Dokument #1055363
IRB – Immigration and Refugee Board of Canada (Autor)
Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa
Dans un rapport de 2010 publié par Human Rights Watch et intitulé Harsh War, Harsh Peace: Abuses by al-Shabaab, the Transitional Federal Government, and AMISOM in Somalia, le soufisme est décrit comme une [traduction] « souche mystique de l'islam à laquelle les Somaliens adhéraient traditionnellement » (29 avr. 2010, 26). Somalia Report, un site Internet de nouvelles somalien [traduction] « non partisan et financé par des capitaux privés » qui emploie des rédacteurs en chef occidentaux « qui travaillent avec plus de 140 journalistes somaliens dans le pays » (s.d.), décrit le soufisme comme une
[traduction]
secte islamique mystique comptant un nombre considérable d'adeptes en Somalie. Les soufis cherchent à se distancer du monde matériel et, ainsi, à établir un lien avec leur créateur. En Somalie, la présence de la secte remonte au 15e siècle.
La secte soufie a gagné du respect en Somalie parce que ses membres se consacraient entièrement à l'enseignement et à la propagation de l'islam dans le pays (3 mars 2012).
Des sources signalent que la majorité des Somaliens sont des musulmans soufis (BBC 8 juin 2009; É.-U. 30 juill. 2012, 2), plus particulièrement [traduction] « des musulmans sunnites de tradition soufie » (ibid.).
Human Rights Watch précise que le soufisme [traduction] « comprend des pratiques, comme l'adoration des tombes de saints, qui sont considérées comme de l'idolâtrie selon la doctrine wahhabite [1], la forme austère de l'islam à laquelle adhèrent les membres d'al Shabaab » (29 avr. 2010, 26). De même, il est écrit dans l'Annual Report 2011, publié par la Commission des États-Unis (É.-U.) sur la liberté religieuse internationale (United States Commission on International Religious Freedom - USCIRF), qu'al Shabaab considère les soufis comme des [traduction] « apostats », et leurs activités religieuses comme de « [l']idolâtrie » (É.-U. 28 avr. 2011, 303-304). Selon la BBC, les soufis [traduction] « n'adhèrent pas à l'interprétation stricte de l'islam inspirée du wahhabisme de l'Arabie saoudite que préconise le groupe intransigeant al Shabaab » (8 juin 2009). On peut lire dans un document d'information publié en 2014 par l'International Crisis Group qu'al Shabaab est [traduction] « lourdement influencé par les interprétations wahhabites et l'accent que ceux-ci mettent sur l'autorité rigide des saintes écritures (le Coran et la sunna), qui servent d'instructions - de feuille de route théologique - à suivre pour se doter de l'organisation et de la structure nécessaires afin de bâtir [...] un État où règne la droiture morale » (26 juin 2014, 7).
Pour de plus amples renseignements sur al Shabaab, y compris les zones qu'il contrôle, le recrutement et les groupes affiliés, veuillez consulter la Réponse à la demande d'information SOM104662.
En 2009, Reuters a affirmé qu'al Shabaab [traduction] « avait ciblé des lieux sacrés et des chefs religieux soufis par le passé, sous prétexte que leurs pratiques allaient à l'encontre de l'interprétation stricte que les insurgés faisaient de la loi islamique » (19 oct. 2009). Il est écrit dans le rapport de 2010 de Human Rights Watch qu'en 2008 et en 2009, des membres d'al Shabaab [traduction] » commettaient souvent des actes de violence contre le soufisme » (Human Rights Watch 29 avr. 2010, 26). Des sources signalent les incidents de violence suivants, perpétrés par al Shabaab contre le soufisme depuis 2008 :
Selon le rapport de 2012 publié par l'USCIRF, aucune attaque perpétrée par al Shabaab contre des pratiquants soufis n'a été signalée en 2012 (É.-U. 20 mars 2012, 322).
Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun autre renseignement sur le traitement réservé récemment aux adeptes du soufisme par al Shabaab.
