Chine : information sur le mouvement des « Crieurs » (« Shouters »), y compris sur ses origines et ses fondateurs, ses croyances fondamentales, ses activités et le traitement réservé à ses membres par les autorités (2017-octobre 2019) [CHN106373.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Aperçu

Selon des sources, le terme [traduction] « Crieurs » [aussi traduit par « Yellers » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121) ou «  callers » (Yang avec Pettit 2018, 60)] fait renvoi à un mouvement religieux en Chine (professeur distingué 28 sept. 2019; Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56; Yang avec Pettit 2018, 60). Dans un chapitre sur les religions interdites dans le livre intitulé Atlas of Religion in China: Social and Geographical Contexts, les auteurs, Fenggang Yang avec J.E.E. Pettit, expliquent que le nom [traduction] « Crieurs » est employé pour désigner [traduction] « une panoplie diffuse d'adeptes qui a été regroupée ensemble par les responsables du gouvernement » et qui est associée au mouvement Église locale dirigé par Watchman Nee et Witness Lee (Yang avec Pettit 2018, 60). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le directeur du Centre d’études sur les nouvelles religions (Center for Studies on New Religions - CESNUR), un sociologue des religions qui est également rédacteur en chef de Bitter Winter, un magazine électronique basé en Italie [version française de Bitter Winter] « sur la liberté religieuse et les droits humains en Chine » qui s’intéresse tout particulièrement aux « persécutions contre toutes les religions en Chine » (Bitter Winter s.d.a), a de même expliqué que le terme est [traduction] « un surnom populaire accolé aux groupes protestants chinois conservateurs qui s’inscrivent dans la tradition des prédicateurs chinois Watchman Nee […] et Witness Lee » (directeur 24 sept. 2019).

Selon des sources, le terme « Crieurs » a une connotation [traduction] « péjorative » (Yang avec Pettit 2018, 60; professeur distingué 28 sept. 2019). Dans un article sur Witness Lee et l’Église locale paru dans le Journal of Church and State, on peut lire que le nom de Crieurs est utilisé par ses détracteurs pour décrire le groupe (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 188). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un professeur distingué d’histoire religieuse américaine de la Baylor University à Waco, au Texas, qui étudie les mouvements religieux et le christianisme en Chine, et qui est aussi membre du conseil d'administration de CESNUR et a publié un livre avec son directeur, a signalé que le terme [traduction] « sert à étiqueter divers groupes, mais [qu']aucun de ces groupes ne l’utilise pour se décrire lui-même » (professeur distingué 28 sept. 2019). De même, Yang et Pettit affirment que le nom est [traduction] « employé par l’État-parti […] pour désigner divers groupes qui suivent de près ou non les enseignements de Witness Lee » (Yang avec Pettit 2018, 60). Selon le directeur du CESNUR, le terme est utilisé en Chine par [traduction] « d’autres chrétiens hostiles au mouvement », les médias et le Parti communiste chinois (Chinese Communist Party - CCP) (directeur 24 sept. 2019).

2. Origines et fondateurs

D’après des sources, les Crieurs sont issus du mouvement lancé en Chine par « Watchman Nee » [Tuosheng Ni (倪柝) 1903-1972] (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195; professeur distingué 28 sept. 2019; Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56), dans les années 1920 (professeur distingué 28 sept. 2019; Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121). Tel qu'expliqué ci-après, des sources signalent que le mouvement de Watchman Nee est connu sous différents noms, notamment :

  • le [version française de Bitter Winter] « Petit troupeau » (Little Flock) (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56; Bitter Winter 15 janv. 2019; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121);
  • la [traduction] « Salle d’assemblée » (Assembly Hall) (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121) ou la « Church Assembly Hall » (Bitter Winter 15 janv. 2019);
  • [traduction] « l’Assemblée chrétienne » (Christian Assembly) (directeur 24 sept. 2019);
  • [traduction] « l’Église locale » (Local Church) ou « les Église locales » (Local Churches) (directeur 24 sept. 2019; Yang avec Pettit 2018, 60; Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 188).

Selon des sources, [après avoir séjourné pendant un certain temps en Asie du Sud-Est, notamment à Taïwan (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121; Yang avec Pettit 2018, 61)], « Witness Lee » [Changshou ou Changsou Li (李常受), 1905-1997] a fondé une ramification du mouvement de Watchman Nee aux États-Unis en 1962 (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121; Bitter Winter s.d.b), les deux branches se désignant sous le nom [version française de Bitter Winter] « [d’]Église locale » [地方教會] (Bitter Winter s.d.b). Des sources décrivent Witness Lee comme [traduction] « l’élève » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56) ou [traduction] « le collègue » de Watchman Nee (Bitter Winter s.d.b; Yang avec Pettit 2018, 61).

