sentent humiliées » lorsqu’elles se font interroger après avoir signalé des cas de violence sexuelle au poste de police ou dans « certains bureaux de l’égalité des genres » ([2022-05], 33). La même source ajoute que les personnes survivantes de violence fondée sur le genre [traduction] « subissent un nouveau traumatisme » dans les centres de soins de santé si elles ne reçoivent pas des soins « immédiatement » ou sont renvoyées d’un médecin à l’autre (CREAW & WKF [2022-05], 33). De plus, la même source signale que [traduction] « les personnes survivantes et les témoins de la violence fondée sur le genre ainsi que les membres de leur famille subissent nombre de menaces et d’actes d’intimidation de la part des auteurs de la violence et d’autres parties intéressées, y compris des membres de l’administration (chefs et policiers), qui tentent de les empêcher de témoigner » (CREAW & WKF [2022-05], 33).

Selon LVCT Health, l’origine ethnique et la classe sociale n’influencent pas la façon dont les autorités traitent les personnes survivantes, mais il en va autrement pour l’orientation sexuelle, l’identité et l’expression de genre et les caractéristiques sexuelles; les groupes [traduction] « marginalisés » ont « difficilement accès » à des services de protection et à un « traitement équitable » dans le système judiciaire, étant donné que les lois ne reconnaissent pas leur identité et leur vécu (2024-09-05). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

4. Protection offerte par l’État

Dans un examen de la conformité du Kenya au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, effectué en août 2024, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a constaté

[traduction]

une insuffisance de mesures pour éliminer les pratiques culturelles préjudiciables, notamment le lévirat et les rituels de purification, l’absence de réparation pour les femmes qui ont été victimes de violence sexuelle dans le contexte des élections de 2017, le défaut de criminaliser le viol conjugal, des lacunes dans l’accès des victimes de violence à des services essentiels, le manque de ressources pour les refuges destinés aux victimes, et l’absence de données sur la violence envers les femmes appartenant aux minorités (Nations Unies 2024-07-17).

Selon les personnes survivantes sondées dans le rapport du CREAW et de la WKF, les services offerts par la police étaient [traduction] « trop lents » ([2022-05], 33). Citant des ONG, les Country Reports 2023 publiés par les États-Unis signalent que

[traduction]

peu d’arrestations et de poursuites ont été recensées concernant des cas de violence sexuelle, même dans les cas où les personnes survivantes en avaient identifié l’auteur, en raison des ressources limitées de la police pour mener les enquêtes, des mécanismes déficients de collecte et de traitement des preuves, et de la lenteur des procédures judiciaires, de sorte qu’il est difficile et coûteux pour les personnes survivantes de tenter d’obtenir justice (2024-04-22, 27).

On peut aussi lire dans le rapport du CREAW et de la WKF que, [traduction] « dans certains cas, la police demande aux personnes survivantes d’arrêter l’agresseur ou leur demande de l’argent pour qu’elle procède à l’arrestation » ([2022-05], 33). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

Le même rapport signale que, dans les postes de police dotés de bureaux de l’égalité des genres, il peut y avoir des policiers qui sont [traduction] « bien formés en matière de violence fondée sur le genre »; cependant, ces bureaux ne sont pas présents dans tous les comtés, et les personnes survivantes se heurtent à des « obstacles » lorsqu’elles signalent un cas de violence fondée sur le genre, y compris les suivants :

  • « Froideur/hostilité de la part des policiers »
  • « Lenteur ou inaction de la part de la police »
  • « Manque de ressources policières »
  • « Absence d’agents qualifiés et dévoués aux bureaux de l’égalité des genres »
  • « Nombre insuffisant de bureaux de l’égalité des genres, inefficacité et état lamentable de ces bureaux »
  • « Corruption dans les postes de police »
  • « Traitement inadéquat des preuves » (CREAW & WKF [2022-05], 35, 36).

