Chili : information sur la violence familiale, y compris le traitement réservé aux personnes survivantes par la société et les autorités; la protection offerte par l’État, y compris aux personnes survivantes dont l’orientation et les caractères sexuels ainsi que l’identité et l’expression de genre (OCSIEG) doivent être pris en considération et à celles qui sont autochtones; les services de soutien à la disposition des personnes survivantes, y compris les services de santé mentale (2021–avril 2023) [CHL201159.EF]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Aperçu
1.1 Violence familiale

Dans son rapport annuel de 2021-2022 sur la violence envers les femmes au Chili, le Réseau chilien de lutte contre la violence envers les femmes (Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres - Red Chilena), qui est composé d’ONG et d’autres organisations de la société civile (Red Chilena s.d.), fait observer que la violence familiale est [traduction] « une des formes les plus courantes de violence envers les femmes » au Chili et se situe « au troisième rang des crimes les plus signalés » au pays (Red Chilena 2022-08, 22). Il ressort de l’analyse réalisée par la même source à partir de données du Sous-secrétariat pour la prévention du crime (Subsecretaría de Prevención del Delito) du Chili que, en 2021, la violence familiale était [traduction] « le type de crimes qui touche le plus les femmes au Chili, suivi des crimes sexuels » (Red Chilena 2022-08, 23).

Le tableau ci-dessous présente des statistiques fournies par les Services policiers d’enquête du Chili (Policía de Investigaciones - PDI) et les Carabineros [1] et publiées par le Centre d’étude et d’analyse de la criminalité (Centro de Estudios y Análisis del Delito - CEAD) :

  2019 2020 2021 2022
Violence familiale 644,4 604,3 736 737,3
Violence familiale envers les femmes 486,2 460,2 556,1 548,4

(Chili [2023], nombres par tranche de 100 000 habitants)

En 2020, le Sous-secrétariat pour la prévention du crime a mené une enquête sur la fréquence de la violence familiale générale auprès de 6 775 répondantes âgées de 15 à 65 ans, dans les zones urbaines des 16 régions du Chili; l’enquête a montré que 41,4 p. 100 des répondantes avaient subi de la violence familiale à un moment ou un autre de leur vie, comparativement à 38,2 p. 100 chez les répondantes ayant pris part à l’enquête de 2017 (Chili 2020, 3, 6). Il ressort également de l’enquête qu’en 2020, 21,7 p. 100 des répondantes avaient été victimes de violence familiale au cours des 12 mois précédents (Chili 2020, 6). La même source signale que les cinq régions affichant les plus hauts taux de violence familiale subie au cours de l’année précédant le sondage sont les suivantes : Coquimbo (29,5 p. 100), Arica y Parinacota (29 p. 100), Tarapacá (26,4 p. 100), Maule (25,5 p. 100) et Biobío (25,4 p. 100) (Chili 2020, 8). Une autre enquête sur la violence familiale envers les femmes, réalisée du 18 mai au 15 novembre 2021 par, entre autres, le ministère de la Femme et de l’Égalité des genres (Ministerio de la Mujer y la Equidad de Género) dans le cadre d’un projet pilote axé sur les milieux ruraux dans la région de Los Ríos au Chili, a montré que, sur un échantillon de 2 002 cas touchant des femmes âgées de 15 ans et plus, 6,7 p. 100 des répondantes au total avaient subi de la violence familiale au cours de la dernière année, soit un total de 8 p. 100 dans les zones urbaines de la région de Los Ríos et 5,3 p. 100 dans les zones rurales (Chili 2022-01-07, 12). La même source présente la ventilation suivante des types de violence familiale subie par les répondantes :

Type de violence Total Zones urbaines de Los Ríos Zones rurales de Los Ríos
Psychologique 6 p. 100 7,1 p. 100 4,9 p. 100
Physique 1,6 p. 100 2,3 p. 100 0,9 p. 100
Sexuelle 0,9 p. 100 1,4 p. 100 0,3 p. 100

(Chili 2022-01-07, 12)

1.1.1 Personnes survivantes de violence familiale dont les OCSIEG doivent être pris en considération

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une doctorante à l’université Adolfo Ibáñez (Universidad Adolfo Ibáñez) du Chili, dont les recherches portent principalement sur l’accès à la justice pour les femmes et les personnes LGBTQI+, a déclaré que les données concernant les personnes survivantes de violence familiale et de violence fondée sur le genre parmi les personnes dont les OCSIEG doivent être pris en compte [traduction] « ne sont pas disponibles » auprès du gouvernement, mais que « certaines » organisations sont parvenues à recueillir cette information (doctorante 2023-04-03).

Les renseignements contenus dans le paragraphe suivant ont été fournis par deux organisations chiliennes, la Société d’études sociales et d’éducation SUR (SUR Corporación de Estudios Sociales y Educación - SUR) et l’Organisation de la diversité trans (Organizando Trans Diversidades - OTD) [2], dans un rapport consacré à leur étude sur le droit au logement et à un environnement convenable pour les personnes dont les OCSIEG doivent être pris en compte, étude pour laquelle ces organisations ont réalisé une enquête entre le 23 décembre 2020 et le 15 février 2021 à laquelle ont participé 735 personnes de 15 ans et plus réparties dans 139 municipalités, en plus de mener des entretiens en ligne avec 28 personnes LGBTQIA+ âgées de 18 ans et plus.

Il ressort de l’étude que 30,4 p. 100 des répondants à l’enquête avaient [traduction] « subi de la violence et/ou de la discrimination à la maison », alors que 45,5 p. 100 avaient subi de la violence et/ou de la discrimination dans un endroit public. En ce qui a trait au type de violence, 68,1 p. 100 des répondants qui ont subi de la violence à la maison ont fait l’objet de [traduction] « violence verbale », 65,1 p. 100 ont fait l’objet de « violence psychologique », et 24,2 p. 100 ont subi le rejet de leur identité de genre, tandis que 22,7 p. 100 ont fait l’objet de « traitements visant à "corriger" leur orientation sexuelle » et que 19,6 p. 100 ont déclaré avoir subi de la « violence physique ». Les auteurs de la violence familiale infligée à la maison étaient des [traduction] « membres de la famille immédiate » (parents, frères et sœurs, enfants) pour 61,2 p. 100 des répondants, alors qu’il s’agissait d’une personne vivant à l’extérieur du ménage familial pour 40,3 p. 100 des répondants (SUR & OTD 2021-11-28, 15, 52-56).

1.1.2 Personnes survivantes autochtones

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur la situation et les statistiques relatives à la violence familiale touchant les autochtones au Chili.

