Iraq: Honour-based violence in the Kurdistan region; state protection and support services available to victims [IRQ105424.E]

Iraq : information sur la violence au nom de l’honneur dans la région du Kurdistan; la protection offerte par l’État et les services de soutien offerts aux victimes

Direction des recherches, Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Aperçu

Selon des sources, la violence au nom de l’honneur est [traduction] « courante » (The Economist 18 mars 2014) ou « fréquente » au Kurdistan iraquien (GCHR 31 déc. 2014). Selon un rapport fondé sur une mission d’enquête du Service de l’immigration du Danemark (Danish Immigration Service - DIS) sur les crimes d’honneur perpétrés contre les hommes au Kurdistan, plusieurs sources kurdes sont d’avis que

[traduction]

la façon dont le concept de l’honneur est traité varie quelque peu entre les régions rurales et les régions urbaines. […] les crimes d’honneur [sont] courants dans les régions rurales et, dans une moindre mesure, dans les grandes villes de la KRI [région du Kurdistan iraquien (Kurdistan Region of Iraq - KRI)]. […] les crimes d’honneur sont plus courants en région rurale que dans les grandes villes. […] la majorité des Iraquiens, y compris les Kurdes, sont associés dans une certaine mesure à leur collectivité tribale, indépendamment du fait qu’ils vivent dans une région urbaine ou rurale (Danemark 2010, 4).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant de WADI, une ONG allemande menant des activités au Kurdistan iraquien qui s’emploie à [traduction] « combattre la violence à l’endroit des femmes » et à améliorer leur « statut social et économique dans la société iraquienne » (WADI 22 janv. 2016), a déclaré que [traduction] « la fréquence et l’attitude de la société entre les régions rurales et les régions urbaines ne varient pas beaucoup, parce qu’il n’y a pas longtemps, tous les citadins vivaient à la campagne » (ibid. 25 janv. 2016).

Des sources déclarent que la violence fondée sur l’honneur est liée à la croyance selon laquelle l’honneur de la famille repose sur la conduite et le comportement sexuels de ses membres féminins (Huffington Post 17 juill. 2014; The Guardian 17 mars 2013; PassBlue 6 mai 2014). Citant le coordonnateur de Zhyan, un groupe qui fait pression sur le gouvernement du Kurdistan iraquien pour [traduction] « mettre fin aux meurtres au nom de l’honneur », le Huffington Post déclare que dans la société kurde, la femme est [traduction] « considérée comme appartenant à [sa] famille, puis à [son] époux », et que les hommes de la famille peuvent contrôler les mouvements et le comportement de la femme, et le choix de son époux (Huffington Post 17 juill. 2014). De même, dans un article rédigé par Aisha K. Gill, une [traduction] « chargée d’enseignement en criminologie à l’Université de Roehampton » dont les recherches portent particulièrement sur « la violence "au nom de l’honneur" dans la diaspora sud-asiatique et kurde et les féminicides au Kurdistan iraquien » (Gill 14 mars 2014), on peut lire qu’au Kurdistan iraquien, [traduction] « les codes "d’honneur" […] sont largement et profondément ancrés dans des points de vue articulés autour de valeurs et traditions axées sur le sexe qui légitiment le contrôle du corps et du comportement des femmes par les hommes » (ibid. 4 juin 2014). Selon des sources, les situations qui suivent peuvent être considérées comme une offense à l’honneur de la famille :

  • activité sexuelle en dehors du mariage (PassBlue 6 mai 2014; WADI 11 janv. 2016b; Huffington Post 17 juill. 2014);
  • tenue vestimentaire non convenable (ibid.; The Atlantic 30 avr. 2015);
  • être victime de viol (WADI 11 janv. 2016b; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 26);
  • contact avec un homme non membre de la famille (Huffington Post 17 juill. 2014; PassBlue 6 mai 2014; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 26);
  • mariage sans l’autorisation de la famille (WADI 11 janv. 2016b; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 26).

