Sri Lanka : information sur le traitement réservé par les autorités aux Sri Lankais qui retournent dans leur pays, y compris les demandeurs d'asile déboutés et les membres de la famille de personnes qui ont quitté le Sri Lanka et demandé l'asile (2017–août 2020) [LKA200301.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Lois

La loi sur les immigrants et les émigrants (Immigrants and Emigrants Act), dont les modifications les plus récentes ont été apportées en 2006, prévoit ce qui suit :

[traduction]

34. Aucune personne visée par la présente partie ne peut quitter le Sri Lanka depuis un endroit autre qu'un port de départ approuvé.

35. Aucune personne visée par la présente partie ne doit,

  1. si elle est une citoyenne du Sri Lanka, quitter le Sri Lanka à moins d'avoir en sa possession un passeport sri-lankais;

[…]

45. (1) Quiconque

  1. entre au Sri Lanka ou y demeure en violation de toute disposition de la présente loi ou de tout décret ou règlement pris en vertu de celle-ci;
  2. quitte le Sri Lanka en violation de toute disposition de la présente loi ou de tout décret ou règlement pris en vertu de celle-ci;
  3. en réponse au ministre ou en relation avec ce dernier, ou tout fonctionnaire autorisé, ou toute autre personne agissant légalement dans l'application des dispositions de la présente loi ou de tout décret ou règlement pris en vertu de celle-ci, fait ou fait faire un faux rapport, une fausse déclaration ou une fausse représentation;
  4. contrefait, modifie ou altère tout passeport, qu'il ait été délivré au Sri Lanka ou ailleurs, ou tout visa ou toute mention y étant apposé;
  5. contrefait, modifie ou altère tout certificat;
  6. sans autorisation légale, utilise ou a en sa possession tout passeport contrefait, modifié ou irrégulier, ou tout passeport assorti d'une mention ou d'un visa contrefait, modifié ou irrégulier;
  7. sans autorisation légale, utilise ou a en sa possession un certificat contrefait, altéré ou irrégulier;
  8. fait obstruction ou entrave à toute personne dans l'exercice de ses pouvoirs et fonctions en vertu de la présente loi ou de tout décret ou règlement pris en vertu de celle-ci;
  9. étant le titulaire d'un titre de voyage et résidant à l'extérieur du Sri Lanka, envoie ou transmet ce titre de voyage à une personne résidant au Sri Lanka, par la poste ou par toute autre personne, sans l'autorisation écrite préalable du contrôleur;
  10. étant le titulaire d'un titre de voyage et résidant au Sri Lanka, envoie ou transmet ce titre de voyage à une personne résidant dans tout pays à l'extérieur du Sri Lanka, par la poste ou par toute autre personne, sans l'autorisation écrite préalable du contrôleur;
  11. a en sa possession plus d'un titre de voyage en vigueur lui ayant été délivré;
  12. a en sa possession un titre de voyage lui ayant été délivré et, tandis qu'il est en vigueur, présente une demande aux fins de la délivrance d'un titre de voyage;
  13. sans autorisation légale, a en sa possession un titre de voyage pour toute autre personne;
  14. durant l'attente d'une ordonnance au titre de l'alinéa 51c visant la saisie d'un titre de voyage lui ayant été délivré, demande la délivrance d'un autre titre de voyage;
  15. contrevient autrement ou omet de se conformer à toute disposition de la présente loi ou de tout décret règlement ou décret pris en vertu de celle-ci, sera coupable d'une infraction à la présente loi et sera, sur déclaration de culpabilité, passible, dans le cas d'une infraction visée à l'alinéa a) ou à l'alinéa b) ou à l'alinéa c) ou à l'alinéa d) ou à l'alinéa e) ou à l'alinéa f) ou à l'alinéa g), à l'alinéa h), à l'alinéa i), à l'alinéa j), à l'alinéa k), à l'alinéa l), à l'alinéa m), à l'alinéa n) et à l'alinéa o), d'une peine d'emprisonnement minimale d'un an et maximale de cinq ans, conformément à l'une ou l'autre description, ainsi qu'à une amende allant de cinquante mille roupies [environ 364 $CAN] à deux cent mille roupies [environ 1 456 $CAN], et, dans le cas d'une infraction visée à l'alinéa h) ou à l'alinéa i) ou à l'alinéa j) ou à l'alinéa k) ou à l'alinéa l) ou à l'alinéa m) ou à l'alinéa n) ou à l'alinéa o), d'une peine d'emprisonnement minimale de six mois et maximale de cinq ans, conformément à l'une ou l'autre description, ainsi que d'une amende allant de cinquante mille roupies à deux cent mille roupies (Sri Lanka 1949).