1.2 Féminicides

Selon Freedom House, la violence envers les femmes et les enfants [traduction] « demeure un problème »; le gouvernement du Chili a fait état de 44 féminicides et de 163 tentatives de féminicide en 2021 (2022-02-24, sect. G3). D’après les Country Reports on Human Rights Practices for 2022 publiés par le Département d’État des États-Unis, la violence à l’endroit des femmes et des filles, y compris le viol et le féminicide, est un [traduction] « grave problème » (É.-U. 2023-03-20, 9). Le Red Chilena recense aussi les cas de féminicide au Chili et a signalé que, en 2022, en plus des 42 féminicides enregistrés comme tels par les autorités, il y a eu 14 affaires de violence envers des femmes et des filles que l’organisation considérait comme des féminicides, mais qui ont été portées en justice en tant qu’homicides ou qui n’ont pas été portées en justice du tout (Red Chilena [2023]). Voici des exemples de ces cas :

  • En décembre 2022, une mère et sa fille ont été assassinées par l’ancien conjoint de la fille, qui avait des antécédents de violence familiale. Le meurtre de la fille a été classé comme un féminicide, mais celui de la mère a été classé comme un homicide;
  • En septembre 2022, une femme est décédée à l’hôpital après avoir été empoisonnée pendant que son conjoint était à la maison. Elle avait dénoncé son conjoint à deux reprises pour [traduction] « mauvais traitements » (maltrato) et avait demandé de l’aide à sa famille. Il n’y a eu aucune arrestation dans cette affaire (Red Chilena [2023]).

Les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis citent l’exemple d’un féminicide pour lequel un homme a été arrêté et placé en détention préventive à la suite de l’assassinat le 3 juin 2022 de son ancienne conjointe qui avait obtenu une ordonnance de non-communication contre lui, laquelle était échue (É.-U. 2023-03-20, 10).

Le gouvernement du Chili a signalé 10 féminicides de janvier à avril 2023 (Chili 2023-04).

2. Cadre juridique

D’après l’outil Lutte contre la violence familiale (Fighting Domestic Violence) [3], un outil de droit comparé mis au point par Baker McKenzie, un cabinet juridique international qui fournit des services en droit des affaires (Baker McKenzie s.d.), les [traduction] « lois et codes portant sur la violence familiale au Chili » comprennent la loi no 20 066 sur la violence intrafamiliale (Ley 20.066 de Violencia Intrafamiliar), « qui vise à prévenir, à punir et à éliminer la violence familiale et à protéger les victimes de violence », ainsi que le code pénal (Código Penal - CP) du Chili (Baker McKenzie [2021], 1). Selon les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, la violence familiale physique et psychologique ainsi que [traduction] « le viol d’hommes ou de femmes, y compris le viol conjugal », sont des crimes au regard du droit chilien (É.-U. 2023-03-20, 9). La même source fait remarquer que tout meurtre commis [traduction] « dans un contexte de violence familiale constitue un féminicide suivant la définition énoncée dans le code pénal » (É.-U. 2023-03-20, 9). Des sources soulignent que, depuis 2020, la cohabitation entre le meurtrier et la victime du meurtre n’est plus requise par la loi chilienne pour que ce crime soit considéré comme un féminicide (Chili 2022-05-16, paragr. 68; Red Chilena 2022-08, 15).

Selon le Red Chilena, la loi no 20 066 est le [traduction] « seul instrument juridique existant » pour les personnes survivantes de violence familiale qui veulent dénoncer cette violence et obtenir la protection de l’État, mais elle est « restreinte aux mariages et aux relations dans lesquelles il y a cohabitation » (2022-08, 22). De plus, la même source souligne que la loi sur la violence familiale [traduction] « n’établit pas la violence envers les femmes comme une notion fondamentale » et qu’en « situant [la violence] dans un contexte familial », la loi ne reconnaît pas « la disproportion du nombre de femmes qui subissent » de la violence familiale de la part de leurs partenaires (Red Chilena 2022-08, 22). Adoptée en 2005 et mise à jour en 2021, la loi no 20 066 énonce la définition suivante de la violence familiale :

[traduction]

Article 5º .- Violence familiale. Est constitutif de violence familiale tout mauvais traitement qui porte atteinte à la vie ou à l’intégrité physique ou psychique de quiconque est ou a été le conjoint ou le cohabitant de l’auteur de l’infraction, ou qui est un parent par le sang ou par alliance en ligne directe ou collatérale jusqu’au troisième degré inclus, de l’auteur de l’infraction ou du conjoint ou du cohabitant actuel de l’auteur de l’infraction.

Il y a également violence familiale lorsque les comportements visés au paragraphe précédent se produisent entre les parents d’un enfant commun ou s’exercent sur une personne mineure, âgée ou handicapée qui est sous la garde ou la dépendance de l’un des membres du groupe familial.

De même, constituent de la violence familiale les comportements exercés dans le cadre de relations affectives ou familiales qui ont pour objet direct de porter atteinte à l’autonomie économique de la femme, au patrimoine, ou à la subsistance économique de la famille ou des enfants, comme le non-respect répété du devoir d’entretien, dans le but d’exercer un contrôle sur la femme, ou sur ses ressources économiques ou patrimoniales, en générant une dépendance ou un préjudice sur ledit patrimoine ou sur celui de ses enfants (Chili 2005).

Le cabinet Baker McKenzie souligne que les tribunaux de la famille instruisent les affaires de violence familiale qui [traduction] « ne constituent pas un crime », alors que les tribunaux criminels s’occupent des actes de violence familiale qui sont considérés comme des crimes ([2021], 1). D’après les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, les affaires de [traduction] « mauvais traitements psychologiques et physiques répétés » liés à la violence familiale sont traitées par le système de justice criminelle (É.-U. 2023-03-20, 9). La loi no 20 066 prévoit ce qui suit :

[traduction]

Partie 3º La violence familiale en tant qu’infraction pénale

[…]

Article 14 .- Infraction de mauvais traitement habituel. L’exercice habituel de la violence physique, psychologique ou économique à l’encontre de l’une des personnes visées à l’article 5 de la présente loi est passible d’une peine d’emprisonnement de durée minimale à moyenne, à moins que l’acte ne constitue un délit plus grave, auquel cas seule la peine prévue par la loi pour ce dernier sera appliquée.

Pour apprécier le caractère habituel du mauvais traitement, il convient de tenir compte du nombre d’actes accomplis, ainsi que de leur proximité dans le temps, que la violence ait été infligée à la même victime ou à une victime différente. À ces fins, les actes antérieurs ayant fait l'objet d’un jugement pénal d’acquittement ou de condamnation ne sont pas pris en considération (Chili 2005).

