The practice of female genital mutilation (FGM); state protection available to victims and to ethnic groups among which the practice is prevalent (2002-February 2005) [KEN43321.FE]

Pratique et fréquence

Trois types de mutilation génitale féminine (MGF) sont pratiqués au Kenya : la clitoridectomie, l'excision et l'infibulation (les deux premières formes étant les plus répandues) (Njue et Askew déc. 2004, 6; NPWJ 18 sept. 2004).

Une enquête menée au Kenya en 2003 sur la démographie et la santé (Kenya Demographic and Health Survey - KDHS) a révélé qu'environ 32 p. cent des femmes kényanes âgées entre 15 et 49 ans avaient subi une mutilation génitale (Kenya juill. 2004, 251). Par rapport au taux de 1998, il s'agit d'une diminution de 6 p. cent sur une période de cinq ans (ibid., 250). Toutefois, l'enquête a montré que la fréquence de la mutilation génitale féminine (MGF) variait en fonction de certains facteurs, dont l'âge des femmes, leur niveau d'instruction et leur appartenance ethnique (ibid., 250-251).

Ainsi, chez les femmes âgées entre 15 et 19 ans, 20 p. cent avait subi une mutilation génitale, comparativement à 48 p. cent dans le cas des femmes âgées entre 45 et 49 ans; 36 p. 100 des femmes vivant en milieu rural avaient subi une mutilation génitale, contre 21 p. 100 dans les villes; environ 50 p. cent des musulmanes avaient subi une mutilation génitale contre quelque 33 p. cent des non-musulmanes (ibid., 250). En outre, une forte corrélation négative entre le niveau d'instruction et la MGF a été observée (58 p. cent des femmes sans instruction avaient subi une mutilation génitale, alors que cette proportion n'était que de 21 p. cent chez les femmes qui avaient entamé leurs études secondaires) (ibid.).

Les statistiques suivantes montrent le taux de MGF chez les différents groupes ethniques.

[Traduction]

  • Embu (43,6 p. cent)
  • Kalenjin (48,1 p. cent)Kamba (26,5 p. cent)
  • Kikuyu (34,0 p. cent)
  • Kisii (95,9 p. cent)Luhya (0,7 p. cent)
  • Luo (0,7 p. cent)
  • Maasai (93,4 p. cent)Meru (42 p. cent)
  • Mijikenda/Swahili (5,8 p. cent)
  • Somali (97,0 p. cent)
  • Taita/Taveta (62,1 p. cent)
  • Turkana (12,2 p. cent)Kuria (95,9 p. cent)
  • Autres (17 6 p. cent) (ibid., 51).

Il convient de signaler ici que les Kisiis sont également appelés Abagusiis, Gisiis, Guziis, Kissiis, Kisis, Kosovas ou Ekegusiis (Finke 2003).

Par ailleurs, Jane Kamau, coordonnatrice d'un projet mis en oeuvre par le ministère kényan de la Santé et l'organisation allemande pour la coopération technique (Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit - GTZ), signale qu'en matière de MGF, les aînés jouent un rôle prépondérant dans les prises de décision, notamment en déterminant le moment et l'endroit de l'intervention ainsi que la personne qui doit la pratiquer (Kamau 17 sept. 2004).

Cependant, des sources concordantes signalent que la pratique de la MGF devient de plus en plus médicalisée et que des professionnels de la santé (médecins et infirmières) pratiquent souvent ces mutilations, moyennant rémunération (Njue et Askew déc. 2004, iv; Nations Unies 10 mars 2004; WeNews 12 févr.2004).

Attitudes et croyances

Une étude menée auprès des membres des Abagusiis (Kisiis), chez qui le taux de MGF atteint presque 96 p. cent (Kenya juill. 2004, 251; Njue et Askew déc. 2004, 1), a montré que le désir de remplir les obligations culturelles et le souci du bien-être social de la fille étaient les principales raisons invoquées pour justifier la MGF (ibid.). L'étude explique que dans l'esprit des Kisiis, les filles, en subissant une mutilation génitale, limitent leur sexualité, se font respecter davantage et augmentent leurs chances de se trouver un mari (ibid.). La pratique permettrait également aux parents de la fille d'obtenir [traduction] « un meilleur prix pour la future mariée » (ibid.).