Des sources déclarent que la femme ou la fille coupable peut être tuée pour que l’honneur de la famille soit rétabli (ibid.; ICSSI 7 mars 2013; Gill 4 juin 2014). Selon l’article d’Aisha Gill, la violence au nom de l’honneur peut prendre les formes suivantes :

[traduction]

violence physique (notamment être battue, estropiée ou tuée), suicide forcé (notamment être forcée à s’immoler), inanition, mariage forcé (souvent à un homme qui l’a déjà violée), avortement forcé, enlèvement de ses enfants, mutilation génitale, virginité forcée, réfection forcée de l’hymen, ainsi que privation de liberté, de droits fondamentaux et/ou d’éducation (ibid.).

De même, selon l’Atlantic, les tentatives de contrôler la sexualité d’une femme ou d’une fille peuvent commencer sans violence, par [traduction] « des restrictions imposées à sa vie sociale, à son accès à l’éducation, aux soins de santé et aux possibilités d’emploi, ainsi qu’à sa participation civique » (The Atlantic 30 avr. 2015). Si ces moyens ne portent pas leurs fruits, elle [traduction] « peut faire l’objet de menaces, de harcèlement, d’agression, de viol, d’enlèvement, de torture et même de meurtre » (ibid.).

Selon le Huffington Post, les auteurs de ces actions peuvent être les époux, les pères, les frères, les oncles ou les fils (17 juill. 2014). D’après le Guardian, [traduction] « [l]es écarts par rapport au rôle lié au sexe sont souvent punis par les membres du propre cercle intime de la victime » (17 mars 2013). De même, selon l’Atlantic, la violence au nom de l’honneur est [traduction] « sanctionnée par la collectivité », et « plusieurs auteurs au sein de la maisonnée ou membres de la collectivité » peuvent y prendre part (30 avr. 2015). On peut lire dans l’article d’Aisha Gill que la [traduction] « majorité des meurtres commis au nom de "l’honneur" sont […] [commis] par des hommes […] à l’endroit de femmes de la famille » (Gill 4 juin 2014).

Le représentant de WADI a déclaré que [traduction] « le nombre officiel de meurtres au nom de l’honneur est de 50 à 60 par année » pour la [KRI], mais que ce nombre est probablement sous-évalué, car les cas « ne sont pas correctement consignés », seuls ceux pour lesquels il y a eu visite au poste de police ou à l’hôpital étant comptés (WADI 25 janv. 2016). De même, d’autres sources déclarent que, souvent, les actes de violence au nom de l’honneur ne sont pas signalés (The Guardian 17 mars 2013; PassBlue 6 mai 2014; Gill 14 mars 2014).

Selon un rapport publié par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme au sujet de la situation en Iraq entre juillet et décembre 2013, la Direction de lutte contre la violence à l’endroit des femmes (Directorate of Combating Violence Against Women - DCVAW) du Kurdistan iraquien a signalé 2 353 allégations de violence à l’endroit des femmes entre juillet et novembre 2013, y compris 2 141 cas de violence physique, 132 cas d’auto-immolation, 46 cas de violence sexuelle et 23 meurtres (Nations Unies juin 2014, 16). D’après les Country Reports on Human Rights Practices for 2014 publiés par le Département d’État des États-Unis, il y a eu, entre janvier et mai 2014, 58 cas d’agression sexuelle, 100 cas [traduction] « [d’]immolation de femmes par d’autres », 42 cas « [d’]auto-immolation de femmes », 10 suicides de femmes, et 18 cas de meurtres présumés de femmes au Kurdistan iraquien (É.-U. 25 juin 2015, 58). Selon un rapport conjoint intitulé The Lost Women of Iraq: Family-based Violence During Armed Conflict et publié en 2015 par le Centre Ceasefire pour les droits civils (Ceasefire Centre for Civilian Rights) et par Minority Rights Group International (MRG), 66 meurtres, 85 suicides, 314 cas [traduction] « [d’]immolation » et 160 cas « [d’]auto-immolation » ont été signalés à la DCVAW entre janvier 2014 et juin 2015 (nov. 2015, 18). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel concernant la violence au nom de l’honneur.

