Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada
1. Aperçu
D’après l’Indice de transformation de la Fondation Bertelsmann de 2022 (Bertelsmann Stiftung's Transformation Index (BTI) 2022), qui [traduction] « examine la transition vers la démocratie et l’économie de marché ainsi que la qualité de la gouvernance dans 137 pays », « 46 p. 100 de la population active occupe des emplois réguliers au sein des secteurs public (24 p. 100) et privé (22 p. 100), tandis que 45 p. 100 travaillent dans le secteur informel » (Bertelsmann Stiftung 2022, 2, 16). La même source signale que l’embauche dans la fonction publique au Venezuela repose [traduction] « entièrement » sur « le favoritisme et la loyauté, sans tenir compte » de l’expertise ou de la compétence professionnelle (Bertelsmann Stiftung 2022, 29). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le président de l’Observatoire de la diaspora vénézuélienne (Observatorio de la Diáspora Venezolana) a déclaré que [traduction] « le secteur public est une importante source d’emplois, représentant environ 20 p. 100 de la main-d’œuvre », et que le secteur privé structuré a enregistré une baisse considérable avec la fermeture de « centaines de milliers » d’entreprises (président 2024-01-18). La même source a fait observer que le gouvernement exploite la vulnérabilité créée par la dépendance envers l’emploi dans le secteur public, soulignant que les employés de l’État sont tenus de participer à des défilés en chandails rouges (la couleur du gouvernement), que leur présence à ces défilés est vérifiée et que la non-conformité peut entraîner le blocage de l’avancement professionnel ou le congédiement (président 2024-01-18). Résumant ses recherches [traduction] « les plus récentes », l’ONG Transparencia Venezuela [1] a signalé dans un article publié en février 2022 qu’elle avait relevé des allégations de « corruption ou mauvaise gestion » au sein de 46 sociétés publiques régionales dans différents secteurs, y compris la distribution du gaz, les transports, l’agroalimentaire, la construction, l’extraction minière et le commerce (Transparencia Venezuela 2022-02-14). L’ONG ajoute que ces sociétés publiques avaient [traduction] « des pratiques opaques, manquaient de mécanismes de responsabilisation » et « servaient à des fins de politique partisane » (Transparencia Venezuela 2022-02-14).
Au cours d’un entretien avec la Direction des recherches, un maître de conférence à l’Université La Trobe en Australie, dont les recherches portent sur la situation de la démocratie et le rôle des institutions juridiques au Venezuela, a déclaré que bien que le pays soit doté d’une constitution et de lois démocratiques, il connaît une [traduction] « détérioration des conditions démocratiques » « délibérée » qui « mine les institutions démocratiques » (maître de conférence 2024-01-17).
2. Traitement réservé aux lanceurs d’alerte présumés ou aux anciens employés du gouvernement par les autorités et les groupes progouvernementaux
Les renseignements contenus dans le paragraphe suivant ont été fournis par le maître de conférence au cours d’un entretien téléphonique avec la Direction des recherches.
Le maître de conférence a signalé que, dans la pratique, les institutions chargées de maintenir la primauté du droit au Venezuela sont [traduction] « gravement compromises » et que « l’autonomisation, la présence et l’importance croissantes des groupes informels comme les colectivos » constituent un problème majeur qui contribue aux difficultés à maintenir la primauté du droit. Les colectivos sont des groupes plus ou moins organisés qui sont [traduction] « souvent propulsés » par l’État ou qui agissent « avec impunité grâce à la protection ou à la négligence » des autorités de l’État et d’application de la loi. Ils peuvent avoir des liens avec divers ministères et entités étatiques, et se voir confier divers [traduction] « rôles gouvernementaux informels », par exemple la distribution de nourriture dans les quartiers démunis, et ils peuvent être impliqués dans certaines activités criminelles, comme le racket. Grâce aux [traduction] « rôles » que leur confie l’État, les colectivos ont parfois la capacité de surveiller « de façon informelle » des personnes, y compris des employés de l’État, et de cerner celles qui sont perçues comme « posant problème ou agissant au détriment » des intérêts des colectivos ou, selon les circonstances, du gouvernement. Les colectivos peuvent retrouver et identifier des personnes de manière informelle, par exemple, lors de la distribution de nourriture. Le [traduction] « rôle le mieux connu des colectivos est la répression des activités de l’opposition, particulièrement durant les manifestations, parce qu’ils peuvent repérer ceux qui s’opposent à l’État » (maître de conférence 2024-01-17).
Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une professeure adjointe de science politique au Collège militaire de la Caroline du Sud, la Citadelle (The Citadel), dont les recherches portent principalement sur la politique vénézuélienne, a déclaré que [traduction] « certains » lanceurs d’alerte et anciens responsables gouvernementaux qui critiquaient le gouvernement, particulièrement ceux qui occupaient des postes de haut rang, sont en exil ou vivent à l’extérieur du Venezuela (2023-01-24). Selon la professeure adjointe, dans de tels cas, les groupes progouvernementaux et l’appareil de sécurité de l’État peuvent être utilisés pour surveiller et intimider les proches de ces anciens employés du gouvernement, ainsi que les lanceurs d’alerte qui restent au Venezuela (2023-01-24).
Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un analyste principal de l’International Crisis Group à Caracas, dont les recherches portent sur la situation politique au Venezuela, a déclaré [traduction] « [qu’]il y a peu ou pas de tolérance pour la dissidence », car le fait de critiquer le gouvernement ou ses entités, même dans le cadre de conversations privées comme celles tenues dans des groupes WhatsApp, est perçu comme étant « de la perfidie, ou même de la trahison », pouvant aboutir à l’emprisonnement (analyste principal 2024-01-15). La même source a ajouté que des personnes avaient été incarcérées pendant de longues périodes sans procès pour avoir publié des messages sur des plateformes de médias sociaux comme Twitter [maintenant appelé X] (2024-01-15). Selon l’analyste principal, les téléphones des fonctionnaires sont [traduction] « vérifiés occasionnellement » pour s’assurer qu’ils ne contiennent pas de contenu considéré comme antigouvernemental (analyste principal 2024-01-15). Dans un rapport paru en 2023, la mission d’établissement des faits sur le Venezuela du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies fait état de cas où des personnes ont été [traduction] « inculpées de manière arbitraire pour avoir pris part à des activités légales »; il y est signalé ce qui suit :
[traduction]
[D]es accusations liées au terrorisme servent « souvent » à punir des personnes pour avoir exercé leur droit à la liberté d’association et de réunion, comme il est arrivé au dirigeant syndical Eudis Girot. Ce dernier a initialement été accusé des crimes de « terrorisme », de « complot » et d’« association criminelle » pour avoir publié plusieurs gazouillis dans lesquels il aurait lancé un appel aux travailleurs de l’industrie pétrolière pour qu’ils se mobilisent contre la pénurie d’essence (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 63).
Selon le rapport de la mission d’établissement des faits, ceux qui diffusent de l’information critique envers le gouvernement ou ses politiques, y compris les particuliers, les organes de presse et les organisations, [traduction] « sont les cibles les plus courantes de dénigrement et de diffamation de la part des responsables publics » et cela s’étend aux particuliers qui, bien qu’ils ne critiquent pas directement le gouvernement, publient de l’information perçue comme présentant une image négative du pays, « par exemple, en couvrant les manifestations sociales ou les décès de migrants vénézuéliens » (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 58).