Dans un rapport sur une mission d'enquête au Sri Lanka effectuée par des représentants du ministère de l'Intérieur (Home Office) du Royaume-Uni du 28 septembre au 5 octobre 2019, il est question d'un entretien où des représentants du Département du procureur général (Attorney General's Department) du Sri Lanka ont fait état des renseignements suivants :

[traduction]

La peine prévue à l'article 45 pour les départs illégaux est une amende. Les personnes ayant facilité le départ seraient passibles d'une peine d'emprisonnement. Les peines pour les documents contrefaits sont, pour une première infraction, une amende de 5000 LKR [environ 36 $CAN] et, pour toute infraction subséquente, une amende plus élevée ou une courte peine d'emprisonnement (R.U. 20 janv. 2020, 58).

Le Département des Affaires étrangères et du Commerce (Department of Foreign Affairs and Trade - DFAT) de l'Australie explique que les personnes qui ont quitté le pays [traduction] « de façon irrégulière par bateau » sont réputées avoir violé la loi sur les immigrants et les émigrants (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.31).

2. Traitement réservé par les autorités aux Sri-Lankais qui retournent dans leur pays, y compris les demandeurs d'asile déboutés
2.1 À l'arrivée

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, qui cite un représentant du Département des enquêtes criminelles (Criminal Investigation Department – CID) du Sri Lanka, précise que l'identité des personnes qui retournent au Sri Lanka est vérifiée en fonction d'une [traduction] « liste de surveillance » tenue par la police, et qu'une personne serait arrêtée si elle était visée par des accusations criminelles en instance (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 7.6.1). Il ressort du même rapport, qui cite l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), que les personnes qui retournent au pays seront également contrôlées en fonction d'une liste de surveillance tenue par le Service de renseignement de l'État (State Intelligence Service - SIS) (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 7.6.1). Le DFAT de l'Australie fait de même observer que différentes agences gouvernementales responsables du traitement des personnes revenant au pays, y compris le Département de l'immigration et de l'émigration (Department of Immigration and Emigration), le SIS, le CID et, [traduction] « par moments », la Division des enquêtes sur le terrorisme (Terrorism Investigation Division), vérifient les titres de voyage des personnes de retour et les renseignements relatifs à leur identité en fonction des « bases de données de l'immigration, des bases de données des services de renseignement et des dossiers relatifs aux affaires criminelles en instance » (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.32).

Selon le rapport du DFAT de l'Australie, [traduction] « [s]i une personne retourne volontairement au pays au moyen de son propre passeport à bord d'un vol commercial, elle n'attirerait pas forcément l'attention des autorités locales si elle a quitté le Sri Lanka légalement par un point de sortie officiel en utilisant le même passeport » (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.31). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Le DFAT de l'Australie signale que [traduction] « [l]a plupart » des personnes qui retournent au pays sont questionnées à leur arrivée, « habituellement » à l'aéroport (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.34). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un maître de conférences à l'Université de Jaffna, au Sri Lanka, qui a écrit au sujet des causes de la migration par bateau depuis le Sri Lanka à destination de l'Australie, a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Toutes les personnes qui ne reviennent pas volontairement de l'étranger font l'objet d'une brève enquête menée par les autorités de l'immigration et par la police à l'aéroport, et tous les détails relatifs au point d'origine et à la destination sont consignés. Depuis les cinq dernières années environ (depuis le début de 2015), cette enquête vise principalement à recueillir des renseignements sur les moyens par lesquels la personne a quitté le pays (voie légale ou illégale), à établir si de quelconques agents organisés ont participé directement ou indirectement au départ de la personne du pays et à déterminer l'itinéraire (le cas échéant) suivi, etc., de manière à prévenir une telle migration irrégulière (maître de conférences 17 juill. 2020).