D’après un rapport d’information sur la Chine du ministère des Affaires étrangères et du Commerce (Department of Foreign Affairs and Trade - DFAT) de l’Australie, le mouvement fondé par Witness Lee a été introduit en Chine en 1979 (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56). De même, selon le Cambridge History of Christianity, un ouvrage en neuf volumes visant à faire [traduction] « un exposé chronologique complet du développement du christianisme dans toutes ses facettes » et partout dans le monde (Cambridge University Press s.d.), le mouvement de Witness Lee s’est établi en Chine [traduction] « à la fin des années 1970 » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121).

Selon Bitter Winter, [traduction] « l’Assemblée » (召會) était le nom utilisé par Witness Lee en Chine pour désigner la branche de l’Église locale qui suit ses enseignements (Bitter Winter n.d.b). [traduction] « [L]’Église locale » était le nom utilisé en Occident [ou aux États-Unis] (Bitter Winter s.d.b; Yang avec Pettit 2018, 61). Dans le rapport du DFAT de l’Australie, on peut lire que le groupe est aussi connu sous les noms de [traduction] « "Salle d’assemblée" » ou « "Assemblées" » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56). Des sources ajoutent qu'en Chine, le groupe de Witness Lee est aussi connu sous le nom de [traduction] « "Mouvement de recouvrement du Seigneur" » (Lord's Recovery Movement) (directeur 24 sept. 2019) ou de [traduction] « Ministère de la Source vive » (Living Stream Ministry, LSM) aux États-Unis (Yang avec Pettit 2018, 61). Cependant, le directeur du CESNUR a affirmé que Watchman Nee croyait que [traduction] « les confessions étaient responsables de la corruption du christianisme et [que] ses adeptes ne devraient avoir aucun autre nom que celui de "chrétiens" » (directeur 24 sept. 2019). La même source a expliqué ce qui suit :

[traduction]

À la fin des années 1970, le groupe [de Watchman Nee/Witness Lee] était connu sous le nom « [d']Église locale » en Occident et sous divers noms en Chine. L’appellation « Église locale » était aussi utilisée en Chine, mais en faisant la distinction entre « l’ancienne Église locale » (Laodifangjiaohui, 老地方教会), qui acceptait les enseignements de Watchman Nee, mais rejetait ceux de Witness Lee, et « la nouvelle Église locale » (Difangjiaohui, 地方教会), c’est-à-dire l’organisation de Witness Lee (directeur 24 sept. 2019).

Selon des sources, le nom « Crieurs » a été utilisé pour faire référence à [traduction] « plusieurs factions différentes » (professeur distingué 28 sept. 2019) ou [traduction] « librement appliqué à divers groupes partout en Chine » (Yang avec Pettit 2018, 61). Le professeur distingué a signalé que [traduction] « le terme "Crieurs" est apparu au début des années 1980 » et a ajouté que

[traduction]

lorsque le gouvernement s’est mis à populariser le terme en 1983 durant les arrestations massives et les procès contre les chefs des maisons-églises, il était utilisé sans discernement contre les chefs d’un éventail de « confessions » différentes de maisons-églises qui se formaient parmi leurs membres (professeur distingué 28 sept. 2019).

D’après Bitter Winter, [version française de Bitter Winter] « [e]n Chine, les termes Église locale et Shouters (les Crieurs) sont souvent utilisés comme des synonymes » (Bitter Winter s.d.b). Toutefois, Yang et Pettit soulignent que les [traduction] « congrégations de l’Église locale se sont activement distanciées des Crieurs et des actes qui leur sont attribués » (Yang avec Pettit 2018, 60).

D’après la Cambridge History of Christianity, le groupe de Witness Lee [traduction] « s’est établi le long de la côte Sud-Est de la Chine et s’est propagé dans un certain nombre de provinces » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121). Selon le professeur distingué, l’Église locale [traduction] « s’est étendue partout en Chine (sauf au Xinjiang et au Tibet) » (professeur distingué 28 sept. 2019).

