Togo: Forced marriage, particularly in Lomé, including its prevalence, the consequences of a refusal, and the treatment by society and the government of women who refuse a forced marriage; state protection and services (2010-February 2013) [TGO104316.FE]

Togo : information sur le mariage forcé, particulièrement à Lomé, y compris la fréquence, les conséquenses associées à un refus et le traitement réservé par la société et les autorités gouvernementales aux femmes qui refusent un mariage forcé; protection et services offerts par l’État (2010-février 2013)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Fréquence et contexte culturel des mariages précoces et forcés

Selon l'enquête par grappes à indicateurs multiples (Multiple Indicator Cluster Surveys - MICS) réalisée en 2010 par la Direction générale de la statistique et de la comptabilité nationale du Togo avec l’assistance financière et technique de l’UNICEF et du Programme des Nations Unies pour le développement,

7 pour cent des femmes de 15 à 49 ans se sont mariées ou étaient en union avant l'âge de 15 ans tandis que 29 pour cent de[s] femmes de 20 à 49 ans ont contracté leur mariage ou union avant l'âge de 18 ans (Togo mars 2012, sect. 11.5).

Une enquête démographique menée par la Direction de la statistique du Togo avait montré qu'en 1998, une femme sur deux, parmi celles âgées de 25 à 49 ans, s'étaient mariées ou étaient dans une union avant l'âge de 18,8 ans, et une femme sur dix s'étaient mariées ou étaient dans une union avant l'âge de 15 ans (Togo avril 1999, sect. 5.3.1).

D'après l’enquête MICS effectuée par le Togo en 2010, les taux pour le mariage avant 15 ans et 18 ans sont plus élevés en milieu rural qu'en milieu urbain, et le taux de mariages précoces est plus élevé dans la région de la Kara, dans le nord du pays (Togo mars 2012, sect. 11.5). Dans son rapport annuel intitulé Country Reports on Human Rights Practices for 2011, le Département d’État des États-Unis affirme que le mariage précoce existe dans le nord du pays (É.-U. 24 mai 2012, 18). De même, dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches le 13 mars 2013, une représentante de Femmes, Droit et Développement en Afrique (FeDDAF), un réseau panafricain d'ONG fondé en 1990 (FeDDAF janv. 2013), explique qu'au Togo, la pratique des mariages forcés existe surtout dans le nord du pays ainsi que dans la région de Vogan, dans le sud du pays (ibid. 12 mars 2013).

La représentante de FeDDAF dit que « [l]e mariage forcé est le résultat d'un long processus entre les familles, prenant parfois plusieurs années avant sa conclusion » et que la tradition religieuse et la dot sont des facteurs déterminants (ibid.). Elle dit aussi que, « [d]ans les communautés musulmanes et villageoises, il arrive que des filles soient données en mariage dès l'âge de 12 ans, à des hommes qui sont parfois quatre fois au moins plus âgés qu'elles », et que la garantie de la virginité peut aussi être un facteur dans la décision des parents de donner leurs filles pour un mariage précoce (ibid.).

Dans une entrevue avec le journal en ligne Ici Lomé, le président du FONDAVO, une ONG qui travaille avec les veuves au Togo, dit que beaucoup des veuves au Togo « croupi[ss]ent sous le poids » du lévirat et des mariages forcés et précoces (Ici Lomé 23 juin 2012). Un autre article publié dans Ici Lomé décrit aussi la pratique du « mariage par échange », par laquelle « l'une des petits sœurs du mari doit venir épouser l'un des frères de la femme mariée », et qui aurait lieu dans des villages de la région des Savanes (ibid. 1er juill. 2012). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement allant dans le même sens que ceux présentés par Ici Lomé.

2. Lois

La Loi n° 2007-005 du 10 janvier 2007 sur la santé de la reproduction établit ce qui suit : « Aucune femme, pour des raisons liées à la sexualité et à la reproduction, ne doit être soumise à [… des] mariages forcés et/ou précoces » (Togo 2007b, art. 11). Aux termes de la Loi n° 2007-017 du 6 juillet 2007 portant code de l'enfant, « [l]e mariage des enfants est interdit. L'âge de la nuptialité est fixé à dix-huit (18) ans révolus » (ibid. 2007a, art. 267). Le code de l'enfant dispose également que, dans certains cas, les enfants de seize ans peuvent se marier (ibid.). Cependant, entre autres conditions, « [c]hacun des futurs époux, même s'il est un enfant âgé de seize (16) ans, doit consentir personnellement au mariage » (ibid., art. 269). Le code prévoit que « toute personne ayant exercé sur l'enfant une contrainte de quelque nature que ce soit en vue de l'amener à consentir au mariage sera punie de un (01) à trois (03) ans d'emprisonnement et d'une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) de francs CFA » (ibid., art. 273). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucune information indiquant si ces peines ont déjà été appliquées.

