Égypte : information sur la violence conjugale, y compris sur la violence commise par d'anciens partenaires; les lois et la protection offerte par l’État; les services de soutien offerts (2017-septembre 2019) [EGY106350.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Aperçu

Des sources signalent que la violence conjugale est un problème [traduction] « grave » (Freedom House 28 janv. 2019) ou [traduction] « important » en Égypte (É.-U. 13 mars 2019, 41). De même, selon un rapport sur l’International Men and Gender Equality Survey (IMAGES), une enquête réalisée par ONU Femmes et Promundo [1] entre avril 2016 et mars 2017, [traduction] « [l]’usage de la violence par les hommes envers les femmes est répandu, tant à la maison que dans les rues » (El Feki, et al. 16 mai 2017, 80). Dans un rapport publié en mai 2017, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce (Department of Foreign Affairs and Trade - DFAT) de l’Australie souligne que

[traduction]

[l]a violence conjugale est courante et généralement acceptée. En raison de l’absence de statistiques officielles comparatives, suffisantes et à jour, il est difficile d’évaluer les taux de violence conjugale, sa nature exacte et les tendances à cet égard. Toutefois, une étude de 2009 commandée par le Conseil national des femmes [National Council for Women - NCW] a révélé que plus de 60 p. 100 des répondantes mariées avaient subi une forme ou une autre de violence au cours de leur vie conjugale et qu’environ 28 p. 100 d’entre elles avaient été victimes d’un acte de violence physique. Selon l’étude, 80 p. 100 des répondants mariés ont reconnu avoir fait usage de violence à l’endroit de leur épouse, et 28 p. 100 ont reconnu avoir eu recours à la violence physique (Australie 19 mai 2017, paragr. 3.75).

D’après 28 Too Many [2],

[traduction]

[d]e nombreuses Égyptiennes sont victimes de violence familiale, le plus souvent aux mains de leur époux ou d’un de leurs parents, une situation que de nombreux Égyptiens, y compris des femmes, trouvent justifiable. D’après l’Enquête démographique et de santé de l’Égypte [Egypt Demographic and Health Survey ] de 2014 [EDHS 2014] [3], sur dix femmes de 15 à 49 ans ayant été mariées au moins une fois, trois ont subi une forme ou une autre de violence conjugale de la part de leur époux actuel. Parmi les femmes ayant participé à l’enquête, 25,2 p. 100 avaient subi de la violence physique, 18,8 p. 100 avaient subi de la violence psychologique et 4,1 p. 100 avaient subi de la violence sexuelle (28 Too Many avr. 2017, 34).

Dans un rapport publié en 2015 sur les résultats d’une enquête consacrée aux coûts économiques de la violence sexiste en Égypte, réalisée par le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et par l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (Central Agency for Public Mobilization and Statistics - CAPMAS) et le NCW de l’Égypte, on peut lire que [traduction] « 46 p. 100 des femmes ayant été mariées au moins une fois [et âgées] de 18 à 64 ans ont déclaré avoir subi au moins un épisode de violence physique, psychologique ou sexuelle commise par leur époux actuel ou le plus récent, et environ 24 p. 100 d’entre elles ont signalé que cet incident de violence s’était produit au cours des 12 mois précédant l’enquête » (Nations Unies et Égypte 2015, 76).

Des sources affirment que la violence conjugale est socialement admise en Égypte (Banque mondiale mai 2018, 34) ou qu’elle est [traduction] « généralement » (Equal Rights Trust déc. 2018, 205) ou [version française d’Euromed Droits] « largement » tolérée (Euromed Droits [nov. 2018], 2). D’après l’EDHS 2014, 35,7 p. 100 des femmes de 15 à 49 ans ayant été mariées au moins une fois estiment qu’il est justifié pour un homme marié de frapper ou de battre son épouse [traduction] « pour des raisons précises » (Égypte, et al.mai 2015, 286). Selon l’IMAGES, 53,4 p.100 des hommes et 32,8 p. 100 des femmes ayant participé à l’enquête souscrivaient à l’affirmation selon laquelle [traduction] « [i]l y a des fois où une femme mérite d’être battue », et 90 p. 100 des répondants et 70,9 p. 100 des répondantes convenaient « [qu’]une femme devrait tolérer la violence pour ne pas briser la famille » (El Feki, et al. 16 mai 2017, 47).