L'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), une [version française de l'OSAR] « organisation faîtière [sans but lucratif] des œuvres d'entraides […] actives dans l[e] domain[e] de […] l'asile » (OSAR s.d.), citant son entretien avec un représentant d'une organisation internationale au Sri Lanka réalisée le 18 octobre 2019, souligne que les personnes qui retournent au Sri Lanka sont « systématiquement » interrogées à leur arrivée à l'aéroport de Colombo par le Département de l'immigration et de l'émigration, puis par le SIS et le CID (OSAR 10 avr. 2020, 10). La même source précise que la durée des « interrogatoires » varie « de quelques heures à plusieurs jours »; à un stade ultérieur, une fois terminés les interrogatoires, la personne rentrée au pays peut recevoir la « visite » de la police sur leur lieu de résidence, « dans la plupart des cas », par la CID (OSAR 10 avr. 2020, 10).

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni cite des représentants du Département de l'immigration et de l'émigration sri-lankais, qui auraient déclaré que

[traduction]

[l]es demandeurs d'asile déboutés seront questionnés si leur séjour s'est prolongé audelà de la période de validité du visa. Si une personne est identifiée comme étant un demandeur d'asile débouté, elle sera questionnée, puis transférée à la CID. Elle pourra être mise en liberté tout en demeurant surveillée (R.U. 20 janv. 2020, 42).

À l'inverse, le même rapport cite l'OIM comme ayant fait la déclaration ciaprès :

[traduction]

Si une personne a demandé l'asile, cela ne serait pas considéré comme une infraction. Si un demandeur d'asile débouté revenait au pays, les autorités ne regarderaient pas depuis quand cette personne est partie. La police s'intéresse uniquement aux infractions criminelles commises au Sri Lanka.

Même si une personne a passé un certain nombre d'années à l'extérieur du pays, ou si son visa est expiré, elle ne serait pas questionnée précisément à ce sujet. L'OIM n'a pas été témoin des traitements discriminatoires allégués. Les médias n'ont pas fait état de cas de personnes rentrées au pays et interrogées pour de tels motifs (R.U. 20 janv. 2020, 54).