Le cabinet Baker McKenzie dresse la liste suivante des actes de violence familiale qui sont [traduction] « passibles de poursuites » suivant le code pénal :

  • le féminicide ou le parricide (article 390 du CP);
  • les lésions corporelles dans le contexte de la violence familiale (article 400 du CP);
  • la violence envers des enfants (article 403-bis du CP);
  • le viol (article 361 du CP);
  • le viol avec homicide (article 372 du CP);
  • le harcèlement sexuel (article 161-C du CP);
  • l’enlèvement (article 141 du CP);
  • les menaces (article 296 du CP);
  • le fait de provoquer un avortement par la violence (article 343 du CP);
  • l’abandon (article 352 du CP);
  • l’entrée non autorisée dans un logement (article 144 du CP) (Baker McKenzie [2021], 1–2).

La même source ajoute que [traduction] « la violence familiale qui ne constitue pas un crime » est un autre acte « passible de poursuites » (Baker McKenzie [2021], 1–2).

Selon le cabinet Baker McKenzie, entre autres voies judiciaires civiles et criminelles à la disposition des personnes survivantes de violence familiale, il y a l’obligation pour le contrevenant de [traduction] « verser à la victime les débours et les dommages-intérêts découlant des actes de violence familiale en cause dans le procès », par exemple l’obligation de « rembourser les fonds ou de payer une indemnisation pour les biens endommagés, détruits ou perdus » ([2021], 3). Dans les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, on peut lire que les peines liées aux mauvais traitements [ou violences] répétés [traduction] « varient selon la gravité des blessures et vont de 61 jours à 15 ans d’emprisonnement » (É.-U. 2023-03-20, 9). La même source fait observer que les affaires de violence familiale traitées par les tribunaux de la famille entraînent des pénalités telles que [traduction] « des amendes et d’autres sanctions, comme l’expulsion du contrevenant du domicile qu’il partage avec la victime, des ordonnances de non-communication, la confiscation d’armes à feu et des thérapies ordonnées par le tribunal » (É.-U. 2023-03-20, 9). La loi no 20 066 contient la disposition suivante :

[traduction]

Article 11 .- Débours et dommages de nature pécuniaire (perjuicios patrimoniales). Le jugement établit l’obligation pour la personne condamnée de payer à la victime les débours et les dommages de nature pécuniaire causés par l’exécution de l’acte ou des actes constitutifs de violence familiale qui font l’objet du jugement, y compris le remplacement en argent ou en nature des biens endommagés, détruits ou perdus. Ces dommages-intérêts sont déterminés prudemment par le juge (Chili 2005).

Pour ce qui est des sanctions liées aux autres crimes de violence sexuelle, on peut lire dans les Country Reports 2022 que le viol est punissable de peines allant de 5 à 15 ans d’emprisonnement, alors que le féminicide est punissable de peines allant de 15 ans à l’emprisonnement à perpétuité (É.-U. 2023-03-20, 9).

D’après la même source, la loi prévoit des mesures de protection visant [traduction] « le respect de la vie privée et la sécurité de la victime qui dénonce le viol ou la violence familiale » (É.-U. 2023-03-20, 9). Selon le cabinet Baker McKenzie, les tribunaux de la famille et les tribunaux criminels peuvent, à toute étape du processus de plainte, rendre des ordonnances civiles de protection pour les personnes survivantes de violence familiale à titre de [traduction] « "mesures préventives" » [4] ([2021], 6). La même source ajoute que les ordonnances de protection protègent aussi les membres de la famille de la personne survivante contre [traduction] « les mauvais traitements et l’intimidation », et peuvent être valides pour une période allant jusqu’à 180 jours ouvrables, après quoi ces ordonnances peuvent être « prolongées, restreintes, modifiées, remplacées ou annulées »; pour ce qui est des « mesures restrictives » définies dans le prononcé de la peine, la période de validité peut varier de six mois à deux ans et elles peuvent être prolongées à la demande de la personne survivante (Baker McKenzie [2021], 9).

La loi no 20 066 prévoit ce qui suit concernant la représentation juridique des personnes survivantes de violence familiale :

[traduction]

Article 20 .- Représentation juridique de la victime. Dans les cas qualifiés par le Service national de la Femme, ce dernier peut assumer le parrainage et la représentation juridique de la femme majeure victime de délits constitutifs de violence familiale, si elle le demande, aux fins des dispositions de l’article 109 du Code de procédure pénale.

Afin de se conformer aux dispositions du paragraphe précédent, le Service peut conclure des accords avec des entités publiques ou privées (Chili 2005).

D’après El País, un journal de Madrid, le Chili a créé un Registre des débiteurs de pension alimentaire (Registro de Deudores de Pensiones de Alimentos), auquel sont inscrits les individus qui sont en défaut de paiement de leur pension alimentaire depuis au moins trois mois consécutifs ou pendant cinq mois au total, ce que le journal qualifie de [traduction] « crime de violence familiale »; neuf délinquants sur dix inscrits à ce registre sont des hommes (2022-11-18). Citant une déclaration du président du Chili lors d’un discours en 2022, la même source signale que [traduction] « [s]eulement 16 p. 100 des pensions alimentaires sont effectivement versées au Chili », et que les conséquences rattachées à l’inscription au registre vont de retenues à la source au non-renouvellement du permis de conduire (El País 2022-11-18).

Pour des renseignements additionnels sur les droits relatifs à la garde d’enfants au Chili, y compris les lois, sur la question de savoir si un parent peut déménager avec un enfant sans en aviser l’autre parent, y compris dans les cas de violence familiale et les cas où il existe une ordonnance de protection ou de non-communication valide, et sur la marche à suivre pour un parent qui veut retrouver son enfant, veuillez consulter la réponse à la demande d’information CHL201160 publiée en mai 2023.

