Colombie : information sur le Clan du golfe (Clan del Golfo) [Autodefensas Gaitanistas de Colombia (AGC), Los Urabeños, Clan Úsuga], y compris sur ses dirigeants, sa structure, ses zones d'opération, ses activités et le profil de ses cibles; information sur sa capacité à suivre ses cibles; la réponse de l'État et la protection offerte aux victimes (2017-mai 2020) [COL200218.F]

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

1. Le Clan du golfe

Des sources signalent que le Clan du golfe est aussi appelé « Los Urabeños », « les Forces d’autodéfenses gaitanistes de Colombie (Autodefensas Gaitanistas de Colombia — AGC) » ou « Clan Úsuga » (HRW 2018, 20; Geneva Academy déc. 2017, 3; Belgique 3 juill. 2017, 13). Des sources rapportent que les autorités colombiennes désignent le groupe généralement sous le nom de « Clan du golfe » (Colombia Reports 20 juill. 2019a; InSight Crime 14 mars 2018; International Crisis Group 19 oct. 2017, 3). Certaines sources avancent que le groupe se désigne par l’appellation « AGC » (L’Observatoire mai 2018, 25; InSight Crime 14 mars 2018). D’autres affirment cependant que les AGC constituent « le bras armé » du Clan du golfe (AFP 30 nov. 2019; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres détails à ce sujet.

Des sources décrivent le Clan du golfe comme un [traduction] « groupe paramilitaire » (GlobalSecurity.org 4 mars 2018) ou [traduction] « néo-paramilitaire » (International Crisis Group 19 oct. 2017, i; Tracking Terrorism s.d.). Certaines sources signalent qu’il est reconnaissable par l’uniforme que porte au moins une partie de ses membres (International Crisis Group 19 oct. 2017, 9; FIDH, et al. 8 sept. 2017) et qui, selon les signataires d’une lettre ouverte aux membres du Conseil de sécurité des Nations Unies, est semblable à celui de l’armée colombienne (FIDH, et al. 8 sept. 2017). Selon certaines sources, il s’agit du [traduction] « plus grand » (L’Observatoire mai 2018, 25; FIDH, et al. 8 sept. 2017) ou du [traduction] « plus puissant » groupe paramilitaire de la Colombie (Colombia Reports 22 oct. 2019). Plusieurs le décrivent comme un important groupe de trafiquants de drogues (AFP 30 nov. 2019; International Crisis Group 8 août 2019, 4). Des sources affirment qu’il constitue la plus grande organisation criminelle de Colombie (International Crisis Group 8 août 2019, 7; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Le 15 octobre 2018, le ministère de la Justice des États-Unis a classé ce groupe parmi les [traduction] « principales menaces de la criminalité transnationale organisée » (É.-U. 15 oct. 2018). D’après InSight Crime, une fondation qui se consacre à l’étude du crime organisé en Amérique latine et dans les Caraïbes (InSight Crime s.d.), le Clan du golfe se classait au huitième rang des plus grandes organisations criminelles d’Amérique latine en 2019 (InSight Crime 22 janv. 2020).

Des sources rapportent que le Clan du golfe a été formé à la suite de la démobilisation des groupes paramilitaires d’extrême droite, et qu’il tire ses origines des Forces d’autodéfense unies de Colombie (Autodefensas Unidas de Colombia — AUC), vers 2005 et 2006 (AFP 30 nov. 2019; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Selon InSight Crime, les AUC sont les [traduction] « prédécesseurs » des Urabeños (InSight Crime 22 janv. 2020). Pour d’autres renseignements sur les origines du Clan du golfe, veuillez consulter la réponse à la demande d’information COL105773 publiée en avril 2017.

2. Membres

Selon des sources, les membres du Clan du golfe sont :

  • d’anciens paramilitaires démobilisés lors du processus de paix de 2006 (Affaires internationales 14 avr. 2018; AFP 5 sept. 2017);
  • d’anciens combattants des AUC (Colombia Reports 20 juill. 2019a; InSight Crime 30 mai 2017);
  • d’anciens membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia — FARC) (Affaires internationales 14 avr. 2018; InSight Crime 30 mai 2017).

