General information on the cultural, demographic and religious background of the Kurds. [ZZZ22068.EX]

Le Kurdistan1, ou [traduction] « la terre des Kurdes », abrite la grande majorité des Kurdes (Van Bruinessen 1992, 11; The Encyclopaedia of Islam 1986a, 439-440; More 1984, 21). Le Kurdistan couvre une région très montagneuse et comprend actuellement des parties de quatre pays : la Turquie, l'Iraq, l'Iran et la Syrie. L'Arménie et l'Azerbaïdjan ont également d'appréciables populations kurdes avoisinantes (The Encyclopaedia of Islam 1986a, 439-440; FIDH janv. 1995, 5; Van Bruinessen 1992, 11). Le Kurdistan occupe une position géographique stratégique dans le Moyen-Orient, riche en ressources naturelles; mentionnons notamment des champs de pétrole, des terres fertiles et des gisements minéraux (Chaliand févr. 1992, 34; Gunter 1992, 1; Van Bruinessen 1992, 13). La présente réponse fournira principalement de l'information générale sur les Kurdes de Turquie, d'Iran et d'Iraq.

Plusieurs sources ont attesté la difficulté d'établir une carte précise du Kurdistan2 puisque la question des frontières fait l'objet de nombreux débats (Bulloch et Morris 1992, 52-53; MRG sept. 1991, 8; The Encyclopaedia of Islam 1986a, 439-440). Les frontières du Kurdistan n'ont jamais été définies avec précision et, selon The Encyclopaedia of Islam, [traduction] « l'étendue nominale du Kurdistan [a] varié [...] au fil des siècles » (Ibid.).

Les Kurdes représentent la majorité de la population dans plusieurs provinces du sud-est de la Turquie, y compris Mardin, Siirt, Hakkari, Diyarbakir, Bitlis, Mus, Van et Agri (Gunter 1990, 6). Cette même source ajoute [traduction] « [qu']un nombre important de Kurdes vivent également dans les provinces voisines d'Urfa, d'Adiyaman, de Malatya, d'Elazig, de Tunceli, d'Erzincan, de Bingol, et de Kars » (Ibid.; voir aussi The Encyclopaedia of Islam 1986a, 439; More 1984, 30).

Les Kurdes d'Iraq vivent dans les départements d'Erbil, de Sulaymaniyah et de Dohuk, dans les districts de Zakho, d'Amadiya et d'Aqra et dans les provinces de Kirkouk, de Salahadin (Tikrit), de Mossoul et de Kiyala (Khanagin et Mandali) (More 1984, 30; voir aussi The Encyclopaedia of Islam 1986a, 440). Les Kurdes yézidis (voir la section sur les minorités religieuses kurdes) vivent à Shaykhan et à Sindjar (ibid.; More 1984, 30).

En Iran, les Kurdes occupent les régions montagneuses du Nord-Ouest, le long des frontières turques et iraquiennes (MRG oct. 1979, 1; Iran: A Country Study 1989, 89). Selon l'ouvrage intitulé Iran: A Country Study, les Kurdes d'Iran habitent [traduction] « la majeure partie de l'Azerbaïdjan de l'Ouest, tout le Kordestan, une grande partie du Bakhtaran (anciennement connu sous le nom de Kermanshahan) et d'Ilam et des parties du Lorestan » (Ibid.). La même source mentionne que l'on peut trouver de plus petits groupes de Kurdes dans les provinces de Fars, de Kerman, du Baluchestan va Sistan et du Khorasan du Nord (ibid., 90; The Encyclopaedia of Islam 1986a, 440).

Population

Il est difficile non seulement d'établir les frontières du Kurdistan, mais aussi de dénombrer les Kurdes avec précision (Van Bruinessen 1992, 14; IAHRK 1993, 2; Gunter 1990, 6). Les sources kurdes ont tendance à surestimer leur population alors que les représentants du gouvernement sont sujets à minimiser l'importance des minorités (ibid.; MRG sept. 1991, 9; Entessar 1992, 3). Selon le rapport de 1993 de l'Association internationale pour les droits de la personne au Kurdistan (International Association for Human Rights in Kurdistan - IAHRK), [traduction] « [l']estimation de 40 millions faite par les sources kurdes est certainement trop élevée alors que celle d'environ 12 millions, qui peut être déduite des sources officielles de l'État, est trop faible » (IAHRK 1993, 2).