Citant des militants des droits de la personne du Kenya, l’Associated Press (AP) signale que les bureaux de l’égalité des genres ne sont pas en état de marche et que certains agents demandent un pot-de-vin aux victimes avant d’intervenir (2024-03-09). L’agrégé de recherche a déclaré que le système judiciaire, les forces policières et les bureaux de l’égalité des genres ont [traduction] « failli à leur tâche » de protéger les victimes et les personnes survivantes de violence fondée sur le genre ou de violence familiale, en raison du manque de ressources et de la « corruption » de la police (2024-08-27).

D’après le CREAW et la WKF, les enquêteurs [traduction] « manquent » d’équipement et de capacité nécessaires pour obtenir, recueillir, transporter, entreposer et analyser les éléments de preuve dans les cas de violence sexuelle et fondée sur le genre, notamment ceux mettant en cause des personnes handicapées ou des enfants ([2022-05], 37). La même source souligne que les preuves médico-légales dans les affaires de violence sexuelle sont recueillies par des professionnels de la santé, des enquêteurs et, dans certains cas, des membres de la communauté ou de la famille, qui ne possèdent pas les connaissances requises pour manipuler ces éléments de preuve de manière à empêcher qu’ils soient altérés, détruits, compromis ou perdus (CREAW & WKF [2022-05], 38). La même source fait état des obstacles suivants relativement aux preuves médico-légales :

  • [traduction] « Elles ne sont pas recueillies à temps »;
  • « Les rapports médicaux sont compromis ou soumis à la corruption » ou, dans le cas d’hôpitaux privés, la partie défenderesse conteste les rapports;
  • « Le coût des documents » est à la charge des personnes survivantes;
  • « Il n’y a pas suffisamment de laboratoires judiciaires »;
  • « Produire des éléments de preuve devant les tribunaux » est un obstacle, car « certains » tribunaux n’admettent pas les témoignages des professionnels médicaux, et ce ne sont pas tous les médecins qui acceptent de comparaître;
  • « Les ressources sont inadéquates », y compris les ressources humaines et financières;
  • « Les communications sont limitées » entre la police, les analystes médico-légaux ou gouvernementaux et le personnel médical (CREAW & WKF [2022-05], 38).

Dans un article publié par la magistrature du Kenya, on peut lire que, en date de juin 2023, il existait deux tribunaux qui se spécialisaient dans le traitement des cas de violence sexuelle et fondée sur le genre (Kenya 2023-06-18). Selon un article publié en mars 2024 par le chapitre kényan de la CIJ, 11 tribunaux ont été établis pour traiter les cas de violence sexuelle et fondée sur le genre (CIJ 2024-03-30). La même source précise que les services de soutien, tels que des services de consultation et d’assistance médicale, sont centralisés dans ce réseau de tribunaux pour en permettre l’accès aux personnes survivantes (CIJ 2024-03-30). Un article paru en mai 2024 dans Capital News, un site d’actualités kényanes affilié à la station de radio Capital FM, signale qu’il y a 12 tribunaux dédiés aux affaires de violence sexuelle et fondée sur le genre au Kenya, dans les villes suivantes : Shanzu, Mombasa; Siaya; Kisumu; Kibera; Makadara; Meru; Nakuru; Kiambu; Machakos; Kisii; Kitale; et Kakamega (2024-05-23). La même source précise que la juge en chef Martha Koome a appuyé la proposition d’attribuer à ces tribunaux le nouveau nom de Cours de justice pour l’égalité de genre (Gender Justice Courts) (Capital News 2024-05-23). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements sur les tribunaux dédiés aux cas de violence sexuelle et fondée sur le genre.