Selon les sources, les estimations du nombre de membres du groupe varient entre 1 500 et 15 000 (Colombia Reports 20 juill. 2019a; RFI 26 mai 2018; France 14 août 2017, 5; Belgique 3 juill. 2017, 13). Des sources affirment que ce nombre se situe entre 3 000 et 3 500, si l’on compte les membres permanents et occasionnels ou les [traduction] « sous-contractants » (GlobalSecurity.org 4 mars 2018; International Crisis Group 19 oct. 2017, 9). Certaines sources précisent que le gouvernement de la Colombie estime que les effectifs du Clan du golfe comptent entre 1 800 et 2 000 membres (Affaires internationales 14 avr. 2018; International Crisis Group 19 oct. 2017, 9; AFP 5 sept. 2017).

3. Organisation
3.1 Structure

Des sources décrivent le Clan du golfe comme une organisation comprenant d’une part des combattants à temps plein et d’autre part des mercenaires occasionnels (GlobalSecurity.org 4 mars 2018; HRW 2018, 20; International Crisis Group 19 oct. 2017, 9). Cette organisation, selon l’International Crisis Group, [traduction] « combine une hiérarchie militaire verticale centrée dans le nord-ouest du pays avec un réseau de gangs locaux sous-contractants » (International Crisis Group 19 oct. 2017, i). Le commandement national aurait son siège [traduction] « dans leur fief d'Urabá », sous la direction d’« Otoniel » (InSight Crime 14 mars 2018). L’International Crisis Group décrit ainsi leur structure :

[traduction]

Les combattants armés et en uniforme opèrent dans des zones rurales, comme l'Urabá, le sud de Córdoba, le Bajo Cauca Antioqueño, le Chocó et le sud du Bolívar, où ils cherchent à exercer un contrôle territorial et sont organisés en blocs et en fronts dirigés par des commandants régionaux et des chefs de front. […] Ils opèrent à Nariño, à Antioquia, ainsi que le long de la côte atlantique et de la frontière vénézuélienne. L'organisation dispose d'un haut commandement central, composé de commandants régionaux, et d'une aile politique. Sous le commandement se trouve une hiérarchie verticale avec différents niveaux de contrôle, comprenant des escadrons, des sections, des groupes, des compagnies, des fronts et des blocs (International Crisis Group 19 oct. 2017, 9).

L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rapporte une description de l’organigramme du Clan du golfe empruntée au groupe de réflexion indépendant colombien Fundación Ideas para la Paz (FIP) :

[Il] se compose d’une structure principale et formelle et de blocs régionaux indépendants obéissant à des dirigeants régionaux qui servent d’interface entre le Clan del Golfo et le complexe réseau criminel leur permettant une ingérence territoriale indirecte en contrôlant la population et en régulant des activités autant légales qu’illégales (France 14 août 2017, 5, en italiques dans l’original).

Les mercenaires, selon des sources, sont engagés par le Clan du golfe parmi les gangs locaux de la Colombie pour mener leurs opérations sur place (HRW 2018, 20; France 14 août 2017, 5). Selon l’OFPRA, ils s’occupent « des assassinats, des recouvrements d’extorsions, du microtrafic et la perception de l’argent du trafic de drogue » (France 14 août 2017, 5). Des sources décrivent les liens qui unissent les gangs locaux au pouvoir central comme plutôt [traduction] « faibles » (InSight Crime 14 mars 2018) ou « relâchés » GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Pour d’autres renseignements sur la structure et la classification du groupe par le gouvernement parmi les groupes armés organisés (Grupos Armados Organizados – GAO), veuillez consulter la réponse à la demande d’information COL105773 publiée en avril 2017.

3.2 Leader

Les sources rapportent que Dairo [Dayro] Antonio Úsuga [Suga] [David], alias « Otoniel » [ou « Mauritius » ou « Mao » (NF News 22 févr. 2020; GlobalSecurity.org 4 mars 2018)] est le leader actuel du Clan du golfe (InSight Crime 22 janv. 2020; Colombia Reports 22 oct. 2019). Il s’agit, selon des sources médiatiques, de l’homme « le plus recherché » du pays (Colombia Reports 23 août 2019; RFI 26 mai 2018; AFP 20 févr. 2018). Des sources soulignent que les États-Unis offrent cinq millions de dollars pour sa capture (RFI 26 mai 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018; AFP 20 févr. 2018) et le gouvernement de la Colombie, un million (GlobalSecurity.org 4 mars 2018).