D’après le DFAT de l’Australie, la violence conjugale est [traduction] « couramment acceptée dans toutes les communautés religieuses et toutes les classes socio-économiques » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.85). Des sources signalent que les taux d’acceptation chez les femmes sont plus élevés dans les régions rurales et parmi les femmes moins scolarisées (Banque mondiale mai 2018, 34; Égypte, et al. mai 2015, 223), ainsi que parmi les femmes se trouvant dans le quintile le plus pauvre (Égypte, et al. mai 2015, 223). Le DFAT de l’Australie souligne que, [traduction] « en raison de facteurs socio-économiques, il peut être difficile pour une femme de fuir un mariage marqué par la violence. Tenter de fuir un tel mariage dans une région conservatrice ou rurale entraîne habituellement l’ostracisme de la famille et de la communauté » (Australie 19 mai 2017, paragr. 3.76).

1.1 Violence aux mains d’anciens partenaires

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur la violence subie aux mains d’anciens partenaires. L’enquête sur les coûts économiques de la violence sexiste en Égypte révèle que, d’après les EDHS de 2014 et 2015, [traduction] « plus de sept femmes sur dix ont identifié leur époux actuel ou leur ancien époux comme étant l’auteur d’au moins un épisode de violence physique qu’elles avaient subi depuis l’âge de 15 ans » (Nations Unies et Égypte 2015, 62).

2. Lois

Selon des sources, la constitution [révisée] de 2014 (28 Too Many avr. 2017, 31; Egypt Today 3 mars 2019) et le code criminel de 1937 [code pénal no 58 de 1937 (Nations Unies 2018, 10)] dans sa version modifiée [loi no 5 de 2018 (Nations Unies 2018, 10)] sont les mesures législatives qui protègent les femmes en Égypte (Egypt Today 3 mars 2019). L’article 11 de la constitution révisée de 2014 prévoit ce qui suit :

[traduction]

[…]

L’État protège les femmes contre toutes les formes de violence et veille à permettre aux femmes de trouver un juste équilibre entre les responsabilités familiales et les exigences professionnelles.

L’État assure une assistance et une protection à la maternité et à l’enfance, aux femmes chefs de famille ainsi qu’aux femmes aînées et aux plus démunies (Égypte 2014).

D’après 28 Too Many , la [traduction] « [c]onstitution de 2014 est la première à protéger les femmes contre la discrimination et la violence conjugale » (28 Too Many avr. 2017, 31).

Des sources signalent que les crimes contre les femmes sont répartis en deux catégories : les délits et les actes délictueux graves (Egypt Today 3 mars 2019; Equal Rights Trust déc. 2018, 69). Dans un article publié dans Egypt Today , une revue mensuelle égyptienne de langue anglaise, on peut lire que

[traduction]

[l]es délits, tels que les commentaires de nature sexuelle ou le harcèlement sexuel, sont perçus comme des crimes moins importants que les actes délictueux graves, et sont habituellement sanctionnés au moyen d’amendes et des peines d’emprisonnement de courte durée; de plus, les [procès] sont plus courts. Les actes délictueux graves, comme la mutilation génitale des femmes, l’enlèvement d’une femme ou l’agression sexuelle, entraînent des peines d’emprisonnement plus longues et un casier judiciaire permanent pour les personnes déclarées coupables (Egypt Today 3 mars 2019).