Selon la BBC, [traduction] « la plupart des auteurs demeurent impunis », malgré le cadre juridique « robuste » du Kenya visant à empêcher la violence fondée sur le genre, et lorsque des affaires se retrouvent devant les tribunaux, les procédures durent « souvent » pendant « des années » (2024-01-27). Dans un rapport sur les délais du système judiciaire pour les personnes survivantes de violence sexuelle et fondée sur le genre, rédigé par la Coalition sur la violence contre les femmes (Coalition on Violence Against Women - COVAW), un organisme kényan à but non lucratif qui défend les droits des femmes et s’intéresse particulièrement à l’accès à la justice, on peut lire qu’un total de 3 791 affaires au titre de la loi sur les infractions de nature sexuelle ont été portées devant le tribunal de 2017 à 2020 dans sept [traduction] « palais de justice », et que, en date de novembre 2021, quatre de ces sept palais de justice avaient réglé moins de 50 p. 100 de leurs dossiers (COVAW 2022, 1, 15, 38).

Selon le site d’actualités Nation, qui couvre le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie et d’autres pays d’Afrique, la police du Kenya a lancé les centres Policare pour offrir en un seul endroit des services professionnels aux personnes survivantes en matière de sécurité et dans les domaines médical, psychosocial et juridique, afin [traduction] « d’accroître la sécurité des victimes et la responsabilisation des agresseurs » (2023-06-30). La même source signale aussi que le premier centre Policare a été établi en 2021 dans la ville de Nanyuki et demeure le [traduction] « seul » centre opérationnel, en plus du centre « d’aiguillage » à Nairobi (2023-06-30).

4.1 Ordonnances de protection

Des sources soulignent que, à la suite d’une demande, des ordonnances de protection peuvent être rendues [traduction] « sans préavis » et en dehors des heures d’ouverture régulières des tribunaux (CREAW & WKF [2022-05], 19; Baker McKenzie s.d.a, paragr. 4.1.7). D’après le CREAW et la WKF, une ordonnance de protection [traduction] « peut être demandée par l’une ou l’autre des personnes suivantes au nom de la personne survivante », soit « un policier, un agent des services sociaux, le tuteur d’un enfant, un membre de la famille, un voisin, un professionnel de la santé, un psychothérapeute, une ONG qui craint pour le bien-être de victimes de violence familiale, un dirigeant de la communauté ou même un chef religieux » ([2022-05], 19). Selon l’outil Combattre la violence familiale (Fighting Domestic Violence) [3], un outil de comparaison de lois créé par Baker McKenzie, un cabinet d’avocats international offrant des services juridiques aux entreprises (Baker McKenzie s.d.b), les personnes suivantes peuvent demander une ordonnance de protection :

[traduction]

  • une personne qui se trouve dans une relation familiale avec une autre personne;
  • le représentant d’un enfant, par exemple un parent, un tuteur ou un autre membre de la famille, un policier ou un agent de probation, ou toute autre personne autorisée par le tribunal;
  • le représentant d’une personne admissible qui n’est pas apte à présenter elle-même sa demande (et n’est pas un enfant) (Baker McKenzie s.d.a, paragr. 4.1.2, renvois omis).

4.1.1 Règlement de 2020 sur la protection contre la violence familiale (The Protection Against Domestic Violence Rules, 2020)

L’organisation LVCT Health fait observer que le Kenya a adopté le règlement sur la protection contre la violence familiale en 2020 pour encadrer la mise en œuvre de la loi sur la protection contre la violence familiale (2024-09-05). Selon la même source, le règlement précise maintenant que les personnes survivantes doivent signaler les cas de violence familiale à la police, et il désigne des [traduction] « responsables » qui ont le devoir de demander des ordonnances de protection au nom des personnes survivantes (LVCT Health 2024-09-05).

Le règlement de 2020 sur la protection contre la violence familiale prévoit ce qui suit au sujet des ordonnances de protection :

[traduction]

Dépôt d’une plainte.

2. (1) Quiconque soupçonne qu’un acte de violence familiale est ou a été commis peut porter plainte auprès d’un policier ou de tout autre agent des autorités, au moyen du formulaire PADV 1 qui figure en annexe.