4. Zones d’opération
4.1 En Colombie

GlobalSecurity.org, une source américaine d’information en ligne dans les domaines de la défense, de l'espace, du renseignement et de la sécurité intérieure (GlobalSecurity.org s.d.), rapporte que, selon un document non identifié du renseignement colombien, le Clan du golfe contrôle l’ensemble du territoire colombien, dont la plupart des ports (GlobalSecurity.org 4 mars 2018). InSight Crime affirme de même que l’emprise du groupe s’étend sur tout le pays (InSight Crime 14 mars 2018). Des sources soulignent qu’il est notamment présent sur les côtes des Caraïbes et du Pacifique (InSight Crime 14 mars 2018; Tracking Terrorism s.d.). GlobalSecurity.org affirme que le groupe est présent dans 17 des 32 départements de la Colombie, dont la plupart se situent dans le nord-ouest du pays, et qu’il est actif dans 13 de ceux-ci :

[traduction]

Le [C]lan est particulièrement concentré dans la région nord de la Colombie, notamment dans les départements du Pacifique, dont Antioquia, Chocó et Córdoba. [...] L'organisation illégale est également présente dans la région centrale du Meta ainsi qu'aux frontières avec le Venezuela et le Panama, y compris dans la région de leur berceau, l'Urabá (GlobalSecurity.org 4 mars 2018).

Selon InSight Crime, le Clan du golfe est présent dans 17 départements :

[traduction]

La base et le fief territorial du groupe sont centrés autour du golfe d'Urabá, dans les départements d'Antioquia et de Chocó, et s'étendent jusqu'à Córdoba. Il est très présent dans le reste de ces départements ainsi que le long de la côte caraïbe, dans la ville de Medellín et dans des départements tels que La Guajira, Santander, Valle del Cauca et Norte de Santander (InSight Crime 14 mars 2018).

Dans un rapport de mission datant de mai 2018, L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’homme, une collaboration entre la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) (L'Observatoire s.d.), publie une liste, empruntée au Human Rights Ombudsman’s Office (Defensoría del Pueblo) de la Colombie et datant de mars 2017, des départements où est présent le Clan du golfe : Antioquia, Chocó, Casanare, Valle del Cauca, Nariño, Córdoba, Sucre, Bolívar, Magdalena, Atlántico, La Guajira, des régions urbaines de Cesar et certaines régions de Magdalena Medio (L’Observatoire mai 2018, 25). Une carte publiée en juillet 2019 par Colombia Reports, un site d’information indépendant de langue anglaise basé en Colombie (Colombia Reports s.d.), démontre de même qu’une grande partie des activités du Clan du golfe, en 2018, avait lieu dans le nord-ouest du pays, ainsi que dans sa région centrale (Colombia Reports 20 juill. 2019b).

4.2 International

Selon GlobalSecurity.org, [traduction] « le Clan du golfe […] entretient de bonnes relations d'affaires avec les cartels de la drogue au Costa Rica, au Honduras, au Panama, au Guatemala et au Mexique, dont le tristement célèbre cartel de la Sinaloa » (GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Des sources rapportent que les bateaux du Clan du golfe transportent de la drogue des ports de la côte pacifique ou caribéenne de la Colombie vers l’Amérique centrale et le Mexique (GlobalSecurity.org 4 mars 2018; AFP 5 sept. 2017).

5. Relations
5.1 Rivaux

Des sources rapportent que le Clan du golfe est en conflit avec la guérilla Armée de libération nationale (Ejército de Liberación Nacional — ELN) (Colombia Reports 22 oct. 2019; InSight Crime 14 mars 2018; Tracking Terrorism s.d.). Des sources signalent des affrontements armés pour le contrôle du territoire entre les deux groupes, notamment dans la région de Chocó (International Crisis Group 8 août 2019, 7; Libération 2 avr. 2020; InSight Crime 14 mars 2018). Pour d’autres renseignements sur les relations entre le Clan du golfe et l’ELN, veuillez consulter la réponse à la demande d’information COL106086 publiée en avril 2018.

