Djibouti: Treatment of members of the Issa Furlaba [Foulaba, Furlabeh] Dulcaad [Dulqaad] tribe by authorities (2015-May 2017) Research Directorate, Immigration and Refugee Board of Canada, Ottawa [DJI105811.FE]

Djibouti : traitement réservé aux membres de la tribu Issa Fourlaba [Fourlabah, Furlaba, Furlabeh] Dulcaad [Dulqaad] par les autorités (2015-mai 2017)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Survol

Dans son ouvrage d'introduction aux clans somalis qui peuplent Djibouti, l'Éthiopie, la Somalie et le Kenya, intitulé Clanship, Conflict and Refugees: An Introduction to Somalis in the Horn of Africa, Guido Ambroso, un ancien agent de protection à Djibouti pour le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations Unies (Ambroso mars 2002, 2), affirme que les Fourlabas constituent un des six sous-clans qui composent le clan Issa, lui-même un des quatre principaux clans de la famille de clans somalis des Dir (Ambroso mars 2002, 6-7).

Des sources rapportent qu'à Djibouti, au moins la moitié de la population est issue du groupe ethnique somali (Royaume-Uni 25 nov. 2008, 39; L'aménagement linguistique dans le monde 23 déc. 2015; É.-U. 12 janv. 2017). Selon des sources, ces Somalis sont principalement du groupement de clans Issa (PHW 2015, 402; Royaume-Uni 25 nov. 2008, 39). Dans un plan d'opération pour Djibouti, préparé en 2005 par le HCR, on peut lire que dans ce pays, [traduction] « la majorité de la population fait partie du groupe ethnique somali (essentiellement des clans Issa, Issak et Gadaboursi) » (Nations Unies 1er sept. 2005, annexe 1). Des sources précisent que les Somalis, dont les Issas, se trouvent dans le sud de Djibouti (L'aménagement linguistique dans le monde 23 déc. 2015; MRG 19 juin 2015). Dans un rapport publié en 2015, Minority Rights Group International (MRG) ajoute que les Issas se trouvent aussi dans la capitale de Djibouti (MRG 19 juin 2015).

Dans un document de recherche qui porte sur les développements dans la Corne de l'Afrique et publié en 2008 par la Bibliothèque de la Chambre des Communes (House of Commons Library) du Royaume-Uni, Jon Lun, de la Section des affaires internationales et de la défense, souligne que le premier président de Djibouti après son indépendance, Hassan Gouled Aptidon [1977 à 1999], l'oncle de l'actuel président djiboutien, était un Issa (Royaume-Uni 25 nov. 2008, 39). D'autres sources rapportent qu'Ismaël Omar Guelleh [l'actuel président djiboutien] fait partie des Mamasans [Mamassan, Mamasane] un sous-clan des Issas (Ambroso mars 2002, 7; BBC 26 janv. 2017). Selon Guido Ambroso, le sous-sous-clan Mamasan fait partie du sous-clan Elaye qui, aux côtés des Fourlabas, appartient au clan Issa de Djibouti (Ambroso mars 2002, 7). Un article de La Lettre de l'Océan Indien, une publication politique et économique « sur les hommes, les affaires et leurs réseaux en Afrique », publiée à Paris par Africa Intelligence, un portail d'information sur l'Afrique (Africa Intelligence s.d.), signale qu'Ismaël Omar Guelleh est un « Issa Mamasan/Bah Fourlabah [1] » (24 mars 2017). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Selon un rapport publié en 2007 par MRG, les Afars [autre groupe ethnique à Djibouti] détenaient [traduction] « une plus grande part de l'influence politique » à Djibouti avant l'indépendance [1977] (MRG 2007). Dans un article publié en 2016, la BBC affirme pour sa part qu'avant l'indépendance du pays, une balance était maintenue entre les deux groupes ethniques [Afars et Issas] (BBC 7 avr. 2016). Des sources rapportent que le gouvernement du [premier] président djiboutien, Hassan Gouled Aptidon, était dominé par les Issas (BBC 7 avr. 2016; Royaume-Uni 25 nov. 2008, 39; MRG 2007). Dans son ouvrage publié en 2002, Guido Ambroso affirme que les Issas sont la tribu [traduction] « hégémonique à Djibouti » et qu'ils détiennent « les portefeuilles de président et de ministre de la Défense » (Ambroso mars 2002, 7).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le président de l'Association pour le respect des droits de l'homme à Djibouti (ARDHD), une association dont le siège se trouve à Paris (ARDHD s.d.), a affirmé ce qui suit :

Les membres de la tribu Fourlaba ont occupé des postes importants dans l'administration de Djibouti, jusqu'au coup d'État « manqué » du 7 décembre 2000, qui avait été commandité par le général Yacin Yabeh (de l'ethnie Fourlaba), alors chef de la police (FNP [Force nationale de police]). Le général est mort en prison en juillet 2002. Sous son commandement, de nombreux officiers issus de son ethnie avaient été promus dans la police.

