Rwanda : information sur la violence fondée sur le genre, y compris la violence familiale; la protection offerte par l’État et les services de soutien accessibles (2021-octobre 2023) [RWA201663.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Aperçu

D’après Freedom House, la violence familiale au pays [traduction] « demeure répandue et rarement dénoncée » (Freedom House 2023-03-09, paragr. G3). Dans les Country Report on Human Rights Practices for 2022 publiés par le Département d’État des États-Unis, il est écrit que [traduction] « [l]a violence familiale envers les femmes et les enfants est toujours courante » (É.-U. 2023-03-20, 28). Le New Times, un journal rwandais, signale que des données du ministère du Genre et de la Promotion de la famille montrent que la violence fondée sur le genre et la violence familiale ont [traduction] « augmenté de manière constante » au cours des cinq dernières années et que, bien que les hommes comme les femmes puissent en être victimes, les femmes sont « les plus vulnérables à la violence fondée sur le genre et sont largement prises pour cible » (The New Times 2022-12-08). L’enquête démographique et de santé - Rwanda 2019-2020 (Rwanda Demographic and Health Survey 2019-20), menée par l’Institut national de la statistique du Rwanda (National Institute of Statistics of Rwanda – NISR) et le ministère de la Santé, fait ressortir les statistiques qui suivent à propos de la violence [traduction] « commise par un conjoint ou toute autre personne » :

  • 45 p. 100 des femmes âgées de 15 à 49 ans ont subi de la violence physique ou sexuelle : 23 p. 100 ont vécu de la violence physique seulement; 9 p. 100 ont vécu de la violence sexuelle seulement; et 14 p. 100 ont vécu de la violence physique et sexuelle.
  • 32 p. 100 des hommes âgés de 15 à 49 ans ont subi de la violence physique ou sexuelle : 27 p. 100 ont vécu de la violence physique seulement; 2 p. 100 ont vécu de la violence sexuelle seulement; et 3 p. 100 ont vécu de la violence physique et sexuelle.
  • Le pourcentage de femmes qui ont vécu de la violence physique à partir de l’âge de 15 ans a augmenté, passant de 35 p. 100 en 2014-2015 à 37 p. 100 en 2019-2020, tandis qu’il a diminué chez les hommes, passant de 39 p. 100 à 30 p. 100 pour la même période.
  • Les répondants qui sont divorcés, séparés ou veufs sont les [traduction] « plus susceptibles » d’avoir vécu de la violence physique, une proportion qui se chiffre à 64 p. 100 pour les femmes et à 52 p. 100 pour les hommes, suivis par les répondants mariés, dans une proportion de 42 p. 100 pour les femmes et de 32 p. 100 pour les hommes. Les répondants qui n’ont jamais été mariés sont les [traduction] « moins susceptibles » d’avoir vécu de la violence physique, soit dans une proportion de 23 p. 100 pour les femmes et de 27 p. 100 pour les hommes.
  • Les femmes divorcées, séparées ou veuves sont plus susceptibles d’avoir vécu de la violence sexuelle que les femmes mariées, soit dans des proportions de 42 p. 100 et de 22 p. 100, respectivement; et les hommes divorcés, séparés ou veufs sont plus susceptibles d’avoir vécu de la violence sexuelle que les hommes mariés, soit dans des proportions de 12 p. 100 et de 5 p. 100, respectivement (Rwanda 2021-09, 287-288).

Selon un rapport rédigé par le Rwanda et présenté à la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 2017-2018, il y a eu 2 293 cas de violence fondée sur le genre et de violence envers les enfants, et la poursuite a eu gain de cause dans 1 903 de ces affaires, ce qui représente un taux de déclaration de culpabilité de 83 p. 100, tandis que, en 2018-2019, il y a eu 2 537 cas du genre et la poursuite a eu gain de cause dans 1 985 d’entre eux, soit un taux de déclaration de culpabilité de 78,2 p. 100 (Rwanda 2020-03-31). D’après un article préparé par le ministère du Genre et de la Promotion de la famille, le Bureau d’enquête du Rwanda (Rwanda Investigation Bureau – RIB) a enquêté sur 12 715 cas de violence fondée sur le genre en 2020 (Rwanda 2021-12-10). Un rapport produit par l’Organe national de poursuite judiciaire du Rwanda contient les renseignements qui suivent au sujet de cas de violence fondée sur le genre, compilés de juillet 2021 à mars 2022 :