Les estimations suivantes découlent des diverses tentatives faites pour dénombrer la population kurde au Moyen-Orient : ils seraient entre 9,6 et 12 millions en Turquie; entre 5 et 7 millions en Iran; entre 3 et 4,1 millions en Iraq; entre 800 000 et 1 million en Syrie et entre 300 000 to 500 000 dans l'ancienne Union soviétique (MRG sept. 1991, 9; ibid. 1990, 195; Third World Quarterly 1992, 475; Chaliand févr. 1992, 34). Toutefois, il est généralement accepté que les Kurdes constituent l'un des plus importants groupes ethniques au monde qui ne dispose pas de leur propre État (FIDH janv. 1995, 5; Gunter 1990, 1; MRG sept. 1991, 6).

Les origines des Kurdes

Les origines anthropologiques précises du peuple kurde demeurent inconnues (More 1984, 47). Plusieurs sources s'entendent toutefois pour dire qu'il y a un fondement à la théorie selon laquelle les Kurdes ne sont pas constitués d'un seul groupe ethnique, mais plutôt d'un amalgame de plusieurs groupes (ibid.; MRG sept. 1991, 9; Bulloch et Morris 1992, 57). L'IAHRK souligne que les plus anciennes mentions connues de tribus vivant dans les montagnes du Zargos, aujourd'hui le Nord-Ouest de l'Iran, remontent à environ 3 000-2 000 ans avant J.-C. (IAHRK 1993, 1; voir aussi Gunter 1990, 5). Selon le Groupe de défense des droits des minorités (Minority Rights Group ? MRG), au début du VIIe siècle de notre ère, [traduction] « le terme "Kurde" était utilisé pour désigner un amalgame de tribus iraniennes ou iranisées, certains autochtones (possiblement des Kardus?), certains peuples sémitiques et, probablement, certaines communautés arméniennes » (MRG sept. 1991, 9; Third World Quarterly oct. 1989, 83). Nader Entessar, professeur de sciences politiques et de relations internationales au Spring Hill College, a écrit que [traduction] « [l]es Kurdes d'aujourd'hui font remonter leurs origines aux Mèdes, une tribu indo-européenne descendue de l'Asie centrale jusqu'au Plateau iranien vers 614 avant J.-C. » et dont les descendants se sont mêlés aux autres groupes ethniques qui habitaient également cette région (Entessar 1992, 3). Martin Van Bruinessen corrobore cette information et ajoute que [traduction] « les Mèdes [...] sont peut-être les principaux ancêtres des Kurdes d'aujourd'hui » (Van Bruinessen 1992, 115-116; voir aussi Gunter 1990, 5).

Langue

Les Kurdes ont une culture linguistique diversifiée et ils ne parlent pas une langue couramment comprise par tous (Entessar 1992, 4-5; voir aussi Chaliand févr. 1992, 38). Certaines sources font état de langues kurdes alors que d'autres, de dialectes kurdes; il existe un certain différend entre les universitaires, à savoir si les vernaculaires que les Kurdes utilisent sont en fait des langues distinctes ou différents dialectes d'une même langue (Mango 1994, 35; Entessar 1992, 4). Toutefois, une source soutient que [traduction] « les variations entre [les langues kurdes] [...] sont "beaucoup trop importantes, selon un quelconque critère linguistique, pour justifier la classification de ces langues comme des dialectes d'une même langue" » (Ibid.; voir Mango 1994, 35; Van Bruinessen 1992, 21-22; IAHRK 1993, 1; Bulloch et Morris 1992, 56, pour obtenir plus d'information sur les langues et les dialectes kurdes).

