Viet Nam : information sur les sommations (thư triệu tập) et les mandats d'arrestation (lệnh bắt) [ordre d'arrestation; ordonnance d'arrestation], y compris leur contenu, leur aspect et leurs caractéristiques de sécurité ainsi que des spécimens de ces documents; les règlements applicables et les autorités compétentes, y compris le ministre de la Sécurité publique (Ministry of Public Security – MPS) (Bộ Công An), la fréquence des documents juridiques frauduleux; information indiquant si une personne recherchée par les autorités peut quitter le pays au moyen de son passeport (2020–mai 2022) [VNM201067.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Loi

Le Code de procédure pénale du Viet Nam, modifié en 2015 en vue d'une entrée en vigueur le 1er janvier 2018, prévoit ce qui suit :

[traduction]

Article 113. Appréhension de suspects et de défendeurs aux fins de détention

  1. Les personnes énumérées ci-dessous sont autorisées à décider de l'appréhension de suspects et de défendeurs aux fins de détention ainsi qu’à l'ordonner :
    1. Chefs et chefs adjoints des autorités d'enquête. Dans une telle éventualité, le mandat d'arrestation doit être approuvé par le parquet correspondant avant l'appréhension;
    2. Chefs et chefs adjoints d'un parquet populaire, et chefs et chefs adjoints d'un parquet militaire;
    3. Présidents de cours, vice-présidents de cours populaires, et présidents et vice-présidents de cours martiales; tribunaux.
  2. Le mandat d'arrestation et l'approbation écrite du mandat d'arrestation doivent préciser dans leur intégralité le nom et l'adresse de la personne appréhendée, les motifs de l'arrestation et d'autres détails, conformément au point 2 de l'article 132 de la présente loi.
    Les exécuteurs d'un mandat d'arrestation doivent lire le mandat à haute voix, expliquer son contenu, préciser les droits et les obligations de la personne appréhendée, consigner l'arrestation par écrit et remettre le mandat à la personne appréhendée.
    L'appréhension d'une personne à son lieu de résidence doit être attestée par un représentant des autorités de la commune, du quartier ou du canton et d'autres personnes. L'appréhension d'une personne à son lieu de travail ou d'enseignement doit être attestée par un représentant du lieu de travail ou d'enseignement. L'appréhension d'une personne à un autre endroit doit être attestée par un représentant des autorités de la commune, du quartier ou du canton.
  3. L'appréhension ne peut avoir lieu la nuit, sauf dans le cas de criminels pris en flagrant délit ou de personnes recherchées.

[…]

Article 132. Documents procéduraux

  1. Les documents procéduraux comprennent les ordonnances, les décisions, les requêtes, les conclusions d'enquête, les actes d'accusation, les jugements et d'autres documents procéduraux à la mise en forme universelle selon les activités procédurales.
  2. Les éléments devant figurer dans les documents procéduraux sont :

a) le numéro ainsi que la date et le lieu de délivrance du document procédural;

c) [sic] les motifs de la délivrance du document procédural;

c) le contenu du document procédural;

d) dans leur intégralité, le nom, le titre du poste et la signature de la personne qui délivre le document procédural ainsi qu'un sceau officiel (Viet Nam 2015).

Au cours d'un entretien avec la Direction des recherches, un professeur de droit de l'Université nationale du Viet Nam qui enseigne le droit constitutionnel et le droit en matière de droits de la personne a déclaré que les sommations et les mandats d'arrestation sont uniquement utilisés dans les affaires criminelles (professeur 19 mai 2022a).