[…]

(3) La personne qui reçoit une plainte doit aider le plaignant ou la victime ou, si la victime est un enfant ou a une déficience physique, mentale, intellectuelle ou sensorielle, le parent ou tuteur de cette personne, à présenter une demande d’ordonnance de protection.

Demande d’ordonnance de protection.

[…]

3. […]

(2) Un plaignant peut autoriser un représentant à demander une ordonnance de protection en son nom au moyen du formulaire PADV 3 qui figure en annexe.

[…]

(4) Le tribunal doit fixer une date pour la présentation d’instructions relatives à l’affaire dans un délai de sept jours à compter de la signification de la réplique du défendeur; le tribunal devra alors se prononcer sur les points suivants :

  1. jonction de parties;
  2. regroupement de demandes;
  3. dépôt de documents additionnels;
  4. questions à trancher;
  5. mode d’audience;
  6. date d’audience.

(5) Une demande d’ordonnance de protection doit être étayée par un affidavit et, si la demande est présentée par le représentant du plaignant, l’affidavit doit préciser :

  1. le lien entre le représentant et le plaignant;
  2. à quel titre agit le représentant;
  3. l’âge du plaignant s’il s’agit d’un enfant;
  4. la nature de la déficience du plaignant, s’il y a lieu;
  5. les faits sur lesquels le représentant fonde la demande.

[…]

Facteurs pris en compte pour rendre une ordonnance de protection.

6. Pour déterminer s’il y a lieu de rendre une ordonnance de protection, le tribunal peut, sous réserve du paragraphe 12(1) de la loi, prendre en considération les facteurs suivants :

  1. tout acte de violence commis par le défendeur envers le demandeur ou commis par le demandeur envers le défendeur;
  2. dans le cas où le demandeur et le défendeur ont des personnes à charge, tout acte de violence commis par le défendeur ou le demandeur envers les personnes à charge;
  3. la question de savoir si le défendeur ou le demandeur a déjà été reconnu coupable d’une infraction commise avec violence ou menaces de violence;
  4. l’âge et l’état de santé du demandeur, du défendeur et des personnes à charge;
  5. la perception du demandeur ou du défendeur quant à la façon dont le comportement de l’autre partie menace sa sécurité ou son bien-être;
  6. toute preuve d’une détérioration du bien-être physique, psychologique ou émotionnel du demandeur ou des personnes à charge qui est directement causée par la crainte du comportement du défendeur;
  7. toute conséquence de la consommation excessive de substances intoxicantes, y compris d’alcool, par le défendeur, le demandeur ou une personne à charge;
  8. toute autre question que le tribunal juge pertinente relativement à la sécurité ou au bien-être du demandeur, du défendeur ou des personnes à charge.

Ordonnances de protection provisoires.

7. (1) Sur réception d’une demande ex parte d’ordonnance de protection provisoire, si le tribunal est convaincu, après examen des preuves présentées, que le défendeur a commis, commet ou menace de commettre ou d’aider à commettre un acte de violence familiale, il peut rendre une ordonnance de protection provisoire contre le défendeur.

(2) Si le tribunal rend une ordonnance de protection provisoire ex parte, le demandeur, ou l’agent des forces de l’ordre, selon ce que prescrit le tribunal dans l’ordonnance, doit signifier l’ordonnance au défendeur et à toute autre personne visée par l’ordonnance dans un délai de sept jours à compter de la date où elle est rendue (Kenya 2020, en gras et italique dans l’original).