3. Croyances et pratiques fondamentales

Selon des sources, le terme [traduction] « Crieurs » fait renvoi à une pratique qui consiste à célébrer le culte à voix haute, pratique instaurée par Witness Lee (professeur distingué 28 sept. 2019; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121). D’après la Cambridge History of Christianity, cette pratique de [traduction] « "crier" » se veut « une forme de repentir émotif et public de ses péchés en se confessant haut et fort » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121). Selon des sources, la pratique consiste [traduction] « à clamer haut et fort "Oh, Seigneur Jésus" » (professeur distingué 28 sept. 2019) ou « "faire appel au nom du Seigneur Jésus" » lors des prières (Yang avec Pettit 2018, 60). Dans le rapport du DFAT de l’Australie, il est expliqué que Witness Lee [traduction] « croyait que le don des langues pouvait être enseigné et que le salut pouvait être obtenu en disant "Oh Seigneur" trois fois » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56). La même source ajoute que les croyants [traduction] « tapent des pieds tout en criant pendant la célébration du culte » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56).

D’après le professeur distingué, l’Église locale [traduction] « enseigne un système de croyances fondamentalistes » et prône « une théologie chrétienne protestante orthodoxe qui privilégie le partage des éléments de la communion en signe d’acceptation et de camaraderie » (professeur distingué 28 sept. 2019). De même, l’article du Journal of Church and State affirme que Watchman Nee a mis l’accent sur la communauté au sein du réseau des groupes de l’Église locale, mais ajoute que le [traduction] « fondamentalisme de Nee est très différent du fondamentalisme américain, qui accorde beaucoup plus de place aux croyants individuels, aux pasteurs individuels et aux congrégations individuelles » (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 196). La source explique en outre que le fondateur Watchman Nee a [traduction] « adapté les enseignements protestants occidentaux au contexte culturel de la Chine » et qu'il a [traduction] « contesté des groupes protestants américains traditionnels » (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 188).

Selon des sources, le groupe croit qu'il ne devrait avoir qu'une église par ville (Yang avec Pettit 2018, 60; Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195) ou [traduction] « dans chaque localité » (professeur distingué 28 sept. 2019). Le professeur distingué a signalé que [traduction] « Watchman Nee rejetait la division des protestants en confessions » (professeur distingué 28 sept. 2019). L’article paru dans le Journal of Church and State explique que Watchman Nee [traduction] « en a appelé à un réseau peu structuré de congrégations indépendantes chacune supervisée par un conseil des aînés, […] chaque ville ou village n’[a] qu’une seule église et un seul conseil des aînés; d’où le nom d'Église locale » (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195).

D’après le professeur distingué, l’église de Witness Lee [traduction] « prône une approche de l’étude biblique fondée sur le dispensationalisme qui divise […] l’histoire biblique en sept périodes. Selon cette doctrine, nous vivons dans la sixième période (l’ère de la grâce), mais passerons sous peu à la suivante, l’ère du royaume » (professeur distingué 28 sept. 2019). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Dans le rapport du DFAT de l’Australie, on peut lire que Witness Lee a créé une [traduction] « "Bible du Recouvrement" » en annotant la version standard de la Bible et que le mouvement est aussi connu sous le nom de « "[l’]Église du Recouvrement" » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56). Le professeur distingué a précisé que Witness Lee

[traduction]

enseignait que, depuis Martin Luther, génération après génération, l’église se voyait « restaurée » à sa nature et à ses pratiques apostoliques. Il a instauré plusieurs pratiques qu’il avait « recouvrées » grâce à son étude des écritures, y compris celle « [d’]invoquer le nom du Seigneur » et « la lecture de la Bible comme prière et quelques nouveaux termes théologiques tels que le "mélange" [mingling] » (professeur distingué 28 sept. 2019).

4. Membres, structure et activités

Selon la Cambridge History of Christianity, le mouvement des Crieurs [traduction] « a conquis de nombreux fidèles en Chine dans les années 1980 » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121). Le rapport du DFAT de l’Australie précise que le mouvement des Crieurs comptait [traduction] « jusqu’à 200 000 adeptes à l’échelle de la Chine » dans les années 1980 (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.56). D’après la Cambridge History of Christianity, dans les années 1980, le mouvement des Crieurs [traduction] « était déjà présent dans la plupart des provinces de la Chine, particulièrement dans le Zhejiang, le Henan, le Fujian et le Guangdong » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121-122). La même source ajoute que [traduction] « Lushan, une petite ville provinciale du Henan, est devenue leur bastion », avec des dizaines de milliers de croyants « parmi une population d’un peu plus de 100 000 habitants » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 122). Le professeur distingué a déclaré que [traduction] « [n]ous pensons généralement que l’Église locale compte à peu près un million de membres, mais -- comme dans le cas d’autres groupes -- les statistiques concernant la religion sont un secret d’État » et de tels chiffres « sont extrêmement difficiles à obtenir en Chine » (professeur distingué 28 sept. 2019). D'après l'article paru dans le Journal of Church and State, qui cite un entretien que les auteurs ont mené avec des chefs du LSM en 2011, ceux-ci ont signalé qu'il y avait environ 4 000 Églises locales en dehors de la Chine et de 1 200 à 1 500 à l'intérieur du pays (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 188). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens, ni aucun renseignement additionnel sur le nombre de fidèles du mouvement des Crieurs ou de l’Église locale.