2. Sommation et mandat d'arrestation
2.1 Contenu, aspect et caractéristiques de sécurité

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un avocat en exercice au Viet Nam, qui fournit des conseils juridiques aux militants sociaux et politiques, a déclaré que les circulaires produites par le MPS précisent les modèles que doivent suivre toutes les sommations et tous les mandats d'arrestation (avocat 25 mai 2022). La même source a ajouté que la circulaire 119/2021/TT-BCA publiée par le MPS en 2021 présente les modèles actuels de sommations et de mandats d'arrestation, qui remplacent les modèles respectifs publiés dans la [circulaire 61/2017/TT-BCA produite par le MPS] en 2017 (avocat 25 mai 2022). L'avocat a toutefois fait remarquer que, comme les modèles de sommations et de mandats d'arrestation de 2021 sont [traduction] « assez récents », les modèles de 2017 demeurent en circulation et sont toujours utilisés, mais il a ajouté que les modèles de 2021 et de 2017 « ne présentent pas de différences marquées » quant à leur aspect (avocat 25 mai 2022).

Le professeur a déclaré que les sommations et les mandats d'arrestation sont [traduction] « uniformes », puisque les postes de police locaux utilisent « toujours » les modèles publiés par le gouvernement, la seule différence étant le nom de l'organe compétent (professeur 19 mai 2022a). Par contre, l'avocat a affirmé que, même si, en théorie, tous les mandats d'arrestation et les sommations devraient respecter le modèle publié par le MPS, dans les faits, différentes régions ou différents services de police locaux [traduction] « peuvent modifier leurs propres documents » en ajoutant du contenu ou des particularités (avocat 25 mai 2022). La même source a ajouté que le modèle du MPS [traduction] « fournit le contenu minimal » dont les sommations et les mandats d'arrestation « ne peuvent s'écarter » (avocat 25 mai 2022). Le professeur a souligné que les champs vides dans les sommations et les mandats d'arrestation sont [traduction] « normalement » remplis à la main (professeur 19 mai 2022a).

Selon l'avocat, dans une sommation ou un mandat d'arrestation, le [traduction] « chef de l'autorité policière responsable des enquêtes (thủ trưởng cơ quan điều tra) » devrait être inscrit comme « autorité ayant délivré » le document (avocat 25 mai 2022).

L'avocat a déclaré que tous les mandats d'arrestation et les sommations doivent être signés par la partie qui les délivre et arborer le [traduction] « timbre de l'autorité policière », un timbre rouge « de forme ronde » (avocat 25 mai 2022), et le professeur a affirmé qu'un timbre est la seule caractéristique de sécurité sur ces documents (professeur 19 mai 2022a). Sans fournir plus de détails, le professeur a ajouté que, [traduction] « dans certains cas », un mandat d'arrestation comportera un « timbre supplémentaire » (professeur 19 mai 2022a).

Le professeur a souligné que la police locale peut délivrer divers types de mandats d'arrestation correspondant à cinq ou six situations différentes, comme la [traduction] « détention d'urgence » ou « [l']extradition » (professeur 19 mai 2022a). La même source a cependant ajouté que le contenu des divers types de mandats d'arrestation est [traduction] « pratiquement le même » et qu'il n'y a que des différences mineures (professeur 19 mai 2022a).

2.2 Spécimens

Le modèle de sommation (également traduit par « convocation ») publié par le MPS en 2021 (document annexé 1), accessible sur un site Internet du MPS, est annexé à la présente réponse. Les modèles du mandat d'arrestation pour les situations d'urgence (document annexé 2) et du mandat d'arrestation pour la détention temporaire de l'accusé (document annexé 3) publiés par le MPS en 2021, accessibles sur un site Internet du MPS, sont aussi annexés à la présente réponse.

Le modèle de sommation (également traduit par « convocation ») publié le 26 décembre 2017 par la gazette officielle du Viet Nam (Công Báo, numéros 1053+1054) est annexé à la présente réponse (document annexé 4). Les modèles du mandat d'arrestation pour les situations d'urgence (document annexé 5) et du mandat d'arrestation pour la détention de l'accusé (document annexé 6) publiés le 26 décembre 2017 par la gazette officielle du Viet Nam (Công Báo, numéros 1045+1046) sont également annexés à la présente réponse.