Dans un récent article, Gemma Richardson, diplômée en journalisme et en droits de la personne de la Carleton University (Ottawa), qui travaille actuellement avec la Planned Parenthood Federation of America, écrit que chez les Kikuyus, la MGF a pour but [traduction] « de rendre les femmes sexuellement soumises » (2005). Jane Kamau explique qu'en plus de servir de rite de passage (17 sept. 2004; voir également Nations Unies 10 mars 2004), la MGF est censée augmenter [traduction] « la propreté » de la fille, faciliter la recherche d'un mari et rendre les accouchements moins pénibles (Kamau 17 sept. 2004).

Protection offerte par l'État

C'est en 2001 (The Nation sept. 2004; Njue et Askew déc. 2004, 3; BBC 7 févr. 2003) que le Kenya a promulgué une loi interdisant la MGF chez les filles de moins de 18 ans (ibid.; The Nation 22 sept. 2004; Kibaki 16 sept 2004). Connue sous le nom de Children's Act (ibid; Nations Unies 10 mars 2004; Njue et Askew déc. 2004, 3), cette loi stipule dans sa section 18 que toute personne reconnue coupable d'un acte lié à la MGF est passible d'une peine de prison de 12 mois ou d'une amende de 50 000 shillings (environ 670 dollars américains) (ibid. déc. 2004, 4).

Également en 2001, le ministère de la Santé a émis une directive qui interdisait la MGF dans tous les établissements de santé (Njue et Askew déc. 2004, 3). En décembre 2003, le pays a signé le protocole de Maputu, qui stipule notamment, dans son article 5, que la MGF doit être condamnée et interdite (Kibaki 16 sept. 2004).

Par ailleurs, l'État kényan a mis sur pied un plan d'action pluriannuel (1999-2019) pour l'élimination de la MGF (National Plan of Action for the Elimination of FGM in Kenya, 1999-2019) (Jillo 17 sept. 2004). Ce plan vise notamment à accroître le nombre de services de soutien aux victimes et à sensibiliser les différents groupes ethniques au problème de la MGF (ibid.). En outre, le journal The Nation a signalé le 13 octobre 2004 que le gouvernement kényan allait, le mois suivant, ouvrir une ligne téléphonique gratuite (Childline Kenya) permettant aux enfants de signaler toute violence dont ils sont victimes, y compris la MGF.

Certaines sources font valoir que dans les faits, l'application de la loi sur les enfants laisse à désirer (Nations Unies 10 mars 2004; Richardson 2005). Ainsi, selon une représentante de l'organisation pour la promotion sociale des femmes Maendeleo ya Wanamuke (MYOWO), les juges imposent souvent des peines peu sévères à ceux qui enfreignent cette loi (Nations Unies 10 mars 2004). En outre, selon le ministère d'État aux Affaires intérieures du Kenya, les structures nécessaires à l'application efficace de la loi ne sont toujours pas en place (Kilimo 16 sept. 2004). Le ministre a ajouté que beaucoup de députés rechignent encore à aborder le problème de la MGF, car ils craignent de perdre des votes (ibid.).

En effet, la presse continue de faire état d'incidents liés à la MGF. Ainsi, une dépêche du 3 février 2005 de l'agence chinoise de nouvelles Xinhua signale qu'en novembre et en décembre 2004, c'est seulement l'intervention de l'ambassade d'Autriche à Nairobi et d'une église kényane qui a permis à environ 500 écolières d'éviter la mutilation génitale (Njue et Askew déc. 2004, 1). Selon Global Feminist News, une centaine d'élèves, la plupart âgées entre 10 et 18 ans, avaient été forcées, en août 2004, de subir une mutilation génitale dans le district de West Pokot (30 août 2004). Un rapport de la BBC du 7 février 2003 signalait qu'une centaine d'écolières avaient dû se réfugier dans des églises pour échapper à la mutilation génitale que leurs parents cherchaient à leur imposer. Le rapport de la BBC ajoutait qu'environ 700 autres jeunes filles, dans le seul sud-ouest du Kenya, faisaient l'objet de pressions exercées par leurs parents qui voulaient leur faire subir une mutilation génitale (7 févr. 2003).