Crime Affaires reçues Affaires soumises aux tribunaux Affaires jugées Taux de déclaration de culpabilité en pourcentage
Viol sur un enfant [1] 3 518 1 677 1 769 65,6
Viol 920 296 275 72,4
Harcèlement d’un conjoint 2 668 1 620 1 365 95,1
Total 7 106 3 593 3 409 77,9

(Rwanda 2022-06a, 24)

D’après un article paru dans le Rwanda Today, un journal rwandais en anglais, des [traduction] « groupes de défense des droits » ont demandé qu’une attention soit portée aux hommes qui vivent de la violence familiale, étant donné que « beaucoup » de ces cas ne sont pas signalés parce que les pressions culturelles et sociales empêchent les hommes de demander de l’aide (2021-09-16). Dans cet article, il est également souligné que, selon les données du RIB, les femmes sont exposées à de la violence physique, tandis que cette forme de violence arrive au second rang chez les hommes, ceux-ci étant plus fréquemment victimes de violence psychologique (Rwanda Today 2021-09-16). Dans le même article, il est écrit que, d’après le RIB, [traduction] « il n’y a aucune iniquité dans la façon dont les cas de violence fondée sur le genre sont traités, et ce, que la victime soit une femme ou un homme » (Rwanda Today 2021-09-16).

Selon le New Times, [traduction] « [l]es infractions liées au genre comprennent la traite de personnes, le harcèlement de la part d’un conjoint, le fait de brimer la liberté de recourir à des méthodes de planification familiale et de solliciter ou d’offrir des faveurs sexuelles, le harcèlement sexuel ou la violence sexuelle à l’endroit d’un conjoint, le viol et le viol sur un enfant, entre autres » (The New Times 2022-12-08). Dans une analyse de l’enquête démographique et de santé - Rwanda 2019-2020, What Works, un programme déployé dans 13 pays visant à fournir des renseignements sur les moyens de prévenir la violence dans les milieux à faible et à moyen revenu (What Works s.d.), recense notamment les facteurs suivants comme [traduction] « déterminants courants » de la violence faite aux femmes au Rwanda :

[traduction]

  • Des normes sociales profondément enracinées relativement au genre et au pouvoir, y compris les rôles liés aux genres, les attentes associées au genre à l’égard des hommes et des femmes et l’accès aux ressources ainsi que le contrôle exercé sur celles-ci, entretiennent les écarts de pouvoir entre les hommes et les femmes et sont invoquées pour justifier la violence envers les femmes. Les normes sociales concernant le rôle de l’homme comme chef du ménage et décideur sont particulièrement bien ancrées.
    […]
  • La pauvreté du ménage est un facteur de risque connu en matière de [violence entre partenaires intimes], et il s’agit aussi d’un obstacle pour les femmes qui sortent d’une relation violente. Il n’y a guère de preuve empirique sur ces relations complexes au Rwanda, mais les données [de l’Institut national de la statistique du Rwanda] montrent que les taux de violence physique et sexuelle sont plus élevés chez les femmes issues de ménages se situant dans les quintiles inférieurs de richesse. La hausse du prix des aliments et d’autres biens essentiels à l’échelle mondiale est susceptible d’exacerber les déterminants économiques de la [violence envers les femmes et les filles] au Rwanda (What Works 2022-09, 4, note de bas de page omise).