D’après un rapport de Justice, Rencontre et Pardon (Justicia, Encuentro y Perdón – JEP), une organisation qui surveille les violations des droits de la personne au Venezuela (JEP s.d.), [traduction] « les employés actifs et les retraités des forces de l’ordre » représentent le groupe le plus important de prisonniers politiques qui sont détenus arbitrairement, mais des membres de la société civile et des forces étrangères sont aussi détenus pour des raisons politiques (JEP 2023-04, 7). Parmi les 179 détenus qui étaient des employés actifs ou des retraités des forces de l’ordre, 87 p. 100 étaient des fonctionnaires actifs au moment de leur arrestation et 13 p. 100 étaient à la retraite ou avaient démissionné (JEP 2023-04, 7). Dans le même rapport, on peut lire ce qui suit :
[traduction]
[L]e fait que plus de la moitié des prisonniers politiques actuels au Venezuela sont des agents ou d’anciens agents de l’État ne fait que confirmer les motifs politiques qui sous-tendent les arrestations, car le gouvernement s’efforce justement de garder derrière les barreaux ceux qui ont les moyens logistiques, les armes ou les capacités techniques pour réduire la durée de leur maintien au pouvoir (JEP 2023-04, 7).
3. Participation aux activités progouvernementales et traitement réservé aux personnes qui refusent d’y participer
Des sources ont signalé que les fonctionnaires subissent des pressions pour assister à des événements en faveur de l’État (maître de conférence 2024-01-17; professeure adjointe 2023-01-24; analyste principal 2024-01-15). Selon le maître de conférence, la pression exercée pour participer aux activités faisant la promotion de l’État provient de l’intérieur de l’institution où travaille le fonctionnaire, par exemple de son superviseur immédiat (2024-01-17). La même source a ajouté qu’il est peu probable que les fonctionnaires qui ne souscrivent pas aux [traduction] « intérêts du régime » mettent en péril leurs emplois en résistant à de telles pressions; au contraire, « ils vont faire ce qu’ils doivent faire » (maître de conférence 2024-01-17). Selon le maître de conférence,
[traduction]
[l]es répercussions [d’un refus de participer] comprennent la perte d’emploi, mais de nos jours, quand il y a de tels rassemblements ou événements, les personnes qui travaillent pour ces entités publiques sont tenues d’y assister. Vous devez vous attendre à perdre votre emploi si vous n’y [assistez] pas. Non seulement vous perdriez votre emploi, mais votre vie deviendrait aussi vraiment désagréable. Vous pourriez être dépeint par le parti comme un membre de l’opposition. Dans certains cas, il se peut que vous ne perdiez pas votre emploi, mais on ne vous ferait plus confiance et, selon votre fonction ou votre rôle, on ne vous confierait plus de tâches importantes, vous seriez relégué en marge et vous pourriez oublier tout avancement professionnel (maître de conférence 2024-01-17).
D’après la professeure adjointe, les employeurs peuvent ne pas [traduction] « menacer » les employés pour les inciter à assister à de tels événements; « [t]outefois, les employés craignent des représailles s’ils n’y participent pas » (professeure adjointe 2023-01-24).
L’analyste principal a déclaré que les fonctionnaires subissent de la pression pour participer à des rassemblements où [traduction] « "le peuple" exprime prétendument un soutien spontané » aux politiques, candidats ou projets du gouvernement (2024-01-15). Selon la même source, [traduction] « [p]ar exemple, on coche les noms sur une liste afin de vérifier la participation et on consigne combien de temps l’employé est resté au rassemblement progouvernemental » (analyste principal 2024-01-15). D’après les explications de l’analyste principal,
[traduction]
[e]n général, cette tâche est effectuée par le chef d’un service particulier, qui est chargé de rendre compte à son supérieur de l’assistance à un événement donné. Ce ne sont pas tous les employés qui y assistent : au fil du temps, le nombre d’absents a augmenté, les gens se rendant graduellement compte que, dans de nombreux cas, le gouvernement ne peut pas se permettre de les congédier parce qu’il n’y a personne d’autre qui fera le travail aux salaires de misère qui sont offerts (2024-01-18).