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant des membres du CID, souligne qu'une personne qui a déjà été détenue [traduction] « peut être questionnée par les autorités de l'immigration, le CID ou le SIS » lorsqu'elle entre de nouveau au Sri Lanka et peut être tenue d'attendre de deux à trois heures sur place pendant que le CID ou le SIS procède aux vérifications auprès de la police locale relativement à « l'adresse de la personne, etc. » (R.U. 20 janv. 2020, 39). La même source signale en outre que la personne de retour dans son pays serait arrêtée si elle présente des titres de voyage contrefaits (R.U. 20 janv. 2020, 39). Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant le CID et le Département du procureur général, explique qu'un ancien cadre des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET) serait [traduction] « d'intérêt » seulement s'il était en cause une affaire criminelle en instance (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 4.2.2). Selon le même rapport, qui cite un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Sri Lanka, précise qu'un [traduction] « cadre de haut niveau des TLET » subirait « un interrogatoire plus approfondi », mais ne serait pas « nécessairement » détenu (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 4.2.1). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Le DFAT de l'Australie fait observer que les personnes qui retournent dans leur pays peuvent être accusées en vertu de la loi sur les immigrants et les émigrants si elles sont soupçonnées d'avoir quitté le pays illégalement (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.34). Il est signalé dans le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant un entretien avec le Secrétariat de coordination des mécanismes de réconciliation (Secretariat for Coordinating Reconciliation Mechanisms – SCRM), une [traduction] « agence exécutive relevant du cabinet du premier ministre », que « certains [demandeurs d'asile déboutés] peuvent être accusés d'avoir quitté le Sri Lanka illégalement, mais ne seraient pas tous jugés coupables d'avoir commis un crime » (R.U. 20 janv. 2020, 33-34). La même source, citant un entretien réalisé en octobre 2019 avec le HCR au Sri Lanka, précise qu'aucun [traduction] « réfugié rapatrié » n'a été arrêté ou détenu à l'aéroport depuis 2017 (R.U. 20 janv. 2020, 57). À l'inverse, des médias signalent qu'un demandeur d'asile tamoul expulsé de l'Australie [le 16 juillet 2018 (The Guardian 18 juill. 2018)] avait été arrêté et détenu à son arrivée au Sri Lanka, avant d'être relâché [le 18 juillet 2018 (The Guardian 18 juill. 2018)], et qu'il était censé faire l'objet d'une poursuite en justice (The Guardian 18 juill. 2018; SBS News 19 juill. 2018). Il ressort d'un article publié en février 2019 par le Tamil Guardian, un site Internet d'actualités [traduction] « offrant un contexte et des commentaires sur les affaires tamoules » que le demandeur d'asile expulsé a été accusé d'avoir quitté le Sri Lanka illégalement (Tamil Guardian 16 févr. 2019). Il est écrit dans le même article que huit rapatriés expulsés de l'île de la Réunion en février 2019, qui avaient quitté le Sri Lanka par bateau, avaient été [traduction] « placés en détention préventive » (Tamil Guardian 16 févr. 2019).

2.2 Procédures judiciaires

D'après un article publié par le Special Broadcasting Service (SBS), un [traduction] « diffuseur à financement hybride » de l'Australie dont les fonds proviennent de ses propres activités commerciales et du gouvernement de l'Australie (SBS s.d.), [traduction] « [d]e nombreux » demandeurs d'asile déboutés sont pris dans « de longues batailles judiciaires » après leur retour au Sri Lanka (SBS 2 déc. 2019). Le DFAT de l'Australie explique que le Département du procureur général du Sri Lanka avait ordonné que [traduction] « tous les passagers d'opérations de passage de clandestins » soient accusés d'avoir enfreint la loi sur les immigrants et les émigrants et comparaissent en cour à l'endroit où l'infraction a été commise, ce qui implique des « coûts juridiques et de transport » pour les personnes visées (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.35). La même source souligne en outre que [traduction] « la plupart des personnes » accusées en vertu de la loi sur les immigrants et les émigrants sont tenues de comparaître en cour tous les trois à six mois et que l'affaire judiciaire ne procède que lorsque « tous les membres d'une opération de passage de clandestins ont été trouvés », ce qui engendre « [d']importants retards » (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.35). L'article publié par le SBS le 2 décembre 2019 donne l'exemple d'une famille de demandeurs d'asile déboutés à Jaffna, qui doit se rendre devant la cour à Negombo tous les six mois depuis que ses membres ont été rapatriés à Colombo depuis l'île Christmas en 2014 (SBS 2 déc. 2019).