2. Cadre juridique

Dans un rapport national sur les statistiques sexospécifiques du Rwanda 2021 (Rwanda National Gender Statistics Report 2021) produit par le NISR, on peut lire que le Rwanda s’était doté d’un plan d’action national pour 2009-2012 et 2018-2022 afin de mettre en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité (Rwanda 2022-06b, 30). Le ministère du Genre et de la Promotion de la famille fait remarquer que la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies, adoptée en 2000, appelle à [traduction] « éliminer la violence fondée sur le genre sous toutes ses formes et à tous les niveaux » et que le Rwanda en a fait un programme « national » par ses plans d’action nationaux (Rwanda 2021-02, 13-14). Le ministère du Genre et de la Promotion de la famille a également signalé qu’une des priorités de la Stratégie nationale pour le changement (National Strategy for Transformation – NSTI) 2017-2024 est le [traduction] « renforcement des stratégies de prévention et d’intervention qui visent à lutter contre la violence fondée sur le genre et les mauvais traitements à l’égard des enfants en favorisant et en renforçant la cohésion familiale, les initiatives locales, la mise en œuvre de services de santé intégrés pour les victimes de violence fondée sur le genre en partenariat avec le secteur privé, les organisations de la société civile et les organisations confessionnelles, ainsi que des campagnes de sensibilisation communautaires » (Rwanda 2021-02, 18). La même source ajoute que, depuis 2018, tous les districts ont une stratégie de développement de district qui met l’accent sur l’égalité entre les genres et la lutte contre la violence fondée sur le genre (Rwanda 2021-02, 18). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, Human Rights First Rwanda, une organisation de défense des droits de la personne sans but lucratif vouée à la sensibilisation, à la défense des droits et à la prestation de services juridiques, a signalé qu’il existe des lois concernant expressément la violence fondée sur le genre, dont la Loi portant prévention et répression de la violence basée sur le genre, lesquelles [traduction] « définissent les infractions relatives à la violence fondée sur le genre, fixent les peines pour les auteurs de tels actes et décrivent la marche à suivre pour faire un signalement et entreprendre des poursuites » (Human Rights First Rwanda 2023-09-29). La Loi no 59/2008 de 2008 portant prévention et répression de la violence basée sur le genre prévoit ce qui suit :

[version française du Rwanda]

Article 5 : Viol conjugal

Les conjoints jouissent des droits égaux en matière de relations sexuelles, de la santé de reproduction et de planning familial.

Il est interdit de faire des relations sexuelles sans consentement de son conjoint.

Article 6 : Sévices comme cause de divorce

La violence basée sur le genre est l’un[e] des causes de demande de divorce.

Pendant l’instance du divorce, les intérêts des enfants issus du mariage sont pris en considération conformément à la loi.

[…]

Article 16 : Peine pour viol

Toute personne reconnue coupable de viol est passible d’une peine d’emprisonnement de dix (10) à quinze (15) ans.

Lorsque le viol a causé à la victime une maladie physique ou mentale, le coupable est puni d’emprisonnement de quinze (15) à vingt (20) ans et est astreint à payer les frais des soins médicaux pour le compte de la victime.

Lorsque la maladie est incurable ou si le viol a occasionné la mort, le coupable est puni de l’emprisonnement à perp[é]tuité.

[…]

Article 20 : Peine pour harcèlement du conjoint

Est punie d’une peine d’emprisonnement de six (6) mois à deux (2) ans, toute personne qui exerce un acte de harcèlement sur son conjoint.

[…]

Article 24 : Peine pour harcèlement sexuel envers son subalterne

Est puni d’une peine d’emprisonnement de deux (2) à cinq (5) ans et d’une amende de cent mille (100.000 Frw) [111,60 $CAN] à deux cent mille (200.000 Frw) [223,20 $CAN] francs rwandais, un employeur ou toute autre personne qui use de ses fonctions pour harceler son subalterne par des instructions, des menaces et de la terreur dans le but du plaisir sexuel.

[…]

Article 36 : Peine pour non[-]assistance à la victime de la violence ou refus de témoigner sur la violence

Toute personne qui ne porte pas assistance à la victime de violence basée sur le genre ou refuse de témoigner sur la violence commise contre elle-même ou contre une tierce personne est passible d’une peine d’emprisonnement de six (6) mois à deux (2) ans et d’une amende de cinquante mille (50.000 Frw) [56 $CAN] à deux cent mille (200.000 Frw) francs rwandais ou l’une de ces peines.

[…]

Article 38 : Dommages et intérêts

La victime de la violence basée sur le genre et toute autre personne affectée a droit à saisir les juridictions pour dommages et intérêts (Rwanda 2008).

