Iran : information sur la situation des derviches gonabadi et des membres de leur famille et le traitement que leur réservent la société et les autorités, y compris la possibilité pour les derviches de pratiquer leur religion en Iran (2018-février 2021) [IRN200460.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Aperçu

Selon des sources, les derviches gonabadi [nematollahi gonabadi [1]; soufi gonabadi] constituent le plus nombreux des ordres soufis en Iran (Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.64; Al Jazeera 27 févr. 2018; RFE/RL 20 févr. 2018). Des sources estiment que le nombre d’adeptes se situe entre deux et cinq millions (Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.64; Al Jazeera 27 févr. 2018).

D’après Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL) [2], il y a des membres de l’ordre gonabadi dans toutes les régions de l’Iran (RFE/RL 20 févr. 2018). Dans un article paru dans Zamaneh Media, un organisme de presse à but non lucratif situé à Amsterdam qui s’intéresse surtout à l’Iran et à d’autres pays persanophones (Zamaneh Media s.d.), on peut lire que les derviches gonabadi habitent [traduction] « principalement » dans les grandes villes des provinces de Téhéran, d’Ispahan et de Lorestan (Zamaneh Media 14 mai 2019).

Selon le rapport annuel de 2020 de la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse dans le monde (US Commission on International Religious Freedom - USCIRF), Noor [Nour] Ali Tabandeh [aussi connu sous le nom de Majzoub Ali Shah] était le chef spirituel [qotb; qutb] des derviches gonabadi jusqu’à son décès en décembre 2019 (É.-U. 28 avr. 2020, 24). La même source signale que Noor Ali Tabandeh avait désigné Alireza Jazbi pour lui succéder, mais que, à la fin de 2019, le leadership d’Alireza Jazbi était contesté par le neveu de Noor Ali Tabandeh, qui avait l’appui [traduction] « [d’]un chef religieux anti-soufi étroitement lié à de hauts dirigeants du gouvernement de l’Iran » (É.-U. 28 avr. 2020, 25). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens, ni aucun renseignement additionnel sur le chef spirituel actuel des derviches gonabadi.

1.1 Croyances et pratiques

Selon des sources, les derviches gonabadi [traduction] « se considèrent » comme des musulmans chiites duodécimains (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 2; HRW 15 mars 2018). Des sources signalent que les membres prient cinq fois par jour et jeûnent pendant le ramadan (RFE/RL 20 févr. 2018) ou [traduction] « prient, jeûnent et accomplissent les rituels religieux conformément aux traités des chefs religieux chiites » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 2). Dans un rapport sur l’Iran, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce (Department of Foreign Affairs and Trade - DFAT) de l’Australie souligne que la musique, la danse et le chant font partie des rituels soufis (Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.64). D’après RFE/RL, les derviches gonabadi lisent également de la [traduction] « poésie spirituelle » dans le cadre de leurs rituels (RFE/RL 20 févr. 2018).

Selon des sources, les soufis rejettent la notion de velayat-e faqih [[traduction] « gouvernement du clergé » (BBC 20 févr. 2018) ou [traduction] « tutelle du juriste » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.5)] (BBC 20 févr. 2018; IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.5), qui est [traduction] « le pilier principal de l’idéologie de la République islamique » (BBC 20 févr. 2018). Selon l’Oxford Dictionary of Islam, un faqih est un [traduction] « expert en jurisprudence islamique » (The Oxford Dictionary of Islam s.d.). Dans son rapport annuel de 2020, l’USCIRF explique que le système de gouvernance en Iran repose sur la doctrine du velayate faqih depuis la révolution islamique de 1979; le [traduction] « guide suprême » du pays est aussi un érudit religieux (É.-U. 28 avr. 2020, 24). D’après un rapport sur les derviches gonabadi publié en novembre 2020 par le Centre de documentation sur les droits de la personne en Iran (Iran Human Rights Documentation Center - IHRDC), un organisme à but non lucratif fondé par des universitaires et avocats spécialistes des droits de la personne en vue de créer un registre historique de la situation en matière de droits de la personne en Iran (IHRDC s.d.), Noor Ali Tabandeh a publié un article dans les années 1980 dans lequel il plaidait contre la notion du velayat-e faqih (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.5).