Des sources affirment qu'al Shabaab s'est retiré de Mogadiscio en 2011 (ibid. 27 févr. 2014, 11; Nations Unies 9 avr. 2014; International Crisis Group 26 juin 2014, 2, 9). Selon des rapports récents, des opérations d'offensive militaire somaliennes et africaines permettent de chasser al Shabaab de villes dans le Sud et le Centre de la Somalie (Reuters 15 oct. 2014; International Crisis Group 26 juin 2014, 2); l'opération la plus notable à cet égard est l'opération « Eagle », menée conjointement par la Mission en Somalie de l'Union africaine (African Union Mission to Somalia - AMISOM) et l'armée nationale de la Somalie, qui a débuté en mars 2014 (ibid.). En mai 2014, la DPA a signalé que le groupe al Shabaab, composé d'environ 5 000 combattants, [traduction] « perdait rapidement du terrain face aux forces du gouvernement de la Somalie et de l'Union africaine », lesquelles comptent au moins 8 000 soldats et 24 000 soldats de maintien de la paix respectivement, et se retrouvait « en grande partie confiné aux régions rurales » (DPA 8 mai 2014).
La DPA fait également observer que, depuis qu'al Shabaab a perdu la guerre contre le gouvernement, le groupe [traduction] « se tourne de plus en plus vers des tactiques terroristes comme les attentats suicides, les attentats à la voiture piégée et les assassinats ciblés » (ibid.). Dans un rapport de 2014 publié par le Center for Strategic & International Studies (CSIS), organisation bipartisane à but non lucratif dont le siège se trouve à Washington (s.d.), et intitulé The Reinvention of Al-Shabaab: A Strategy of Choice or Necessity?, il est par ailleurs expliqué que,
[traduction]
[c]omme son infanterie est principalement active en zones rurales et évite généralement les affrontements d'envergure avec l'AMISOM et les forces du gouvernement fédéral de la Somalie, al Shabaab en est venu à se fier énormément sur l'Amniyaad [son unité du renseignement] pour maintenir une présence à Mogadiscio et dans d'autres grandes villes et pour prouver que le groupe a toujours la capacité de combattre. Les tactiques, techniques et procédures les plus communes de l'Amniyaad comprennent les assassinats ciblés, l'utilisation de grenades ainsi que d'engins explosifs improvisés (févr. 2014, 7).
On peut lire ce qui suit au sujet des activités terroristes récentes d'al Shabaab dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2013 sur la Somalie publiés par le Département d'État des États-Unis :
[traduction]
Al Shabaab a continué à tuer des civils, notamment en commettant des assassinats politiques ayant pour cibles des civils affiliés au gouvernement, de même que des attaques visant des travailleurs humanitaires, des employés d'ONG, les Nations Unies et les missions diplomatiques. Les opérations du groupe ont souvent pris la forme d'attentats suicides ou d'attaques au mortier, ou ont été commises au moyen d'engins explosifs improvisés. Des membres d'al Shabaab ont aussi tué des militants pour la paix très connus, des dirigeants communautaires ainsi que des aînés de clans et des membres de leur famille, en raison de leur rôle dans la consolidation de la paix, et ils ont décapité des personnes que le groupe accusait d'espionnage à la solde des forces nationales de la Somalie et des milices affiliées et de collaboration avec celles-ci (É.-U. 27 févr. 2014, 12).
Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement sur les attaques ciblées perpétrées récemment par al Shabaab contre des pratiquants du soufisme à Mogadiscio. L'information qui suit peut toutefois s'avérer utile.
Des sources font état des attaques suivantes perpétrées par al Shabaab à Mogadiscio en 2014 :
Pour de plus amples renseignements sur les attaques récentes perpétrées par al Shabaab contre des groupes religieux non musulmans, veuillez consulter la Réponse à la demande d'information SOM104854.
D'après un rapport d'octobre 2014 du président de la Commission sur la situation en Somalie (Commission on the Situation in Somalia) de l'Union africaine, l'AMISOM collabore étroitement avec le gouvernement fédéral de la Somalie à Mogadiscio et a déployé deux unités de policiers dans la ville afin de mener des opérations policières conjointes avec la force de police de la Somalie (Union africaine 16 oct. 2014, paragr. 18). Il est précisé dans les Country Reports 2013 qu'au cours de la période couverte par les rapports de 2013, le contingent de la police de l'AMISOM à Mogadiscio comprenait 363 agents (É.-U. 27 févr. 2014, 7).