2.3 Autorité responsable de la délivrance

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un chercheur en cybercriminologie à l'Université du Queensland, dont les domaines de spécialisation comprennent les services de police en matière de cybersécurité et la formation de la police à ce sujet, le trafic de stupéfiants, le passage de clandestins et la traite de personnes au Viet Nam, a déclaré que les [traduction] « trois organismes chargés d'engager des procédures », soit le MPS, le Parquet populaire suprême et la Cour populaire suprême, ont le pouvoir de délivrer des sommations et des mandats d'arrestation (chercheur 21 mai 2022). L'avocat a souligné que, même si le MPS régit les sommations et les mandats d'arrestation, ce sont les [traduction] « autorités policières individuelles responsables des enquêtes (cơ quan cảnh sát điều tra) [1] » qui délivrent ces deux documents « dans les faits » (avocat 25 mai 2022). Le professeur a précisé que les sommations sont délivrées par l'Agence de police d'enquête du MPS, qui est responsable des [traduction] « crimes ordinaires », et l'Agence de sécurité d'enquête du MPS, qui est responsable des « crimes liés à la sécurité nationale » (professeur 19 mai 2022a).

Le professeur a déclaré que [traduction] « seul » le chef d'une agence d'enquête ou le juge en chef d'un tribunal, à l'échelle centrale, provinciale ou du district, peut délivrer des sommations ou des mandats d'arrestation (professeur 19 mai 2022a). Le chercheur a souligné que ce sont plus précisément les [traduction] « chefs et chefs adjoints des organismes d'enquête, des parquets et des cours, de même que les tribunaux », qui sont autorisés à délivrer des mandats d'arrestation, tandis que les sommations sont délivrées par les « enquêteurs, procureurs [ou] juge[s] président[s] » (chercheur 21 mai 2022). L'avocat a affirmé que, bien que les autorités policières puissent délivrer des sommations de façon indépendante, les mandats d'arrestation qu'elles délivrent doivent être approuvés par le Parquet populaire (avocat 25 mai 2022). La même source a ajouté que, dans de rares cas, les cours peuvent délivrer des mandats d'arrestation (avocat 25 mai 2022).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches pour faire suite à l'entretien téléphonique, le professeur a fourni les renseignements suivants concernant la procédure que doivent suivre les autorités au moment de délivrer un mandat d'arrestation :

[traduction]

(i) La décision concernant l'arrestation de l'accusé et des défendeurs aux fins de détention temporaire doit être prise par les chefs adjoints et les chefs des agences d'enquête de [toute] unité administrative. Antérieurement à la prise de la décision, le mandat d'arrestation doit être approuvé par les parquets de la même unité administrative avant que la détention temporaire puisse être appliquée. (ii) À l'étape de la poursuite, le pouvoir de décider de l'arrestation de l'accusé ou des défendeurs incombe au procureur adjoint ou au procureur en chef des parquets populaires et des parquets militaires de [toute] unité administrative, lequel peut décider d'arrêter l'accusé et les défendeurs aux fins de détention temporaire pour régler l'affaire. (iii) Les premiers magistrats et les magistrats adjoints des cours populaires et des cours martiales de [toute] unité administrative, y compris les juges qui occupent le poste de juge en chef, de juge suppléant et de tribunal, peuvent décider d'arrêter l'accusé et les défendeurs aux fins de détention temporaire pendant la durée du procès (professeur 19 mai 2022b).

3. Exemples en ce qui concerne la délivrance
3.1 Sommations

Selon les Country Reports on Human Rights Practices for 2021 publiés par le Département d'État des États-Unis, en septembre, un homme est mort dans un bureau de la police dans le village de Ha Lam de la province du Lam Dong après son arrivée là-bas pour donner suite à une sommation qu'il avait reçue en raison de son présumé défaut de respecter les restrictions liées à la COVID-19 (É.-U. 12 avr. 2022, 2). La même source cite des rapports de police signalant que l'homme était [traduction] « en état d'ébriété et agressif » ainsi que les propos du frère de l'homme selon lesquels l'autopsie a « révélé de nombreuses contusions » sur le corps de l'homme; la source souligne également que, à la fin de 2021, le MPS enquêtait sur l'affaire (É.-U. 12 avr. 2022, 2).