La majorité des universitaires reconnaissent que les trois principales langues ou principaux dialectes kurdes sont le kurmanji, le sorani ou kurde3 et le zaza (Entessar 1992, 4-5; IAHRK 1993, 1; Bulloch et Morris 1992, 56). Les sources s'entendent pour dire que ces dialectes ou ces langues [traduction] « sont dans certains cas mutuellement incompréhensibles, car il existe de grandes différences tant au niveau du vocabulaire que de la grammaire » (Ibid.; Van Bruinessen 1992, 21-22; Entessar 1992, 4-5).

Le kurmanji, très répandu, se scinde en dialectes kurmanji du Nord et kurmanji du Sud (ibid.; Iran: A Country Study 1989, 89; voir aussi IAHRK 1993, 1). Selon Entessar, le kurmanji est [traduction] « à toutes fins pratiques la langue littéraire des Kurdes » (Entessar 1992, 4; voir aussi Mango 1994, 35). Le kurmanji du Nord est surtout parlé par les Kurdes de la région du Caucase de l'ancienne Union soviétique alors que le dialecte du Sud est utilisé au Kurdistan central (Entessar 1992, 4). Le kurde est parlé par la majorité des Kurdes d'Iran et par les Kurdes du Sud de l'Iraq, [traduction] « qui vivent au sud du Grand Zab » (Mango 1994, 35-36; Entessar 1992, 4). Le Groupe de défense des droits des minorités a mentionné que le kurde est devenu [traduction] « la langue officielle des Kurdes » en Iraq (MRG sept. 1991, 9). Le zaza est principalement parlé dans le Nord-Ouest du Kurdistan (Van Bruinessen 1992, 22; Entessar 1994, 5), y compris dans la province de Tunceli (Dersim), en Turquie (Mango 1994, 35). Selon une source, [traduction] « le zaza est la langue littéraire kurde la moins avancée » (Entessar 1994, 5).

Toutefois, malgré ces différences, les langues kurdes partagent une origine linguistique dans le Nord-Ouest de l'Iran (MRG sept. 1991, 9; IAHRK 1993, 1; Bulloch et Morris 1992, 56; Van Bruinessen 1992, 21) et elles sont plus rapprochées du perse que de toute autre langue arabe (Entessar 1992, 4). Le relief montagneux du Kurdistan, l'absence d'un organe administratif central kurde et la situation géopolitique moderne, laquelle a séparé les Kurdes entre plusieurs États distincts, ont contribué à créer ce qui est appelé [traduction] « l'hétérogénéité des langues kurdes » (Ibid.).

Religion

Hormis de plus petits groupes chrétiens, yézidis, zoroastriens et [traduction] « quelque 200 familles juives dans la ville de Sanandaj, en Iran », la majorité des Kurdes sont musulmans (Entessar 1992, 5; voir aussi State of the Peoples 1993, 185). Environ les deux tiers des Kurdes sont des musulmans sunnites de l'école ou du rite chaféite4 (Entessar 1992, 5; Van Bruinessen 1992, 23; Chaliand févr. 1992, 38). Mis à part les Kurdes chiites de la région de Kermanshah, en Iran, les Kurdes se distinguent habituellement sur le plan religieux des personnes des États qu'ils habitent; même si la majorité des Turcs et des Arabes de la région sont également des musulmans sunnites, ils sont de l'école hanafite (ibid.; Van Bruinessen 1992, 23; MRG sept. 1991, 10). Des parties de l'Iraq et de l'Azerbaïdjan ainsi que la majorité de l'Iran sont peuplés de musulmans chiites (Van Bruinessen 1992, 23; voir aussi Entessar 1992, 5).