4.2 Signalement de la violence familiale

Selon Afrobarometer, malgré le fait que la violence familiale est criminalisée par la loi, [traduction] « bien souvent », elle n’est pas signalée et demeure sans suite, bien que l’agresseur soit « habituellement connu », en raison de la « complexité des relations familiales » (2022-10-06). La même source a constaté que 79 p. 100 des Kényans sondés estiment qu’il est [traduction] « plutôt probable » ou « très probable » que la police prenne au sérieux les cas de violence fondée sur le genre (Afrobarometer 2022-10-06). D’après la même source, la [traduction] « [r]éprobation » peut « décourager » les femmes et les filles de signaler la violence fondée sur le genre (Afrobarometer 2022-10-06). Dans le rapport du CREAW et de la WKF, on peut lire que la mise en application des lois se rapportant à la violence sexuelle et fondée sur le genre est [traduction] « déficiente » ([2022-05], 30). La même source signale aussi que, en raison du traumatisme et parce qu’elles ignorent comment obtenir de l’aide, [traduction] « de nombreuses » personnes survivantes s’abstiennent de porter plainte pour violence fondée sur le genre (CREAW & WKF [2022-05], 34).

L’agrégé de recherche a affirmé que les personnes survivantes peuvent craindre que leur sécurité physique soit menacée par les autorités ou les agresseurs si elles portent plainte, surtout si les agresseurs sont fortunés ou ont de bons contacts (2024-08-27). Selon LVCT Health, le choix de signaler la violence fondée sur le genre et la violence familiale est influencé par des facteurs tels que la [traduction] « corruption » et les délais administratifs, qui exposent les personnes survivantes à « la réprobation et à la discrimination » (2024-09-05). La même source a ajouté que [traduction] « les longs délais d’attente et l’inaction générale » des policiers peuvent exacerber les conséquences post-traumatiques pour les personnes survivantes (LVCT Health 2024-09-05). L’agrégé de recherche a également fait état de [traduction] « taux alarmants » de cas où des policiers renvoient les gens qui signalent la violence fondée sur le genre ou la violence familiale, et où des personnes survivantes subissent « de la réprobation et de nouveaux préjudices » et « peuvent même se faire agresser ou exploiter » par la police (2024-08-27). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

5. Services de soutien

D’après le rapport du CREAW et de la WKF, il manque de services de psychologie et de thérapie pour les personnes survivantes de violence fondée sur le genre, mais ces services peuvent être obtenus sans frais auprès d’ONG, ou moyennant des coûts dans certains hôpitaux ([2022-05], 34). L’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU Femmes) fait observer que [traduction] « la vaste majorité » des refuges du pays sont administrés par des défenseurs des droits de la personne et des ONG (Nations Unies 2023-06-21). Un rapport du Forum Génération Égalité, une initiative d’ONU Femmes visant la promotion de l’égalité des genres (Nations Unies s.d.), signale qu’il y avait 54 [traduction] « refuges et centres d’hébergement d’urgence privés » en service dans 18 comtés [sur 47] du Kenya, et que 2 étaient administrés par le gouvernement (Nations Unies 2023-06-21).

ONU Femmes fait état d’un [traduction] « urgent » besoin de refuges et de lieux sûrs pour les personnes survivantes de violence fondée sur le genre (Nations Unies 2023-06-21). Selon ONU Femmes, les refuges administrés par le secteur privé offrent aux personnes survivantes un hébergement temporaire, des services d’aide psychologique, de l’aide juridique et des formations professionnelles (Nations Unies 2023-06-21). D’après Population Services Kenya (PS Kenya), une entreprise kényane qui collabore avec le secteur privé pour promouvoir et mettre en œuvre des programmes de santé en misant sur [traduction] « les changements sociaux [et] comportementaux, le marketing social [et] le franchisage » (PS Kenya s.d.), les refuges existants sont aux prises avec [traduction] « des contraintes financières et des espaces limités, et n’ont pas suffisamment de ressources et de capital humain pour offrir adéquatement leurs services » (2024-05-27). La même source ajoute que [traduction] « [d]e nombreux refuges sont surpeuplés et peinent à maintenir leurs activités, faute de soutien adéquat de la part des organismes d’État, des gouvernements de comté et du gouvernement national » (PS Kenya 2024-05-27).