1.1 Auto-immolation

Des sources déclarent que l’auto-immolation est une forme de violence au nom de l’honneur, car la femme peut choisir de s’immoler pour échapper à sa situation dans la famille (Huffington Post 17 juill. 2014; The Economist 18 mars 2014; WADI 11 janv. 2016a). Selon PassBlue, une [traduction] « publication numérique indépendante » qui se concentre sur « les droits des femmes et l’égalité des sexes, les droits de la personne, le développement, la justice internationale et le maintien de la paix dans l’optique des Nations Unies » (PassBlue s.d.), l’auto-immolation peut aussi être considérée comme un [traduction] « sacrifice pour méfait » (ibid. 6 mai 2014). D’autres sources affirment que les victimes d’auto-immolation peuvent avoir été [traduction] « contraintes » à agir ainsi par des membres de leur famille (Gill 4 juin 2014; Open Democracy 12 mai 2015; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 16). Des sources soulignent que la majorité des cas d’auto-immolation sont déclarés des [traduction] « accidents » (Huffington Post 17 juill. 2014; Open Democracy 12 mai 2015). On peut lire dans les Country Reports 2014 que

[traduction]

[c]ertaines familles font en sorte que les meurtres au nom de l’honneur aient l’apparence de suicides. Comme dans [la KRI] certaines femmes suicidaires avaient choisi l’immolation comme moyen de se tuer, les autorités ont à l’occasion refusé de faire enquête sur certains cas (É.-U. 25 juin 2015, 59).

1.2 Hommes victimes de violence au nom de l’honneur

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu de renseignements sur les hommes victimes de violence au nom de l’honneur. Citant le représentant national de Diakonia, une organisation de développement international (Diakonia 27 sept. 2013) à Dahuk, le rapport de la mission d’enquête du Danemark signale que [traduction] « les hommes courent tout autant le risque d’être victimes de crimes d’honneur que les femmes » (Danemark 2010, 3). Par contre, le représentant de WADI estime que les garçons et les hommes sont [traduction] « peu susceptibles » d’être victimes de violence au nom de l’honneur au Kurdistan iraquien, et quand ils le sont, « la plupart » du temps c’est pour des motifs « [d’]homosexualité présumée » (WADI 25 janv. 2016). De même, dans un article de mars 2014, Aisha Gill écrit que

[traduction]

le déshonneur causé par des hommes découle, pour la plupart du temps, de leur comportement à l’égard d’une femme, notamment i) choix d’une amoureuse et/ou d’une partenaire sexuelle, ii) refus de contracter un mariage arrangé, iii) se déclarer gai, bisexuel ou transgenre, et/ou iv) refus de commettre un acte de violence au nom de l’honneur. Cependant, il n’en demeure pas moins que la majorité des victimes sont des femmes et la majorité des auteurs, des hommes (Gill 14 mars 2014).

Selon le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, les hommes sont [traduction] « à l’occasion » victimes de violence au nom de l’honneur, et on les tue « parfois » pour rétablir l’honneur de la famille offensée (nov. 2015, 26). Selon le rapport du DIS, le père d’une fille ou l’époux d’une femme [traduction] « tuerait très probablement sa fille ou son épouse », respectivement, si celle-ci a eu « une relation sexuelle illicite avec un autre homme. […] Ensuite, l’homme coupable risquerait grandement d’être tué » (Danemark 2010, 7).