2. Situation des derviches gonabadi et traitement qui leur est réservé
2.1 Lois

Aux termes de l’article 12 de la constitution de 1979 de la République islamique d’Iran, [traduction] « [l]a religion officielle de l’Iran est l’islam de confession dja’farite duodécimain, et ce principe est éternellement immuable; les autres confessions islamiques, soit hanéfite, chaféite, malékite, hanbalite et zaydite sont entièrement respectées » (Iran 1979). L’article 13 prévoit que [traduction] « [l]es zoroastriens, les juifs et les chrétiens sont les seules minorités religieuses reconnues qui, dans les limites de la loi, sont libres d’accomplir leurs rites religieux et de pratiquer leur foi à titre personnel et dans l’éducation religieuse » (Iran 1979).

Des sources signalent que les autorités iraniennes considèrent le soufisme comme une [traduction] « secte déviante » (É.-U. 29 avr. 2019, 3; Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 65). Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran fait observer que les minorités religieuses non reconnues, dont les derviches gonabadi, sont [version française des Nations unies] « les cibles de lois et pratiques discriminatoires », car elles sont exclues du cadre juridique national (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 34).

2.2 Traitement réservé par la société

Selon RFE/RL, il y a des tensions entre les musulmans orthodoxes et les soufis en Iran (RFE/RL 20 févr. 2018). Dans son rapport sur l’Iran, le DFAT de l’Australie écrit que les chefs religieux chiites ont [traduction] « dénoncé » les derviches gonabadi dans des sermons et des déclarations publiques (Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.66). Dans son rapport de novembre 2020, l’IHRDC signale [traduction] « [qu’]un des plus hauts chefs religieux chiites » au séminaire de Qom a ordonné à ses disciples d’éviter de fréquenter les derviches, de fraterniser avec eux ou de se marier avec une personne derviche (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.7.4).

Selon des sources, des lieux de culte gonabadi ont été attaqués (Ceasefire, et al. mars 2018, 26) ou démolis (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 65; journaliste 19 janv. 2021). Des sources signalent qu’un centre religieux soufi à Qom a été détruit en 2006 (RFE/RL 20 févr. 2018; IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.2; Al Jazeera 27 févr. 2018). Dans le rapport de novembre 2020 de l’IHRDC, on peut lire que, en 2013, on a ordonné la démolition d’une maison qui servait de centre de prière à des derviches dans la municipalité de Shahr-e Kurd, dans la province de Chahar Mahaal-o-Bakhtiari (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.6.2, 5.8.1).

Selon des sources, les minorités, [en particulier les minorités religieuses non reconnues (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 41)], doivent surmonter [version française des Nations unies] « de graves obstacles » pour obtenir des emplois dans la fonction publique, ce qui serait aussi le cas chez certains employeurs privés (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 41, 42), ou [traduction] « n’ont généralement pas un accès égal aux emplois du secteur public » et sont également « exclus de nombreux autres secteurs économiques et sociaux » (Bertelsmann Stiftung 2020, 26).

Des sources soulignent que des derviches gonabadi ont été congédiés en raison de leur religion (Al Jazeera 27 févr. 2018; Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.66). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un journaliste, qui est également administrateur du site Internet Majzooban Noor [Majzooban-e Noor] [3] et militant des droits des derviches gonabadi, a déclaré que les derviches n’ont pas le droit d’occuper un emploi au gouvernement, dans les facultés universitaires et dans les autres établissements d’enseignement supérieur (journaliste 19 janv. 2021). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le directeur général de Minority Rights Group International (MRG) [4] a affirmé que l’intimidation des derviches gonabadi [traduction] « approuvée par l’État » a créé un « climat de méfiance qui a des conséquences et effets néfastes en aval », notamment dans les domaines de l’emploi et du logement, particulièrement pour les membres de l’ordre qui « montrent leur affiliation religieuse de quelque manière que ce soit » (MRG 29 janv. 2021). Le rapport de l’IHRDC de novembre 2020 signale le cas d’un derviche gonabadi et ancien combattant de la guerre irano-irakienne qui a perdu ses prestations d’invalidité en raison de sa religion (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.1.3, 9.6).