Selon l'ancien code des personnes et de la famille de 1980, l'âge minimum du mariage était de 20 ans pour les hommes et de 17 ans pour les femmes (Togo 1980, art. 43). Un nouveau code a été promulgué en juillet 2012 (Togo 11 mars 2013, 2). Dans sa déclaration devant la 53e session du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, à l'occasion de la présentation de ses 6e et 7e rapports, le Togo a constaté que le nouveau code des personnes et de la famille de 2012 s’harmonise avec le code de l'enfant pour ce qui est de l'âge minimum du mariage (Togo 4 oct. 2012, 16). Par ailleurs, le nouveau code interdit le lévirat (ibid., 17).

Dans son rapport initial présenté au Conseil économique et social des Nations Unies en 2011, le Togo écrit que « [l]e mariage précoce et le mariage forcé ne sont pas reconnus par la loi. Cependant, il existe encore des mariages précoces et forcés dans certains régions du pays du fait de l'influence des coutumes et des pratiques religieuses » (ibid. 4 oct. 2011, paragr. 452). L'Afrique pour les droits des femmes, une campagne lancée par une coalition d’organisations de défense des droits de la personne afin d'amener les pays africains « à ratifier les instruments africains et internationaux de protection des droits des femmes et à les respecter » (L'Afrique pour les droits des femmes s.d.), souligne que l'âge légal du mariage est « souvent ignoré » et que des mariages précoces et forcés ont lieu au Togo (ibid. 5 mars 2010).

3. Protection offerte par l'État

Dans ses observations finales sur le Togo en 2012, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes des Nations Unies affirme qu'il y a plusieurs facteurs qui peuvent empêcher les femmes d’accéder à la justice, notamment

[traduction]

la pauvreté, l’absence de connaissances juridiques, un nombre insuffisant de cours et de tribunaux, la formation limitée des juges, des avocats et des procureurs sur la discrimination à l'égard des femmes, et la réprobation dont font l’objet les femmes qui portent leur affaire devant les tribunaux (Nations Unies 18 oct. 2012, paragr. 12).

La représentante de FeDDAF explique que

[c]ertains cas [de mariage forcé] sont portés devant le service social auprès des tribunaux. Toutefois vu le poids de la tradition, il est difficile [pour les] juges de trancher ces faits. Aujourd'hui, la pratique culturelle prend le pas sur l'application des lois. « Il arrive que des juges demandent aux associations de les aider pour que des solutions à l'amiable soient trouvées à des cas de mariage forcé qui leur sont soumis », [m’a confié] Cyrille Ekoue, coordonnateur du Groupe de réflexion et d'action Femme, Démocratie et Développement (FeDDAF 12 mars 2013).

Parmi les sources qu'elle a consultées, la Direction des recherches n'a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens.

Selon les Country Reports for 2011, souvent, au Togo, les cas de mariages précoces ne sont pas signalés parce que les parents donnent volontiers leurs enfants en mariage (É.-U. 24 mai 2012, 18).

Dans l'entrevue publiée par Ici Lomé, le président du FONDAVO explique que, comme beaucoup de mariages sont coutumiers, donc non légalisés, « beaucoup de veuves ne rentrent pas dans leur droit » (23 juin 2012). Dans ses observations finales formulées en 2012, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes se dit préoccupé par les [traduction] « unions de facto », qui peuvent laisser les femmes sans protection après la séparation (Nations Unies 18 oct. 2012, paragr. 40).

4. Traitement des femmes et filles qui tentent de se soustraire à un mariage forcé

Selon la représentante de FeDDAF, les filles qui ne veulent pas se marier sont « la plupart du temps bannies de la famille et livrées à elles-mêmes surtout quand l'affaire a été portée devant les tribunaux » (12 mars 2013). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens.

Selon la représentante de FeDDAF, les femmes peuvent vivre seules au Togo, en milieu urbain ainsi qu’en milieu rural (FeDDAF 12 mars 2013). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens. La représentante ajoute toutefois que le taux de chômage y est élevé pour les hommes ainsi que pour les femmes, et il peut être difficile de trouver de l'emploi, mais encore plus difficile peut-être pour les femmes, qui subissent aussi du harcèlement sexuel (ibid.). Selon les résultats de l'Enquête du Questionnaire unifié des indicateurs de base de bien-être réalisée en 2011 par la Direction générale de la statistique et de la comptabilité nationale du Togo, 74 p. 100 des hommes sont alphabétisés, et 47,9 p. 100 des femmes le sont (Togo 7 mars 2013). L'Enquête a également montré que le chômage touche 4,3 p. 100 des hommes, et 9 p. 100 des femmes, et que 20,2 p. 100 des hommes sont en situation de sous-emploi, comparativement à 25,5 p. 100 des femmes (ibid.).