Des sources rapportent que le Clan du golfe entretient une rivalité avec les Caparros [Los Caparros, précédemment Los Caparrapos] (Nations Unies 26 févr. 2020, paragr. 10; Colombia Reports 22 oct. 2019; OEA 2019, paragr. 23). Selon Colombia Reports, les deux groupes s’affrontent pour le contrôle du territoire dans le département d’Antioquia, et plus précisément dans la région de Bajo Cauca (Colombia Reports 6 juill. 2019).

Des sources décrivent le Clan du golfe comme un [traduction] « rival de longue date » (Tracking Terrorism s.d.) ou un [traduction] « ennemi juré » des FARC (Colombia Reports 22 oct. 2019). InSight Crime signale cependant ce qui suit :

[traduction]

La nouvelle mafia qui se forme à partir des vestiges des FARC a le potentiel de créer à la fois de nouveaux alliés et de nouveaux ennemis, selon que les deux parties perçoivent qu'il est dans leur intérêt de coopérer ou de se disputer le territoire laissé par la guérilla. Dans certaines régions, notamment à Córdoba dans le nord, les Urabeños travailleraient avec la mafia des ex-FARC, tandis que dans d'autres, comme certaines parties d'Antioquia, ils s'opposeraient violemment à eux (InSight Crime 14 mars 2018).

5.2 Alliés

Des sources rapportent, sans les nommer, que le Clan du golfe s’allie à des organisations criminelles et à des gangs ou à des trafiquants de drogues indépendants en Colombie (InSight Crime 14 mars 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Colombia Reports, sans nommer de groupes précis, rapporte que les AGC entretiennent des liens avec d’autres dissidents des AUC (Colombia Reports 22 oct. 2019). Des sources signalent que le groupe entretient de bonnes relations avec le cartel de Sinaloa au Mexique (InSight Crime 14 mars 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Selon Colombia Reports, les autorités colombiennes affirment que le groupe est [traduction] « le principal allié du puissant cartel de Sinaloa » (Colombia Reports 22 oct. 2019). GlobalSecurity.org souligne en outre que le Clan entretient [traduction] « de bonnes relations d’affaires avec des cartels de la drogue au Costa Rica, au Honduras, au Panama, au Guatemala et au Mexique » (GlobalSecurity.org 4 mars 2018).

6. Activités
6.1 Trafic de drogue

Les sources rapportent que l’activité principale du Clan du golfe est le trafic de drogues (InSight Crime 14 mars 2018; International Crisis Group 19 oct. 2017, 10). Selon des sources, le groupe contrôle la plus grande partie de ce trafic en Colombie (Colombia Reports 22 oct. 2019; France 14 août 2017, 5). Il est particulièrement impliqué dans la production et le trafic de la cocaïne (AFP 5 sept. 2019; RFI 26 mai 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). InSight Crime décrit ainsi son organisation :

[traduction]

[Ils] se consacrent principalement au trafic de drogue transnational. Les membres du groupe dirigeant sont eux-mêmes des trafiquants internationaux qui gèrent leurs propres itinéraires. Toutefois, le réseau dans son ensemble est moins un cartel de la drogue qu'un fournisseur de services aux trafiquants indépendants. Le groupe contrôle les territoires et réglemente ou gère le marché de base de coca, en escortant les envois le long des couloirs de trafic internationaux, en assurant l'accès ou la protection des laboratoires de transformation, et en fournissant des services de stockage et d'expédition dans les régions côtières et frontalières (InSight Crime 14 mars 2018).

6.2 Extorsion

Pour financer ses activités, le groupe, selon des sources, se livre à l’extorsion (International Crisis Group 8 août 2019, 11; InSight Crime 14 mars 2018; France 14 août 2017, 5). Selon l’International Crisis Group, il exige des sommes autant des trafiquants qui veulent traverser des zones sous leur contrôle, que des mineurs qui veulent exploiter des mines sur leur territoire ou des entreprises et exploitations agricoles locales (International Crisis Group 19 oct. 2017, 10).