Selon des sources, certains derviches gonabadi se sont vu refuser l’accès à des études universitaires à cause de leur religion (Al Jazeera 27 févr. 2018; Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.66; Bertelsmann Stiftung 2020, 26). Le rapport de l’IHRDC de novembre 2020 signale que, en 2018, une derviche gonabadi qui étudiait à l’Université islamique Azad dans la ville de Bandar Abbas [Bandar-e 'Abbās], dans la province de Hormozgan, a été [traduction] « informée verbalement » de son renvoi en raison de sa foi (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 9.5). Le Centre pour les droits de la personne en Iran (Center for Human Rights in Iran - CHRI), un organisme à but non lucratif établi à New York qui mène des recherches et recueille des données sur les violations des droits de la personne en Iran (CHRI s.d.), fait état du cas d’une derviche gonabadi inscrite à un programme d’études supérieures, qui a été expulsée de l’Université Tarbiat Modares à Téhéran en février 2018 après avoir refusé de signer un engagement de [traduction] « "se conformer à tous les principes éthiques, idéologiques et politiques" » émanant des règles et règlements de l’université (CHRI 10 févr. 2018). Un porte-parole de Majzooban Noor interviewé dans le même article a fait observer que l’étudiante expulsée ne [traduction] « "participait à aucune activité" » et a ajouté que « "seuls les derviches" » étaient tenus de signer l’engagement (CHRI 10 févr. 2018). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

2.3 Traitement réservé par les autorités

Des sources signalent que les soufis sont [traduction] « pris pour cible par le gouvernement » (É.-U. 29 avr. 2019, 3; The Economist 23 janv. 2021). La BBC souligne que les derviches gonabadi se font [traduction] « harceler de manière sporadique » par des « groupes radicaux soutenus par l’État » (BBC 20 févr. 2018).

Selon des sources, les derviches gonabadi sont perçus comme une [traduction] « "menace" » (Al Jazeera 27 févr. 2018) ou une [traduction] « contestation directe des autorités religieuses en place » (MRG 29 janv. 2021). Dans une entrevue avec Zamaneh Media, le directeur général du CHRI a déclaré que les derviches sont pris pour cible parce qu’ils ne se conforment pas à la [traduction] « version officielle de la religion prescrite par l’État, et leur popularité et leur croissance ont alarmé les autorités » (Zamaneh Media 14 mai 2019). De même, dans un article de l’Economist paru en janvier 2021 sur les Iraniens qui abandonnent la foi chiite et explorent d’autres religions, on peut lire [traduction] « [qu’]un nombre croissant d’Iraniens » participent à des retraites gonabadi, et que le clergé considère le soufisme comme « une plus grande menace » que les autres religions (The Economist 23 janv. 2021). D’après le directeur général de MRG,

[traduction]

la nature de la menace [des derviches gonabadi] telle quelle est perçue par le régime donne lieu à de fréquentes tentatives d’intimider les adeptes et de les empêcher de pratiquer leur foi en Iran. Dans ce contexte général, il peut y avoir des attaques contre des lieux de culte, suivies d’arrestations de membres de la communauté qui protestent contre de telles attaques (MRG 29 janv. 2021).