5. Ressources pour les victimes de mariages forcés

La représentante de FeDDAF affirme qu'il y a quelques organisations au Togo, incluant la sienne, qui s'occupent des mariages forcés et qui font des activités comme sensibiliser les parents, les chefs traditionnels et religieux et la population aux conséquences néfastes du mariage forcé ou précoce (12 mars 2013). Dans son entrevue avec Ici Lomé, le président du FONDAVO dit que son organisation s’occupe des veuves, certaines d'entre elles étant des victimes de mariages forcés (23 juin 2012).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement sur les ressources offertes aux victimes de mariages forcés.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

L'Afrique pour les droits des femmes. 5 mars 2010. Togo. [Date de consultation : 11 mars 2013]

_____. S.d. « L'Afrique pour les droits des femmes ». [Date de consultation : 18 mars 2013]

États-Unis (É.-U.). 24 mai 2012. Department of State. « Togo ». Country Reports on Human Rights Practices for 2011. [Date de consultation : 27 févr. 2013]

Femmes, Droit et Développement en Afrique (FeDDAF). 12 mars 2013. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par une représentante.

_____. Janvier 2013. « Qui sommes-nous? ». [Date de consultation : 19 mars 2013]

Ici Lomé. 1er juillet 2012. Dapaong Junior Aurel. « Le "mariage par échange" toujours en cours dans la région des Savanes, le "REFED/S" dans la bataille à travers des comités de vigilance ». [Date de consultation : 14 mars 2013]

_____. 23 juin 2012. « Journée internationale de la veuve : interview du président de FONDAVO, Dr Charles Birregah ». [Date de consultation : 14 mars 2013]

Nations Unies. 18 octobre 2012. Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Togo. (CEDAW/C/TGO/CO/6-7) [Date de consultation : 15 mars 2013]

Togo. 11 mars 2013. 57ème session de la commission de condition de la femme : intervention de madame Ayawavi Djigbodi Dagban-Zonvide, minsitre de la Promotion de la femme. [Date de consultation : 28 mars 2013]

_____. 7 mars 2013. Direction générale de la statistique et de la comptabilité nationale du Togo. « Publication des résultats de l'Enquête du Questionnaire unifié des indicateurs de base de bien-être (QUIBB) réalisée en 2011 ». [Date de consultation : 8 mars 2013]

_____. 4 octobre 2012. Déclaration liminiare du Togo devant la 53ème session du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes à l'occasion de la présentation des 6ème et 7ème rapports périodiques combinés sur la CEDEF. [Date de consultation : 11 mars 2013]

_____. Mars 2012. Direction générale de la statistique et de la comptabilité nationale du Togo. Suivi de la situation des enfants et des femmes : enquête par grappes à indicateurs multiples. [Date de consultation : 11 mars 2013]

_____. 4 octobre 2011. Application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Rapports initiaux présentés par les États parties en vertu des articles 16 et 17 du Pacte : Togo. (E/C.12/TGO/1) [Date de consultation : 15 mars 2013]

_____. 2007a. Loi n° 2007-017 du 6 juillet 2007 portant code de l'enfant. [Date de consultation : 18 mars 2013]

_____. 2007b. Loi n° 2007-005 du 10 janvier 2007 sur la santé de la reprodution. [Date de consultation : 18 mars 2013]

_____. Avril 1999. Direction de la statistique. Enquête démographique et de santé 1998. [Date de consultation : 28 mars 2013]

_____. 1980. Ordonnance n° 80-16 du 31 janvier 1980 portant Code des personnes et de la famille. [Date de consultation : 18 mars 2013]

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre des représentants des organisations suivantes ont été infructueuses : L'Afrique pour les droits des femmes; Cercle de réflexion et d'action pour la protection et l'émancipation de la femme; Communauté togolaise du Canada; Direction des femmes, du sexe et du développement de l'Union africaine; Association pour les droits des femmes en développement. Les représentants des organisations suivantes n'ont pas répondu à une demande de renseignements dans les délais voulus : Association des femmes africaines pour la recherche et le développement; Nations Unies - Fonds des Nations Unies pour la population, Bureau régional d’ONU Femmes pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre; Réseau des organisations féminines d'Afrique francophones; Togo – ministère des Affaires sociales, de la Protection de la femme et de la Protection de l'enfance.

Sites Internet, y compris : Afrol News; Agence togolaise de presse; AllAfrica.net; Allemagne – Bureau fédéral de l'asile et de la migration; Child Rights International Network; ecoi.net; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme; International Center for Research on Women; Lexadin; Liberté-Togo; Minority Rights Group International; Nations Unies – Fonds des Nations Unies pour la population, Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Refworld; Parrainage Africa-Suisse; Radio France internationale; Royaume-Uni – Home Office; Say No to Violence Against Women; Togo – ministère de la Justice, RepublicofTogo.com; Togo Confidentiel; UFC Togo.

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