Des sources précisent qu’il n’y a pas de loi visant précisément la violence conjugale en Égypte (É.-U. 13 mars 2019, 41; Equal Rights Trust déc. 2018, 72; Nations Unies 2018, 9). Certaines sources affirment qu’un projet de loi sur la violence conjugale est présentement à l’étude (The Caravan 14 déc. 2017), mais que le parlement n’avait pas encore adopté ce projet de loi à la fin de 2018 (Equal Rights Trus t déc. 2018, 72). Euromed Droits [4] signale ce qui suit :

[version française d’Euromed Droits]

Depuis 2016, il y a eu plusieurs tentatives pour élaborer une loi pénalisant les violences à l’égard des femmes, y compris la violence domestique. Toutefois, bien que le Conseil national des femmes (NCW) et une coalition d’ONG aient rédigé différentes versions de cette loi, aucune n’a encore été présentée au Parlement. Début novembre 2018, la députée Nadia Henry a proposé un projet de loi sur la lutte contre les violences à l’égard des femmes. Ce projet comprend des articles sur la violence domestique et le viol conjugal. Le projet n’a pas encore été discuté au parlement (Euromed Droits [nov. 2018], 2).

Des sources précisent que le viol conjugal n’est pas criminalisé en Égypte (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.82; É.-U. 13 mars 2019, 41; Freedom House 28 janv. 2019).

Selon des sources, la loi no 10 de 2004 a établi les tribunaux de la famille (Egypt Today 3 mars 2019; Nations Unies 2018, 10), auxquels les femmes peuvent s’adresser pour obtenir une protection contre la violence conjugale (Egypt Today 3 mars 2019). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement sur le fonctionnement et l’efficacité de ces tribunaux.

Selon Euromed Droits, [version française d’Euromed Droits] « [a]ucune disposition légale ne garantit la protection des femmes battues en cas de violence domestique. Il n’existe aucune ordonnance restrictive, d’interdiction d’urgence ou de protection permettant aux autorités d’obliger un auteur de violence domestique de s’éloigner ou de rester à distance de sa victime » (Euromed Droits [nov. 2018], 4). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel.

2.1 Mise en œuvre

Des sources affirment que certaines dispositions du code criminel [code pénal] peuvent être invoquées pour réduire les peines des contrevenants dans les affaires de crimes ou de meurtres [traduction] « d’honneur » (Equal Rights Trust déc. 2018, 207; Euromed Droits [nov. 2018], 2; Nations Unies 2018, 9). Le DFAT de l’Australie donne l’explication suivante :

[traduction]

Plusieurs articles du code criminel ont pour effet d’excuser les crimes [« d’honneur »], notamment : l’article 17, qui prévoit l’imposition de peines réduites à la lumière de circonstances atténuantes; l’article 60, qui prévoit aussi une réduction de la peine si l’infraction est commise de bonne foi suivant la charia; et l’article 237, qui prévoit l’imposition de peines réduites quand un époux surprend son épouse en train de commettre l’adultère et la tue (Australie 19 mai 2017, paragr. 3.77).

De même, l’indice des institutions sociales et de l’égalité homme-femme (Social Institutions and Gender Index - SIGI) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) signale que [traduction] « [l’]article 60 du code pénal est souvent invoqué dans le cadre d’affaires judiciaires pour faire valoir le droit des époux de discipliner leur femme » (OCDE 2019, 7). Dans un rapport sur la justice pour les femmes et le droit, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) on peut lire ce qui suit :

[traduction]

Le code pénal sanctionne de nombreuses formes de violence familiale dans différents textes. La violence physique et la violence psychologique, y compris le fait d’insulter ou d’humilier une personne, sont des crimes suivant les articles 171, 242 et 308. Ces dispositions s’appliquent strictement aux personnes qui commettent de tels crimes. Toutefois, si ces crimes sont commis à la maison ou par des parents, dans la plupart des cas, le juge exerce son pouvoir discrétionnaire et réduit la sanction soit à une peine avec sursis ou à une amende en raison de considérations sociales (Nations Unies 2018, 16).