Dans le rapport du DFAT de l’Australie, il est signalé que, durant les années 1980, le mouvement des Crieurs [traduction] « s’est scindé en plusieurs groupes » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.57). De même, Bitter Winter explique [traduction] « [qu']en raison de la persécution et d’autres facteurs, le mouvement en Chine s’est fragmenté en plusieurs branches différentes, et les groupes appelés "Shouters" ne font pas nécessairement partie du même réseau que ceux connus comme "Églises locales" en Occident » (Bitter Winter s.d.b).

Le directeur du CESNUR a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Il n’y a pas de leadership centralisé en Chine, à ce que je sache, bien que certains groupes (mais certainement pas tous) acceptent l’idée que le siège à Anaheim en Californie et sa section à Taïwan, responsable de l’Asie de l’Est, ont une fonction de leadership pour les fidèles qui reconnaissent que les enseignements de Watchman Nee et de Witness Lee sont normatifs (directeur 24 sept. 2019, en italique dans l'original).

Selon l’article du Journal of Church and State, chaque église a un conseil des aînés et il n’y a pas de clergé officiel (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195). La source explique en outre ce qui suit :

[traduction]

Un groupe de collègues de l’extérieur se déplaçait d’église en église pour prêcher à l’invitation des aînés d’une localité. Les collègues n’avaient aucun contrôle sur les groupes locaux sauf par le pouvoir de leur enseignement; il n’y avait pas d’administration centrale et les collègues ne recevaient pas de compensations financières fixes d’une église locale, d’églises ou d’une organisation centrale en particulier. La majorité des aînés avaient un emploi régulier et étaient des bénévoles au service de l’église (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 195-196).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens, ni aucun renseignement additionnel sur la structure du mouvement des Crieurs ou des Églises locales, ainsi que sur leurs activités en Chine.

5. Traitement réservé aux membres par les autorités

Selon des sources, les Crieurs figurent parmi les groupes religieux interdits par les autorités en Chine (É.-U. 21 juin 2019, 5; Yang avec Pettit 2018, 60-61). D’après le rapport du DFAT de l’Australie, les Crieurs font partie des groupes qui [traduction] « s’exposent au harcèlement, à la détention et à l’emprisonnement » parce qu’ils se livrent à « des pratiques jugées superstitieuses ou sectaires » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.54, 3.55). Le rapport ajoute que [traduction] « [l]e code pénal de la République populaire de la Chine prévoit des peines allant jusqu’à sept ans d’emprisonnement pour les personnes qui se servent de "sectes superstitieuses, de sociétés secrètes ou d’organisations religieuses maléfiques" pour miner les lois ou les règlements administratifs de l’État » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.54). L’article du Journal of Church and State fait remarquer que les groupes religieux non enregistrés sont considérés comme des sectes illégales et que [traduction] « [l]’étiquette de secte est la forme de censure la plus vigoureuse pour les groupes religieux non officiels et peut entraîner des peines sévères; typiquement, les groupes religieux classés parmi les sectes sont dissous de force et leurs chefs sont emprisonnés » (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 193-194). La source ajoute que pour l’Église locale, l’étiquette de secte a mené à des [traduction] « sanctions plus sévères » et qu'elle a été prise pour cible plus fréquemment pour cette raison (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 204). Yang et Pettit affirment de même que les groupes désignés comme des sectes malveillantes ont été les [traduction] « cibles de mesures répressives systématiques et sévères » (2018, 60).