2.3 Surveillance

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant un journaliste, souligne que la surveillance dès le retour au Sri Lanka est une [traduction] « possibilité » si la personne est « réputée avoir fait quelque chose contre le gouvernement » (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 5.2.4). Selon le même rapport, qui cite des représentants du Département de l'immigration et de l'émigration du Sri Lanka, précise que la police locale serait informée qu'un demandeur d'asile débouté rapatrié avait été relâché et [traduction] « la personne serait surveillée, bien que la durée de cette surveillance puisse varier » (R.U. 20 janv. 2020, 42-43). Le DFAT de l'Australie déclare ce qui suit :

[traduction]

Le DFAT comprend que certaines personnes qui reviennent au pays, y compris dans le Nord et dans l'Est soupçonnées d'entretenir des liens avec les TLET, ont fait l'objet de surveillance par les autorités, impliquant des visites à domicile et des appels téléphoniques de la part de la CID. Le DFAT comprend que la plupart des personnes qui retournent au Sri Lanka, y compris les demandeurs d'asile déboutés, ne sont pas activement surveillées en permanence. Le DFAT n'est pas en mesure de vérifier si la surveillance, lorsqu'elle a lieu, vise précisément les anciens cadres des TLET. Le DFAT n'est pas au courant de situations où des personnes retournées au Sri Lanka, y compris des demandeurs d'asile déboutés, ont été traitées d'une façon qui mettait leur sécurité en péril (Australie 4 nov. 2019, paragr. 5.46).

L'OSAR, citant un entretien avec un prêtre catholique travaillant dans le Nord du Sri Lanka réalisé le 24 octobre 2019, précise que les personnes rentrant de pays occidentaux sont dans une situation « "plus compliquée" » que celles qui reviennent d'Inde ou des États du Golfe (OSAR 10 avr. 2020, 10). La même source fait en outre observer que ces personnes qui retournent dans leur pays sont « placées sous surveillance » et que les autorités chercheraient à déterminer si elles ont entretenu des liens avec les TLET; si les liens sont confirmés, la personne serait alors placée sous « surveillance accrue » (OSAR 10 avr. 2020, 10).

Le maître de conférences a déclaré qu'il n'y a eu [traduction] « aucun changement » au traitement réservé aux demandeurs d'asile déboutés arrivant de pays occidentaux à la suite de l'élection présidentielle de novembre 2019 (maître de conférences 17 juill. 2020). La même source ajoute que,

[traduction]

de janvier 2015 à novembre 2019, aucun [membre] de « groupes » [particuliers] n'a été expressément ciblée à l'arrivée, à ma connaissance. Toutefois, depuis l'élection du nouveau prédisent en novembre 2019, il y a assurément un examen et une surveillance accrus et, effectivement, un harcèlement (frôlant parfois l'arrestation) de groupes spécifiques de personnes qui ont critiqué publiquement les abus commis dans le passé par la police, par les forces armées (y compris dans le sillage des attentats de Pâques) et par les proches de la famille Rajapaksa, y compris les membres de la famille Rajapaksa eux-mêmes.

Cependant, à ma connaissance, les personnes assujetties au traitement décrit ci-dessus ont jusqu'ici été des personnes qui ont résidé tout le long dans le pays et non des personnes qui revenaient de l'étranger. Parmi les groupes qui subissent des pressions, notons les militants des droits de la personne, les journalistes, le personnel des ONG peu importe leur origine ethnique et leurs croyances religieuses. Un certain nombre de « suspects » cinghalais et musulmans sont « surveillés », en plus de quelques militants tamouls également. Toutefois, la plupart des personnes « surveillées » sont de Colombo et des environs et seules quelques-unes viennent des anciennes régions touchées par le conflit dans le Nord et l'Est du pays (maître de conférences 17 juill. 2020).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens. Pour obtenir des renseignements au sujet du traitement réservé aux citoyens tamouls avant et après l'élection présidentielle de novembre 2019, veuillez consulter la réponse à la demande d'information LKA200298 publiée en août 2020.

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant un entretien avec la Commission des droits de la personne (Human Rights Commission - HRC) du Sri Lanka réalisé le 1er octobre 2019, souligne que la liberté d'expression et d'association s'est [traduction] « élargie » depuis octobre 2015 (R.U. 20 janv. 2020, 40). Freedom House fait observer que [traduction] « [l]e retour au pouvoir attendu des Rajapaksa aurait également porté atteinte à la liberté d'expression dès la fin de 2018, et les allégations de menaces et de harcèlement à l'endroit des présumés opposants à la nouvelle administration se sont multipliées après l'élection de 2019 » (Freedom House 2020). Pour obtenir des renseignements au sujet de la situation politique actuelle, veuillez consulter la réponse à la demande d'information LKA200300 publiée en août 2020.