Les minorités religieuses kurdes

La majorité des Kurdes alévis ou alaouites5 habitent le Nord-Ouest du Kurdistan, ou Centre-Est de la Turquie, et ils sont [traduction] « largement répandus dans les provinces de Maras, de Malatya, d'Elazig, de Tunceli et d'Erzincan » (IAHRK 1993, 2; McDowall mai 1994, 4). On évalue qu'il y a 15 millions d'alévis en Turquie, dont environ 3 millions d'entre eux sont des Kurdes (ibid. 3 oct. 1995; Günlük mars 1992, 2). La religion alévie a été étiquetée comme [traduction] « une lointaine ramification du chiisme » (Bulloch et Morris 1992, 225; MRG sept. 1991, 10) et un universitaire fait valoir que certains groupes alévis [traduction] « peuvent difficilement être qualifiés d'islamiques » (Van Bruinessen 1992, 23; voir aussi Bulloch et Morris 1992, 225). Une autre source a mentionné que les Kurdes alévis de Turquie, qui parlent majoritairement le zaza, font souvent l'objet de soupçons et d'outrages de la part des Turcs et de certains Kurdes (ibid.). Cette situation est peut-être attribuable au fait que la majorité des alévis sont communément considérés comme étant [traduction] « dangereusement gauchistes » par de nombreux Turcs, et ce, même si [traduction] « seulement une minorité [d'alévis] appuient des organisations illégales » (McDowall mai 1994, 4). La religion alévie fait également la distinction entre le groupe et la population sunnite, autant turque que kurde (ibid.; Günlük mars 1994, 2).

Une source a mentionné que [traduction] « certains affirment que les croyances et les cérémonies religieuses alévies sont les actes de sectes hérétiques » (Ibid.). En plus de ce que le chercheur David McDowall appelle [traduction] « le déni de l'État de toute identité kurde », les Kurdes alévis sont [traduction] « une minorité dénigrée d'une minorité dénigrée » (McDowall 3 oct. 1995; ibid. mai 1994, 4).

Selon une source citée par Middle Eastern Studies, il y a actuellement plus de 200 000 yézidis (yazidis, ézidis) dans le monde et la plupart d'entre eux, environ 120 000, se trouvent en Iraq (Middle Eastern Studies oct. 1992, 994). Selon d'autres sources, le nombre de yézidis se situe seulement entre 70 000 et 100 000 et ceux-ci vivent principalement dans la région de Mossoul, en Iraq (More 1984, 38; Bulloch et Morris 1992, 225; voir aussi Van Bruinessen 1992, 24). En outre, il y aurait 60 000 yézidis vivant dans le Caucase, où ils constituent la majorité de la population kurde d'Arménie (Middle Eastern Studies oct. 1994, 994; voir aussi MRG sept. 1991, 10), 20 000 autres en Turquie et en Allemagne, et 10 000 en Syrie (Middle Eastern Studies oct. 1994, 994). Les yézidis parlent le kurmanji et ils sont exclusivement kurdes (Van Bruinessen 1992, 24; MRG sept. 1991, 10). Les croyances yézidies incorporent les aspects de plusieurs religions importantes dans la région, y compris le zoroastrisme, l'islam, le christianisme nestorien, le judaïsme et le manichéisme (Bulloch et Morris 1992, 224; MRG sept. 1991, 10). Les yézidis, péjorativement appelés les [traduction] « adorateurs du diable » par les membres d'autres religions (Van Bruinessen 1992, 23; Middle Eastern Studies oct. 1994, 995; Chaliand févr. 1992, 39; Bulloch et Morris 1992, 225), [traduction] « nient l'existence du mal et croient à la dualité entre Dieu et Malak Taus, Satan, qu'ils croient être un agent de la volonté divine » (Ibid.; voir aussi More 1984, 38-39; Middle Eastern Studies oct. 1994, 995). Plusieurs sources ont mentionné qu'en raison de la nature peu orthodoxe de la religion yézidie et des allégations d'adoration du diable, de nombreux yézidis ont été maltraités au cours des siècles par des Turcs, d'autres Kurdes et des Arabes (Bulloch et Morris 1992, 225; Middle Eastern Studies oct. 1994, 993; MRG sept. 1991, 10; Chaliand févr. 1992, 39).