On peut lire dans les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis que, en août 2021, à Hô Chi Minh-Ville, le chef de la police économique et deux autres policiers [traduction] « auraient agressé » un journaliste convoqué au poste pour discuter de son rôle dans les efforts de lutte contre la COVID-19 (É.-U. 12 avr. 2022, 3). La même source ajoute que les policiers [traduction] « ont battu » le journaliste lorsqu'il « a refusé de signer le procès-verbal de la rencontre » qu'ils avaient préparé (É.-U. 12 avr. 2022, 3).

Selon le rapport annuel de 2021 sur les droits de la personne publié par The 88 Project, une ONG vouée à la défense de la liberté d'expression et des droits des militants au Viet Nam, trois militants ont été convoqués au cours de l'année, y compris une personne qui a été [traduction] « convoquée et interrogée sur ses liens présumés avec la Liberal Publishing House » et une autre qui a été convoquée à trois reprises, dont une fois « de Hanoï alors qu'elle vivait à Hô Chi Minh-Ville » (The 88 Project 9 mai 2022, 4, 47).

D'après le rapport annuel de 2021 publié par The 88 Project, deux candidats indépendants qui ont essayé de se présenter aux élections à l'Assemblée nationale en 2021 ont été [traduction] « convoqués aux fins d'interrogatoire » (The 88 Project 9 mai 2022, 38). La même source signale qu'une femme - qui avait été reconnue coupable en 2018 d'avoir [traduction] « "profané le drapeau national" » et condamnée à plus de deux ans d'emprisonnement, mais avait vu sa peine reportée parce qu'elle était enceinte à l'époque - a été « convoqu[ée] à répétition » aux fins d'interrogatoire par la police durant la période de report de sa peine (The 88 Project 9 mai 2022, 39).

Il est écrit dans le rapport de 2021 publié par The 88 Project que, tout au long de l'année, « [d]es gens faisant des commentaires en ligne ont été convoqués dans des postes de police et interrogés » après avoir publié dans les médias sociaux du contenu critiquant la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19 (The 88 Project 9 mai 2022, 4, 38). Selon le rapport annuel de 2020 sur les droits de la personne publié par The 88 Project, à la mi-mars de cette année-là, près de 700 personnes avaient été convoquées par les autorités en lien avec des publications sur Facebook [traduction] « au sujet de la COVID-19 » (The 88 Project 6 avr. 2021, 37).

On peut lire dans le rapport de 2020 publié par The 88 Project que, en 2020, [traduction] « de nombreuses personnes » membres de groupes de la société civile, y compris la maison d'édition Liberal Publishing House (LPH), l'Association des journalistes indépendants du Viet Nam (Independent Journalists Association of Vietnam - IJAVN) et la Confrérie pour la démocratie (Brotherhood for Democracy), ont été « arrêtées du fait de leur affiliation avec ces groupes ou convoquées aux fins d'interrogatoire » (The 88 Project 6 avr. 2021, 5, 38). La même source signale qu'un défenseur des droits fonciers a été [traduction] « convoqu[é] à des fins d'interrogatoire par la police » au cours de la période précédant son arrestation en juin 2020 (The 88 Project 6 avr. 2021, 39).