La même source ajoute que certaines infractions de violence familiale ne sont punissables que [traduction] « si l’acte de violence dépasse les limites admises de la discipline fixées par le juge et si les blessures sont visibles au moment du dépôt de la plainte au poste de police » (Nations Unies 2018, 9).

Selon le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni,

[traduction]

[d]epuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement du président al-Sissi s’est engagé à protéger les droits des femmes et à renforcer les lois existantes en matière de lutte contre la discrimination et la violence, particulièrement celles visant la mutilation génitale des femmes et le harcèlement sexuel. Toutefois, malgré la modification de l’approche gouvernementale, l’appareil étatique est souvent inefficace dans la pratique pour ce qui est de l’application de la loi (R.-U. mars 2017, paragr. 2.4.1)

Dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2018 portant sur l’Égypte, publiés par le Département d’État des États-Unis, on peut lire que l’État égyptien est inefficace pour ce qui est d’appliquer la loi contre la violence conjugale (É.-U. 13 mars 2019, 41). Freedom House signale que l’efficacité des lois contre la violence conjugale, entre autres, [traduction] « est entravée par la résistance sociale, une mauvaise application, des abus de la part des policiers eux-mêmes et l’absence de protection adéquate pour les témoins, ce qui décourage les victimes de dénoncer les mauvais traitements et le harcèlement » (Freedom House 28 janv. 2019). Le DFAT de l’Australie affirme que [traduction] « [l]a mise en application des protections constitutionnelles est imprévisible et dépend souvent de l’appréciation individuelle du policier, du procureur ou du juge » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.76).

Le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni ajoute que [traduction] « [l]es femmes hésitent souvent à signaler des mauvais traitements aux autorités en raison de la stigmatisation sociale et, parfois, de la pression exercée par la police », que « [d]es femmes ont été punies pour avoir dénoncé des mauvais traitements envers des femmes » et que « les parlementaires contribuent à une culture où le blâme est attribué à la victime » (R.-U. juin 2019, paragr. 2.5.1). Selon l’enquête sur la violence sexiste, bien qu’environ 5,6 millions de femmes aient été exposées à la violence conjugale au cours de l’année précédente (Nations Unies et Égypte 2015, 135), 75 000 femmes ont signalé des incidents à la police (Nations Unies et Égypte 2015, 149). D’après 28 Too Many, qui se fonde sur l’EDHS 2014, le tiers des femmes touchées par la violence conjugale [traduction] « ont demandé de l’aide » (28 Too Many avr. 2017, 34).

3. Protection offerte par l’État

Des sources affirment que le gouvernement de l’Égypte n’a consenti [version française d’Euromed Droits] « aucun effort » pour enrayer la violence conjugale (Euromed Droits [nov. 2018], 2), ou [version française de Human Rights Watch] « a omis de protéger de manière adéquate » les femmes et les filles contre la violence sexuelle et sexiste (Human Rights Watch 17 janv. 2019).

Selon les Country Reports 2018 publiés par les États-Unis, le NCW, [traduction] « un organisme quasi gouvernemental, était responsable de la coordination des efforts de l’État et de la société civile en vue de l’autonomisation des femmes » (É.-U. 13 mars 2019, 41). D’après 28 Too Many , le NCW a été créé en 2000 par le gouvernement de l’Égypte pour se pencher sur les problèmes vécus par les femmes égyptiennes, y compris la violence conjugale, et l’organisme [traduction] « a des bureaux dans chacun des 27 gouvernorats et collabore avec diverses institutions gouvernementales et organisations de la société civile qui visent précisément les femmes dans les communautés rurales défavorisées » (28 Too Many avr. 2017, 32). D’après le PNUD, l’enquête sur les coûts économiques de la violence sexiste en Égypte, à laquelle le NCW a participé, était [traduction] « la première enquête nationale mesurant l’importance de divers types de [violence sexiste] exercée contre les femmes et les filles âgées de 18 à 64 ans et leurs répercussions sur la santé, la santé génésique et le bien-être général (Nations Unies 2018, 13). La même source ajoute que le NCW était également chargé de la préparation d’un [traduction] « projet de loi pour lutter contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes » (Nations Unies 2018, 15).