3. Traitement réservé aux membres de la famille de personnes qui ont quitté le Sri Lanka et demandé l'asile

Le rapport sur la mission d'enquête du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant un militant des droits de la personne, signale que [traduction] « [c]ertains membres de la famille peuvent être harcelés si la police cherche une personne qui a fui à l'étranger » (R.U. 20 janv. 2020, 38). Selon le DFAT de l'Australie, [traduction] « la proche famille d'anciens membres de haut niveau des TLET qui sont recherchés par les autorités sri-lankaises peut faire l'objet de surveillance » (Australie 4 nov. 2019, paragr. 3.83). Le maître de conférences a déclaré que les membres de la famille de personnes qui ont demandé l'asile à l'étranger n'ont [traduction] « absolument aucun problème », « sauf probablement dans quelques cas seulement » où le demandeur d'asile à l'étranger entreprend une « campagne publique médiatisée » demandant l'imputabilité des responsables d'injustices passées (maître de conférences 17 juill. 2020). La même source a donné l'exemple du père d'un de cinq étudiants tamouls qui ont été victimes d'exécutions extrajudiciaires à Trincomalee en 2006 [1], qui s'est enfui au Royaume-Uni et qui a entrepris une campagne publique demandant l'identification des auteurs; les membres de la famille du père au Sri Lanka ont subi [traduction] « d'intenses pressions » de la part des autorités, pour inciter le père à mettre un terme à sa campagne (maître de conférences 17 juill. 2020).

Le Projet international de vérité et de justice – Sri Lanka (International Truth and Justice Project – Sri Lanka – ITJP) [2], citant son entretien avec 26 demandeurs d'asile tamouls de sexe masculin au Royaume-Uni, soit [traduction] « typiquement » d'anciens membres des TLET ayant de la famille dans le Vanni, ancien bastion des TLET, souligne que, après le départ des demandeurs d'asile, les membres de leur famille avaient [traduction] « reçu à répétition la visite » de policiers en civil, « principalement », et de représentants du renseignement militaire ou du Département de la sécurité civile (Civil Security Department) dans certains cas (ITJP 24 oct. 2019). Certains des demandeurs d'asile ont déclaré à l'ITJP que des membres de leur famille s'étaient fait montrer des photos sur lesquelles on voyait les demandeurs d'asile participant à des manifestations à Londres (ITJP 24 oct. 2019). Le rapport du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni, citant un journaliste, explique que des membres de la diaspora qui ont participé à des manifestations ont été photographiés par des personnes à l'intérieur du haut-commissariat du Sri Lanka (R.U. 20 janv. 2020, paragr. 5.2.1). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignement allant dans le même sens.