Des sources signalent qu’aucune aide n’est disponible pour les hommes victimes de violence au nom de l’honneur (ibid., 9; WADI 25 janv. 2016). Selon le rapport de la mission d’enquête du Danemark, si un homme qui a eu des relations sexuelles en dehors du mariage craignait d’être victime de violence au nom de l’honneur et s’adressait à la police, [traduction] « il est très probable que [celle-ci] offrirait de le protéger. Cependant, le seul moyen pour lui d’être protégé serait d’être gardé en détention », solution non viable à long terme puisque rester en prison n’est « pas une solution durable » (Danemark 2010, 10). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens.

En outre, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement sur la situation des hommes victimes de violence au nom de l’honneur, y compris la protection qui leur est offerte.

2. Cas précis de violence au nom de l’honneur : 2014 à 2016

Selon le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, le 28 février 2014, les dépouilles de deux sœurs de 16 ans et de 18 ans ont été [traduction] « trouvées dans un fossé à Said Sadiq, Souleimniye » (Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 29). Les sœurs avaient demandé l’aide de la police en juillet 2013, et avaient été [traduction] « subséquemment hébergées dans un refuge géré par le gouvernement », puis libérées « après que leur famille a signé une déclaration stipulant qu’elle les protégerait » (ibid.). D’après le rapport, le premier ministre Mechirvan Barzani a créé une commission d’enquête chargée d’examiner le cas (ibid.). Le jour même où on a trouvé les corps des sœurs, une fille de 16 ans [traduction] « a été tuée par son père à Erbil » (ibid.) Selon le rapport conjoint, elle aussi avait demandé à un refuge géré par le gouvernement de la protéger, mais avait été renvoyée chez son oncle par la suite (ibid.). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel, y compris des renseignements sur les conclusions de la commission d’enquête.

Des sources soulignent que, en mai 2014, une fille de 15 ans, Dunya Hassan, a été tuée par son époux de 45 ans, Sleman Zyab Yunis (ibid.; KMEWO [mai 2014]; Huffington Post 17 juill. 2014) qui a enregistré ses aveux sur vidéo, déclarant qu’il avait commis ce meurtre parce qu’il soupçonnait que son épouse avait une liaison (ibid.; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 29). Selon le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, Sleman Zyab Yunis s’est ensuite rendu à la police, et un [traduction] « comité parlementaire spécial » a été créé et chargé de mener une enquête sur cette affaire (ibid.). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel concernant le comité parlementaire.

Nalia Radio and Television (NRT), un réseau média kurde indépendant (NRT s.d.), signale qu’en octobre 2015, une femme de 21 ans a été tuée par balle par son père à Souleimniye après avoir passé presque un an dans un refuge parce qu’elle [traduction] « avait des problèmes dans sa famille » (ibid. 8 oct. 2015). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel.

3. Protection offerte par l’État
3.1 Lois

Des sources déclarent qu’en 2011, la KRI a adopté une loi contre la violence familiale (Nations Unies juin 2015, 16; WADI 25 janv. 2016; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 9). Selon le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, les actes qui constituent de la violence familiale sont, entre autres,

[traduction]

le mariage forcé, le mariage de mineurs, la mutilation génitale des femmes (MGF), forcer des membres de la famille à quitter leur emploi, le suicide en raison de violence conjugale, la maltraitance d’enfants et de membres de la famille, l’agression, maudire ou insulter des membres de la famille, exercer des pressions psychologiques sur des membres de la famille, les relations sexuelles forcées entre mari et femme (ibid.).

Au dire du représentant de WADI, en 2002, l’IKR a modifié la loi pénale iraquienne, incluant les crimes au nom de l’honneur dans la catégorie des meurtres (WADI 25 janv. 2016). Selon le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, en 2004, [traduction] « une loi interdisant les peines atténuées pour les auteurs de crimes "d’honneur" a été adoptée » (nov. 2015, 9).