L’Arrêté du premier ministre no 001/03 du 11/01/2012 déterminant les modalités de prévention de la violence basée sur le genre et mécanismes de protection de sa victime par les organes de l’État prévoit ce qui suit :

[version française du Rwanda]

Article 3 : Responsabilités générales des organes de l’État dans la prévention et la lutte contre la violence basée sur le genre

Toutes les institutions gouvernementales doivent mettre en place des programmes visant à prévenir et à lutter contre la violence basée sur le genre et assister ses victimes.

Les institutions gouvernementales doivent continuer à renforcer les comités chargés de lutter contre la violence basée sur le genre à tous les niveaux dans le but de son éradication.

Article 4 : Responsabilités spéciales des organes de l’État dans la prévention de la violence basée sur le genre

Les institutions gouvernementales, spécialement les Ministères, les établissements publics, les Commissions Nationales, les Conseils, ayant un rapport avec le problème de la violence basée sur le genre, chacun en ce qui le concerne ou en concertation en cas de besoin, doivent :

  1. s’assurer que les organes liés à ces institutions respectent les programmes de prévention et de lutte contre la violence basée sur le genre;
  2. porter rapidement secours aux victimes de la violence basée sur le genre;
  3. déterminer les modalités de sensibilisation des victimes de la violence basée sur le genre pour qu’elles se rendent au plus vite à un établissement de santé le plus proche afin de recevoir les premiers soins nécessaires;
  4. établir un “One Stop Center” au sein de tous les établissements de santé tant publics que semi-publics et renforcer ses capacités;
  5. apporter une attention particulière à la question de la violence basée sur le genre;
  6. établir des programmes spéciaux de réduction de la pauvreté en faveur des plus démunis afin de les protéger contre la violence fondée sur le genre;
  7. mettre en place des mécanismes de prévention et de lutte contre la violence basée sur le genre au sein des institutions de travail, qu’elles soient privées ou de la société civile;
  8. mettre en place un système de gestion des informations en rapport avec la violence basée sur le genre;
  9. surveiller et coordonner la collecte des données et fournir des conseils sur l’élimination de la violence basée sur le genre;
  10. rappeler à chaque personne à travers les médias de l’État d’éviter les propos faisant état de la violence basée sur le genre;
  11. publier les noms des personnes reconnues coupables de violence basée sur le genre en jugement final;
  12. sensibiliser les médias privés afin qu’ils dénoncent la violence basée sur le genre;
  13. vulgariser les lois réprimant la violence basée sur le genre;
  14. sensibiliser en particulier les femmes sur la violence basée sur le genre et de donner rapidement les rapports quand la violence a eu lieu;
  15. intégrer les droits humains, le genre et la lutte contre la violence basée sur le genre dans les programmes éducatifs à tous les niveaux;
  16. éduquer les jeunes afin qu’ils évitent les habitudes récréatives, les comportements et autres actes indécents qui peuvent conduire à la violence basée sur le genre;
  17. examiner la nature et les conséquences des activités de loisir susceptibles de violer les bonnes mœurs et la sécurité publique ou conduire à la violence basée sur genre;
  18. mettre en place des stratégies pour prévenir les violences basées sur le genre qui peuvent être commises à l’encontre des personnes handicapées;
  19. sensibiliser les parents à ne pas laisser leurs enfants s’engager dans des travaux ou d’autres activités pouvant conduire à la violence basée sur le genre;
  20. rendre justice aux victimes de la violence basée sur le genre;
  21. mettre en place un programme durable pour sensibiliser tous les employeurs et tous les employés à éviter les actes qui peuvent conduire à la violence basée sur le genre dans les institutions publiques;
  22. exécuter rapidement les décisions des tribunaux et d’autres autorités en vue de prévenir et lutter contre la violence basée sur le genre (Rwanda 2012).