Selon des sources, en février 2018, des derviches gonabadi manifestaient contre l’arrestation d’un de leurs membres à un poste de police dans le quartier Pasdaran à Téhéran, lorsque des affrontements ont éclaté entre les manifestants et la police (HRW 15 mars 2018; Al Jazeera 27 févr. 2018). L’organisation Human Rights Watch (HRW) signale [traduction] « [qu’]au moins » trois policiers et un membre du Basij sont morts (HRW 15 mars 2018), tandis qu’Al Jazeera cite les autorités iraniennes, qui ont déclaré que trois policiers et deux membres du Basij avaient été tués (Al Jazeera 27 févr. 2018). Des sources soulignent que 300 (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2) ou [traduction] « plus de » 300 (HRW 15 mars 2018) manifestants ont été arrêtés (HRW 15 mars 2018; IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2). Selon des sources, [[traduction] « au moins » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2)] 208 derviches arrêtés durant les manifestations de février ont été condamnés à des peines d’emprisonnement [allant de 4 mois à 26 ans (HRW 29 août 2018)], à des coups de fouet, à l’exil interne, à des interdictions de voyager et à des interdictions d’adhérer à des groupes sociaux ou politiques (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2; HRW 29 août 2018).

Des sources soulignent que des journalistes qui couvraient les manifestations des derviches en février 2018 ont été arrêtés (RSF 22 août 2018; CPJ 31 août 2018). Des sources signalent que, en août 2018, six employés du site Internet Majzooban Noor ont été condamnés in absentia à des peines d’emprisonnement allant de 7 à 26 ans, ainsi qu’à des coups de fouet, à l’exil interne et à l’interdiction d’exercer des [traduction] « activités journalistiques » pendant deux ans (RSF 22 août 2018; É.-U. 29 avr. 2019, 3-4), [à la suite d’accusations telles que [traduction] « "perturbation de l’ordre public" », « "propagande contre l’État" » et « "communication de renseignements sur la minorité derviche aux médias de l’opposition" » (Freedom House 2020, sect. C3)].

Selon des sources, des derviches gonabadi emprisonnés ont subi [[version française des Nations unies] « [d]es mauvais traitements » (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 66)], y compris des tabassages, et se sont vu refuser l’accès à leurs avocats et à des soins médicaux (Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 66; CHRI 8 avr. 2019). Des sources signalent que certaines manifestantes derviches ont été placées dans le même quartier pénitentiaire que les autres détenues, ce qui contrevenait aux règles de la prison (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2; Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 66) selon lesquelles les [traduction] « prisonniers politiques » doivent être séparés des autres contrevenants (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2).

Selon des sources, [[traduction] « au moins » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2)] 39 derviches gonabadi ont été libérés de prison en raison de la COVID-19, mais contraints de purger leur peine d’exil (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2; VOA 28 mai 2020). D’après le rapport de novembre 2020 de l’IHRDC, le fait d’obliger des détenus [traduction] « graciés ou libérés sous condition » à purger leur peine d’exil enfreint l’article 98 du code criminel de l’Iran, qui prévoit que « "[l’]octroi du pardon annule tous les effets de la déclaration de culpabilité", sauf le paiement de la diya [indemnisation] et des dommages » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.2); toutefois, d’après un article publié en mai 2020 par Voice of America (VOA) [5], le droit iranien [traduction] « n’est pas clair » sur la question de savoir si la commutation d’une peine d’emprisonnement par l’octroi du pardon a pour effet de soustraire la personne concernée aux autres éléments de la peine (VOA 28 mai 2020).

Des sources signalent que, à la suite des manifestations de 2018, des médias [traduction] « d’État » (BBC 20 févr. 2018) ou [traduction] « progouvernementaux » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.1.1) ont comparé les derviches gonabadi à l’État islamique en Iraq et en Syrie (EIIS) [État islamique en Iraq et al-Cham, État islamique (EI), État islamique en Iraq et au Levant (EIIL), Daech] (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.1.1; BBC 20 févr. 2018).