Selon le Guardian, le gouvernement [traduction] « n’a pas » poursuivi les auteurs de crimes de violence à l’endroit des femmes (17 mars 2013). Open Democracy déclare que l’application des lois contre les meurtres au nom de l’honneur [traduction] « demeure un défi » (12 mai 2015). D’autres sources déclarent de même que la loi contre les meurtres au nom de l’honneur n’est pas [traduction] « appliquée suffisamment » (GCHR 31 déc. 2014), voire pas du tout appliquée (ibid.; WADI 25 janv. 2016).

Citant un membre du Haut conseil de la condition féminine du Kurdistan (Kurdistan High Council of Women’s Affairs), NRT déclare que [traduction] « les meurtriers s’en tirent souvent impunément » (NRT 8 oct. 2015). La même source signale aussi, citant un député, que les partis politiques entravent [traduction] « souvent » le courant de la justice et « évitent aux meurtriers les poursuites en agissant en tant qu’intermédiaires et en organisant des accords de réconciliation » (ibid.). Le Huffington Post cite un [traduction] « avocat et coordonnateur de projet » de WADI qui a déclaré que, « "[q]uelquefois, les coutumes et les lois tribales l’emportent sur les lois nationales" » (Huffington Post 17 juill. 2014). De même, l’Iraq Civil Society Solidarity Initiative (ICSSI), un réseau d’organisations de société civile internationales et iraquiennes qui promeut les droits de la personne (ICSSI 29 oct. 2011), soutient qu’il est [traduction] « difficile » d’appliquer les lois « dans une société régie par des codes d’honneur tribaux, où les chefs de tribu continuent d’être les acteurs qui ont le plus de pouvoir et d’influence dans la résolution des conflits familiaux » (ibid. 7 mars 2013).

3.1.1 Poursuites

Selon le rapport publié en 2014 par les Nations Unies, la DCVAW [traduction] « n’a pu fournir de détails [sur] le nombre d’arrestations et de poursuites » liées à la violence au nom de l’honneur au Kurdistan iraquien (Nations Unies juin 2014, 16-17). D’après le représentant de WADI, aucun auteur de violence au nom de l’honneur [traduction] « n’a eu à purger une peine de prison de plus de deux ans – si même une peine quelconque lui a été imposée » (WADI 25 janv. 2016). La même source a déclaré que pour permettre à une personne d’être libérée rapidement de prison, le juge [traduction] « s’attend à des négociations », et que, quand il y en a, « elles sont faciles, car les deux parties sont de la famille. Celles-ci s’entendent, et l’auteur du crime est libéré » (ibid.). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel concernant les poursuites liées à la violence au nom de l’honneur.

3.2 Police

Il ressort du rapport publié en 2014 par les Nations Unies que [traduction] « de nouvelles unités d’enquêtes policières relevant de la DCVAW ont été créées dans les six zones de la région du Kurdistan au niveau des districts et des sous-districts », et que « la plupart » sont en service (Nations Unies juin 2014, 16). Selon la même source, [traduction] « des comités de réconciliation » ont été créés à Erbil, Dahuk, Garmiyan, Souleimniye et Rapareen (ibid.). On peut lire dans les Country Reports 2014 que la KRI a créé une force policière spéciale chargée [traduction] « d’enquêter sur les cas de violence au nom de l’honneur », ainsi que d’établir un « comité familial de réconciliation », mais que, d’après des ONG locales, « elle ne réussit pas à combattre la violence fondée sur le sexe » (É.-U. 25 juin 2015, 58).