D'après les Country Reports 2013, il y a deux forces policières dans la capitale : l'une est contrôlée par le gouvernement central fédéral, et l'autre par l'administration régionale de Benadir; toutes deux collaborent avec le contingent de la police de l'AMISOM dans la ville (ibid.). La même source signale qu'en 2013, la force de police fédérale [traduction] « a étendu sa présence jusque dans les 16 districts de Mogadiscio, alors qu'elle n'était auparavant que dans 7 d'entre eux » (ibid.).
On peut lire dans le rapport de 2014 publié par l'Union africaine que
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[c]es opérations [policières] ont contribué à diminuer considérablement le niveau de menace asymétrique à Mogadiscio grâce à des opérations de bouclage et de recherche, des points de contrôle aléatoires, la mise en place de services de police communautaires ainsi que de programmes de sensibilisation communautaires; ces efforts ont permis de récupérer des armes, de neutraliser des explosifs, munitions et engins explosifs improvisés, ainsi que d'arrêter de nombreuses personnes soupçonnées d'être des insurgés d'al Shabaab (16 oct. 2014, paragr. 18).
Selon un article publié en avril 2014 par les Réseaux d'information régionaux intégrés (IRIN) des Nations Unies, [traduction] « trois ans après le retrait des insurgés d'al Shabaab de la ville, la sécurité à Mogadiscio constitue toujours un grave problème pour les habitants et les travailleurs humanitaires, sur qui plane la menace que représentent les criminels, les milices et les incursions d'al Shabaab » (Nations Unies 9 avr. 2014). Il est également écrit dans l'article que des attaques terroristes [traduction] « attribuées à al Shabaab ou à ses partisans » se produisent « très fréquemment » dans la capitale, et que le risque de subir d'autres attaques « demeure élevé » (ibid.). De même, un article publié en 2014 par Reuters rapporte qu'al Shabaab [traduction] « a promis de perpétrer d'autres attaques » après avoir perdu le contrôle d'une importante place forte le long de la côte ce mois-là (15 oct. 2014).
D'après Amnesty International (AI), [version française d'AI] « Al Shaba[a]b reste capable de commettre des attentats meurtriers même dans les zones les mieux gardées » et
[l']absence de discipline et de contrôle au sein des forces armées et des groupes alliés en Somalie signifient que non seulement ceux-ci ne protègent pas les civils, mais qu'ils contribuent en outre à l'insécurité générale. Des éléments criminels, radicaux ou insurgés continuent en outre à infiltrer les forces de sécurité de l'État (4 mars 2014).
Amnesty International a également signalé en octobre 2014 que [traduction] « les gains réalisés à Mogadiscio sur le plan de la sécurité [au détriment d'al Shabaab] sont fragiles et de courte durée » (23 oct. 2014, 2).
Le rapport publié en février 2014 par le CSIS décrit la situation en matière de sécurité dans les zones urbaines comme Mogadiscio en ces termes :
[traduction]
Dans les zones urbaines, il faut s'attendre à ce qu'al Shabaab maintienne des réseaux de soutien et des cellules opérationnelles afin de conserver sa capacité à commettre des assassinats ciblés et des attaques terroristes. Certains de ces réseaux profitent de l'appui tacite de représentants du gouvernement et de membres du parlement, de sorte qu'il est extrêmement difficile pour le gouvernement d'assurer la sécurité.
En outre, non seulement le sentiment d'insécurité qui perdure à Mogadiscio et dans d'autres grandes villes joue en faveur d'al Shabaab sur le plan de la stratégie militaire, mais il permet également au groupe de continuer à extorquer de l'argent du milieu des affaires somalien en échange de sa protection. À moins que le gouvernement fédéral de la Somalie et ses alliés ne soient en mesure d'assurer une sécurité véritable, et tant que ce ne sera pas fait, la « taxe » exigée par al Shabaab continuera fort probablement d'être une source de revenus importante pour le groupe, même dans les secteurs qui sont en principe sous le contrôle du gouvernement (févr. 2014, 12).
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Note
[1] Le wahhabisme, né en Arabie saoudite, a gagné la Somalie dans les années 1970 et 1980 et a été adopté par des groupes soutenus par les milices dans le pays (Human Rights Watch 29 avr. 2010, 26).
Al Jazeera. 12 octobre 2014. « Deadly Car Bomb Explodes Near Mogadishu Cafe ».