Des sources signalent que le mouvement des Crieurs a d’abord été frappé d’interdiction en 1983 (directeur 24 sept. 2019; Cambridge History of Christianity mars 2008, 121), avant que la première liste officielle de xie jiao [terme souvent traduit par [traduction] « sectes », mais qui peut aussi vouloir dire « hétérodoxie » (Zimmerman-Liu and Wright 10 avr. 2015, 192)] ne soit adoptée en 1995 (directeur 24 sept. 2019). Des sources rapportent qu'au début des années 1980, le PCC a [traduction] « ciblé » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.57) ou « caractérisé » (Yang avec Pettit 2018, 61) les Crieurs à titre de « contre-révolutionnaires » (Australie 21 déc. 2017, paragr. 3.57; Yang avec Pettit 2018, 61). Selon des sources, des chefs locaux ont été arrêtés et condamnés à de longues peines de prison (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121; Yang avec Pettit 2018, 61), mais la Cambridge History of Christianity ajoute que [traduction] « l’interdiction n’a pas empêché [le groupe] de prendre de l’ampleur clandestinement » (Cambridge History of Christianity mars 2008, 121).

Le professeur distingué a déclaré que [traduction] « [d]es adeptes de l’Église locale à l’extérieur de la Chine travaillent depuis de nombreuses années pour convaincre le gouvernement chinois de soustraire leurs coreligionnaires en Chine à l’étiquette de "Crieurs" », en ajoutant que « [d]epuis trois ans, lorsque le gouvernement publie sa liste de xie jiao, les Crieurs y figurent encore, mais tous les renvois à Witness Lee et à Watchman Nee ont été supprimés de la description » (professeur distingué 28 sept. 2019). Le Journal of Church and State affirme également que les chefs du LSM n'ont pas réussi à négocier leur retrait de la liste des sectes (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 205-206).

Freedom House affirme que, depuis le début de 2014, [traduction] « les autorités chinoises ont intensifié leurs efforts en vue de réprimer, et même d’éradiquer, diverses sectes quasi chrétiennes ayant des liens ténus avec les principaux courants du protestantisme », y compris les Crieurs, ce qui a mené à la détention et à l’emprisonnement de « [c]entaines » de membres du clergé et de simples fidèles de ces « "religions hétérodoxes" » (Freedom House févr. 2017, 48, 61). Cependant, selon le directeur du CESNUR,

[traduction]

[d]epuis quelques années, le siège de l’Église locale en Californie et à Taïwan tente d’ouvrir un dialogue avec les autorités chinoises en faisant valoir qu’il est fort possible qu’il existe, parmi les groupes désignés sous le nom de Crieurs, des mouvements dont les enseignements sont bizarres et hérétiques, mais que les groupes en contact avec l’administration centrale internationale sont orthodoxes et respectueux des lois, et qu’il ne faudrait pas les appeler les Crieurs, mais plutôt l’Église locale ou le Mouvement de recouvrement du Seigneur (directeur 24 sept. 2019).

Sans fournir de précisions additionnelles, le directeur du CESNUR a ajouté que ce dialogue [traduction] « a donné quelques résultats limités » (directeur 24 sept. 2019). L’article du Journal of Church and State précise que des chefs du LSM ont rencontré des [traduction] « responsables locaux chargés de s’occuper des "Crieurs" » deux fois par année depuis 2005, qu’ils ont établi des relations avec des responsables politiques et qu’ils ont rencontré des dirigeants des « organisations supérieures de contrôle des religions » du système politique chinois, y compris l’Administration d’État des affaires religieuses (State Administration for Religious Affairs – SARA) (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 205). La même source affirme que le traitement du groupe par le gouvernement varie selon le lieu :

[traduction]

D’après des chefs du LSM, la différence dans le traitement local dépend des relations entre les autorités politiques locales, les chefs locaux du [Mouvement patriotique des trois autonomies (Three-Self Patriotic Movement – TSPM)] [1] et les chefs de l’Église locale. Les chefs du LSM signalent également que les attitudes du gouvernement envers le groupe tendent à changer avec le temps (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 205).