Des sources affirment que la police [traduction] « ne prend pas au sérieux » la violence au nom de l’honneur (PassBlue 6 mai 2014; Ceasefire Centre for Civilian Rights et MRG nov. 2015, 29). La Kurdish and Middle Eastern Women’s Organisation (KMEWO), une ONG établie au Royaume-Uni qui promeut les droits des femmes kurdes et moyen-orientales au Royaume-Uni et à l’étranger (KMEWO s.d.), déclare de même que la police [traduction] « n’a pas la capacité ni la volonté d’offrir […] une protection » (ibid. [mai 2014]). Selon le représentant de WADI, la police [traduction] « ne fera pas enquête parce que les crimes d’honneur sont considérés comme une affaire de famille » (WADI 25 janv. 2016). D’après l’Economist, les agents de police ne sont pas correctement formés et, par conséquent, [traduction] « dirigent rarement » les femmes vers les « endroits sûrs » (The Economist 18 mars 2014). On peut lire dans les Country Reports 2014 que plutôt que de recourir aux moyens juridiques, [traduction] « les autorités tentent fréquemment de jouer le rôle de médiateur entre les femmes et leur famille pour que les femmes puissent retourner chez elles » (É.-U. 25 juin 2015, 58).

En ce qui concerne le meurtre de Dunya Hassan, la KMEWO déclare que,

[traduction]

selon sa mère, Dunya aurait signalé le danger à la police quelques heures à peine avant qu’on ne trouve son corps, et il s’est écoulé des heures avant que la police ne se présente pour faire enquête. Le crime a été commis dans la même petite ville, et pendant de longues heures, aucun agent de police n’a cherché Dunya ni ne s’est inquiété à son sujet. C’est là encore un autre acte d’ignorance de la part des fonctionnaires du Kurdistan iraquien (KMEWO [mai 2014]).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel.

4. Services de soutien

D’après l’Economist, l’aide offerte aux femmes touchées par la violence familiale et les crimes d’honneur au Kurdistan iraquien est [traduction] « minime » (The Economist 18 mars 2014). Selon les Country Reports 2014, les places dans les refuges sont [traduction] « limitées, et les services offerts sont mauvais » (É.-U. 25 juin 2015, 58). WADI soutient que le nombre de refuges disponibles est [traduction] « inadéquat » (WADI 11 janv. 2016a). Le Gulf Center for Human Rights (GCHR), une ONG indépendante qui offre un appui aux défenseurs des droits de la personne dans la région du Golfe (GCHR déc. 2015), affirme que [traduction] « [p]lusieurs » organisations de défense des droits des femmes au Kurdistan iraquien ont des gardes armés pour « les protéger des attaques violentes de la part de la famille des femmes qu’elles ont hébergées […] ou défendues », surtout dans le cas des « crimes d’honneur » (ibid. 31 déc. 2014).

WADI déclare en outre qu’elle a contribué à la création de trois refuges au Kurdistan iraquien, deux à Souleimniye et un autre à Erbil (ibid. 11 janv. 2016b). Le refuge « "Khanzad Home" » à Erbil peut accueillir 20 femmes qui peuvent y demeurer jusqu’à un an, et le Centre Asuda, [traduction] « caché » à Souleimniye, peut accueillir jusqu’à 12 femmes (ibid.). Le Centre Nawa à Souleimniye offre nourriture, logement et aide psychologique, juridique et sociale aux femmes, [traduction] « jusqu’à ce que leurs problèmes soient réglés et leur santé psychologique, stabilisée » (ibid.). Selon le rapport publié en 2014 par les Nations Unies, il y avait 60 femmes dans les refuges du MoLSA [ministère du travail et des affaires sociales (Ministry of Labour and Social Affairs) (É.-U. 25 juin 2015, 58)], [traduction] « 29 à Erbil, 16 à Dahuk et 15 à Souleimniye », et l’Union patriotique du Kurdistan (Patriotic Union of Kurdistan - PUK) gère un [traduction] « refuge privé à Souleimniye » (Nations Unies juin 2014, 17). On peut lire dans les Country Reports 2014 que le MoLSA gère quatre refuges pour femmes, et que deux autres sont gérés par des intérêts privés (É.-U. 25 juin 2015, 58). D’après Al-Monitor, il y a dans la KRI [traduction] « six refuges répartis dans ses trois régions » (Al-Monitor 9 déc. 2013).