Le Ahl-e Haqq, ou Peuple de la vérité, se trouve principalement dans le Sud et le Sud-Est du Kurdistan autour de Kermanshah et de Kirkuk et la majorité de ses membres parlent le gourani, dialecte kurde propre à cette région (Van Bruinessen 1992, 23; MRG sept. 1991, 10; Chaliand févr. 1992, 38-39; voir aussi Bulloch et Morris 1992, 226). Une source a mentionné que les ahl-e haqq et les alévis [traduction] « partagent la croyance en la réincarnation et aux incarnations successives de la divinité sous forme humaine, et bon nombre de leurs rituels sont semblables » (Van Bruinessen 1992, 23; voir aussi The Encyclopaedia of Islam 1986b, 261 pour de l'information sur les ahl-e haqq). Selon un article de 1994 de l'International Journal of Middle East Studies, les [traduction] « ahl-e haqq ont été - et dans une certaine mesure sont encore - étiquetés comme des hérétiques et ils ont fait l'objet de la persécution religieuse de leurs voisins "orthodoxes" » (International Journal of Middle East Studies 1994, 268).

Tribalisme

La société kurde traditionnelle est fondée sur le tribalisme (Gunter 1990, 6; Chaliand févr. 1992, 45; MRG sept. 1991, 11). Le pouvoir et l'influence de l'agha, chef tribal, a évolué à partir d'une tradition de nomadisme et de semi-nomadisme vieille de plusieurs centaines d'années et qui, selon une source, est [traduction] « maintenant presque inexistante » (Ibid.; voir aussi Gunter 1990, 6; Nisan 1991, 27-28). Le tribalisme kurde s'appuie sur la loyauté à la famille et au territoire (MRG sept. 1991, 11; Van Bruinessen 1992, 51; Chaliand févr. 1992, 45-47), quoiqu'une source fasse valoir que [traduction] « les liens du sang [...] sont souvent plus mythiques que réels [...] [et que] les tribus constituent des alliances de convenance qui changent selon les circonstances » (Bulloch et Morris 1992, 75-76; voir aussi MRG sept. 1991, 11; Chaliand févr. 1992, 45-47).

La force ou l'influence du tribalisme historique kurde s'est affaiblie au cours de ce siècle en raison de changements socio-économiques comme la mécanisation, l'urbanisation de la population et l'augmentation du chômage dans les régions kurdes (Entessar 1992, 6-7; MEI 28 avr. 1995, 18; MRG sept. 1991, 11). Toutefois, malgré cette tendance, plusieurs sources ont soutenu que le tribalisme constitue le principal obstacle à l'unité kurde (Gunter 1990, 6; Nisan 1991, 28; FIDH 30 mars-6 avr. 1995, 10). Bulloch et Morris ont écrit que :

[traduction]
[l]a société kurde traditionnelle était divisée en tribus [...]. Le premier devoir du membre d'une tribu était envers sa tribu et son chef, son second était envers sa religion. Le concept d'un devoir national envers les compatriotes kurdes était presque inexistant. Si un chef décrétait qu'il était dans l'intérêt de la tribu de combattre aux côtés d'un État non kurde contre d'autres Kurdes, les membres de sa tribu obéissaient. Encore aujourd'hui, en Turquie et en Iraq, des Kurdes prennent le parti d'Ankara et de Bagdad contre d'autres Kurdes sans avoir le sentiment de trahir une autre cause nationale kurde plus importante (Bulloch et Morris 1992, 75; voir aussi Gunter 1992, 3).

Le rôle débilitant du tribalisme kurde est des plus manifeste au Kurdistan iraquien où des chefs kurdes rivaux sont engagés dans une guerre civile depuis mai 1994 (Middle East Report juill.-août 1994, 7). Dans un article publié dans le Middle East International, David McDowall fait valoir que la rivalité entre le chef du Parti démocratique du Kurdistan (Kurdistan Democratic Party - KDP), Masud Barzani, et le chef de l'Union patriotique du Kurdistan (Patriotic Union of Kurdistan - PUK), Jalal Talabani, est symptomatique de l'émergence d'une nouvelle forme de tribalisme kurde (MEI 28 avr. 1995, 18). Même s'il concède que le rôle du tribalisme traditionnel et le pouvoir des aghas ont diminué avec le temps, M. McDowall soutient que :