Des sources affirment que le ministère de l’Intérieur est doté d’une unité qui se consacre à la violence envers les femmes (É.-U. 13 mars 2019, 41-42; Nations Unies 2018, 13). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements sur le mandat de cette unité et les services qu’elle offre, y compris sur leur efficacité.

Des sources affirment que la stratégie nationale de lutte contre la violence envers les femmes, lancée par le gouvernement en 2015, comporte quatre objectifs : la prévention, la protection, l’intervention et la judiciarisation [ou les poursuites judiciaires] (É.-U. 13 mars 2019, 41-42; Equal Rights Trust déc. 2018, 192). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur les mesures mises en œuvre dans le cadre de cette stratégie.

3.1 Services policiers

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur des affaires de violence conjugale ayant fait l’objet d’enquêtes policières.

Le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni signale ce qui suit :

[traduction]

Le degré de professionnalisme des policiers varie, et il semble qu’ils soient réticents à enquêter sur les cas de violence à l’égard des femmes, particulièrement lorsqu’il s’agit de violence conjugale. De plus, l’efficacité de la police est entravée par le manque d’équipement, le manque de formation, la faible rémunération et les compétences insuffisantes en matière d’enquête - particulièrement en ce qui a trait aux affaires d’agression sexuelle. […] Les perceptions culturelles et religieuses peuvent souvent avoir une incidence sur les décisions des policiers, des procureurs et des juges, particulièrement dans les régions rurales (R.-U. juin 2019, paragr. 2.5.1).

Selon le DFAT de l’Australie, [traduction] « [l]a responsabilisation des policiers est […] problématique, tant au chapitre de leur capacité d’appliquer les lois visant à prévenir la violence et le harcèlement envers les femmes qu’au chapitre de leur propre rôle à titre d’auteurs de tels actes » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.76). D’après les Country Reports 2018 publiés par les États-Unis, [traduction] « [l]es policiers traitaient souvent la violence conjugale comme un problème social plutôt que comme une affaire criminelle » et, selon des organisations de la société civile, exerçaient parfois des pressions sur les victimes pour qu’elles ne portent pas d’accusations (É.-U. 13 mars 2019, 41). Le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni signale, sans fournir de précisions concernant l’emplacement, que, [traduction] « [d]ans un effort pour combattre la violence envers les femmes[,] on a mis sur pied un service policier composé principalement de policières » (R.-U. juin 2019, paragr. 2.5.1). Les Country Reports 2018 publiés par les États-Unis soulignent qu’un décret de 2017 prévoyant l’affectation d’au moins une policière à chaque poste de police a été mis en œuvre en 2018 (É.-U. 13 mars 2019, 43). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

3.2 Appareil judiciaire

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur des affaires de violence conjugale ayant fait l’objet de poursuites judiciaires.

Le DFAT de l’Australie signale que l’appareil judiciaire égyptien est [traduction] « presque entièrement composé d’hommes », avec seulement 0,5 p. 100 des juges qui sont des femmes, et que les décisions de « certains juges », particulièrement dans les régions rurales, sont influencées par leurs « perceptions religieuses et culturelles à l’égard des femmes » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.76).

Selon Euromed Droits, [version française d’Euromed Droits] « [e]n principe, les femmes peuvent déposer plainte devant les tribunaux en cas de violence fondée sur le genre. En pratique, ces affaires sont souvent bloquées par la police ou le procureur général » (Euromed Droits [nov. 2018], 4). Des sources signalent que le témoignage d’une femme équivaut à celui d’un homme devant les tribunaux [civils (OCDE 2019, 15)], à l’exception des tribunaux du statut personnel, où il ne vaut que la moitié de celui d’un homme (OCDE 2019, 15; Euromed Droits [nov. 2018], 4).