L'ITJP, citant ses entretiens avec les demandeurs d'asile, explique que durant les perquisitions menées chez les demandeurs d'asile, les autorités sri-lankaises avaient [traduction] « agressé » et « menacé » leurs épouses, et avaient saisi leurs cartes d'identité; des parents ont été « agressés » et « [c]ertaines familles élargies » avaient été questionnées sur les moyens pris par le demandeur d'asile pour fuir à l'étranger (ITJP 24 oct. 2019). La même source signale que certains membres des familles avaient tenté de signaler ces incidents à la police, qui avait refusé de consigner la plupart de leurs plaintes (ITJP 24 oct. 2019). Cinq des personnes questionnées en entretien par l'ITJP ont affirmé que leurs familles avaient tenté de porter plainte à la Commission des droits de la personne du Sri Lanka, mais que trois d'entre elles s'étaient fait dire de présenter d'abord un rapport de police, ce que la police a refusé de fournir (ITJP 24 oct. 2019). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Une source qui travaille pour une organisation internationale de la diaspora tamoule a précisé, dans une communication écrite envoyée à l'OSAR, que l'organisation était au courant de cas de personnes au Royaume-Uni dont les proches au Sri Lanka avaient reçu de l'argent de l'étranger et avaient été interrogés par les autorités (OSAR 10 avr. 2020, 11). Selon la même source, « des interrogatoires et des actes de harcèlement » à l'encontre des proches de Sri-Lankais à l'étranger ont augmenté depuis [l'élection présidentielle] de novembre 2019 (OSAR 10 avr. 2020, 11). Le même rapport, citant une source active dans le domaine des droits de la personne au Sri Lanka, fait observer que les membres de la diaspora qui envoient de l'argent au Sri Lanka sont « placés sous surveillance » et que les bénéficiaires peuvent se voir accorder une « attention particulière » de la part des autorités (OSAR 10 avr. 2020, 11). La même source donne l'exemple d'un groupe de journalistes et de militants tamouls qui ont été interrogés au printemps 2020 sur les fonds qu'ils avaient reçus de membres de la diaspora (OSAR 10 avr. 2020, 11). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

L'OSAR, citant la source qui travaille pour une organisation internationale de la diaspora tamoule, explique que les « menaces » qui pèsent sur un membre de la diaspora qui envoie de l'argent au Sri Lanka dépend du « regard » porté par les autorités sri-lankaises quant à la destination des fonds; le soutien financier de la diaspora est lié à diverses causes, y compris les enquêtes sur les crimes de guerre et aux projets humanitaires pour soutenir la population tamoule (OSAR 10 avr. 2020, 11). D'après la même source, qui cite un prêtre catholique travaillant dans le Nord du Sri Lanka, il est « très probable » que les autorités sri-lankaises interprètent les activités de collecte de fonds menées par la diaspora à l'étranger au profit des victimes de la guerre civile comme une tentative de reconstituer les TLET (OSAR 10 avr. 2020, 11). Le DFAT de l'Australie explique que, durant la guerre, certains Sri-Lankais à l'étranger avaient fourni de l'argent, des armes et [traduction] « d'autre matériel de soutien » aux TLET et que le gouvernement du Sri Lanka « demeure d'avis que des éléments de la diaspora tamoule restent attachés à l'idée d'un État tamoul distinct » (Australie 4 nov. 2019, paragr. 3.79-3.80).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Human Rights Watch (HRW) signale que, en juillet 2019, 12 membres de l'Unité d'intervention spéciale (Special Task Force – STF) de la police et un policier ont été acquittés de l'exécution de cinq étudiants tamouls le 2 janvier 2006, appelés les [traduction] « "Cinq de Trinco" », en raison de « "[l']absence d'éléments de preuve" » (HRW 8 juill. 2019). Selon la même source, huit témoins n'ont pas comparu en cour et l'affaire était [traduction] « plombée par de graves menaces à l'endroit des survivants et des témoins, qui ont obligé ces personnes et leurs proches à fuir le Sri Lanka » (HRW 8 juill. 2019). La même source fait en outre observer que le père d'une des victimes, et les membres de sa famille, avaient reçu des menaces de mort et s'étaient ultérieurement fait octroyer l'asile au Royaume-Uni (HRW 8 juill. 2019).