Après le coup d'État, nous avons noté l'arrestation massive de nombreux membres de cette ethnie et des licenciements de l'administration (ARDHD 17 mai 2017).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Selon les Country Reports on Human Rights Practices for 2016 du Département d'État des États-Unis (É.-U.), [traduction] « la discrimination fondée sur l'ethnie et le clan s'est poursuivie [à Djibouti] dans les affaires et en politique », ainsi que dans les domaines de l'emploi et de l'avancement professionnel (É.-U. 3 mars 2017, 24). La même source signale que la coalition gouvernementale à Djibouti comprenait les principaux clans et groupes ethniques du pays, mais que les Issas contrôlaient le parti dirigeant et dominaient la fonction publique, ainsi que les services de sécurité (É.-U. 3 mars 2017, 24). De même, dans un rapport publié en 2016 par Freedom House, on peut lire qu'à Djibouti, les Issas occupent des postes plus importants dans le gouvernement et dans le secteur privé (Freedom House 2016).

2. Traitement réservé aux Fourlabas par les autorités

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, le président de la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH), une ONG de défense des droits de l'homme à Djibouti (LDDH s.d.), a déclaré que les membres de la tribu Issa Fourlaba « sont bien représentés au sein de l'administration, de la police et de l'armée » (LDDH 17 mai 2017). Un article publié en 2017 par La Lettre de l'Océan Indien rapporte en outre que le directeur du cabinet du premier ministre, Youssouf Aouled Farah, est un Issa Mamasan/Bah Fourlabah (le sous-clan du président) et que le ministre des Affaires musulmanes, Moumin Hassan Barreh, est un Issa Fourlaba/Reer Mahmoud (La Lettre de l'Océan Indien 10 mars 2017). Cette même source signale que le président djiboutien, durant les élections régionales et municipales de février [2017], « pour éviter les velléités de dissidence […] [a confié] à un proche Issa Mamasan/Bah Fourlaba comme lui, Houssein Idriss Gouled, la direction d'une commission en vue de rassurer la base électorale du RPP [Rassemblement populaire pour le progrès, le parti du président (PHW 2015, 406)] » (La Lettre de l'Océan Indien 24 mars 2017). La même source rapporte que le président, en vue des élections présidentielles d'avril 2016, a nommé Youssouf Moussa Dawaleh, « [i]ssu du clan issa fourlaba », au poste de directeur adjoint de sa campagne (La Lettre de l'Océan Indien 5 févr. 2016). Selon la Lettre de l'Océan indien, à la suite de « la répression sanglante » d'une manifestation de membres de la tribu Issa/Yonis Moussa à Balbala le 21 décembre 2015, le président a demandé « aux dignitaires issa/fourlaba » d'agir comme médiateurs entre lui et la tribu réprimée (La Lettre de l'Océan Indien 8 janv. 2016). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Selon le président de la LDDH, la situation des Fourlabas à Djibouti est semblable à celle de tous les autres Djiboutiens et n'a pas de « particularités spécifiques » (LDDH 17 mai 2017). La même source a déclaré ce qui suit : « À notre connaissance, la tribu Fourlaba compte très peu dans la résistance à la dictature djiboutienne. On dénombre quelques personnes qui font partie de l'opposition et qui sont sévèrement réprimées » (LDDH 17 mai 2017). Toutefois, le président de l'ARDHD a signalé que Daher Ahmed Farah, issu de l'ethnie Fourlaba, est le président du MRD (Mouvement pour le renouveau démocratique et le développement, un ancien parti d'opposition) et l'un « des opposants [politiques] relativement actifs » (ARDHD 17 mai 2017). Selon la même source, la majorité des membres du MRD sont issus de cette ethnie (ARDHD 17 mai 2017). De même, dans un article publié en 2012 par La Lettre de l'Océan Indien, on peut lire que Daher Ahmed Farah, « le leader du MRD », fait partie du clan Fourlaba (La Lettre de l'Océan Indien 6 oct. 2012). Selon un article publié en 2010 par la même source, le MRD tire ses membres du clan Issa/Fourlaba (La Lettre de l'océan Indien 10 juill. 2010). D'après le président de l'ARDHD, Daher Ahmed Farah « est revenu plusieurs fois à Djibouti où il fait toujours un certain nombre de jours de prison » (ARDHD 17 mai 2017). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Le président de la LDDH a affirmé qu'il n'y a « aucun membre du sous-clan de Dulcaad dans l'opposition et je ne vois pas de répression particulière à leur encontre » (LDDH 17 mai 2017). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] Dans le glossaire qui accompagne son ouvrage, Guido Ambroso explique que le mot « Bah » désigne un [traduction] « "groupe de frères ayant la même mère", ainsi que leurs descendants » (Ambroso mars 2002, 61).