3.2 Mandats d'arrestation

Les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis fournissent les renseignements suivants sur l'utilisation des mandats d'arrestation dans les faits :

[traduction]

Conformément à la loi, la police a généralement besoin d'un mandat délivré par un procureur pour arrêter un suspect, bien que, dans certains cas, une décision d'un tribunal soit nécessaire. Le code criminel permet également à la police de « détenir un individu » sans mandat dans des « situations urgentes », par exemple lorsqu'il y a des éléments de preuve indiquant que la personne se préparait à commettre un crime ou lorsque la personne est prise en flagrant délit par la police. Des avocats spécialisés en droits de la personne se sont dit d'avis que la détention sans mandat est pratique courante. De nombreux cas de militants ayant été emmenés en garde à vue par des personnes en civil, sans mandat d'arrestation, ont été signalés (É.-U. 12 avr. 2022, 7).

La même source ajoute que, [traduction] « [e]n particulier dans les affaires reposant sur des motivations d'ordre politique », les agences d'enquête, « dans la plupart des cas la police », « n'appliquaient pas de façon uniforme ou stricte » les règlements régissant l'arrestation et la détention temporaire sans mandat d'arrestation (É.-U. 12 avr. 2022, 7). Selon le rapport de 2021 publié par The 88 Project, les autorités [traduction] « continuent de procéder à des arrestations sans mandat » (The 88 Project 9 mai 2022, 41).

Des sources signalent que, en mai 2021, un mandat (HRW 22 mars 2022) ou un [traduction] « mandat spécial » (RFA 1er juill. 2021) a été délivré en vue de l'arrestation d'un journaliste qui traitait de sujets comme la corruption et les différends fonciers (HRW 22 mars 2022; RFA 1er juill. 2021), et que la police a arrêté le journaliste en question en juin, puis [traduction] « l'a accusé de propagande contre l'État » (HRW 22 mars 2022).

Selon le rapport de 2020 publié par The 88 Project, un chargé de cours à l'Université Ton Duc Thang qui [traduction] « poursuit actuellement une plainte de plagiat contre le secrétaire du parti de la province du Dak Lak » a été arrêté pour « avoir critiqué un responsable local du parti», et ce, « sans que son employeur et sa famille en soient avisés et sans mandat d'arrestation » (The 88 Project 6 avr. 2021, 16, 45, 47). La même source ajoute que des responsables de la sécurité publique du Dak Lak se sont rendus à Hô Chi Minh-Ville, où vit le chargé de cours, pour l'arrêter (The 88 Project 6 avr. 2021, 47).

3.3 Délivrance aux membres de groupes religieux, y compris le Falun Gong et le Hoa Hao

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur la délivrance de sommations ou de mandats d'arrestation aux membres de groupes religieux.

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le directeur de Safeguard Defenders [2] a déclaré ce qui suit après avoir consulté ses partenaires et son réseau au sein de la communauté des défenseurs des droits de la personne au Viet Nam :

[traduction]

[L]a façon dont les groupes religieux minoritaires sont traités dépend largement de la relation avec les autorités locales. Ils peuvent être plus ou moins ciblés en fonction de la province et d'intérêts particuliers. Safeguard Defenders est au courant de cas de membres de minorités religieuses ayant été arrêtés sans mandat, ce qui peut en fait arriver à n'importe quel citoyen vietnamien (Safeguard Defenders 30 mai 2022).

4. Lettres d'invitation

Le professeur a fourni les renseignements suivants au sujet des lettres d'invitation :

[traduction]

Une lettre d'invitation est un type de [document] utilisé dans les cas où les services de police, les tribunaux ou les organismes généralement responsables des procédures invitent des personnes qui sont liées à une affaire ou sont au courant d'une affaire à se présenter à [leur] bureau pour recueillir de l'information et clarifier les renseignements relatifs à l'affaire. À l'heure actuelle, il n'y a aucun document juridique exigeant expressément que les citoyens qui reçoivent une « invitation » d'un organisme d'État en général ou d'un service de police en particulier y donnent une suite favorable.

Par conséquent, dans le cas des invitations, la personne invitée a le choix de se présenter ou non. […] Cependant, lorsque [la lettre précise] des conditions et des dates, les avocats locaux conseillent souvent aux personnes ayant reçu l'invitation de collaborer avec les organismes d'État qui l'ont envoyé [afin de] savoir précisément en quoi [elles] sont liées à l'affaire (professeur 19 mai 2022b).