6.3 Exploitations minières illégales

Des sources soulignent que le Clan du golfe est également impliqué dans l’exploitation minière illégale, notamment de l’or (Affaires internationales 14 avr. 2018; InSight Crime 14 mars 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Selon l’International Crisis Group, ils [traduction] « tirent profit de l'exploitation minière criminelle et informelle dans des régions comme le Bajo Cauca Antioqueño, Córdoba et Chocó, où ils gèrent directement les exploitations minières » (International Crisis Group 19 oct. 2017, 10).

6.4 Autres

Parmi les autres activités du Clan qui sont mentionnées dans les sources, on retrouve le trafic d’armes (International Crisis Group 8 août 2019, 7; GlobalSecurity.org 4 mars 2018) et le blanchiment d’argent (GlobalSecurity.org 4 mars 2018).

6.5 Violence et intimidation (pour le contrôle du territoire)

L’International Crisis Group explique ce qui suit au sujet des relations des groupes armés avec les populations présentes sur les territoires qu’ils contrôlent :

[traduction]

Chacun de ces groupes a des objectifs différents, mais ils partagent des méthodes communes pour imposer un contrôle territorial, offrir une protection, résoudre les conflits entre les résidents et préserver les économies locales illégales. Ils sont en concurrence avec un État perçu comme distant et indifférent pour le contrôle de régions physiquement isolées, de zones frontalières et de rivières importantes, qui sont considérées comme les autoroutes de la périphérie de la Colombie (International Crisis Group 19 oct. 2017, 3).

La même source ajoute ce qui suit :

[traduction]

Depuis l'accord de paix des FARC, une myriade d'autres groupes [...] ont exploité les griefs de la population locale envers les élites politiques, fourni des occasions dans le commerce de la drogue ou d'autres entreprises illégales, et déployé une puissance de feu brute pour coopter et contraindre les communautés (International Crisis Group 8 août 2019, i).

Un rapport publié par la Geneva Academy of International Humanitarian Law and Human Rights, un centre d’études et d'enseignement suisse qui se consacre au domaine du droit international en lien avec les conflits armés (Geneva Academy Déc. 2017, 17), explique en outre ceci :

[traduction]

Ces groupes ont des structures non homogènes et sont capables d'entreprendre des actions différenciées et flexibles en réponse à des circonstances et des contextes locaux et régionaux spécifiques. Ils cherchent à reproduire des scénarios de contrôle coercitif dans les communautés rurales et urbaines, entravant la consolidation des bases organisationnelles communautaires et la mobilisation sociale pour faire valoir des droits (Geneva Academy déc. 2017, 4).

6.5.1 Violences

Parmi les moyens employés par le Clan du golfe pour contraindre les populations, les sources font état de violences et d’intimidation dirigées contre des civils (GlobalSecurity.org 4 mars 2018; International Crisis Group 19 oct. 2017, 10). Selon InSight Crime, ils maintiennent [traduction] « des commerçants, des agriculteurs, des fonctionnaires et des communautés dans un état de terreur » (InSight Crime 30 mai 2017). Certaines sources mentionnent de nombreux meurtres commis par le groupe (International Crisis Group 8 août 2019, 7; Affaires internationales 14 avr. 2018). Des sources rapportent également des violences sexuelles à l’endroit des femmes et des jeunes filles (International Crisis Group 8 août 2019, i, 14; Nations Unies 23 mars 2018, paragr. 34).

D’autres sources rapportent que les activités du Clan du golfe ainsi que les violences occasionnées par ses affrontements avec des groupes rivaux causent des déplacements forcés de populations (Libération 2 avr. 2020; Affaires internationales 14 avr. 2018), notamment dans la région de Chocó (Libération 2 avr. 2020; International Crisis Group 8 août 2019, 7).