L’OCDE fait observer que, selon diverses organisations de défense des droits de la personne, les femmes n’obtiennent pas l’anonymat quand elles signalent des cas de violence familiale (OCDE 2019, 15). De même, Euromed Droits signale que [version française d’Euromed Droits] « [l]es femmes ne peuvent par ailleurs pas témoigner sans être confrontées à leur agresseur, dans la mesure où il leur faut l’identifier. Cela met les victimes et leurs familles en grand danger […] » (Euromed Droits [nov. 2018], 5). Selon les Country Reports 2018 publiés par les États-Unis, [traduction] « [l]a loi exige que la victime d’une agression présente de multiples témoins oculaires, une exigence qui est difficile à respecter pour les victimes de violence familiale » (É.-U. 13 mars 2019, 41). Euromed Droits signale que, [version française d’Euromed Droits] « [c]onformément à la loi, les femmes accusées qui ne disposent pas d’un avocat doivent bénéficier des services d’un avocat commis d’office. Une assistance juridique leur est généralement effectivement fournie mais elle est souvent de mauvaise qualité » (Euromed Droits [nov. 2018], 4-5).

4. Services de soutien
4.1 Gouvernement

Selon des sources, le gouvernement de l’Égypte met huit ou neuf refuges à la disposition des femmes victimes de violence conjugale (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86; Equal Rights Trust déc. 2018, 205-206; Euromed Droits [nov. 2018], 3). Ces refuges sont supervisés ou financés par le ministère de la Solidarité sociale (É.-U. 13 mars 2019, 41-42; Euromed Droits [nov. 2018], 3), et sont administrés par le NCW (Euromed Droits [nov. 2018], 3). Le DFAT de l’Australie signale que les refuges se trouvent au Caire, à Giza, à Qalyubia, à Alexandrie, à Beni Sueif, à Fayoum et à Minya (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86). D’après la même source, les refuges [traduction] « offrent des services de counseling social, familial et psychologique, ainsi que l’aiguillage vers d’autres fournisseurs de services » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86). Des sources font observer que les refuges disposent de peu de ressources (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86; Equal Rights Trust déc. 2018, 206; Euromed Droits [nov. 2018], 3). Selon Equal Rights Trust [5], on [traduction] « s’attend » à ce que les femmes paient des frais pour rester dans un refuge (Equal Rights Trust déc. 2018, 206). Des sources signalement également que les refuges sont plus ou moins accessibles aux femmes victimes de violence (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86) ou que les refuges [traduction] « ne peuvent pas fournir d’accueil d’urgence ou, dans certains cas, n’accueillent simplement personne après 15 h » (Equal Rights Trust déc. 2018, 206). Euromed Droits déclare ce qui suit :

[traduction]

Les refuges sont extrêmement difficiles d’accès et exigent des papiers d’identité que ne possèdent généralement pas les femmes qui ont échappé à la violence. Ils n’acceptent pas non plus les femmes victimes d’inceste ou de viol, ni les femmes enceintes, et ils ne permettent pas aux enfants de plus de 12 ans de rester avec leur mère[,] ce que rejettent la plupart des mères qui cherchent refuge (Euromed Droits [nov. 2018], 4).

Le DFAT de l’Australie déclare aussi que [traduction] « les femmes célibataires (y compris celles qui sont perçues comme n’étant pas vierges), celles qui demandent le divorce et celles qui ont des enfants n’ont pas accès [aux refuges] » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86). Selon la même source, les refuges encouragent les victimes à se réconcilier avec leur époux violent et [traduction] « tendent à héberger les femmes pour des périodes limitées » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86).

Selon l’enquête consacrée aux coûts économiques de la violence sexiste, [traduction] « seulement 7 000 femmes ont eu recours aux services sociaux » au cours de l’année précédente (Nations Unies et Égypte 2015, 149).