Sans plus de détails, WADI déclare que quand il est impossible de régler le problème des [traduction] « menace[s] de mort » par la médiation entre les femmes et leur famille, « les femmes sont envoyées dans des villages et des endroits éloignés d’autres régions du Kurdistan, où personne ne les connaît » et, comme les « crimes d’honneur […] sont condamnés en grande partie par la population kurde iraquienne, les femmes trouvent protection et un nouveau logis dans ces villages » (WADI 11 janv. 2016b). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement allant dans le même sens ni aucun renseignement concernant l’efficacité des mesures de réinstallation.

Selon les Country Reports 2014, au-delà du mariage ou du retour dans leur famille, qui se traduit souvent par [traduction] « plus de mauvais traitements encore par la famille ou la collectivité », les options qui s’offrent aux femmes dans les refuges sont limitées (É.-U. 25 juin 2015, 58). Niqash, un [traduction] « site Internet trilingue (arabe, anglais et kurde) sur la politique, les médias et la culture en Iraq » (Niqash s.d.), cite le directeur de la Direction générale de lutte contre la violence à l’endroit des femmes (General Directorate to Combat Violence Against Women) qui a dit que [traduction] « la plupart » des femmes qui se prévalent des services de refuge retournent chez elles, et « un certain nombre des femmes qui ont quitté les refuges ont été tuées » (ibid. 20 nov. 2014). Le directeur de la Direction générale a aussi déclaré que, à la suite de ces cas, les enquêteurs [traduction] « doivent prouver que la femme ne subira pas de préjudice si elle rentre chez elle » (ibid.). Selon la même source, l’engagement que prennent les familles [traduction] « ne suffit pas à les arrêter de tuer leurs filles […] surtout s’il y va de l’honneur » (ibid.). D’après le rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG, [traduction] « un grand nombre » des femmes qui avaient quitté les refuges risquaient d’autres préjudices de la part de leur famille, et ceci constitue la preuve des « graves lacunes du système des refuges » (nov. 2015, 30).

Selon Open Democracy, la démarche d’obtention d’une protection est juridiquement et psychologiquement [traduction] « difficile », ainsi que « largement accompagnée d’opprobre social » (Open Democracy 12 mai 2015). Il ressort du rapport conjoint de 2015 du Centre Ceasefire pour les droits civils et de MRG que [traduction] « la honte associée au divorce et le fait qu’elles dépendent financièrement de leur partenaire peuvent décourager les femmes de dénoncer la violence conjugale » (nov. 2015, 19).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Références

Al-Monitor. 9 décembre 2013. Amal Sakr. « Iraqi Government Rejects Plans for Women’s Shelters ». [Date de consultation : 14 janv. 2016]

The Atlantic. 30 avril 2015. « Honour Killings in America ». [Date de consultation : 22 janv. 2016]

Ceasefire Centre for Civilian Rights et Minority Rights Group International (MRG). Novembre 2015. Miriam Puttick. The Lost Women of Iraq: Family-Based Violence During Armed Conflict. [Date de consultation : 22 janv. 2016]

Danemark. 2010. Danish Immigration Service (DIS). Honour Crimes Against Men in Kurdistan Region of Iraq (KRI) and the Availability of Protection. [Date de consultation : 14 janv. 2016]

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Autres sources consultées

Sources orales : Agrégé supérieur de recherche, The Center for Gender and Violence Research, University of Bristol; Kurdish and Middle Eastern Women’s Organisation; professeur de criminologie, University of Roehampton; professeur émérite, Sociology, University of Bristol; professeur invité, Department of Sociology, Uppsala University; Roj Women’s Association.

Sites Internet, y compris : Alliance for Kurdish Rights; Amnesty International; ecoi.net; Factiva; Human Rights Watch; The Kurdistan Tribune; Nations Unies – Refworld; Qantara; Roj Women’s Association.

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