Dans un communiqué de presse publié par Physicians for Human Rights (PHR), [traduction] « un organisme international voué à la santé et aux droits de la personne » (PHR s.d.), qui porte sur un rapport rédigé en collaboration avec le réseau kényan des personnes survivantes de violence sexuelle (Kenya Survivors of Sexual Violence Network in Kenya - SSVKenya), un réseau organisé par la WKF, on peut lire que, [traduction] « [s]ouvent, les personnes survivantes ne tentent pas d’obtenir des soins médicaux ou psychologiques ni d’obtenir justice et réparation, en raison de facteurs tels que des inquiétudes quant à leur sécurité, la réprobation sociale et le manque de services », l’accès physique, le coût et le « très grand nombre de patients » (PHR 2023-06-05).

Selon le ministère du Genre, de la Culture, des Arts et du Patrimoine (Ministry of Gender, Culture, the Arts and Heritage) du Kenya, le gouvernement a établi un partenariat avec des intervenants non gouvernementaux pour [traduction] « soutenir » sept services téléphoniques d’urgence sans frais qui « orientent adéquatement » les personnes survivantes de violence fondée sur le genre (Kenya s.d.).

L’agrégé de recherche a affirmé que la population du Kenya est unie par des réseaux sociaux, ethniques et familiaux, de sorte qu’il est très difficile pour les personnes survivantes de violence fondée sur le genre ou de violence familiale de déménager et de repartir à neuf (2024-08-27). La même source a ajouté que la pauvreté est un facteur qui rend les personnes survivantes plus vulnérables à l’exploitation et à la traite de personnes si elles déménagent en milieu urbain, bien qu’elles y aient un meilleur accès aux services (agrégé de recherche 2024-08-27).

5.1 Nairobi

Selon l’agrégé de recherche, [traduction] « il n’existe pas » de refuges ou de « maisons d’hébergement » administrés par l’État à Nairobi; certains organismes privés sont « censés » recevoir de l’aide gouvernementale, mais cette aide est « largement insuffisante » (2024-08-27). La même source a souligné que les ONG et les organisations caritatives qui s’occupent des cas de violence fondée sur le genre et de violence familiale sont [traduction] « bien établies » et présentes au Kenya, mais qu’elles sont « peu nombreuses » et incapables d’offrir des services rapides à tout le monde (agrégé de recherche 2024-08-27). Le Centre de rétablissement des victimes de violence fondée sur le genre (Gender Violence Recovery Centre - GVRC), une [traduction] « fiducie caritative de l’hôpital pour femmes de Nairobi », écrit sur son site Internet qu’il offre gratuitement des soins médicaux et de l’aide psychosociale aux personnes survivantes de violence fondée sur le genre (GVRC s.d.a). La même source précise qu’elle traite en moyenne 3 600 personnes survivantes de violence fondée sur le genre chaque année (GVRC s.d.b). L’organisme Médecins sans frontières (MSF) souligne qu’il administre une clinique pour les personnes survivantes, ouverte 24 heures par jour, dans le quartier Mathare de Nairobi (2022-03-08). Sur son site Internet, LVCT Health signale qu’elle offre de l’assistance médicale et psychologique aux personnes survivantes de violence fondée sur le genre et les oriente vers des ressources juridiques (s.d.b).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] L’Enquête sur la démographie et la santé au Kenya (Kenya Demographic and Health Survey - KDHS) de 2022 a été menée par le Bureau national de la statistique du Kenya (Kenya National Bureau of Statistics - KNBS) en partenariat avec le ministère de la Santé (Ministry of Health) et d’autres intervenants, et avec la collaboration d’ICF, une organisation qui administre le programme DHS, un projet financé par l’Agence américaine pour le développement international (US Agency for International Development - USAID) qui met en œuvre des [traduction] « enquêtes sur la population et la santé » partout dans le monde (KNBS du Kenya & ICF 2023-01, ii). Les données d’enquête ont été recueillies du 17 février au 13 juillet 2022 (KNBS du Kenya & ICF 2023-01, 7).