3. Traitement
3.1 Traitement réservé par la société

La doctorante a fait observer que les attitudes sociales envers la violence familiale au Chili ont évolué au cours des dernières décennies vers la [traduction] « reconn[aissance] » du fait qu’elle est « répréhensible et constitue un crime » (2023-04-03). La même source a signalé que des variations dans les attitudes sociales envers la violence familiale existent [traduction] « principale[ment] » entre les régions urbaines et rurales, « étant donné que, dans les régions rurales, on accorde encore de l’importance aux rôles traditionnels associés aux genres », et entre les vieilles générations et les générations plus jeunes, puisque « chez les personnes plus âgées, la violence familiale n’est pas réprouvée dans la même mesure [ni] généralement considérée comme un problème de société » (doctorante 2023-04-03). D’après l’enquête du gouvernement du Chili sur la violence familiale dans la région de Los Ríos, 47 p. 100 des répondantes des zones rurales étaient d’accord ou fortement d’accord pour dire que [traduction] « [l]’homme devrait avoir la responsabilité des dépenses de la famille et du ménage », comparativement à 38,5 p. 100 des répondantes des zones urbaines de Los Ríos; 35,4 p. 100 des répondantes des zones rurales et 27,5 p. 100 des répondantes des zones urbaines étaient d’accord pour dire qu’« [i]l est plus approprié que l’homme soit reconnu comme étant le chef du ménage »; 21 p. 100 des répondantes des zones rurales et 14,8 p. 100 des répondantes des zones urbaines étaient d’accord pour dire que « [s]’il y a de la maltraitance ou de la violence à la maison, c’est à la famille de résoudre le problème » (Chili 2022-01-07, 18).

Au cours d’un entretien avec le quotidien chilien La Tercera, la directrice de la Fondation pour la promotion et le développement de la femme (Fundación para la Promoción y Desarrollo de la Mujer - PRODEMU), une institution publique chilienne qui se voue à promouvoir la participation, l’organisation et le développement des femmes et qui est présente dans toutes les régions et provinces du Chili (PRODEMU s.d.), a signalé que, dans la société chilienne, [traduction] « "il y a encore des stéréotypes machistes tels que l’homme doit être le soutien de famille, celui qui trouve les solutions et qui prend les décisions" » et que « "les femmes normalisent le fait qu’elles ne peuvent pas travailler et qu’elles doivent seulement s’occuper des tâches ménagères et de leur famille" » (La Tercera 2022-02-01). Dans l’article de La Tercera, on peut aussi lire que la violence familiale sous forme d’exploitation économique [5] [traduction] « passe inaperçue », et pourtant, elle « est répandue à tel point qu’elle est considérée normale dans une large mesure » au Chili, « en raison des rôles [sexo-spécifiques] qui ont historiquement été attribués aux femmes » (2022-02-01). D’après les données sur l’emploi recueillies par l’Institut national de la statistique (Instituto Nacional de Estadísticas - INE) du Chili pour la période allant de novembre 2022 à janvier 2023, le taux de participation des femmes au marché du travail était de 51 p. 100, comparativement à 70,7 p. 100 chez les hommes (Chili 2023-02-27, 2).

Sans fournir de précisions concernant les personnes survivantes de la violence familiale en particulier chez les autochtones, Freedom House signale que les populations autochtones au Chili subissent [traduction] « encore de la discrimination sociale » (2022-02-24, sect. F4). La même source souligne que [traduction] « [l]es personnes LGBT+ continuent de faire l’objet de préjugés sociaux » (Freedom House> 2022-02-24, sect. F4).

3.2 Traitement réservé par les autorités

Selon la doctorante, malgré les efforts du gouvernement pour [traduction] « sensibiliser les autorités » à la violence familiale et à la violence fondée sur le genre et pour mettre en place des « bureaux de police spécialisés » dans le traitement des cas de violence familiale, « des problèmes persistent dans la façon dont les autorités (les policiers et les procureurs) mettent en application les normes » en vigueur (2023-04-03). La même source a donné des exemples de tels problèmes : les policiers qui négligent de soumettre les plaintes au bureau du procureur public, les procureurs publics qui décident de ne pas intenter de poursuite à la suite d’une plainte, et le [traduction] « défaut des Carabineros de mettre efficacement en place les mesures de protection accordées aux personnes survivantes conformément aux directives des procureurs » (doctorante 2023-04-03).

Selon l’enquête réalisée dans la région de Los Ríos par le gouvernement du Chili, 25,5 p. 100 des femmes qui ont subi de la violence familiale ont déposé une plainte officielle aux autorités; la proportion est de 22,5 p. 100 parmi les femmes habitant dans des régions urbaines, et de 29,6 p. 100 parmi celles habitant dans des régions rurales (Chili 2022-01-07, 16). Pour ce qui est des femmes ayant subi de la violence psychologique, 22,3 p. 100 ont porté plainte, alors que 28,8 p. 100 ont dénoncé des cas de violence physique et 15,9 ont dénoncé des cas de violence sexuelle (Chili 2022-01-07, 16). La même enquête a montré que les trois affirmations suivantes figuraient parmi les principales raisons de ne pas porter plainte en cas de violence familiale, en particulier chez les femmes ayant subi de la violence psychologique ou physique : [traduction] « Je ne savais pas que je pouvais porter plainte », « Je ne crois pas qu’il soit utile de porter plainte, ou j’ai porté plainte [par le passé] et il n’y a pas eu de suite » et « Ce n’était pas grave et je ne pensais pas que c’était nécessaire » (Chili 2022-01-07, 17). Quant aux cas de violence sexuelle, la même source précise que les deux principales raisons pour lesquelles les femmes n’ont pas porté plainte à la police étaient qu’elles avaient [traduction] « honte de parler de [leur] situation » et qu’elles « ne savai[ent] pas qu’[elles] pouvai[ent] porter plainte » (Chili 2022-01-07, 17).

Les renseignements contenus dans les trois paragraphes suivants sont tirés du rapport de novembre 2020 relatif à l’étude menée par le Red Chilena du 11 juin au 30 septembre 2020 auprès de 205 participantes, étude qui examine au moyen de questionnaires quantitatifs et qualitatifs les mesures prises par la police en réponse aux plaintes de violence déposées par des femmes, en accordant une attention particulière à la violence familiale, et qui a mené aux constats suivants :

  • 50,2 p. 100 des répondantes résidaient dans la région métropolitaine de la capitale;
  • 81 p. 100 des répondantes avaient entre 18 et 40 ans au moment où elles ont déposé ou tenté de déposer une plainte de violence familiale à la police;
  • 50 p. 100 des plaintes ont été déposées avant 2018, et 48 p. 100 entre 2019 et 2020;
  • 77 p. 100 des répondantes ont déposé ou tenté de déposer leur plainte à la police en personne, 19 p. 100 par téléphone et 3 p. 100 par d’autres moyens;
  • 81 p. 100 des participantes ont eu une [traduction] « mauvaise » expérience quand elles ont déposé ou tenté de déposer une plainte de violence familiale aux Carabineros.