L’analyste principal a fait observer que les conséquences précises pour les fonctionnaires qui ne se présentent pas à un rassemblement varient en fonction de leur situation particulière, y compris la position adoptée par leur superviseur immédiat, et que la non-participation peut mener et mène effectivement au congédiement; il est possible de se voir priver d’une promotion ou de se faire rétrograder à un poste subalterne ou de se voir exclure du bénéfice de certains [traduction] « "avantages" » offerts occasionnellement aux fonctionnaires, tels que les aliments subventionnés (2024-01-18).
4. Incidents
Selon le rapport de la mission d’établissement des faits des Nations Unies, au cours des premiers mois de 2023, on a observé [traduction] « du mécontentement et des protestations » en lien avec les difficultés économiques du pays, « touchant notamment les secteurs de la santé et de l’éducation et les entreprises publiques » (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 18).
D’après les Country Reports on Human Rights Practices for 2023 publiés par le Département d’État des États-Unis, des ONG ont documenté des situations où des fonctionnaires avaient subi [traduction] « de la discrimination et du harcèlement » en raison de leurs convictions politiques (É.-U. 2023-03-20, 63). On peut lire dans le même rapport que, en 2021, l’Organisation internationale du travail (OIT) [traduction] « s’est dite profondément préoccupée par le grand nombre de cas signalés d’actes de discrimination au travail, d’actes de harcèlement et de congédiements fondés sur des opinions politiques, une situation incompatible avec les obligations du pays dans le cadre des conventions de l’OIT sur la discrimination » (É.-U. 2023-03-20, 63). Citant Fordisi, une ONG qui travaille avec les syndicats d’enseignants, les Country Reports 2023 publiés par les États-Unis signalent que 2 153 enseignants à Carabobo, 700 à Guarico, 141 à Portuguesa et 6 à Caracas ont cessé de recevoir leurs salaires en juillet 2022, ce qui, de l’avis de militants, était une forme de représailles pour avoir dénoncé les pratiques de travail du gouvernement (É.-U. 2023-03-20, 63).
Dans un rapport qui documente les cas de prisonniers politiques durant la période de janvier à octobre 2023, Foro Penal, une ONG vénézuélienne qui offre une assistance judiciaire gratuite aux personnes qui sont détenues arbitrairement, a relevé un total de 271 personnes détenues par le gouvernement pendant cette période, dont 54 p. 100 étaient des responsables militaires (2023-11-17, 2, 3). D’après le rapport, quatre personnes avaient été arrêtées en janvier 2023 par des membres de la Garde nationale bolivarienne (Guardia Nacional Bolivariana – GNB), à la suite de manifestations en faveur d’améliorations salariales organisées par Siderúrgica del Orinoco (SIDOR), l’usine sidérurgique de l’État (Foro Penal 2023-11-17, 4). Sans fournir de précisions additionnelles, le même rapport ajoute que, en juin 2023, les autorités ont détenu deux travailleurs de l’usine SIDOR (Foro Penal 2023-11-17, 4).
Selon un communiqué de presse publié par le Centre pour la justice et la paix (Centro de Justicia y Paz – CEPAZ), une organisation à but non lucratif qui promeut [traduction] « les valeurs démocratiques, les droits de la personne et une culture de la paix » au Venezuela (CEPAZ s.d.), les forces de sécurité ont poursuivi leurs [traduction] « attaques » contre les fonctionnaires à la suite de manifestations par des travailleurs insatisfaits de leurs conditions salariales et de leur qualité de vie, ce qui les a empêchés d’exercer leur droit de manifester (2023-05-04). Des sources signalent qu’un employé de la société d’État Conacal, qui est aussi un dirigeant de la Centrale socialiste bolivarienne des travailleurs (Central Bolivariana Socialista de los Trabajadores), s’est vu refuser l’accès à son lieu de travail après avoir demandé sur les médias sociaux qu’une enquête soit menée sur des actes de corruption et de détournement dans son milieu de travail (CEPAZ 2023-05-04; Espacio Público 2023-02-07). D’après un article publié par Espacio Público, une ONG qui promeut et défend la liberté d’expression (Espacio Público s.d.), l’employé a déclaré qu’il était ciblé parce qu’il était un dirigeant syndical, puis a ajouté qu’il avait [traduction] « subi de l’intimidation et reçu un salaire inférieur, et s’était vu assigner des personnes moins qualifiées que lui pour le superviser » (2023-02-07). Dans le même article, on peut lire que l’employé de l’État [traduction] « a dénoncé la corruption en partie parce que le gouvernement de Nicolás Maduro avait lui-même lancé un appel à plusieurs reprises pour que les gens dénoncent ce qui se passe dans les sociétés d’État » (Espacio Público 2023-02-07).