Références

Africa Intellignce. S.d. « Qui sommes-nous? ». [Date de consultation : 23 mai 2017]

Ambroso, Guido. Mars 2002. Clanship, Conflict and Refugees: An Introduction to Somalis in the Horn of Africa. [Date de consultation : 18 mai 2017]

L'aménagement linguistique dans le monde. 23 décembre 2015. Jacques Leclerc, collaborateur à la Chaire de recherche pour le développement de la recherche sur la culture d'expression française en Amérique du Nord (CEFAN), Université Laval. « Djibouti ». [Date de consulation : 31 mai 2017]

Association pour le respect des droits de l'homme à Djibouti (ARDHD). 17 mai 2017. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par le président.

Association pour le respect des droits de l'homme à Djibouti (ARDHD). S.d. [Date de consultation : 30 mai 2017]

British Broadcasting Corporation (BBC). 26 janvier 2017. « Djibouti Country Profile ». [Date de consultation : 23 mai 2017]

British Broadcasting Corporation (BBC). 7 avril 2016. « Djibouti Profile - Full Profile ». [Date de consultation : 23 mai 2017]

États-Unis (É.-U.). 3 mars 2017. Department of State. « Djibouti». Country Reports on Human Rights Practices for 2016. [Date de consultation : 17 mai 2017]

États-Unis (É.-U.). 12 janvier 2017. Central Intelligence Agency (CIA). « Djibouti ». The World Factbook. [Date de consultation : 17 mai 2017]

Freedom House. 2016. « Djibouti ». Freedom in the World 2016. [Date de consultation : 23 mai 2017]

Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH). 17 mai 2017. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par le président.

Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH). S.d. « Présentation de la LDDH ». [Date de consultation : 30 mai 2017]

La Lettre de l'Océan Indien. 24 mars 2017. « Succession d'IOG : faites vos jeux, rien ne va plus! ». (Factiva)

La Lettre de l'Océan Indien. 10 mars 2017. « La guerre de succession à IOG a bel et bien commencé! ». (Factiva)

La Lettre de l'Océan Indien. 5 février 2016. « IOG nomme un cacique du FRUD numéro deux de sa campagne ». (Factiva)

La Lettre de l'Océan Indien. 8 janvier 2016. « Échec de la médiation fourlaba entre IOG et les Yonis Moussa ». (Factiva)

La Lettre de l'Océan Indien. 6 octobre 2012. « IOG prend le risque de rénover le RPP ». (Factiva)

La Lettre de l'Océan Indien. 10 juillet 2010. « No Opposition Agreement in Sight ». (Factiva)

Minority Rights Group International (MRG). 19 juin 2015. « Djibouti ». [Date de consultation : 23 mai 2017]

Minority Rights Group International (MRG). 2007. World Directory of Minoritites and Indigenous Peoples - Djibouti. [Date de consultation : 23 mai 2017]

Nations Unies. 1er septembre 2005. Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR). UNHCR Country Operations Plan 2006 - Djibouti. [Date de consultation : 23 mai 2017]

Political Handbook of the World 2015 (PHW). 2015. « Djibouti ». Sous la direction de Thomas Lansford. Washington, DC, CQ Press.

Royaume-Uni. 25 novembre 2008. House of Commons Library. John Lun. Interlocking Crisis in the Horn of Africa. Research Paper 08/86. [Date de consultation : 18 mai 2017]

Autres sources consultées

Sources orales : Docteur, Observatoire de la Corne de l'Afrique; Docteure, spécialiste en géopolitique, France; Observatoire djiboutien pour la promotion de la démocratie et des droits humains; Professeur émérite, Institut français de géopolitique; Professeur émérite, Université Bordeaux Montaigne; Professeur spécialiste des droits humains dans la Corne de l'Afrique, University of Minnesota-Morris.

Sites Internet, y compris : Agence djiboutienne d'information; Djibouti – Présidence de la République; ecoi.net; International Crisis Group; Jeune Afrique; La Nation; Radio France internationale; Radio Télévision Djibouti; Royaume-Uni – Country of Origin Information Service, UK Border Agency.

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