Journalists in Chad Entitled to Pretrial Release

|Point de vue

Un cas de détention prolongée illustre la tendance à la répression

La semaine dernière marquait trois mois depuis l'arrestation au Tchad d'Olivier Monodji, directeur de publication de l’hebdomadaire Le Pays et correspondant de Radio France Internationale, et de Mahamat Saleh Alhissein, reporter de la chaîne publique Télé Tchad. Leur affaire concerne aussi d’autres co-accusés. Les procureurs ont allégué que les journalistes étaient de connivence avec le groupe Wagner, un groupe mercenaire russe présent en Afrique centrale et au Sahel, et les ont accusés d'espionnage, de conspiration et de mise en danger de la sécurité de l'État.

Parmi les preuves dans cette affaire figurent des documents qui auraient été traduits du français à l'arabe par Mahamat Saleh Alhissein et un article d’Olivier Monodji dans Le Pays sur l'ouverture d'un centre culturel russe.

Les journalistes semblent avoir été pris pour cible en raison de leurs liens présumés avec le groupe Wagner, dont les affaires au Tchad sont un sujet sensible. En 2023, les médias ont rapporté des preuves d'un complot de ce groupe mercenaire contre le Tchad. Le groupe soutient activement divers groupes armés dans presque tous les pays environnants. Human Rights Watch a précédemment documenté comment des Russes soupçonnés d'appartenir au groupe Wagner ont joué un rôle déterminant dans la répression autoritaire en République centrafricaine voisine.

Cette semaine, un juge qui enquêtait sur cette affaire depuis deux mois a requalifié les charges en vertu de l'article 95 du Code pénal tchadien, qui concerne l’« entretien avec les agents d'une puissance étrangère d’[…] intelligences, » passible d'une peine d'un à cinq ans, et a renvoyé les accusés devant le tribunal. Leur détention a toutefois été prolongée, malgré le rejet des accusations plus graves d’attentat et de complot contre l’État. Leur maintien en détention bafoue le droit relatif aux droits humains, qui prévoit que les accusés ne doivent en général pas être placés en détention provisoire, et reflète une tendance inquiétante à la répression.

À l'approche des élections de 2024, les autorités tchadiennes ont pris pour cible les médias, la société civile et les voix de l'opposition. Elles ont révoqué les licences de certains médias, interdit la couverture médiatique des rassemblements politiques, coupé l'accès à Internet, suspendu des plateformes médiatiques et proféré des menaces juridiques pour faire taire la dissidence. Succès Masra, ancien Premier ministre et dirigeant du principal parti d'opposition du Tchad, est détenu depuis près d'un mois. Il est accusé d'incitation à la haine et à la violence par le biais de publications sur les réseaux sociaux.

Le Tchad est particulièrement instable depuis la mort en 2021 de l’ex-président Idriss Déby Itno, père de l’actuel président Mahamat Idriss Déby ; ce décès avait marqué le début d'une période de transition entachée de violences, de troubles de l’ordre public et de bains de sang. Quelques mois avant les élections de 2024, un éminent opposant politique a été tué lors d'une attaque dans la capitale du Tchad, N’Djamena.

Cependant, aucun de ces éléments ne justifie la détention prolongée des journalistes, laquelle exigerait des preuves individuelles de la nécessité et de la légalité d’une telle détention. Le gouvernement tchadien devrait respecter son engagement en faveur d'une procédure régulière, veiller à ce que ces hommes soient libérés et garantir un procès équitable.

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