Selon des sources, en date de 2019, [Noor Ali Tabandeh] était assigné à résidence depuis les manifestations de février 2018 (É.-U. 29 avr. 2019, 3; Nations Unies 18 juill. 2019, paragr. 67). D’après un article du CHRI publié en novembre 2019, Noor Ali Tabandeh a été hospitalisé pour [traduction] « des problèmes de santé non divulgués » le 15 octobre 2019 et a par la suite entamé une grève de la faim (CHRI 6 nov. 2019); cependant, selon le rapport annuel 2020 de l’USCIRF, Noor Ali Tabandeh a entamé une grève de la faim en novembre 2019, a été hospitalisé et [traduction] « s’est vu refuser l’accès à ses médecins et conseillers », puis est décédé en décembre (É.-U. 28 avr. 2020, 25). L’Associated Press (AP) cite un reportage de l’agence de presse étudiante iranienne (Iranian Students' News Agency - ISNA), une agence d’information [traduction] « semi-officielle », selon qui Noor Ali Tabandeh est décédé « des suites de plusieurs maladies » (AP 24 déc. 2019). D’après Radio Farda, le radiodiffuseur de langue persane de RFE/RL (Radio Farda s.d.), Noor Ali Tabandeh est mort après avoir été [traduction] « hospitalisé en raison de complications découlant de son âge avancé et de sa grève de la faim » (Radio Farda 24 déc. 2019). Dans l’article du CHRI de novembre 2019, on peut lire que [traduction] « plus de 70 » derviches gonadabi emprisonnés ont participé à une grève de la faim en signe de solidarité avec Noor Ali Tabandeh et pour protester contre le fait que des centres religieux gonabadi ont été fermés depuis février 2018 (CHRI 6 nov. 2019). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens, ni aucun renseignement additionnel sur la fermeture de centres religieux gonabadi.

Dans un article paru en mai 2019, le CHRI signale que le site Internet Majzooban Noor a été la cible d’une attaque par déni de service distribué (Distributed Denial of Service - DDoS) soutenue par l’État [6] du 5 au 7 mai 2019, ce qui a eu pour effet de bloquer l’accès au site [traduction] « pendant de nombreuses heures » (CHRI 20 mai 2019). Des sources font état d’une cyberattaque au moyen de logiciels malveillants en février 2018 contre l’administrateur (Article18 23 sept. 2020) ou les administrateurs (CHRI 20 mai 2019) de Majzooban Noor, laquelle était [[traduction] « fort probablement » (Article18 23 sept. 2020)] appuyée par l’État (CHRI 20 mai 2019; Article18 23 sept. 2020).

2.4 Traitement réservé aux membres de la famille par les autorités

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur le traitement réservé par les autorités aux membres de la famille des derviches gonabadi.

Dans une déclaration conjointe publiée en mars 2018, Amnesty International, le CHRI, HRW et Justice for Iran signalent que les membres de la famille d’un derviche gonabadi qui a été arrêté le 20 février 2018 et dont [version française d’Amnesty International] « on ignore encore » les circonstances précises du décès ont été « menacés » d’arrestation s’ils continuaient de parler aux médias (Amnesty International, et al. 13 mars 2018). Selon le rapport de l’IHRDC de novembre 2020, les forces de sécurité ont remis le corps à la famille seulement après que celle-ci eut accepté de l’enterrer la nuit sans tenir de cérémonie (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 5.10.4); selon la déclaration conjointe d’Amnesty International et al, les autorités [version française d’Amnesty International] « ont contraint » les proches à enterrer le corps à deux heures du matin en présence des forces de police (Amnesty International, et al. 13 mars 2018).

Dans l’article de VOA paru en mai 2020, on peut lire que, à la suite du transfert d’un derviche gonabadi dans une prison à Chiraz, ce qui contrevient au code criminel de l’Iran qui exige que les détenus soient emprisonnés [traduction] « le plus près possible de leur lieu de résidence », les membres de sa famille, qui habitent à Téhéran, croient que le transfert visait à punir la famille, étant donné que certains membres sont aussi des militants derviches (VOA 28 mai 2020). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

2.5 Possibilité pour les derviches gonabadi de pratiquer leur religion

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur la possibilité pour les derviches gonabadi de pratiquer leur religion.