[2] La base de données sur les féminicides a été créée par l’Africa Data Hub (ADH), Odipo Dev et Africa Uncensored en 2024, et elle recense les cas de féminicide qui ont été signalés dans les médias et qui répondent aux critères établis par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) pour repérer les [traduction] « meurtres de femmes en raison de leur genre » (ADH et al. [2024-01]). L’ADH est un [traduction] « collectif » d’organisations qui recueille des données dans trois pays d’Afrique dans le but de fournir aux journalistes des données à jour (ADH s.d.). Odipo Dev est une entreprise de Nairobi vouée au journalisme de données et aux études de marché (Odipo Dev s.d.). Africa Uncensored est une entreprise de journalisme d’enquête [traduction] « indépendante » qui est établie à Nairobi (Africa Uncensored s.d.).

[3] L’outil juridique Combattre la violence familiale (Fighting Domestic Violence) permet une analyse rapide des lois nationales de divers pays en matière de violence familiale (Baker McKenzie s.d.c).

Références

Africa Data Hub (ADH). S.d. « About ADH ». [Date de consultation : 2024-09-04]

Africa Data Hub (ADH), Odipo Dev & Africa Uncensored. [2024-01]. « Silencing Women ». [Date de consultation : 2024-09-04]

Africa Uncensored. S.d. « About ». [Date de consultation : 2024-10-02]

Afrobarometer. 2022-10-06. Mercy Kaburu & Alfred Kwadzo Torsu. « Most Kenyans See Domestic Violence as a Private Rather than Criminal Matter ». [Date de consultation : 2024-08-12]

Afrobarometer. S.d. « What We Do ». [Date de consultation : 2024-08-12]

Agrégé de recherche, London School of Hygiene and Tropical Medicine. 2024-08-27. Entretien avec la Direction des recherches.

Al Jazeera. 2024-01-27. Shola Lawal. « Femicide in Kenya: What's Causing an Epidemic of Violence Against Women?". [Date de consultation : 2024-09-04]

Associated Press (AP). 2024-03-09. Tom Odula. « Kenyan Activists Are on a Mission to End Gender-Based Violence as Attacks on Women Surge ». [Date de consultation : 2024-08-26]

Baker McKenzie. S.d.a. « Protection for Domestic Violence Victims and Relief Granted ». [Date de consultation : 2024-09-18]

Baker McKenzie. S.d.b. « About Baker McKenzie ». [Date de consultation : 2024-09-18]

Baker McKenzie. S.d.c. « About ». [Date de consultation : 2024-09-18]

British Broadcasting Corporation (BBC). 2024-01-27. Mercy Juma & Anthony Irungu. « Kenya Femicide: Hundreds Protest at Violence Against Women ». [Date de consultation : 2024-08-12]

Capital News. 2024-05-23. « CJ Koome Endorses Renaming SGBV Court the Gender Justice Court ». [Date de consultation : 2024-10-09]

Centre for Rights Education and Awareness (CREAW). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 2024-08-13]

Centre for Rights Education and Awareness (CREAW) & Wangu Kanja Foundation (WKF). [2022-05]. Gaps and Challenges Within the Criminal Justice System and Access to Justice for Survivors of Sexual Violence. [Date de consultation : 2024-08-06]

Coalition on Violence Against Women (COVAW). 2022. Delayed. Denied. Legal and Administrative Bottlenecks to Effective and Efficient Delivery of Justice for Survivors of SGBV in Kenya. [Date de consultation : 2024-10-09]

Commission internationale de juristes (CIJ). 2024-03-30. Charles Jaika. « Kenya Must Scale Up Establishment of SGBV Courts ». [Date de consultation : 2024-10-09]

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Commission internationale de juristes (CIJ). S.d. « About ». [Date de consultation : 2024-08-26]

États-Unis (É.-U.). 2024-04-22. Department of State. « Kenya ». Country Reports on Human Rights Practices for 2023. [Date de consultation : 2024-08-06]

Freedom House. 2024-02-29. « Kenya ». Freedom in the World 2024. [Date de consultation : 2024-02-12]