D’après le directeur du CESNUR, [traduction] « [c]ertains groupes ont échappé à la persécution et ont même ouvert un dialogue avec l’Église des Trois-Autonomies. Ces groupes maintiennent fermement qu’ils ne sont pas des "Crieurs". D’autres groupes, dont la théologie est très similaire, mais qui ne reconnaissent pas nécessairement l’autorité du siège en Californie, continuent d’être persécutés » (directeur 24 sept. 2019). De même, Yang et Pettit font remarquer que de [traduction] « nombreuses congrégations de l’Église locale qui suivent délibérément les enseignements et les pratiques de Witness Lee mènent leurs activités dans la zone grise en étant harcelées seulement occasionnellement par la police » (Yang avec Pettit 2018, 61). Selon le directeur du CESNUR, une fois que les autorités désignent une communauté comme faisant partie des traditions de Watchman Nee et de Witness Lee, la question de savoir si une personne est [traduction] « persécutée comme "Crieur" » « dépend souvent [de] facteurs locaux et, dans une large mesure, imprévisibles » (directeur 24 sept. 2019). L’article du Journal of Church and State explique qu’aux [traduction] « niveaux inférieurs du système politique, les responsables ont eu des attitudes plus partagées et, dans certaines régions, ils ont toléré ou même accepté les activités du groupe » (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 205). La même source ajoute que les chefs religieux croient que pour [traduction] « laver le nom du groupe », ils auront besoin de soutien pour retirer le groupe de la liste des sectes, mais souligne que

[d]’ici là, en Chine, le groupe sera soumis aux vicissitudes de la politique du CCP et ses membres devront vivre sous la menace constante d’être arrêtés ou emprisonnés. Toutefois, à l’échelle communautaire, on peut s’attendre à ce que les congrégations de l’Église locale continuent de prospérer dans de nombreuses régions en Chine (Zimmerman-Liu et Wright 10 avr. 2015, 206).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] Pour des renseignements sur le Mouvement patritique des trois autonomies (Three-Self Patriotic Movement - TSPM), veuillez consulter la réponse à la demande d'information CHN106341 publiée en août 2019.

Références

Australie. 21 décembre 2017. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: People's Republic of China. [Date de consultation : 3 sept. 2019]

Bitter Winter. 15 janvier 2019. Entrevue de Massimo Introvigne avec Gordon Melton. « Local Church, Shouters, Assembly: Who's Who in the Watchman Nee Tradition ». [Date de consultation : 10 sept. 2019]

Bitter Winter. S.d.a « About ». [Date de consultation : 4 oct. 2019]

Bitter Winter. S.d.b. « Local Church ». [Date de consultation : 10 sept. 2019]

Cambridge History of Christianity: Volume 9, World Christianities C.1914-C. 2000. Mars 2008. Sous la direction de Hugh McLeod. Cambridge : Cambridge University Press. [Date de consultation : 10 sept. 2019]

Cambridge University Press. S.d. « Cambridge History of Christianity ». [Date de consultation : 3 oct. 2019]

Directeur, Center for Studies on New Religions (CESNUR). 24 septembre 2019. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

États-Unis (É.-U.). 21 juin 2019. Department of State. « China (Includes Tibet, Xinjiang, Hong Kong, and Macau) ». International Religious Freedom Report for 2018. [Date de consultation : 3 sept. 2019]

Freedom House. Février 2017. Sarah Cook. The Battle for China's Spirit: Religious Revival, Repression, and Resistance under Xi Jinping. [Date de consultation : 3 sept. 2019]

Professeur distingué. 28 septembre 2019. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Yang, Fenggang avec J.E.E. Pettit. 2018. « The Black Market: Illegal Religions ». Atlas of Religion in China: Social and Geographical Contexts. Boston : Brill.

Zimmerman-Liu, Teresa et Teresa Wright. 10 avril 2015. « What Is in a Name? A Comparison of Being Branded a Religious Cult in the United States and the People's Republic of China: Witness Lee and the Local Churches ». Journal of Church and State. Vol. 60, no 2. [Date de consultation :18 oct. 2019]

Autres sources consultées

Sources orales : chargé d’enseignement en théologie qui mène des recherches sur le christianisme en Chine; ChinaAid; professeur agrégé de science politique qui étudie la politique et la religion en Chine; professeur agrégé de sociologie qui mène des recherches sur la religion en Chine; professeur d’études religieuses qui mène des recherches sur les protestants en Chine; professeur de science politique qui étudie la relation entre le gouvernement de la Chine et les protestants; professeur de science politique qui mène des recherches à l’intersection de la religion et de la politique en Chine.

Sites Internet, y compris : Agence de presse Xinhua; Amnesty International; Apologetics Index; China Daily; ChinaSource; ecoi.net; États-Unis – Commission on International Religious Freedom, Congressional-Executive Commission on China; Factiva; Human Rights in China; Human Rights Watch; MercatorNet; Nations Unies – Refworld; Royaume-Uni – Home Office; Sixth Tone; South China Morning Post; The Woodrow Wilson International Center for Scholars; World Religions and Spirituality Project; World Watch Monitor.

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