3. Protection offerte par l’État

D’après les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, [traduction] « le gouvernement a poursuivi sa campagne pangouvernementale multipartite de lutte contre la violence fondée sur le genre, les mauvais traitements envers les enfants et d’autres formes de violence familiale » (É.-U. 2023-03-20, 29). L’organisation Human Rights First Rwanda a fait observer que le gouvernement s’est montré [traduction] « proactif » en luttant contre la violence fondée sur le genre au moyen de réformes législatives, de campagnes de sensibilisation et de services de soutien (Human Rights First Rwanda 2023-09-29). Dans les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, il est précisé que les femmes ont le même statut juridique et les mêmes droits que les hommes, mais que les cas de discrimination fondée sur le genre en milieu de travail sont [traduction] « rarement signalés », en partie parce que les victimes craignent de perdre leur emploi (É.-U. 2023-03-20, 31). Selon Freedom House, les hommes et les femmes jouissent [traduction] « normalement » de droits égaux dans un mariage et lors d’un divorce, et les « peines pour viol conjugal sont beaucoup moins sévères que pour les autres types de viols » (Freedom House 2023-03-09, paragr. G3). Il est écrit dans les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis que le gouvernement a fait des affaires de viol des priorités judiciaires et que les autorités [traduction] « ont encouragé » la dénonciation de la violence familiale, mais que la « majorité des cas » n’ont pas été déclarés ou n’ont pas fait l’objet de poursuites (É.-U. 2023-03-20, 29). Le ministère du Genre et de la Promotion de la famille souligne qu’il y a un [traduction] « écart » dans la déclaration des cas de violence fondée sur le genre, car les hommes ont le sentiment d’être exclus; que les hommes contribuent peu aux structures visant à lutter contre la violence fondée sur le genre à l’échelle communautaire; que les services juridiques spécialisés sont déficients et les renvois, inefficaces; et que les victimes aussi bien que les délinquants sont « montrés du doigt, rejetés par la société et sujets à la dépression; ils sont aussi, surtout dans le cas des délinquants, enclins à récidiver » (Rwanda 2021-02, 40).

3.1 Système juridique

L’Arrêté du premier ministre no 001/03 du 11/01/2012 déterminant les modalités de prévention de la violence basée sur le genre et mécanismes de protection de sa victime par les organes de l’État prévoit ce qui suit :

[version française du Rwanda]

Article 5 : Plaintes sur la violence basée sur le genre

Après réception de la plainte d’une victime de la violence basée sur le genre, la police judiciaire demande à l’autorité compétente de donner rapidement à la victime le soutien dont elle a besoin.

L’enquête criminelle sur les cas de la violence basée sur le genre doit être accélérée et le cas doit être soumis à l’autorité de poursuite judiciaire dans le délai prévu par la loi.

L’Organe [n]ational de [p]oursuite [j]udiciaire doit donner la priorité aux cas de violence basée sur le genre et préserver les preuves y relatives.

[…]

Article 9 : Rapports soumis par les autorités locales

Les autorités locales doivent transmettre à l’autorité hiérarchique supérieure un rapport trimestriel sur les activités visant à prévenir et à lutter contre la violence basée sur le genre. Ces rapports sont collectés au niveau de la Province ou de la Ville de Kigali et sont transmis au Ministre ayant l’administration locale dans ses attributions (Rwanda 2012).