Des sources signalent que, en août 2023, six syndicalistes se sont vu infliger des peines de 16 ans d’emprisonnement pour complot et association criminelle après avoir mené, en 2022, une vague de protestations en faveur d’augmentations salariales (El País 2023-08-09; Transparencia Venezuela 2023-08-03). Le journal madrilène El País ajoute que le procureur général, qui est [traduction] « fidèle » au président au Nicolàs Maduro, a déclaré que les six hommes étaient des « "comploteurs" » et non des syndicalistes (El País 2023-08-09).
D’après le BTI 2022, des manifestations organisées par des travailleurs de la santé pour dénoncer [traduction] « les mauvaises conditions de travail ont été réprimées de façon brutale, et plus d’une dizaine d’entre eux ont été mis en détention pour avoir critiqué publiquement la situation » (Bertelsmann Stiftung 2022, 10). Selon le même rapport, on a mis en garde les professionnels de la santé contre la divulgation d’information sur les cas de COVID-19 ou sur la situation dans leurs milieux de travail respectifs, et on leur a dit de ne pas critiquer la gestion de la pandémie par le gouvernement (Bertelsmann Stiftung 2022, 11).
La mission d’établissement des faits des Nations Unies signale qu’elle a fait enquête sur [traduction] « au moins » 58 cas de détentions arbitraires survenus depuis 2020, dont 53 dans le cadre de « la répression sélective d’opposants réels ou présumés » du gouvernement; ces cas incluaient des cas de détention arbitraire de syndicalistes, de défenseurs des droits de la personne, de membres d’ONG, de journalistes, d’enseignants, de personnes associées aux partis de l’opposition et d’autres personnes ayant exprimé des critiques ou des griefs envers le gouvernement, y compris en lien avec le travail (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 34). D’après le même rapport, trois de ces cas avaient trait à des militaires arrêtés pour leur [traduction] « prétendue participation […] à des actes militaires de rébellion, dépeints officiellement comme ayant pour but de déstabiliser le gouvernement » (Nations Unies 2023-09-18, para. 34).
Dans son rapport annuel de 2023, Freedom House fait observer qu’un changement est survenu à la direction des syndicats, les dirigeants traditionnels alignés sur l’opposition ayant laissé la place à de nouvelles organisations syndicales qui [traduction] « s’alignent souvent » sur le gouvernement (2023-03-09, sect. E3). Selon des sources, le 2 août 2022, un dirigeant syndical qui travaillait pour l’Industrie vénézuélienne de l’aluminium (Industria Venezolana de Aluminio – Venalum) a été arrêté dans l’État d’Anzoátegui par des responsables de la sécurité alors qu’il se rendait à Caracas pour participer à des manifestations syndicales (É.-U. 2023-03-20, 59; TalCual 2022-08-02). D’après le journal vénézuélien Correo del Caroní, ce dirigeant syndical est demeuré en détention pendant quatre mois avant d’être libéré sous la condition de se conformer à l’obligation de se présenter aux autorités tous les mois pendant deux ans (Correo del Caroní 2023-03-10).