7. Cibles et victimes
7.1 Policiers

Des sources rapportent que le Clan du golfe s’en prend aux membres des forces de l’ordre (Geneva Academy déc. 2017, 4; InSight Crime 30 mai 2017). Selon certaines sources, le groupe aurait initié, en mai 2017, le Plan Pistola qui visait à attaquer systématiquement les membres des forces de sécurité (Geneva Academy déc. 2017, 4; France 14 août 2017, 6; Belgique 3 juill. 2017, 11). Selon les signataires de la lettre ouverte au Conseil de sécurité des Nations Unies, ce plan prévoyait des récompenses pour le meurtre de policiers dans certaines régions du pays (FIDH, et al. 8 sept. 2017). Des sources font état d’attaques du Clan du golfe contre des policiers qui ont causé des morts (Geneva Academy déc. 2017, 4; Belgique 3 juill. 2017; France 14 août 2017, 5, 6; InSight Crime 30 mai 2017) et des blessés (France 14 août 2017, 5, 6; InSight Crime 30 mai 2017).

7.2 Leaders sociaux

Des sources signalent que des leaders sociaux ou des dirigeants communautaires sont ciblés par le Clan du golfe (International Crisis Group 8 août 2019, i; El Espectador 12 juill. 2018; GlobalSecurity.org 4 mars 2018). Le rapport publié par la Geneva Academy explique que c’est un moyen de contrôler la population en la décourageant de se mobiliser pour faire valoir ses droits (Geneva Academy déc. 2017, 4).

7.3 Défenseurs des droits de la personne

Selon L’Observatoire, des défenseurs des droits de la personne ont été ciblés par le Clan du golfe (L’Observatoire mai 2018, 16, 19, 27, 36). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

7.4 Afro-Colombiens et indigènes

D’après des sources, entre 2017 et 2019, les communautés indigènes du département de Chocó ont subi les violences directes ou indirectes du Clan du golfe lorsque ce dernier affrontait les membres de l'ELN dans la région (ACAPS 5 nov. 2019; GlobalSecurity.org 4 mars 2018; Geneva Academy déc. 2017, 4). Des sources mentionnent que les communautés afro-colombiennes ont aussi été touchées (Geneva Academy déc. 2017, 4; ACAPS 5 nov. 2019; GlobalSecurity.org 4 mars 2018), également dans les départements d'Antioquia et de Córdoba (GlobalSecurity.org 4 mars 2018). L’International Crisis Group mentionne que les communautés indigènes et afro-colombiennes sont victimes d’un [traduction] « taux élevé de meurtres, de déplacements massifs ou de confinements forcés, de violences sexuelles et de meurtres de dirigeants communautaires » (International Crisis Group 8 août 2019, i). Pour plus de renseignements sur la situation des Afro-Colombiens, y compris sur les déplacements forcés à l'intérieur du pays et les effets des confrontations entre groupes armés sur eux, veuillez consulter la réponse à la demande d'information COL200219 publiée en mai 2020.

7.5 Capacité à suivre leurs cibles

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur la capacité du Clan du golfe à traquer ses cibles.

8. Mesures prises par l'État
8.1 Opération Agamemnon II

L’International Crisis Group explique ce qui suit :

[traduction]

Le gouvernement colombien a identifié trois « groupes armés organisés » qui, selon lui, sont considérés comme des parties à un conflit armé interne selon les normes internationales : les Gaitanistes, l'EPL et les Puntilleros. Sur cette base, le gouvernement assume le droit légal de cibler ces groupes avec une force mortelle en vertu des lois régissant la conduite de la guerre (International Crisis Group 19 oct. 2017, 8, 9).

Des sources signalent que le gouvernement de la Colombie a mené en 2017 l’opération militaire Agamemnon II, qui visait à capturer ou neutraliser les dirigeants du Clan du golfe (InSight Crime 14 mars 2018; France 14 août 2017, 6). L’OFPRA rapporte qu’entre janvier et août 2017, cette opération a permis d’arrêter 153 membres du Clan et, au cours de l’opération, a provoqué la mort de 21 autres membres (France 14 août 2017, 6). Selon InSight Crime, l’opération a permis d’arrêter ou de tuer au moins trois commandants (InSight Crime 14 mars 2018). GlobalSecurity.org signale pour sa part que les opérations Agamemnon I, menée en 2015, et Agamemnon II ont permis l’arrestation de 1 500 membres du Clan et la suppression de 12 de ses plus hauts gradés (GlobalSecurity.org 4 mars 2018).