Dans son rapport annuel sur les droits de la personne et la démocratie dans le monde (Annual Report on Human Rights and Democracy in the World) de 2021, l’Union européenne souligne qu’il existe un [traduction] « bon » cadre juridique en ce qui concerne les droits des femmes, mais que la « mise en œuvre des lois et des politiques [est] déficiente » et que certaines normes sociales sont « discriminatoires » (UE 2022-03-30, 137). L’organisation What Works signale que les normes sociales et les normes liées au genre [traduction] « n’ont pas évolué au même rythme » que les politiques sur l’égalité des genres mises en œuvre par le gouvernement (What Works 2022-09, 14). Dans les 2021 Country Reports publiés par les États-Unis, il est souligné que le président a enjoint aux fonctionnaires judiciaires de traiter plus sévèrement les auteurs d’actes de violence fondée sur le genre (É.-U. 2022-04-12, 33). Selon un article provenant du ministère du Genre et de la Promotion de la famille, le RIB et le système judiciaire [traduction] « déploient des ressources considérables pour faire en sorte que les auteurs d’actes de violence fondée sur le genre soient traités comme il se doit », ce qui comprend de nouvelles technologies visant à détecter les « menaces émergentes », à enquêter à leur sujet et à y réagir (Rwanda 2021-12-10). Dans un billet de blogue faisant la promotion d’une campagne gouvernementale contre la violence fondée sur le genre, le ministère du Genre et de la Promotion de la famille donne comme exemples de [traduction] « progrès » la mise en place d’un registre des délinquants sexuels, la création d’un laboratoire judiciaire réservé aux enquêtes sur les affaires de violence fondée sur le genre, l’allocation d’un budget annuel aux districts pour répondre aux besoins des victimes de violence fondée sur le genre et la présence, dans « chaque district », d’un bureau d’accès à la justice offrant des services d’aide juridique au public, « avec du personnel qui se consacre exclusivement aux affaires de violence fondée sur le genre » (Rwanda 2022-11-25). L’organisation Human Rights First Rwanda a fait remarquer que [traduction] « le cadre juridique » a été renforcé à la suite de réformes législatives et au titre d’un « engagement d’entamer des poursuites », mais que des « difficultés », comme l’arriéré de cas et l’accès « limité » aux services de justice, ont des conséquences sur « les délais dans lesquels justice est rendue pour les personnes survivantes » (2023-09-29). La même source signale qu’il existe des chambres et des tribunaux au sein de l’appareil judiciaire pour traiter les affaires de violence fondée sur le genre, et la Commission nationale des droits de la personne (National Commission for Human Rights) du Rwanda peut enquêter sur les cas de violence fondée sur le genre et faire valoir les droits des personnes survivantes (Human Rights First Rwanda 2023-09-29).

3.2 Police

L’Arrêté du premier ministre no 001/03 du 11/01/2012 déterminant les modalités de prévention de la violence basée sur le genre et mécanismes de protection de sa victime par les organes de l’État prévoit ce qui suit :

[version française du Rwanda]

Article 7 : « Gender Desk »

Un programme d’éducation « Gender desk » est mis en place en particulier au niveau de la Police Nationale et des Forces de la Défense et doit être muni des moyens nécessaires en vue de lutter contre la violence basée sur le genre (Rwanda 2012).

D’après Human Rights First Rwanda, les unités spécialisées de la police, comme le bureau de l’égalité des genres (Gender Desk), sont composées d’agents formés pour traiter [traduction] « de manière sensible et efficace » les affaires de violence fondée sur le genre, et tant la police que le RIB disposent d’unités spécialisées pour intervenir en cas de violence fondée sur le genre, bien que les ressources soient limitées dans « certains secteurs » (Human Rights First Rwanda 2023-09-29). Dans les 2022 Country Reports publiés par les États-Unis, il est écrit que le quartier général de la police à Kigali gère une ligne d’aide aux victimes de violence familiale; qu’il y a un bureau de l’égalité des genres dans tous les postes de police du pays; qu’il y a, en moyenne, trois agents affectés aux affaires de violence fondée sur le genre et de violence familiale, ainsi qu’un programme de sensibilisation du public; et que tout le personnel de la police et de l’armée doit suivre une formation sur la violence fondée sur le genre (2023-03-20, 29). Selon Human Rights First Rwanda, les personnes survivantes de violence fondée sur le genre peuvent [traduction] « en général s’attendre à être traitées de manière appropriée et à obtenir le soutien nécessaire lorsqu’elles déposent une plainte à la police », car les unités spécialisées et les agents formés de la Police nationale du Rwanda « accordent la priorité à la sécurité et à la protection des personnes survivantes »; cependant, la même source souligne également que la qualité des interventions « demeure variable » selon le lieu, les agents qui interviennent et les ressources accessibles (2023-09-29). Selon un article paru dans le Rwanda Today, qui cite le procureur général de l’Organe national de poursuite judiciaire, les poursuites dans les affaires de violence fondée sur le genre sont ralenties par un manque d’éléments de preuve parce que, [traduction] « "[d]ans la majorité des cas" », le RIB ne procède pas à une enquête immédiate, notamment le prélèvement d’échantillons pour établir la preuve médicolégale, ce qui entraîne le rejet de « milliers d’affaires » (Rwanda Today 2019-05-21).