4.2 Société civile

Sans fournir de précisions additionnelles, des sources affirment que certains groupes de la société civile ou certaines ONG offrent des services aux femmes victimes de violence (Euromed Droits [nov. 2018], 4; R.-U. mars 2017, paragr. 2.4.3). Selon le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni, ils offrent [traduction] « de l’aide pratique et un refuge » (R.-U. mars 2017, paragr. 2.4.3). Le PNUD affirme ce qui suit :

[traduction]

Certaines ONG offrent des services juridiques ainsi que des programmes de counselling, de conscientisation et d’autonomisation économique pour les femmes. Par exemple, des services sont fournis aux femmes par le Centre for Egyptian Women’s Legal Activities , l’Association for the Development and Enhancement of Women in Egypt , le Egyptian Centre for Women’s Rights et la New Woman Foundation (Nations Unies 2018, 15).

Euromed Droits souligne que [version française d’Euromed] « [c]ertaines ONG proposent donc une aide juridique gratuite à ces femmes. Cependant, en raison de la réduction et de la fermeture des espaces pour la société civile en Égypte, la fourniture de ces services rend les ONG plus visibles », ce qui les expose à la menace des forces de sécurité (Euromed Droits [nov. 2018], 5). La même source ajoute ce qui suit :

[traduction]

La plupart des refuges en activité sont gérés par des ONG et des [organismes de services communautaires] et sont principalement financés par la coopération bilatérale. Cependant, il est très difficile pour les ONG de créer un refuge, en raison de la complexité de l’ensemble des considérations de sécurité auxquelles les refuges sont astreints. Bien que certaines organisations de femmes offrent des services et des programmes d’approche, ainsi qu’un soutien juridique et psychologique aux femmes victimes de violence, ceux-ci ne suffisent pas à répondre aux besoins en matière de protection, car le pays ne dispose pas des institutions nécessaires pour mettre en place un système efficace. (Euromed Droits [nov. 2018], 3-4)

Le DFAT de l’Australie affirme également que, selon des [traduction] « sources nationales », les organisations de la société civile ont été empêchées d’ouvrir des refuges « par des ordonnances judiciaires ou d’autres procédures judiciaires contre leurs activités » (Australie 17 juin 2019, paragr. 3.86).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement concernant les services médicaux et autres services de soutien.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] [Traduction] « Fondée au Brésil en 1997, Promundo s’efforce de promouvoir l’égalité entre les sexes et de créer un monde exempt de violence en engageant les hommes et les garçons en partenariat avec les femmes et les filles »; l’organisation réalise de la « recherche appliquée qui enrichit la base des connaissances sur les masculinités et l’égalité entre les sexes » (El Feki, et al. 16 mai 2017).

[2] 28 Too Many est une [traduction] « organisation caritative de lutte contre les MGF [mutilations génitales féminines] » qui a pour objectif « [d’]éradiquer les MGF dans les 28 pays d’Afrique où elles sont pratiquées et ailleurs dans le monde où les membres de ces communautés ont migré » en fournissant un « cadre stratégique s’articulant sur des connaissances et des outils qui permettent aux militants et aux organisations nationaux opposés aux MGF d’apporter des changements durables en vue de mettre fin aux MGF » (28 Too Many avr. 2017, 3).

[3] [Traduction] « L’enquête démographique et de santé d’Égypte de 2014 (EDS-2014) a été réalisée pour le compte du ministère de la Santé et de la Population dans le cadre du programme DHS, financé par l’Agence américaine pour le développement international (United States Agency International for Development - USAID) et soutenu par l’UNICEF et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP). » (Égypte, et al.mai 2015, ii)

[4] Euromed Rights, dont le siège principal est à Copenhague, [version française d’Euromed Droits] est « un réseau de plus de 80 organisations des droits humains, des institutions et des personnes situées dans 30 pays de la région euro-méditerranéenne » qui « [adhère] aux principes universels des droits humains et [croit] fermement en la valeur de la coopération et du dialogue entre et au sein des frontières » (Euromed Droits s.d.).