Les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis fournissent les renseignements suivants au sujet des personnes qui sont invitées à un poste de police :

[traduction]

Des avocats et des représentants d'ONG ont signalé que, outre les arrestations à proprement parler, dans de nombreux cas, des policiers « invitaient » des personnes à se présenter au poste de police sans leur préciser clairement le motif de cette invitation. Ces personnes pouvaient être détenues pendant des heures et interrogées ou pouvaient se faire demander de rédiger ou de signer des rapports. Bon nombre de ces cas n'avaient rien à voir avec des circonstances délicates ou motivées par des considérations politiques (É.-U. 12 avr. 2022, 7).

Le modèle de lettre d'invitation produit par le MPS en 2021, accessible sur un site Internet du gouvernement du Viet Nam, est annexé à la présente réponse (document annexé 7). Le modèle de lettre d'invitation du MPS publié le 26 décembre 2017 par la gazette officielle du Viet Nam (Công Báo numéros 1053+1054) est annexé à la présente réponse (document annexé 8).

5. Fréquence des documents juridiques frauduleux

Le professeur a déclaré que les documents juridiques frauduleux sont [traduction] « très rares » (professeur 19 mai 2022a). La même source a également affirmé qu'elle n'avait jamais vu de cas où les autorités policières avaient délivré un document juridique frauduleux (professeur 19 mai 2022a). Toutefois, selon l'avocat, les documents juridiques frauduleux ne sont [traduction] « pas rares » au Viet Nam puisqu'il est « plutôt facile de reproduire passablement bien » une sommation ou un mandat d'arrestation (avocat 25 mai 2022).

Des sources signalent qu'il y a eu des cas où des documents juridiques frauduleux ont été utilisés par des [traduction] « gens de l'endroit » (professeur 19 mai 2022a) ou des [traduction] « fraudeurs » en vue de tenter d'escroquer financièrement d'autres personnes (avocat 25 mai 2022). Le professeur a ajouté que les documents juridiques frauduleux sont généralement envoyés par courriel ou par l'intermédiaire de Facebook, mais que les autorités policières ne délivrent jamais de documents juridiques authentiques par l'un ou l'autre de ces moyens (professeur 19 mai 2022a).

Selon un article paru en 2019 dans le Da Nang Police Online Newspaper, la police de Da Nang a informé les résidents de multiples incidents où des sommations et des mandats d'arrestation frauduleux ont été utilisés pour demander des transferts d'argent (Da Nang Police Online Newspaper 10 août 2019). La même source souligne que le chef du Service de sécurité de la police de Da Nang a confirmé que les sommations et les mandats d'arrestation en question sont [traduction] « complètement faux » et qu'ils arboraient un timbre numérisé avant de préciser que, dans le cadre d'une enquête, les responsables de la sécurité ne sont pas autorisés à communiquer avec des citoyens au moyen des réseaux sociaux, y compris Facebook (Da Nang Police Online Newspaper 10 août 2019).

Le professeur a affirmé que la [traduction] « corruption est très courante au sein de la police » (professeur 19 mai 2022a). Selon les Country Reports 2021 publiés par les États-Unis, malgré des mesures occasionnelles, les policiers et les représentants de l'État [traduction] « agissaient fréquemment en toute impunité » (É.-U. 12 avr. 2022, 1). Le professeur a ajouté que les policiers demandent [traduction] « rarement » de l'argent « immédiatement après avoir envoyé la sommation », mais attendent plutôt que la personne arrive au poste de police pour « négocier » avec elle le « montant d'argent qu'elle devra payer pour que l'affaire soit ignorée ou que sa gravité soit atténuée » (professeur 19 mai 2022a). La même source a précisé qu'une telle pratique [traduction] « est assez courante », mais qu'elle n'est pas utilisée « dans tous les cas » (professeur 19 mai 2022a). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement allant dans le même sens.