Les répondantes ont donné des exemples de réactions de la police à leurs plaintes de violence familiale, dont les suivants :

  • [traduction] « "Pourquoi avez-vous attendu aussi longtemps? Eh bien, si vous aviez l’intention de faire quelque chose, vous auriez dû le faire plus tôt... bloquez ses appels, de cette façon vous pourrez éviter tout contact avec lui" » ;
  • « "De quoi elle se plaint quand elle n’a rien de cassé?" […] Ils m’ont emmenée à une rencontre avec lui pour qu’on se parle et qu’on règle nos problèmes de couple, c’était horrible »;
  • « ils m’ont dit directement que j’étais stupide de m’être « "engagée dans une relation avec quelqu’un de ce genre" [en parlant de l’agresseur] »;
  • « "Madame, qu’avez-vous fait pour pousser votre mari à vous frapper? Si vous lui avez fait perdre la raison, c’est de votre faute" ».

D’après les témoignages de ces femmes, [traduction] « les garanties de protection sont inexistantes » et « l’inefficacité du système se manifeste dans chacune des institutions » chargées de protéger les personnes survivantes, y compris la police et le ministère de la Femme et de l’Égalité des genres, ce qui entraîne un « puissant sentiment d’être laissée sans protection » contre [la violence fondée sur le genre]. La même source conclut que, plutôt que de témoigner d’une [traduction] « compréhension du problème de la violence » envers les femmes, les expériences vécues par les répondantes « confirment que ces institutions la reproduisent et la normalisent » (Red Chilena 2020-11, 5–7, 8, 9, 10).

Dans une affaire relatée par la BBC, une survivante de violence familiale qui a tué son conjoint en septembre 2019 après [traduction] « des séjours à l’hôpital, des ordonnances de non-communication et d’innombrables signalements à la police » liés à la violence familiale, et qui a été détenue et par la suite acquittée par les tribunaux, a déclaré que « "[q]uand vous dénoncez la violence, la police vous regarde rapidement et vous dit que tout va bien, que vous devez cesser de vous plaindre pour rien" » (2022-07-24).

Sans fournir de précisions concernant les personnes survivantes de la violence familiale en particulier chez les autochtones, Freedom House signale que les populations autochtones au Chili subissent [traduction] « encore […] de la brutalité policière » (2022-02-24, sect. F4).

4. Protection offerte par l’État

D’après les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, le gouvernement du Chili [traduction] « a, de manière générale, appliqué la loi » sur le viol et le viol conjugal, et a appliqué les lois sur la violence familiale « de façon efficace » (É.-U. 2023-03-20, 9). Sans fournir de précisions au sujet des cas de violence familiale en particulier, le rapport national du Chili au Comité contre la torture (CCT) des Nations Unies signale que, sur les 485 595 [traduction] « victimes féminines [dont les plaintes ont été] acceptées en tant que crimes de violence fondée sur le genre » de 2018 à décembre 2021, 219 364 ont obtenu des déclarations de culpabilité et 62 353 ont vu leur affaire se solder par un acquittement (Chili 2023-01-16, paragr. 38). Dans son rapport annuel 2021-2022, le Red Chilena signale, en se fondant sur les données de la Direction des études de la Cour suprême du Chili (Dirección de Estudios de la Corte Suprema), qu’il y a eu

  • 114 906 affaires de violence familiale enregistrées en 2021, comparativement à 83 148 en 2020;
  • 63 247 mesures de protection préventives prises en 2021, comparativement à 38 911 en 2020;
  • 106 749 affaires qui ont été menées à terme en 2021, comparativement à 77 527 en 2020 (2022-08, 25, 27).

La même source fait observer que durant la pandémie de COVID-19, [traduction] « le pourcentage d’affaires qui se sont soldées par des peines [infligées par les tribunaux] a diminué (37,4 p. 100 du total), alors que le nombre d’affaires qui ont été closes parce que la plainte n’a pas eu de suite a augmenté (26,6 p. 100 du total) » (Red Chilena 2022-08, 27). Pour ce qui est des affaires de violence familiale qui constituent un [traduction] « crime de mauvais traitements répétés », le Red Chilena fait état d’une « augmentation » du nombre de plaintes déposées durant la pandémie de COVID-19, « tout comme pour le reste des plaintes » déposées en lien avec la violence familiale (2022-08, 27). Toutefois, selon la même source, en ce qui a trait aux crimes de mauvais traitements répétés liés à la violence familiale, un [traduction] « petit nombre d’affaires ont abouti à des peines » infligées par les tribunaux, soit « moins de 6 p. 100 » pour la période allant de 2015 à 2021 (1 818 affaires sur un total de 32 157), et 4,9 p. 100 en 2021 (258 affaires sur un total de 4 024) (Red Chilena 2022-08, 28, 29).

D’après le rapport du Chili au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, [version française des Nations Unies] « [g]râce aux canaux de prise en charge » mis sur pied par le Service national de la femme et de l’égalité des genres (Servicio Nacional de la Mujer y la Equidad de Género - SERNAMEG), « des services gratuits d’assistance psychologique, sociale et juridique sont fournis aux victimes de la violence à l’égard des femmes » (Chili 2022-05-16, paragr. 28). Dans le même rapport, le Chili déclare que les femmes représentent plus de 70 p. 100 des personnes qui [version française des Nations Unies] « appellent [l]a ligne d’assistance aux victimes » du Cabinet d’assistance judiciaire du Chili, qui est chargé de « fournir à titre gratuit des conseils et une représentation juridiques », notamment « une représentation judiciaire et une assistance psychosociale aux victimes d’infractions sexuelles » (Chili 2022-05-16, paragr. 30). Selon le rapport du Chili au CCT, la Ligne d’assistance téléphonique en cas de violence envers les femmes (Fono de Orientación en Violencia Contra la Mujer), le service d’assistance téléphonique gratuit destiné aux femmes victimes de violence, est accessible au moyen d’applications telles que WhatsApp et offert 24 heures par jour, et il comporte une ligne de communication directe avec les Carabineros du Chili pour les situations d’urgence (Chili 2023-01-16, paragr. 43). D’après le rapport du Chili au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, la ligne d’assistance téléphonique a reçu 126 645 appels en 2021, [version française des Nations Unies] « soit une variation de 149,1 % par rapport à 2019 » (Chili 2022-05-16, paragr. 15). De plus, on peut lire dans le même rapport que, après l’entrée en fonction du numéro WhatsApp, [version française des Nations Unies] « 18 923 sessions ont été enregistrées, avec un pic en mai 2020, atteignant 4 656 activations » (Chili 2022-05-16, paragr. 15). L’organisation Freedom House signale que, malgré le fait que [traduction] « le droit à l’assistance d’un avocat est garanti par la constitution et l’application régulière de la loi prévaut de manière générale » dans les affaires civiles et pénales au Chili, « les défendeurs démunis ne bénéficient pas toujours d’une représentation juridique efficace » (2022-02-24, sect. F2).