Le rapport sur l’Iran du DFAT de l’Australie signale que les membres des religions non reconnues [traduction] « n’ont pas le droit d’exprimer leur foi en public » et qu’il est interdit aux derviches de se rassembler en public (Australie 14 avr. 2020, paragr. 3.27, 3.64). D’après le rapport de l’IHRDC de novembre 2020, le guide suprême Ali Khamenei a déclaré en réponse à une istifta [7] qu’il [traduction] « "n’est pas permis" » d’assister à des rassemblements derviches (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.7.1). Le directeur général de MRG a également fait observer que la fatwa du guide suprême contre la communauté derviche est [traduction] « en fait une autorisation de restreindre la pratique et la propagation de cette religion » (MRG 29 janv. 2021).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Selon le Centre de documentation sur les droits de la personne en Iran (Iran Human Rights Documentation Center - IHRDC), Nematollah Wali est le fondateur de l’ordre gonabadi (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 2).

[2] Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL) est une chaîne d’information américaine financée par le Congrès des États-Unis par l’entremise de l’Agence américaine des médias internationaux (US Agency for Global Media - USAGM), un organisme gouvernemental fédéral chargé de [traduction] « chapeauter tous les médias internationaux civils [des États-Unis] » (RFE/RL s.d.).

[3] D’après son site Internet, Majzooban Noor est un site d’information en ligne, créé et maintenu par un groupe d’avocats et de militants défenseurs des droits des derviches, et principalement consacré aux actualités touchant la communauté soufie (Majzooban Noor 10 oct. 2010).

[4] Le directeur général de Minority Rights Group International (MRG) a signalé que les renseignements fournis à la Direction des recherches étaient fondés sur le travail de MRG auprès des minorités en Iran et de la diaspora iranienne, ainsi que sur l’information produite par d’autres organisations, y compris le rapport de l’IHRDC de novembre 2020 et « [l]es rapports récents » du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran (MRG 29 janv. 2021).

[5] L’organisation Voice of America (VOA) fait partie de l’Agence américaine des médias internationaux (US Agency for Global Media - USAGM) et est financée par le Congrès des États-Unis (VOA s.d.).

[6] Selon la BBC, une attaque par déni de service distribué (Distributed Denial of Service - DDoS) est [traduction] « une manœuvre visant mettre un site hors service en le submergeant de trafic » (BBC 7 mars 2016).

[7] Selon le rapport de l’IHRDC de novembre 2020, une istifta est [traduction] « une demande officielle en vue d’obtenir une décision sur une question de droit islamique par un faqih » [« un expert en jurisprudence islamique » (The Oxford Dictionary of Islam s.d.)], et la réponse à une istifta est une fatwa, qui est « contraignante pour les disciples du faqih qui l’a prononcée » (IHRDC 5 nov. 2020, sect. 3.7.1).

Références

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Amnesty International, et al. 13 mars 2018. « Iran: End Persecution of Families Seeking Truth and Justice for Detainees Who Have Died in Detention ». [Date de consultation : 11 févr. 2021]

Article18. 23 septembre 2020. « Iranian Minorities and Activists Targeted in 'Large-Scale' Hacking Operation ». [Date de consultation : 6 janv. 2021]

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Australie. 14 avril 2020. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: Iran. [Date de consultation : 4 janv. 2021]

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Ceasefire Centre for Civilian Rights (Ceasefire), Centre for Supporters of Human Rights (CSHR) et Minority Rights Group International (MRG). Mars 2018. Rights Denied: Violations Against Ethnic and Religious Minorities in Iran. [Date de consultation : 4 janv. 2021]

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Zamaneh Media. S.d. « About Zamaneh Media ». [Date de consultation : 4 janv. 2021]

Autres sources consultées

Sources orales : Center for Human Rights in Iran; chargé d’enseignement dans une université du Royaume-Uni qui a mené des recherches sur le développement des ordres soufis en Iran; chargé d’enseignement principal dans une université australienne qui se spécialise dans le soufisme; International Organisation to Preserve Human Rights; journaliste aux États-Unis qui couvre l’Iran; professeur adjoint dans une université aux États-Unis qui a mené des recherches sur la pensée et la pratique soufies contemporaines en Iran.

Sites Internet, y compris : ecoi.net; États-Unis – Department of State; Factiva; France – Office français de protection des réfugiés et apatrides; IranWire; Nations Unies – Refworld; The New York Times; Tehran Times.

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