6. Capacité des personnes faisant l'objet d'une sommation ou d'un mandat d'arrestation de quitter le Viet Nam

L'article 124 du code de procédure pénale prévoit ce qui suit au sujet des restrictions de sortie :

[traduction]

  1. Une restriction de sortie peut s'appliquer aux personnes suivantes lorsqu'il y a des motifs évidents de croire que leur sortie du pays indique une évasion :
    1. Les personnes qui ont fait l'objet d'une dénonciation ou qui sont visées par des réquisitions en raison d'accusations sont soupçonnées d'avoir commis des crimes sur le fondement de motifs suffisants et doivent être empêchées de s'esquiver ou de détruire des éléments de preuve.
    2. Les suspects et les défendeurs.
  2. Les personnes autorisées visées au paragraphe 1 de l'article 113 de la présente loi ainsi que les juges présidents sont habilités à rendre des décisions sur les restrictions de sortie. Les décisions concernant les restrictions de sortie rendues par les personnes visées au point a) du paragraphe 1 de l'article 113 de la présente loi doivent être ratifiées par le parquet correspondant avant leur exécution.
  3. La durée de la restriction de sortie ne doit pas excéder le délai pour le traitement des renseignements sur le crime, le dépôt d'accusations, l'enquête, la poursuite et le jugement conformément à la présente loi. La durée de la restriction de sortie imposée aux personnes condamnées à une peine d'emprisonnement ne doit pas excéder la période entre la déclaration de culpabilité et l'application de la peine d'emprisonnement (Viet Nam 2015).

D'après des sources, une personne recherchée par les autorités ne serait pas autorisée à quitter le Viet Nam au moyen de son propre passeport (professeur 19 mai 2022a) ou il serait [traduction] « très improbable » qu'elle le fasse (avocat 25 mai 2022). Le professeur a déclaré que toute personne ayant fait l'objet d'une sommation ou d'un mandat d'arrestation se verrait [traduction] « interdire » de quitter le pays, mais que seules les personnes visées par un mandat d'arrestation pourraient être « détenues » (professeur 19 mai 2022a). Au contraire, l'avocat a affirmé que, lorsqu'une personne a seulement été convoquée par les autorités sans qu'un mandat d'arrestation ou une décision selon laquelle elle est une personne recherchée lui ait été signifié, elle a [traduction] « beaucoup plus de chances d'être en mesure de [quitter] légalement » le pays au moyen de son passeport (avocat 25 mai 2022). L'avocat a également déclaré que, [traduction] « [e]n théorie », les autorités doivent délivrer un document précisant qu'une personne ne peut légalement quitter le pays, mais que, « dans les faits », même si ce document n'a pas été délivré, il est « très improbable » qu'une « personne recherchée » soit capable de « se rendre au-delà » des contrôles frontaliers, en particulier parce que les organismes d'enquête et les autorités de contrôle de l'immigration relèvent du MPS (avocat 25 mai 2022).

Le professeur a précisé qu'une personne visée par un mandat d'arrestation qui a déjà quitté le pays serait [traduction] « arrêtée à la frontière » à son retour au Viet Nam (professeur 19 mai 2022a).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Le ministère de la Sécurité publique (Ministry of Public Security - MPS) est [traduction] « responsable de la sécurité intérieure et dirige la police nationale, une agence nationale spéciale d'enquête de sécurité ainsi que d'autres unités de sécurité internes » (É.-U. 12 avr. 2022, 1). Le MPS supervise la Force de police populaire, qui gère [traduction] « le travail policier traditionnel, y compris les enquêtes criminelles, les services de police de quartier, la régulation du trafic, l'enregistrement des ménages et les cartes d'identité » (Australie 11 janv. 2022, paragr. 5.1).

[2] Safeguard Defenders est une ONG espagnole de défense des droits de la personne qui [traduction] « mène et soutient des activités sur le terrain » en Asie (Safeguard Defenders s.d.).