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Gender Violence Recovery Centre (GVRC). S.d.b. « What We Do ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Kenya. 2023-06-18. The Judiciary. « SGBV Court Launched in Siaya ». [Date de consultation : 2024-09-30]

Kenya. 2020. The Protection Against Domestic Violence Rules, 2020. [Date de consultation : 2024-08-19]

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Kenya. 2006 (modifiée en 2012). Sexual Offences Act. [Date de consultation : 2024-08-13]

Kenya. S.d. Ministry of Gender, Culture, the Arts and Heritage. « Key Achievements ». [Date de consultation : 2024-08-20]

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Nations Unies. S.d. Entité pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU Femmes). « Accelerating Progress for Gender Equality ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Odipo Dev. S.d. « We're a Collective ». [Date de consultation : 2024-10-02]

Physicians for Human Rights (PHR). 2023-06-05. « New Assessment: Survivors of Sexual Violence in Kenya Have Inadequate Access to Mental Health Services ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Physicians for Human Rights (PHR). S.d. « Our Principles of Diversity, Equity, and Inclusion ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Plan Netherlands, Terre des Hommes Netherlands & Defence for Children-ECPAT. 2019-04-09. Safely Engaged: Addressing Gender-Based Violence and Economic Exclusion of Girls and Young Women in Kenya: Public and Private Sector Practices. [Date de consultation : 2024-08-06]

Population Services Kenya (PS Kenya). 2024-05-27. « Addressing the Unmet Need for Gender-Based Violence Shelters ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Population Services Kenya (PS Kenya). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 2024-08-20]

Wangu Kanja Foundation (WKF). S.d. « The Foundation ». [Date de consultation : 2024-09-26]

Autres sources consultées

Sources orales : Gender Violence Recovery Centre; International Center for Research on Women; International Federation of Women Lawyers; Kenya – National Commission on Human Rights; professeur adjoint dans une université aux États-Unis dont les recherches portent principalement sur la violence sexuelle et fondée sur le genre; professeur adjoint dans une université aux États-Unis qui est spécialiste de la violence sociale fondée sur le genre et de la violence entre partenaires intimes; professeur agrégé dans une université au Royaume-Uni qui se spécialise dans les réseaux de santé, les politiques connexes et la violence fondée sur le genre; professeur agrégé dans une université aux États-Unis dont les spécialités sont la violence fondée sur le genre, la violence entre partenaires intimes et les questions relatives à l’autonomisation des femmes; professeur dans une université au Ghana qui se spécialise en études africaines et études de genre; professeur dans une université au Kenya qui est spécialiste en santé publique; professeur dans une université aux États-Unis dont les travaux portent sur le genre, la race, la santé reproductive et la justice sociale; professeur dans une université en Afrique du Sud dont les spécialités sont la race, le genre, la sexualité et la violence sexiste; professeur de sociologie dans une université aux États-Unis qui a travaillé au Kenya dans le domaine de la violence entre partenaires intimes et des relations hommes-femmes.

Sites Internet, y compris : African Commission on Human and Peoples' Rights; The African Women's Development Fund; AllAfrica; Australie – Department of Foreign Affairs and Trade; Banque mondiale; Bertelsmann Stiftung; The Brookings Institution; Center for Strategic and International Studies; Community Advocacy and Awareness Trust; Cooperative for Assistance and Relief Everywhere Kenya; The EastAfrican; Factiva; The Guardian; Institute for War and Peace Reporting; International Crisis Group; International Federation of Women Lawyers; International Rescue Committee; Kenya – Ministry of East African Community, Arid and Semi-Arid Lands, and Regional Development, National Commission on Human Rights, National Gender and Equality Commission, Office of the Attorney General and Department of Justice; Minority Rights Group International; Nations Unies – HCR, OMS, PNUD, Refworld; Pulitzer Center; Royaume-Uni – Home Office; Single Mothers Association of Kenya; The Standard; Transparency International; Wilson Center.

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