[traduction]
Peu importe si les Kurdes vivent en ville ou à la campagne, des protecteurs leur sont encore nécessaires - peut-être plus que jamais - à l'égard de l'emploi, des matériaux de construction, de l'achat ou de la vente de marchandises rares, de la protection et des approvisionnements de secours. Les chefs des deux principaux partis ont maintenant pris le rôle autrefois joué par les chefs suprêmes et nous sommes témoins de l'éclosion du néo-tribalisme. Les ressemblances entre l'ancien et le nouveau tribalisme sont frappantes : les deux fonctionnent grâce à des partisans très loyaux et, aux moyens de ceux-ci, ils obtiennent la loyauté de plusieurs « tribus » (Ibid.).

Une source fait valoir que les Kurdes ont [traduction] « le sentiment de partager une identité, une communauté et un espace» et elle souligne que les Kurdes vivent encore dans des [traduction] « régions contiguës » à la Turquie, à l'Iraq, à l'Iran et à la Syrie (Third World Quarterly 1992, 475). En outre, les frontières internationales à l'intérieur du Kurdistan tendent à être perméables puisque les Kurdes interagissent avec des groupes et des personnes des pays voisins (Middle Eastern Studies oct. 1994, 989; Gunter 1992, 109-113). [traduction] « L'attachement à la famille et au clan traverse les frontières nationales, et les frontières modernes sont considérées comme n'étant rien de plus qu'un inconvénient encombrant dont il faudrait ne pas tenir compte dans la mesure du possible » (Bulloch et Morris 1992, 54). Le World Directory of Minorities souligne que finalement, malgré leurs nombreuses différences, [traduction] « les Kurdes constituent effectivement une communauté unique qui dispose de sa propre culture émanant d'un passé nomade ou semi-nomade, de liens du sang et d'une loyauté territoriale » (MRG 1990, 197; voir aussi Nisan 1991, 28).

Cette réponse a été préparée par la DGDIR à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la DGDIR a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse ne prétend pas être un traitement exhaustif du pays étudié, ni apporter de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile ou de statut de réfugié.

Références


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Documents annexés


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Laizer, Sheri. 1991. Into Kurdistan. Londres : Zed Books Ltd, s.p.

Van Bruinessen, Martin. 1992. Agha, Shaikh and State: The Social and Political Structures of Kurdistan. Londres : Zed Books, s.p.

NOTES

1 Dans cette réponse, le terme « Kurdistan » est utilisé pour désigner un territoire historiquement habité par les Kurdes; il ne sert pas à désigner une entité politique.

2 Veuillez consulter les extraits annexés tirés des textes de Sheri Laizer, Into Kurdistan, et de Martin Van Bruinessen, Agha, Shaikh and State.

3 Le kurde et le sorani sont une même langue (Mango 1994, 36; MRG sept. 1991, 9) et M. Entessar souligne que le kurde comprend également les dialectes gurani et sulaymani (Entessar 1992, 4; voir aussi Van Bruinessen 1992, 22).

4 Il existe quatre écoles de charia dans l'islam sunnite : hanafite, malékite, chaféite et hanbalite (Contemporary Religions: A World Guide 1992, 163). Veuillez consulter l'extrait annexé tiré de Contemporary Religions: A World Guide pour obtenir plus d'information concernant les écoles chaféite et hanafite de la loi musulmane.

5 Pour obtenir de l'information plus détaillée concernant les Kurdes alévis, veuillez consulter le document Briefing Note Regarding the Current Status of Alevi Kurds préparé par David McDowall pour la Commission d'aide juridique de Terre-Neuve en mai 1994 et la réponse TUR22069.E du 16 octobre 1995. Entre 20 p. 100 et 30 p. 100 environ de la population kurde de Turquie est alévie (McDowall 3 oct. 1995; MEI 17 mars 1995, 15).


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