Références

The 88 Project. 9 mai 2022. 2021 Human Rights Report Vietnam: The Situation of Political Prisoners and Activists at Risk. [Date de consultation : 15 juin 2022]

The 88 Project. 6 avril 2021. 2020 Human Rights Report Vietnam: Our Report on Political Prisoners and Activists at Risk. [Date de consultation : 1er juin 2022]

Australie. 11 janvier 2022. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: Vietnam. [Date de consultation : 13 juin 2022]

Avocat, Viet Nam. 25 mai 2022. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Chercheur, University of Queensland, Australie. 21 mai 2022. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Da Nang Police Online Newspaper. 10 août 2019. « Beware of Scammers Impersonating Government Officials ». Extrait traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 27 mai 2022]

États-Unis (É.-U.). 12 avril 2022. Department of State. « Vietnam ». Country Reports on Human Rights Practices for 2021. [Date de consultation : 18 mai 2022]

Human Rights Watch (HRW). 22 mars 2022. « Vietnam: Drop Charges Against 'Citizen Reporter' ». [Date de consultation : 18 mai 2022]

Professeur, Viet Nam National University. 19 mai 2022a. Entretien avec la Direction des recherches.

Professeur, Viet Nam National University. 19 mai 2022b. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Radio Free Asia (RFA). 1er juillet 2021. Richard Finney. « Fugitive Independent Journalist Arrested in Vietnam After Month on the Run ». [Date de consultation : 18 mai 2022]

Safeguard Defenders. 30 mai 2022. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par le directeur.

Safeguard Defenders. S.d. « About Us ». [Date de consultation : 2 juin 2022]

Viet Nam. 2015. Criminal Procedure Code. [Date de consultation : 18 mai 2022]

Autres sources consultées

Sources orales : D&N International; Dewan & Associates; Duc Thinh Law Firm; Law Office of Nguyen Chien; Le & Tran Trial Lawyers; professeur de droit dans une université au Viet Nam (4); professeur de droit spécialiste du droit asiatique dans une université du Wisconsin; professeur de droit vietnamien dans une université d'Australie; professeur de droit vietnamien dans une université de Pennsylvanie; Russin and Vecchi; Vietnam Human Rights Network.

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; Association of Southeast Asian Nations (ASEAN); Bertelsmann Stiftung; Committee to Protect Journalists; Croix-Rouge autrichienne – ecoi.net; The Diplomat; Factiva; Financial Times; Foreign Policy; France – Office français de protection des réfugiés et apatrides; Freedom House; The Guardian; Hoatieu.vn; International Crisis Group; The Law on Police Use of Force Worldwide; Nations Unies – Refworld; Reuters; Royaume-Uni – Home Office; Union européenne – European Union Agency for Asylum; The Vietnamese.

Documents annexés

  1. Viet Nam. 2021. Ministry of Public Security (MPS). Convocations. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 27 mai 2022]
  2. Viet Nam. 2021. Ministry of Public Security (MPS). Ordonnance d’arrestation en situation d’urgence. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 27 mai 2022]
  3. Viet Nam. 2021. Ministry of Public Security (MPS). Ordonnance d’arrestation de l’accusé pour détention provisoire. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 27 mai 2022]
  4. Viet Nam. 2017. Ministry of Public Security (MPS). Convocations. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 19 mai 2022]
  5. Viet Nam. 2017. Ministry of Public Security (MPS). Ordonnance d’arrestation en situation d’urgence. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 19 mai 2022]
  6. Viet Nam. 2017. Ministry of Public Security (MPS). Ordonnance d’arrestation de l’accusé pour détention provisoire. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 19 mai 2022]
  7. Viet Nam. 2021. Ministry of Public Security (MPS). Invitation. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 27 mai 2022]
  8. Viet Nam. 2017. Ministry of Public Security (MPS). Invitation. Traduit par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 19 mai 2022]

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