4. Services de soutien

D’après l’enquête démographique et de santé - Rwanda 2019-2020, les sources de soutien les [traduction] « plus courantes » pour les personnes ayant vécu de la violence physique ou sexuelle et qui ont cherché à obtenir de l’aide sont des voisins, pour 40 p. 100 des femmes et 32 p. 100 des hommes, ou la famille, pour 33 p. 100 des femmes et 24 p. 100 des hommes (Rwanda 2021-09, 294). La même source ajoute que 18 p. 100 des femmes ont demandé l’aide de la famille de leur époux ou de leur partenaire, que 18 p. 100 se sont adressées aux autorités locales et que 11 p. 100 ont communiqué avec la police (Rwanda 2021-09, 294).

Dans l’International Religious Freedom Report for 2022 publié par le Département d’État des États-Unis, on peut lire que le Conseil interconfessionnel rwandais (Rwanda Interfaith Council), une organisation représentant toutes les grandes religions, a collaboré avec les organisations confessionnelles et le gouvernement pour mettre sur pied des campagnes visant à prévenir la violence fondée sur le genre dans les communautés qu’ils représentent (É.-U. 2023-05-13, 7). Le Centre de ressources pour les hommes du Rwanda (Rwanda Men's Resource Centre), une organisation qui fait la promotion de l’égalité des genres en mobilisant les hommes, décrit son programme Bandebereho comme une initiative sexotransformatrice mise en œuvre en collaboration avec le ministère de la Santé du Rwanda et qui [traduction] « incite les hommes à jouer un rôle actif en tant que pères et aidants, relativement à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants et dans la prévention de la violence envers les femmes et les enfants » (Rwanda Men's Resource Centre s.d.). Le ministère du Genre et de la Promotion de la famille fait observer que [traduction] « [l’]élément essentiel » pour prévenir la violence est la sensibilisation en milieu scolaire, dans la communauté, au moyen de campagnes de participation et d’initiatives communautaires, de campagnes médiatiques contre la violence fondée sur le genre ainsi que de partenariats du gouvernement avec les chefs religieux et les ONG (Rwanda 2021-12-10). Dans les 2022 Country Reports publiés par les États-Unis, il est souligné que le gouvernement a orchestré une campagne de sensibilisation du public pour lutter contre la violence fondée sur le genre, et que, en partenariat avec l’UNICEF, la Commission nationale de la jeunesse (National Commission for Children) a supervisé 29 674 bénévoles, soit deux dans chacun des villages du pays, pour lutter contre la violence fondée sur le genre dans les villages (É.-U. 2023-03-20, 33). Des sources signalent que le gouvernement gère 44 centres à guichet unique Isange (Isange One Stop Centres – IOSC) à l’échelle du pays, lesquels offrent une aide médicale, psychologique et juridique aux personnes survivantes de violence fondée sur le genre (É.-U. 2023-03-20, 29; Rwanda 2022-11-25; Nations Unies 2023-07-31). L’organisation Human Rights First Rwanda a fait remarquer que la [traduction] « plupart » des IOSC n’offrent pas de services en langue des signes pour les victimes sourdes ou malentendantes (2023-09-29).

Selon Human Rights First Rwanda, bien qu’il y ait [traduction] « une sensibilisation et un soutien accrus à l’égard des personnes survivantes, elles peuvent tout de même se heurter à l’opprobre social ou être tenues pour responsables, surtout dans les communautés traditionnelles ou rurales » (2023-09-29). La même source ajoute que les ressources, les services et les campagnes de sensibilisation sont [traduction] « souvent » mieux dans les régions urbaines, ce qui peut favoriser un traitement « plus adapté et offrant plus de soutien » pour les personnes survivantes de violence fondée sur le genre, alors que, dans les régions rurales, les services limités et les croyances traditionnelles ont des conséquences sur le traitement réservé aux personnes survivantes (Human Rights First Rwanda 2023-09-29). Un article paru dans le New Times cite les propos d’un [traduction] « spécialiste principal du droit et des politiques » selon lesquels la pauvreté nuit à l’accès des femmes aux services comme les analyses d’ADN parce qu’ils sont coûteux (The New Times 2022-12-08). L’organisation Human Rights First Rwanda fait remarquer que les personnes défavorisées sur le plan socioéconomique [traduction] « peuvent avoir plus de difficultés » à accéder à des ressources médicales et juridiques et à du soutien, et qu’il « peut y avoir des attentes sociétales différentes ou des problèmes relativement à leur réputation » dans le cas des personnes survivantes issues de la classe supérieure (2023-09-29). La même source fait aussi observer que les victimes ayant des déficiences psychosociales sont [traduction] « rarement » crues et que les personnes dont l’orientation et les caractères sexuels ainsi que l’identité et l’expression de genre doivent être pris en compte sont également confrontées à des difficultés et signalent « rarement » la violence qu’elles subissent (Human Rights First Rwanda 2023-09-29).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Note