5. Mesures de protection pour les lanceurs d’alerte
L’analyste principal a déclaré que, [traduction] « en théorie », la liberté d’expression des lanceurs d’alerte qui expriment des préoccupations au sujet du gouvernement est garantie par la constitution (2024-01-15). Toutefois, des sources font remarquer que, [dans les faits (analyste principal 2024-01-15)], les lanceurs d’alerte ne bénéficient d’aucune protection (président 2024-01-18; analyste principal 2024-01-15). D’après le président de l’Observatoire de la diaspora vénézuélienne, il en est ainsi parce que le système judiciaire est [traduction] « au service » du gouvernement actuel (président 2024-01-18).
5.1 Protecteur du citoyen (Defensoría del Pueblo)
Questionné au sujet de l’efficacité du protecteur du citoyen en ce qui concerne les lanceurs d’alerte, le maître de conférence a répondu qu’on [traduction] « ne peut raisonnablement s’attendre à ce que les institutions de responsabilisation de l’État, y compris le protecteur du citoyen, puissent agir dans votre intérêt supérieur ou vous offrir une protection efficace » (2024-01-17). Selon le maître de conférence, il en est ainsi parce que les institutions de l’État, y compris le Bureau du protecteur du citoyen, n’ont pas les ressources requises pour remplir leurs fonctions, et parce que le Bureau du protecteur du citoyen [traduction] « est une organisation politisée » (2024-01-17). D’après le maître de conférence,
[traduction]
[e]n tant qu’institution, son rôle n’est pas vraiment d’offrir une protection; en règle générale, on ne peut s’attendre à en obtenir la protection dont on a besoin. Selon qui est le lanceur d’alerte et qui est visé par sa dénonciation, les lanceurs d’alerte peuvent se voir offrir une protection dans certaines situations. Au contraire, les lanceurs d’alerte pourraient vouloir éviter de telles institutions, car au Venezuela, l’information de quelque nature que ce soit présente des risques (2024-01-17).
Dans les Country Reports 2023 publiés par les États-Unis, on peut lire que le protecteur du citoyen ne défendait pas de manière impartiale et objective pour les droits de la personne des citoyens du pays (É.-U. 2023-03-20, 42). Selon la mission d’établissement des faits des Nations Unies, le Bureau du protecteur du citoyen, entre autres institutions publiques, [traduction] « a négligé d’intervenir à la suite d’allégations de torture et de mauvais traitements », et « l’impunité pour de tels actes dans les cas mettant en cause des opposants réels ou présumés du gouvernement demeure la norme » (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 42). La mission d’établissement des faits des Nations Unies signale ce qui suit :
[traduction]
Dans le cadre de la mission, on a examiné en profondeur le rôle du Bureau du protecteur du citoyen (Defensoría del Pueblo). En 2016, l’Alliance mondiale des institutions [nationales] des droits de l’homme [Global Alliance of [National] Human Rights Institutions – GANHRI] a rétrogradé de « A » à « B » le statut du Defensoría, se disant préoccupée par un manque d’indépendance et l’inaction face aux abus du gouvernement. Les recherches effectuées dans le cadre de la mission ont confirmé que ces préoccupations demeurent valides. L’actuel protecteur du citoyen, Alfredo Ruiz Angulo, s’est aligné ouvertement sur le gouvernement et, au mépris de son mandat constitutionnel, a négligé de réagir lorsque des épisodes majeurs de la crise des droits de la personne de son pays ont été portés à son attention. D’après la mission, il y a des motifs raisonnables de croire que le Defensoría a régulièrement et délibérément négligé de répondre de façon efficace aux allégations concernant de graves violations des droits de la personne, soit d’office, soit à la suite de plaintes de la part de victimes et de leurs familles (Nations Unies 2023-09-18, paragr. 98).
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Note
[1] Transparencia Venezuela est une section nationale de Transparency International (Transparencia Venezuela s.d.). Transparency International est une ONG mondiale indépendante et sans but lucratif ayant pour objectif [traduction] « de mettre fin à la corruption et de promouvoir la transparence, la responsabilisation et l’intégrité à tous les niveaux et dans tous les secteurs de la société » (Transparency International s.d.).