La doctorante a fait observer que la mise en œuvre des mécanismes de protection offerts par l’État aux personnes survivantes de violence familiale varie selon les gouvernements et les administrations en place, par exemple lorsqu’on compare le gouvernement de l’ancien président Sebastián Piñera [2018-2022] à l’administration du président Gabriel Boric [depuis 2022] (2023-04-03). La même source a souligné que [traduction] « les politiques [de l’ancien président Piñera] à l’égard des refuges pour femmes témoignaient d’une approche plus conservatrice » et mettaient l’accent sur « la médiation entre les personnes survivantes et les agresseurs, ce qui s’est avéré dangereux pour les survivantes et le personnel », qui étaient « exposés à la violence des agresseurs et l’ont subie » (doctorante 2023-04-03). La doctorante a ajouté que le gouvernement Boric [traduction] « est beaucoup plus sensible aux mécanismes qui sont à l’origine de la violence familiale » (2023-04-03). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

D’après des réseaux et organisations de défense des droits des femmes cités dans un article de la BBC, il existe [traduction] « de nombreux » cas de « personnes survivantes de violence familiale qui ont été injustement traduites en justice pour s’être défendues » contre leur agresseur (2022-07-24). Selon la documentation transmise par le bureau du procureur du Chili à la BBC, de 2011 à 2022, [traduction] « il y a eu 224 affaires où des femmes ont tué ou tenté de tuer leur conjoint »; de ce nombre, 86 affaires ont abouti à une peine criminelle et « plus de » 50 sont « encore en instance » (BBC 2022-07-24). Au cours d’une entrevue avec la BBC, une [traduction] « militante féministe qui fournit de l’assistance dans la prison » où une survivante de violence familiale était détenue pour avoir tué son conjoint et agresseur, et qui était aussi « la personne qui avait initialement alerté les organisations de défense des droits à propos de la situation [de la survivante de violence familiale en détention] et demandé leur soutien », a déclaré que « "[d]e nombreux cas comme celui-ci pourraient être évités si le système de justice faisait son travail" » et si « "une femme était effectivement protégée chaque fois qu’elle dénonçait la violence familiale" » (BBC 2022-07-24). Pour ce qui est de la survivante de violence familiale mise en détention pour avoir tué son conjoint, elle a déposé en preuve [traduction] « "au moins une centaine de signalements de violence familiale" », y compris des attestations de visites à l’hôpital, des ordonnances de non-communication et « [d’]innombrables » rapports de police, et les tribunaux l’ont finalement acquittée (BBC 2022-07-24).

Selon le rapport du Chili au CCT, les efforts pour [traduction] « renforcer les programmes de formation institutionnelle » de 2018 à 2022 ont permis au Bureau du procureur public d’offrir à 1 300 responsables publics une formation de sensibilisation aux questions de genre et à l’ouverture interculturelle, entre autres cours sur les droits de la personne et l’égalité des genres adoptés dans des institutions telles que la police et l’appareil judiciaire (Chili 2023-01-16, paragr. 44).

4.1 Protection offerte par l’État aux personnes survivantes dont les OCSIEG doivent être pris en considération

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu d’information sur la protection offerte par l’État aux personnes survivantes de violence familiale dont les OCSIEG doivent être pris en considération.

D’après les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, le droit chilien [traduction] « interdit la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre en matière d’accès au logement, à l’emploi et aux services gouvernementaux »; toutefois, « [p]ar moments », les autorités publiques « ont semblé réticentes à recourir pleinement aux lois contre la discrimination », notamment à accuser « les agresseurs de personnes LGBTQI+ de crimes motivés par la haine » (É.-U. 2023-03-20, 15). Selon la doctorante, [traduction] « la plupart » des mesures gouvernementales visant à contrer la violence familiale n’incluent pas « une approche intersectionnelle » tenant compte des expériences vécues par les personnes survivantes dont les OCSIEG sont un facteur à prendre en compte (2023-04-03). La même source a ajouté que [traduction] « de nombreuses organisations de défense des droits LGBTQIA+ ont signalé que les autorités font preuve de discrimination à l’endroit des personnes LGBTQIA+ » quand ces dernières déposent des plaintes pour violence, « ce qui comprend la violence familiale et la violence fondée sur le genre » (doctorante 2023-04-03).

4.2 Protection offerte par l’État aux personnes survivantes autochtones

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu d’information sur la protection offerte par l’État aux autochtones qui subissent de la violence familiale.

D’après les Country Reports 2022 publiés par les États-Unis, la constitution du Chili [traduction] « ne protège pas expressément les groupes autochtones », et « les organisations de défense des droits de la personne » déclarent que les populations autochtones se heurtent à « de sérieux obstacles à l’exercice » de leurs droits politiques et civils, y compris en ce qui concerne « la non-discrimination et l’accès égal à la justice » (É.-U. 2023-03-20, 12). D’après le rapport du Chili au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le Chili a mis en place un [version française des Nations Unies] « groupe de travail intersectoriel » qui élabore « un programme de formation nationale […] s’adress[ant] aux fonctionnaires des Services de défense pénale publique, du Cabinet d’assistance judiciaire, des carabiniers, de la police d’investigation chilienne, de la gendarmerie chilienne et du Service national de protection des mineurs, sur les droits humains des femmes autochtones et l’accès à la justice » (Chili 2022-05-16, paragr. 35). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur la mise en œuvre et l’efficacité du programme de formation nationale.

5. Services de soutien, y compris les services de santé mentale

D’après le rapport du Chili au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, c’est par l’intermédiaire du programme « Attention, protection et réparation en cas de violence contre les femmes » que le SERNAMEG met en œuvre

[version française des Nations Unies]

des services de soins, de protection, de réparation et d’accès à la justice grâce à un réseau de centres ambulatoires qui proposent une prise en charge psychosociale ou juridique aux femmes victimes de violence exercée par un partenaire intime ou un ancien partenaire (centres pour les femmes, centres pour les femmes sourdes, représentation juridique dans le Centre de mesures provisoires) ; des soins réparateurs spécialisés pour les survivantes de violences sexuelles (centres de soins et de réparation pour les femmes) et les victimes de violences graves (centres de soins réparateurs complets) ; des conseils et des informations ainsi qu’une orientation assistée pour les femmes victimes de violences fondées sur le genre graves voire potentiellement mortelles dans le contexte du couple au moment où les actes de violence se produisent (centres de soutien de liaison) ; et la prise en charge rééducative des hommes auteurs de violences envers une partenaire ou ancienne partenaire (centres de rééducation pour les hommes auteurs de violences) (Chili 2022-05-16, paragr. 66).