[5] Equal Rights Trust est une société anglaise et une organisation caritative qui rassemble des experts de différents pays et participe à des recherches et projets dans plus de 45 pays pour [traduction] « combattre la discrimination et promouvoir l’égalité comme un droit humain fondamental » (Equal Rights Trust s.d.).

Références

28 Too Many . Avril 2017. Country Profile: FGM in Egypt . [Date de consultation : 26 août 2019]

Australie. 17 juin 2019. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: Egypt . [Date de consultation : 26 août 2019]

Australie. 19 mai 2017. Department of Foreign Affairs and Trade (DFAT). DFAT Country Information Report: Egypt . [Date de consultation : 26 août 2019]

Banque mondiale. Mai 2018. Women Economic Empowerment Study . [Date de consultation : 26 août 2019]

The Caravan . 14 décembre 2017. Nourane Selim. « Parliament Drafts New Bill to Combat Domestic Violence ». [Date de consultation : 26 août 2019]

Égypte. 2014. Constitution of the Arab Republic of Egypt 2014 . [Date de consultation : 26 août 2019]

Égypte, El-Zanaty and Associates , et ICF International . Mai 2015. Ministry of Health and Population . Egypt Demographic and Health Survey 2014 . [Date de consultation : 26 août 2019]

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El Feki, Shereen, Brian Heilman et Gary Barker. 16 mai 2017. Understanding Masculinities: Results from the International Men and Gender Equality Survey (IMAGES) – Middle East and North Africa . [Date de consultation : 26 août 2019]

Equal Rights Trust . Décembre 2018. A Past Still Present: Addressing Discrimination and Inequality in Egypt . The Equal Rights Trust Country Report Series No. 12 . [Date de consultation : 26 août 2019]

Equal Rights Trust . S.d. « Our Story ». [Date de consultation : 5 sept. 2019]

États-Unis (É.-U.). 13 mars 2019. Department of State . « Egypt ». Country Reports on Human Rights Practices for 2018 . [Date de consultation : 26 août 2019]

Euromed Droits. [Novembre 2018]. Egypt: Situation Report on Violence Against Women . [Date de consultation : 26 août 2019]

Euromed Droits. S.d. « Who We Are ». [Date de consultation : 5 sept. 2019]

Freedom House . 28 janvier 2019. « Egypt ». Freedom in the World 2019 . [Date de consultation : 26 août 2019]

Human Rights Watch . 17 janvier 2019. « Egypt ». World Report 2019: Events of 2018 . [Date de consultation : 26 août 2019]

Nations Unies. 2018. Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Egypt: Gender Justice & the Law . [Date de consultation : 26 août 2019]

Nations Unies et Égypte. 2015. Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Central Agency for Public Mobilization and Statistics (CAPMAS) et National Council for Women (NCW). The Egypt Economic Cost of Gender-Based Violence Survey (ECGBVS) 2015 . Par Nata Duvvury et al. [Date de consultation : 26 août 2019]

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). 2019. « Egypt ». Social Institutions and Gender Index (SIGI) . [Date de consultation : 26 août 2019]

Royaume-Uni (R.-U.). Juin 2019. Home Office . Country Policy and Information Note - Egypt: Women . [Date de consultation : 26 août 2019]

Royaume-Uni (R.-U.). Mars 2017. Home Office . Country Policy and Information Note - Egypt: Women . [Date de consultation : 26 août 2019]

Autres sources consultées

Sites Internet, y compris :Amnesty International; Fédération internationale des ligues des droits de l’homme; Maat Foundation for Peace, Development and Human Rights ; Nations Unies – ONU Femmes, Women Watch; Oxfam; University of California Hastings – Center for Gender and Refugee Studies .

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