Citant des données fournies par l'organisation féminine kényane Maendeleo ya Wanamuke, Gemma Richardson fait valoir que la majorité des 38 p. cent des Kényanes qui ont subi l'excision se disent prêtes à imposer cette opération à leurs filles (2005). En outre, on fait subir la MGF à des filles de plus en plus jeunes (entre 7 et 14 ans), dans le but de leur imposer l'opération avant qu'elles soit assez âgées pour s'enfuir (Richardson 2005).

Organisations et actions non gouvernementales

Un rapport des Nations Unies mentionne une organisation non gouvernementale locale appelée Kenya National Focal Point for FGM, dont l'objectif est de coordonner les actions anti-MGF de différents groupes non gouvernementaux partout au pays (10 mars 2004). Le même rapport explique que grâce notamment au travail de diverses ONG, 200 praticiens de la MGF dans la région de la Rift Valley ont accepté d'abandonner cette pratique et de s'y opposer (Nations Unies 10 mars 2004). Par contre, dans le nord-est du pays, 98 p. cent des filles subissent la MGF entre six et neuf ans, parce que les ONG sont peu actives dans cette région où des bandits sèment la peur (Nations Unies 10 mai 2004).

En outre, un rapport thématique de la conférence internationale de Nairobi sur la MGF faisait l'éloge de l'organisation Maendeleo ya Wanamuke (NPWJ 18 sept. 2004). Cette organisation a eu l'idée de remplacer la MGF par des rites substitutifs qui ont connu un certain succès dans diverses communautés (ibid.).

Par ailleurs, un article publié par Women's eNews (WeNews) signale que trois ONGs luttent spécialement contre la pratique de la MGF par les professionnels de la santé; il s'agit du Child Rights Advisory Documentation and Legal Centre (CRADLE), du Building Eastern Africa Community Network (BEACON) et du Julikei International, Women and Youth (12 mai 2004).

Pour ce qui est de la sensibilisation des jeunes, un rapport de la BBC du 7 février 2003 signalait qu'une organisation appelée Centre for Human Rights and Democracy faisait le tour des différentes écoles pour avertir les jeunes filles des dangers de la MGF et pour encourager la formation des clubs de lutte contre la MGF.

Certaines sources d'information mentionnent également le rôle des églises dans la lutte contre la MGF (Njue et Askew déc. 2004, 1; BBC 7 févr. 2003).

Les auteurs de Medicalization of Female Genital Cutting Among the Abagusii in Nyanza Province, Kenya, publié en décembre 2004, signalent également le rôle important joué par plusieurs organisations non gouvernementales dans la lutte contre la MGF dans trois districts peuplés par les Kisiis (Abagusiis) (Njue et Askew déc. 2004, 4). Il s'agit notamment du Program for Appopriate Technology in Health (PATH), la MYWO, l'Église adventiste du septième jour, la Female Guild Organization, la Federation of Women's Groups, la Pan African Christian Women's Organization, le Julokei International et la Coalition on Violence Against Women (Njue et Askew déc. 2004, 4).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références


BBC. 7 février 2003. « Kenyan Girls Flee Mutilation ». http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/2736317.stm [Date de consultation : 14 janv. 2005]

Finke, Jens. 2003. « Gusii - Introduction ». Dans : The Traditional Music and Cultures of Kenya. www.bluegecko.org/kenya/tribes/gusii/index.htm [Date de consultation : 14 févr. 2005]

Global Feminist News. 30 août 2004. « Schoolgirls Forced To Undergo Female Genital Mutilation in Kenya ». http://www.feministcampus.org/know/news/gnewstory.asp?id=8614 [date de consultation : 14 janv. 2005]

Jillo, Hilton. 17 septembre 2004. « The Role of the Ministry of Health in FGM Eradication ». Exposé fait à la Conférence internationale sur la mutilation génitale des femmes [Nairobi]. 16-18 septembre 2004. http://www.npwj.org/netrep/fgm/kenyaconference/jilo_presentation/jilo%20presentation.html[Date de consultation : 9 févr. 2005]