Références
Analyste principal, International Crisis Group. 2023-01-18. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.
Analyste principal, International Crisis Group. 2023-01-15. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.
Bertelsmann Stiftung. 2022. « Venezuela Country Report ». Bertelsmann Stiftung's Transformation Index (BTI) 2022. [Date de consultation : 2024-01-08]
Centro de Justicia y Paz (CEPAZ). 2023-05-04. « Crece la arremetida contra periodistas y trabajadores públicos ». [Date de consultation : 2024-02-09]
Centro de Justicia y Paz (CEPAZ). S.d. « Sobre CEPAZ ». [Date de consultation : 2024-02-28]
Correo del Caroní. 2023-03-10. Francesca Díaz. « Douglas González: 'Quienes reclamamos nuestros derechos somos los que terminamos presos' ». [Date de consultation : 2024-02-09]
El País. 2023-08-09. Alonso Moleiro. « Wave of Outrage in Venezuela After Six Trade Unionists Convicted of Conspiracy and Terrorism ». [Date de consultation : 2024-02-09]
Espacio Público. 2023-02-07. « CVG Conacal impide acceso a trabajador que hizo denuncias de corrupción ». [Date de consultation : 2024-02-09]
Espacio Público. S.d. « Quiénes somos? ». [Date de consultation : 2024-02-28]
États-Unis (É.-U.). 2023-03-20. Department of State. « Venezuela ». Country Reports on Human Rights Practices for 2022. [Date de consultation : 2024-01-08]
Foro Penal. 2023-11-17. Reporte sobre la represión política en Venezuela octubre 2023. [Date de consultation : 2024-02-09]
Freedom House. 2023-03-09. « Venezuela ». Freedom in the World 2023. [Date de consultation : 2023-01-08]
Justicia, Encuentro y Perdón (JEP). 2023-04. Balance de presos políticos en Venezuela (2014 – abril 2023). [Date de consultation : 2024-02-09]
Maître de conférence, La Trobe University, Australie. 2024-01-17. Entretien avec la Direction des recherches.
Nations Unies. 2023-09-18. Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH). Report of the Independent International Fact-Finding Mission on the Bolivarian Republic of Venezuela. (A/HRC/54/57) [Date de consultation : 2024-01-09]
Président, Observatorio de la Diáspora Venezolana. 2024-01-18. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.
Professeure adjointe, The Citadel, Charleston, Caroline du Sud. 2024-01-24. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.
TalCual. 2022-08-02. Luisa Quintero. « Detienen al sindicalista Douglas González por denuncias sobre Venalum ». [Date de consultation : 2024-01-31]
Transparencia Venezuela. 2023-08-03. « Con pruebas que violan el debido proceso condenaron a sindicalistas ». [Date de consultation : 2024-02-20]
Transparencia Venezuela. 2022-02-14. « Empresas de las gobernaciones también son instrumentos para la corrupción ». [Date de consultation : 2024-02-20]
Transparencia Venezuela. S.d. « Quiénes somos ». [Date de consultation : 2024-02-23]
Transparency International. S.d. « About ». [Date de consultation : 2024-02-23]
Autres sources consultées
Sources orales : enquêteur principal à InSight Crime; professeur adjoint dans une université américaine dont les recherches portent principalement sur les mouvements sociaux en Amérique latine et la politique vénézuélienne; professeur dans une université américaine dont les recherches portent principalement sur la politique vénézuélienne; professeur dans une université vénézuélienne dont les recherches portent principalement sur l’histoire de l’Amérique latine; Washington Office on Latin America.
Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; Austrian Red Cross – ecoi.net; BBC; CNN; États-Unis – CIA; Factiva; Human Rights Watch; Impacto Venezuela; Infobae; Insight Crime; Janes; La Patilla; North American Congress on Latin America; Observatorio Nacional de Derechos Humanos; PROVEA; Reuters; swissinfo.ch; Union européenne – European Union Agency for Asylum; Voice of America.