Amnesty International (AI). 23 octobre 2014. Forced Returns to South and Central Somalia, Including to Al-Shabaab Areas: A Blatant Violation of International Law.
_____. 4 mars 2014. « UN Security Council Urged to Tighten Arms Embargo on Somalia ».
British Broadcasting Corporation (BBC). 8 juin 2009. Mohamed Mohamed. « Somali Rage at Grave Desecration ».
Center for Strategic and International Studies (CSIS). Février 2014. Matt Bryden. The Reinvention of Al-Shabaab: A Strategy of Choice or Necessity?
_____. S.d. « About Us ».
Deutsche Presse-Agentur (DPA). 8 mai 2014. Mohamed Odowa et Sinikka Tarvainen. « A Weakened Al-Shabaab Resorts to New War Tactics ». (Factiva)
États-Unis (É.-U.). 27 février 2014. Department of State. « Somalia ». Country Reports on Human Rights Practices for 2013.
_____. 28 juillet 2014. Department of State. « Somalia ». International Religious Freedom Report 2013.
_____. 30 juillet 2012. Department of State. « Somalia ». International Religious Freedom Report 2011.
_____. 20 mars 2012. United States Commission on International Religious Freedom (USCIRF). « Somalia ». Annual Report 2012.
_____. 28 avril 2011. USCIRF. « Somalia ». Annual Report 2011.
Human Rights Watch. 29 avril 2010. Harsh War, Harsh Peace: Abuses by Al-Shabaab, the Transitional Federal Government, and AMISOM in Somalia.
International Crisis Group. 26 juin 2014. Somalia: Al-Shabaab - It Will be a Long War. Africa Briefing No. 99.
Nations Unies. 12 juillet 2014. Centre d'actualités de l'ONU. « Somalia: Security Council Strongly Condemns Most Recent Terrorist Attacks in Mogadishu ».
_____. 9 avril 2014. Réseaux d'information régionaux intégrés (IRIN). « Security Downturn in Mogadishu ».
The New York Times. 13 octobre 2014. Mohammed Ibrahim. « Car Bomb Kills at Least 15 in Somalia ».
Reuters. 15 octobre 2014. Feisel Omar. « Somali Militants Kill Five with Car Bomb in Mogadishu ».
_____. 19 octobre 2009. Abdi Sheikh. « Shabaab Rebels Destroy Grave and Mosque in Somalia ».
Somalia Report. 5 mars 2012. « What is the ASWJ? ».
_____. S.d. « About Us ».
Union africaine. 16 octobre 2014. Conseil de paix et sécurité. Report of the Chairperson of the Commission on the Situation in Somalia. (PSC/PR/2.(CDLXII))
Sources orales : Les tentatives faites pour joindre les personnes et organisations suivantes dans les délais voulus ont été infructueuses : président, Canadian Somali Congress; professeur de sciences politiques, Davidson College, Caroline du Nord; professeur de sociologie, Iowa State University; professeur de sciences politiques, Université McGill; professeur de questions sociales et politiques, Monash University, Melbourne, Australie; professeur d'études africaines, North Western University, Illinois; professeur d'histoire, Wellesley College, Massachusetts; représentant, Heritage Institute for Policy Studies; représentant, International Sufi Movement.
Sites Internet, y compris : Africa Confidential; Africa Research Bulletin; AllAfrica; Allsomali24; Associated Press; Brookings Institution; Canadian Somali Congress; Combating Terrorism Center; Danish Immigration Service; Diplomat News Network; ecoi.net; États-Unis – Woodrow Wilson Centre for Scholars; Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme; Freedom House; Horseed Media; Human Rights Quarterly; Internal Displacement Monitoring Centre; Jane's Terrorism Watch Report; Middle East Quarterly; Mogadishu Online; Nations Unies – ReliefWeb; Newstime Africa; Political Handbook of the World; Reporters sans frontières; Sabahi Online; Somali Current; U.S. Committee for Refugees and Immigrants.
Somalia: Situation of practitioners of Sufism in Mogadishu; incidents of violence involving al Shabaab [Al-Shabaab] and practitioners of Sufism; security situation and availability of state protection in Mogadishu (2013-November 2014) [SOM104995.E] (Anfragebeantwortung, Englisch)