Kenya. Juillet 2004. Central Bureau of Statistics. Demographic and Health Survey - 2003. Betty Khasakhala-Mwenzi et al. « Gender Violence », Chapitre 15. http://www.measuredhs.com/pubs/pdf/FR151/15Chapter15.pdf [Date de consultation : 1er févr. 2005]

Kamau, Jane. 17 septembre 2004. « Role of Council of Elders in the Fight Against FGM: A Case of Kuria District By Jane Kamau Project Coordinator, MOH/GTZ, Kenya ». Exposé fait à la Conférence internationale sur la mutilation génitale des femmes [Nairobi]. 16-18 septembre 2004. http://www.npwj.org/netrep/fgm/kenyaconference/jane_kamau_presentation/jane%20kamau%20presentation.html [Date de consultation : 14 janv. 2005]

Kibaki, Mwai. 16 septembre 2004. « Speech of H.E. Hon Mwai Kibaki C.G.H., M.P. President and Commander-In-Chief of the Armed Forces of the Republic of Kenya. Delivered by the Honourable Vice President, H.E. Arthur Moody Awory ». Discours prononcé à la Conférence internationale sur la mutilation génitale des femmes [Nairobi]. 16-18 septembre 2004. http://www.npwj.org/modules.php?name=News&file=article&sid=1811 [Date de consultation : 8 févr. 2005]

Kilimo, Linah Jebii. 16 septembre 2004. « Speech by Hon. Linah Jebii Kilimo, M.P., Minister of State for Home Affairs ». Discours prononcé à la Conférence internationale sur la mutilation génitale des femmes [Nairobi]. 16-18 septembre 2004. http://www.npwj.org/modules.php?name=News&file=article&sid=1841 [Date de consultation : 8 févr. 2004]

The Nation [Nairobi]. 13 octobre 2004. Kwamboka Oyaro. « Toll-Free Helpline for Children in Distress ». (Dialog)

_____. 22 septembre 2004. Kwamboka Oyaro. « Why the Female 'Cut' Refuses to Go Away ». http://allafrica.com/stories/200409220108.html [Date de consultation : 7 janv. 2005] http://allafrica.com/stories/200409220208.html

Nations Unies. 10 mars 2004. Réseaux d'information régionaux intégrés (IRIN). « KENYA: Boost for Anti-FGM Efforts as 200 Circumcisers Quit ». http://www.irinnews.org/report.asp?ReportID=39965&SelectRegion=East_Africa&SelectCountry=KENYA [Date de consultation : 21 janv. 2005]

Njue, Carolyne et Ian Askew. Décembre 2004. Medicalization of Female Genital Cutting Among the Abagusii in Nyanza Province, Kenya. Population Council, The Frontiers in Reproductive Health Program (FRONTIERS). http://www.dec.org/pdf_docs/PNADB241.pdf [Date de consultation : 2 févr. 2005]

No Peace Without Justice Committee for the International Criminal Court (NPWJ). 18 septembre 2004. Conférence internationale sur la mutilation génitale des femmes [Nairobi]. 16-18 septembre 2004.: Report from Thematic Session II: "Breaking the Myth: The Role of Communities, Family, School and the Media in Transforming Social Conventions and Promoting FGM Abandonment." http://www.npwj.org/modules.php?name=News&file=article&sid=1835 [Date de consultation : 8 févr. 2005]

Panafrican News Agency (PANA). 17 décembre 2004. « Two Kenyan Girls Undergo FGM Despite Outcry ». (Dialog).

Richardson, Gemma. 2005. « Delegates of the Nairobi Conference Discuss Putting an End to Female Genital Mutilation ». Dans Tribune des droits humains [Ottawa]. Vol. 11, no 1. Hiver 2005. http://www.hri.ca/tribune/OnlineIssue/11_01_2005/Delegates%20of%20the%20Nairobi%20Conference%20Discuss%20Putting%20an%20End%20to%20Female%20Genital%20Mutilation_11-01-2005.html [Date de consultation : 4 févr. 2005]

Women's eNews (WeNews) [Nairobi]. Fredrick Nwili. 12 mai 2004. « In Africa, FGM Checks Into Hospitals ». http://www.womense-news.org/article.cfm/dyn/aid/2097/context/archive [Date de consultation : 11 janv. 1004]

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