La même source ajoute que le programme

[version française des Nations Unies]

propose également une protection résidentielle sous la forme d’une assistance psychosociale et juridique aux femmes victimes de violences graves (résidences protégées) [...] Il a en outre mis sur pied la ligne d’assistance en cas de violence extrême, qui offre une représentation juridique spécialisée aux femmes victimes de tentatives de féminicide ou de violence fondée sur le genre de nature publique, ainsi qu’une représentation juridique aux membres de la famille des femmes victimes d’un féminicide (Chili 2022-05-16, paragr. 66).

En réponse au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le Chili affirme également que, durant la pandémie de COVID-19, l’accès des femmes [version française des Nations Unies] « à tous les modules de prise en charge » du SERNAMEG a été assuré, « y compris 44 résidences protégées, qui offrent des prestations résidentielles aux femmes ayant survécu à de graves violences de la part de leur partenaire intime, 113 centres pour les femmes, établissements de soins ambulatoires, dont 10 ont vu le jour entre 2018 et 2021 », ainsi que « 16 centres de rééducation pour les hommes » qui ont commis des actes de violence envers leurs partenaires intimes (Chili 2022-05-16, paragr. 15). Toutefois, d’après la doctorante, [traduction] « les refuges ont une capacité restreinte et ne disposent pas des mesures de sécurité » nécessaires pour fournir des services à « la plupart des survivantes, particulièrement dans les régions rurales » (2023-04-03). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

Dans son rapport au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le Chili signale que le ministère du Logement et de l’Aménagement urbain, de concert avec le ministère de la Femme et de l’Égalité des genres et le Service national de la femme et de l’égalité des genres, a mis à jour en 2020 un accord visant à répondre [version française des Nations Unies] « aux besoins urgents en matière de logement de femmes survivantes de violences fondées sur le genre et domestiques », accordant ainsi à ces femmes « une aide au logement préférentielle par l’intermédiaire d’une subvention au logement destinée aux femmes orientées par le Service national de la femme et de l’égalité des genres » (Chili 2022-05-16, paragr. 188). La même source fait remarquer que, dans ce cadre, [version française des Nations Unies] « plus de 800 subventions au logement » ont été attribuées au cours de la période 2018-2021 (Chili 2022-05-16, paragr. 188). De plus, en 2020 et 2021, 2 814 titres de propriété ont été accordés à des femmes chefs de famille dans le cadre des priorités du Programme social du gouvernement du Chili (Chili 2022-05-16, paragr. 188). D’après un article publié dans El Mostrador, un journal numérique chilien, l’accès au logement constitue [traduction] « une des pires crises depuis des décennies » au Chili, car le manque de logements et les conditions de logement difficiles, telles que les familles forcées de « vivre avec des familles apparentées », ont fait en sorte que les auteurs des violences ont « la possibilité d’exercer un contrôle accru et la victime dispose de moins d’espace et de moins de possibilités de chercher de l’aide » (2022-06-12).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Les Service policiers d’enquête du Chili (Policía de Investigaciones - PDI) sont la [traduction] « force policière civile chargée d’enquêter sur les crimes, y compris le trafic de stupéfiants et le crime organisé », alors que les Carabineros sont la « force nationale de police militarisée » (InSight Crime [2018]). Pour des renseignements additionnels sur ces institutions, veuillez consulter la réponse à la demande d’information CHL200952 publiée en mai 2023.

[2] La Société d’études sociales et d’éducation SUR (SUR Corporación de Estudios Sociales y Educación - SUR) est une organisation de la société civile à Santiago qui fait la promotion de la démocratie, de la justice sociale et des droits de la personne et qui vise à soutenir le développement du Chili et à infléchir les politiques publiques (SUR s.d.). L’Organisation de la diversité trans (Organizando Trans Diversidades - OTD) est une organisation chilienne qui vise à [traduction] « bâtir une communauté grâce au militantisme transféministe » pour défendre, promouvoir et renforcer les droits fondamentaux des « diversités trans » au Chili (OTD s.d.).

[3] La Lutte contre la violence conjugale (Fighting Domestic Violence), un outil de droit comparé, a été développé par le cabinet Baker McKenzie avec le soutien financier de l’organisation Droits des femmes dans le monde (Global Rights for Women) et le Traité toutes les femmes (Every Woman Treaty) et permet de mener des analyses rapides des lois nationales sur la violence familiale en vigueur dans divers pays (Baker McKenzie 2021-12-01).

[4] Selon le cabinet Baker McKenzie, des ordonnances civiles de protection peuvent être rendues dans les situations où il existe un [traduit] « risque imminent », c’est-à-dire les suivantes :

[traduction]

  1. le contrevenant a intimidé la victime potentielle en menaçant de lui causer des préjudices;
  2. il y a des circonstances ou des antécédents tels que la toxicomanie, l’alcoolisme ou une ou plusieurs plaintes de violence familiale;
  3. le contrevenant a déjà été déclaré coupable de violence familiale, fait présentement l’objet d’une procédure ou a déjà été déclaré coupable de crimes contre des personnes;
  4. les antécédents psychiatriques ou psychologiques du contrevenant laissent penser qu’il a une personnalité violente;
  5. le contrevenant s’oppose violemment à la rupture de la relation amoureuse qu’il avait avec la victime, ou refuse d’accepter cette rupture ([2021], 6).

[5] D’après l’article de La Tercera, la Fondation pour la promotion et le développement de la femme (Fundación para la Promoción y Desarrollo de la Mujer - PRODEMU) définit la violence économique comme suit :

[traduction]

« le contrôle exercé par le soutien de famille de sexe masculin du fait qu’il fournit l’argent nécessaire pour subvenir aux besoins du ménage et/ou des enfants ou des autres personnes qui composent la cellule familiale ». [La PRODEMU] précise aussi qu’il y a violence économique lorsque « quelqu’un d’autre » s’approprie l’argent qu’une femme a gagné par son travail, puis refuse de lui remettre l’argent nécessaire à l’entretien du ménage commun, lui extorque l’argent ou lui impose des conditions. De plus, [la violence économique survient] lorsque le « chef du ménage » ne permet pas à la femme de travailler et de générer ses propres revenus (La Tercera 2022-02-01).