8.2 Reddition avortée

À la suite de cette opération, selon des sources, Otoniel a fait, en septembre 2017, une offre de reddition du Clan du golfe au système de justice colombien (Colombia Reports 22 oct. 2019; InSight Crime 14 mars 2018; Tracking Terrorism s.d.). Des sources rapportent que cette offre comprenait des conditions (International Crisis Group 19 oct. 2017, 21; Tracking Terrorism s.d.). Selon Colombia Reports, le Clan demandait une protection contre l’extradition et des garanties empêchant la formation de nouveaux groupes dans les régions sous le contrôle du Clan (Colombia Reports 22 oct. 2019). La même source rapporte que des négociations ont eu lieu jusqu’au changement de gouvernement, en août 2018, puis que le nouveau président Ivan Duque y a mis fin (Colombia Reports 22 oct. 2019). Le blogue sur le processus de paix en Colombie du Bureau de Washington sur l’Amérique latine (Washington Office on Latin America — WOLA) rapporte que la Police nationale de Colombie a dressé le bilan suivant en janvier 2020 :

[traduction]

[Elle] a déclaré avoir mené 1 163 opérations contre le groupe néo-paramilitaire du Clan du golfe depuis le lancement de l’« opération Agamemnon » en février 2015, capturant 3 344 personnes, en tuant 127, dont 30 dirigeants de haut niveau, et saisissant plus de 1 000 armes à feu. 80 membres des forces de sécurité sont morts au cours de ces opérations (WOLA 10 mars 2020).

8.3 Protection offerte aux victimes

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu d’information sur la protection offerte aux victimes du Clan du golfe. Amnesty International, dans un rapport de novembre 2017, estime que le gouvernement ne parvient pas à assurer la sécurité des civils alors que les menaces émises par les guérillas et groupes paramilitaires continuent sans que les autorités ne réagissent (Amnesty International 22 nov. 2017). Un rapport de l’ACAPS, un site d’information indépendant et objectif, spécialisé dans l’analyse et l’évaluation des besoins humanitaires en cas de crises (ACAPS s.d.), qui porte sur les déplacements causés par les affrontements entre l’AGC et l’ELN dans la région de Chocó, signale en novembre 2019 que selon un rapport du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies datant du 22 octobre 2019, [traduction] « la présence de l’État est faible et l’État ne peut assurer une protection aux individus ou à des groupes spécifiques contre la violence » (ACAPS 5 nov. 2019, 2). L’Observatoire signale de même à maintes reprises que les autorités ne sont pas en mesure de protéger les défenseurs des droits de la personne ou les communautés qui sont menacées par les membres du Clan du golfe (L’Observatoire mai 2018, 5, 46). Pour d’autres renseignements sur les mesures de protection offertes par l’État, veuillez consulter le rapport de la mission d’information sur la Colombie publié en mai 2020.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Références

ACAPS. 5 novembre 2019. « Colombia: Displacement in Choco ». [Date de consultation : 30 avr. 2020]

ACAPS. S.d. « Who We Are - In Short ». [Date de consultation : 11 mai 2020]

Affaires internationales. 14 avril 2018. « La Colombie redouble d’efforts dans la lutte contre le clan du Golfe ». [Date de consultation : 8 mai 2020]

Agence France-Presse (AFP). 30 novembre 2019. « Colombie : fuite de 2 200 civils par peur d’affrontements entre guérilla et narcos ». [Date de consultation : 27 avr. 2020]

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Autres sources consultées

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; Colombie – ministère de la Défense nationale; Courrier international; ecoi.net; États-Unis – Congressional Research Service, Department of State; Le Figaro; Freedom House; Internal Displacement Monitoring Centre; International Federation of Red Cross and Red Crescent Societies; Nations Unies – Refworld; Oficina Internacional de Derechos Humanos – Acción Colombia; Le Point; Reporters sans frontières; Tele Sur English.

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