[2] Le Projet international de vérité et de justice – Sri Lanka (International Truth and Justice Project – Sri Lanka – ITJP) est [traduction] « administré par la Fondation pour les droits de la personne en Afrique du Sud [Foundation for Human Rights in South Africa], sous la direction de la spécialiste de la justice transitionnelle Yasmin Sooka » (ITJP s.d.). L'ITJP [traduction] « recueille et conserve des éléments de preuve en vue d'assurer la crédibilité d'un futur processus judiciaire, et intervient aussi pour aider les communautés victimes au Sri Lanka qui demandent une reddition de comptes » (ITJP s.d.). La Fondation pour les droits de la personne (Foundation for Human Rights – FHR) est une [traduction] « institution d'octroi de subventions appuyant les organisations de la société civile en Afrique du Sud, et dans la région, aux fins de la mise en œuvre de programmes assurant la promotion et la protection des droits de la personne » (FHR s.d.). Yasmin Sooka a été nommée en juillet 2010 à un comité d'experts de trois membres qui conseille le secrétaire général des Nations Unies sur la reddition de comptes quant aux crimes de guerre commis durant les dernières étapes de la guerre au Sri Lanka; elle est également l'autrice de rapports sur le Sri Lanka (IFIT s.d.).

Références

Australie. 4 novembre 2019. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: Sri Lanka. [Date de consultation : 14 juill. 2020]

Freedom House. 2020. « Sri Lanka ». Freedom in the World 2020. [Date de consultation : 27 juill. 2020]

Foundation for Human Rights (FHR). S.d. « Overview ». [Date de consultation : 17 juill. 2020]

The Guardian. 18 juillet 2018. Ben Doherty. « Wife's Despair as Asylum Seeker Deported by Australia Is Arrested in Sri Lanka ». [Date de consultation : 16 juill. 2020]

Human Rights Watch (HRW). 8 juillet 2019. « Sri Lanka: No Justice for 'Trinco 5' ». [Date de consultation : 21 juill. 2020]

Institute for Integrated Transitions (IFIT). S.d. « Yasmin Sooka ». [Date de consultation : 17 juill. 2020]

International Trust and Justice Project – Sri Lanka (ITJP). 24 octobre 2019. « Press Release: Sri Lankan Security Agencies Assaulting Families of Asylum Seekers in UK ». [Date de consultation : 16 juill. 2020]

International Trust and Justice Project – Sri Lanka (ITJP). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 16 juill. 2020]

Maître de conférences, University of Jaffna. 17 juillet 2020. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR). 10 avril 2020. Sri Lanka : Situation politique actuelle, surveillance de la diaspora, collecte de fonds à l'étranger pour les victimes de la guerre. [Date de consultation : 15 juill. 2020]

Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR). S.d. « Protecting Refugees – Maintaining Human Dignity ». [Date de consultation : 15 juill. 2020]

Royaume-Uni (R.U.). 20 janvier 2020. Home Office. Report of a Home Office Fact-Finding Mission to Sri Lanka. [Date de consultation : 14 juill. 2020]

Special Broadcasting Service (SBS). 2 décembre 2019. Aaron Fernandes. « This Is What Happened to the Tamil Asylum Seekers Australia Sent Back to Sri Lanka ». [Date de consultation : 14 juill. 2020]

Special Broadcasting Service (SBS). 19 juillet 2018. « Refugee Deported from Australia Released After Sri Lanka Arrest ». [Date de consultation : 16 juill. 2020]

Special Broadcasting Service (SBS). S.d. « FAQs ». [Date de consultation : 15 juill. 2020]

Sri Lanka. 1949 (version modifiée en 2006). Immigrants and Emigrants Act. [Date de consultation : 14 juill. 2020]

Tamil Guardian. 16 février 2019. « Deported Asylum Seekers Detained in Colombo ». [Date de consultation : 16 juill. 2020]

Autres sources consultées

Sources orales : Centre for Policy Alternatives (CPA); chercheur dans une université de Brunei Darussalam dont les travaux de recherche s'intéressent aux Sri-Lankais qui retournent dans leur pays; National Peace Council of Sri Lanka; Organisation for Elangai Refugees Rehabilitation (OfERR (Ceylon)).

Sites Internet, y compris :Al Jazeera; Amnesty International; Asian News International; Asylum Research Centre; The Conversation; ecoi.net; États-Unis – Department of State; Groundviews; Nations Unies – Refworld; Network of Researchers in International Affairs (Noria); The New Humanitarian; Sri Lanka – Office of the Cabinet of Ministers.

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