Références

Baker McKenzie. 2021-12-01. « Baker McKenzie Launches Fighting Domestic Violence Comparative Law Tool ». [Date de consultation : 2023-03-07]

Baker McKenzie. [2021]. « Chile ». Fighting Domestic Violence: Pro Bono Initiative. Latin America and the Caribbean. [Date de consultation : 2023-03-07]

Baker McKenzie. S.d. « About Us ». [Date de consultation : 2023-03-07]

British Broadcasting Corporation (BBC). 2022-07-24. Charis McGowan. « 'I'd Defend Myself, Too': Chileans Back Abuse Survivors ». [Date de consultation : 2023-03-29]

Chili. 2023-04. Servicio Nacional de la Mujer y la Equidad de Género (SERNAMEG). Femicidios 2023. [Date de consultation : 2023-04-24]

Chili. 2023-02-27. Instituto Nacional de Estadísticas (INE). Statistical Bulletin: Quarterly Employment. [Date de consultation : 2023-04-25]

Chili. 2023-01-16. Séptimo informe periódico que Chile debía presentar en 2022 en virtud del artículo 19 de la Convención con arreglo al procedimiento simplificado de presentación de informes. (CAT/C/CHL/7) [Date de consultation : 2023-03-08]

Chili. [2023]. Subsecretaría de Prevención del Delito, Centro de Estudios y Análisis del Delito (CEAD). « Estadísticas delictuales: Estadísticas por delito ». Recherche dans la base de données à l’aide de Medida : « Tasa cada 100.000 habitantes », Tipo de datos : « Casos policiales », Unidad territorial : « Total país », Grupo Delictual : « Violencia intrafamiliar », Año : « 2021, 2022 ». [Date de consultation : 2023-04-19]

Chili. 2022-05-16. Eighth Periodic Report Submitted by Chile Under Article 18 of the Convention, Due in 2022. (CEDAW/C/CHL/8) [Date de consultation : 2023-03-15]

Chili. 2022-01-07. Ministerio del Interior y Seguridad Pública, Ministerio de la Mujer y la Equidad de Género & Ministerio de Agricultura. Piloto Rural Los Ríos. Encuesta de violencia intrafamiliar contra la mujer. [Date de consultation : 2023-04-03]

Chili. 2020. Ministerio del Interior y Seguridad Pública, Subsecretaría de Prevención del Delito. IV Encuesta de Violencia contra la Mujer en el Ámbito de Violencia Intrafamiliar y en Otros Espacios (ENVIF-VCM): Resultados País. [Date de consultation : 2023-04-19]

Chili. 2005. Ley 20066 Establece Ley de Violencia Intrafamiliar. Extraits traduits par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada. [Date de consultation : 2023-03-07]

Doctorante, Universidad Adolfo Ibáñez, Chili. 2023-04-03. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

El Mostrador. 2022-06-12. Natalia Espinoza. « Domestic Violence: The Hidden Face of Chile's Housing Crisis ». Traduit par le Havana Times. [Date de consultation : 2023-03-29]

El País. 2022-11-18. Antonia Laborde. « Chile considera 'violencia intrafamiliar' las deudas de pensiones por alimentos ». [Date de consultation : 2023-04-03]

États-Unis (É.-U.). 2023-03-20. Department of State. « Chile ». Country Reports on Human Rights Practices for 2022. [Date de consultation : 2023-04-23]

Freedom House. 2022-02-24. « Chile ». Freedom in the World 2022. [Date de consultation : 2023-03-29]

Fundación para la Promoción y Desarrollo de la Mujer (Prodemu). S.d. « Quiénes Somos ». [Date de consultation : 2023-04-03]

InSight Crime. [2018]. « Chile Profile ». [Date de consultation : 2023-04-21]

La Tercera. 2022-02-01. Mariana del Pilar Núñez. « Violencia económica, una violencia normalizada ». [Date de consultation : 2023-04-03]

Organizando Trans Diversidades (OTD). S.d. « Us ». [Date de consultation : 2023-03-29]

Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres (Red Chilena). [2023]. « Femicidios 2022 ». [Date de consultation : 2023-03-29]

Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres (Red Chilena). 2022-08. Dossier informativo: 2021 - 2022. Violencia contra mujeres en Chile. [Date de consultation : 2023-03-30]

Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres (Red Chilena). 2020-11. Estudio Exploratorio – Noviembre 2020: Respuestas de Carabineros frente a denuncias realizadas por mujeres que sufrieron violencia. [Date de consultation : 2023-03-30]

Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres, Red Chilena. S.d. « Presentación ». [Date de consultation : 2023-03-29]

SUR Corporación de Estudios Sociales y Educación (SUR). S.d. « Quiénes somos ». [Date de consultation : 2023-04-28]

SUR Corporación de Estudios Sociales y Educación (SUR) & Organizando Trans Diversidades (OTD). 2021-11-28. Nicolás Méndez, et al. Estudio: Derecho a la vivienda y a un entorno adecuado para disidencias sexuales y de género. [Date de consultation : 2023-04-21]

Autres sources consultées

Sources orales : Corporación Latinoamericana SUR; Movimiento de Integración y Liberación Homosexual; Organizando Trans Diversidades; professeure dans une université au Canada dont les recherches portent principalement sur les femmes et la participation politique et sur la représentation au sein des institutions d’État chiliennes, et qui a rédigé des articles sur les politiques visant à contrer la violence familiale au pays; professeure d’études de genre dans une université américaine ayant mené des recherches sur des questions liées à la violence, au genre, à la sexualité et à la culture politique dans des pays de l’Amérique latine comme le Chili; psychologue au Chili dont les recherches portent principalement sur les relations intergroupes, les préjugés et les problèmes de santé mentale chez les groupes minoritaires, ainsi que sur la violence entre partenaires intimes dans les relations homosexuelles au Chili; Red Chilena contra la Violencia hacia las Mujeres.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; Associated Press; Chili – Biblioteca del Congreso Nacional, Ministerio de Desarrollo Social y Familia, Ministerio de Relaciones Exteriores, Poder Judicial; Connectas; Diario Constitucional; El Ciudadano; EUROsociAL+; Factiva; The Guardian; Harvard University – Nieman Foundation; Human Rights Watch; Infobae; International Work Group for Indigenous Affairs; La Izquierda Diario; La Nación; LatinAmerican Post; MercoPress; Movimiento de Integración y Liberación Homosexual; Nations Unies – ONU Femmes; Organisation des États américains – Commission interaméricaine des droits de l’homme; Radio ADN; Radio Programas del Perú; The Santiago Times; Servicio Jesuita a Migrantes; SinEmbargo; Universidad de Chile.

 

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