[1] La Loi no 68/2018 du 30/08/2018 déterminant les infractions et les peines en général prévoit ce qui suit relativement aux peines pour viol sur un enfant :

[version française du Rwanda]

Article 133 : Viol sur enfant

[…]

Lorsque le viol sur enfant est commis entre des enfants âgés d’au moins quatorze (14) ans sans violence ni menaces, aucune peine n’est prononcée. Toutefois, lorsqu’un enfant âgé de quatorze (14) ans mais qui n’a pas atteint dix-huit (18) ans commet le viol sur un enfant de moins de quatorze (14) ans, il est puni conformément aux dispositions de l’article 54 de la présente loi.

Références

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États-Unis (É.-U.). 2023-03-20. Department of State. « Rwanda ». Country Reports on Human Rights Practices for 2022. [Date de consultation : 2023-09-25]

Freedom House. « Rwanda ». Freedom in the World 2023. [Date de consultation : 2023-09-25]

Human Rights First Rwanda. 2023-09-29. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Nations Unies. 2023-07-31. ONU Femmes. « UN Women Executive Director Visits Rwanda, Applauds Remarkable Progress on Gender Equality and Women's Empowerment ». [Date de consultation : 2023-09-25]

The New Times. 2022-12-08. Jade Natacha Iriza. « Silence on GBV Remains a Big Hindrance to Justice ». [Date de consultation : 2023-09-26]

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Rwanda Today. 2019-05-21. Arafat Mugabo. « No Justice for Gender-based Violence Victims ». [Date de consultation : 2023-10-04]

What Works. 2022-09. Erika Fraser & Veronica Ahlenback. « VAWG in Rwanda: Evidence Review ». [Date de consultation : 2023-09-27]

What Works. S.d. « About What Works ». [Date de consultation : 2023-10-03]

Autres sources consultées

Sources orales : cabinet de droit de Kigali spécialisé en droit de la famille; Empower Rwanda; Impanuro Girls Initiative; Institute of Legal Practice and Development – Rwanda Law Journal; Kvinna till Kvinna Foundation; Paper Crown Rwanda; professeur agrégé dans un collège américain dont les recherches portent sur la violence fondée sur le genre en Afrique; professeur de sociologie politique dans un collège américain dont les recherches portent sur le genre, les politiques et la violence; professeur d’études sur la paix et les conflits; Women for Women International.

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Allemagne – Federal Office for Migration and Refugees; American Academy of Pediatrics; Amnesty International; Association internationale des chefs de police; Asylos; Australie – Department of Foreign Affairs and Trade; BBC; Belgique – Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides; Bertelsmann Stiftung; BMC Women’s Health; Care International; Croix-Rouge autrichienne – ecoi.net; Danemark – Immigration Service; États-Unis – National Library of Medicine; European Journal of Public Health; Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge; France – Office français de protection des réfugiés et apatrides; Georgetown University – Department of Economics; Global Public Health; The Guardian; Human Rights Watch; IGIHE; The Independent; Institute of Development Studies; The Institute of Legal Practice and Development; Nations Unies – Conseil de sécurité, Fonds pour la population, Haut-Commissariat aux droits de l’homme, Haut Commissariat pour les réfugiés, Programme pour le développement, Refworld; Negotiating Gender Equity in the Global South; The New Humanitarian; The New York Times; Norvège – Landinfo; Organisation de coopération et de développement économiques; Royaume-Uni – Home Office; Rwanda – Rwanda Investigation Bureau; Rwanda Initiative for Sustainable Development; Union européenne – European Union Agency for Asylum; Unsilenced Voices.


 
 
 
 
 
 

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