Somalie et Soudan : information sur les passeports délivrés aux réfugiés érythréens par les gouvernements de la Somalie et du Soudan (1960-1980) [ZZZ106138.EF]

Direction des recherches, Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Contexte historique

En 1962, l’Éthiopie a déclaré que l’Érythrée est une province du pays, abolissant ainsi le statut d’entité fédérale dont le territoire bénéficiait auparavant (BBC 10 juill. 2018; Last et Markakis 31 août 2018) et [traduction] « donnant de l’élan à la lutte [Érythréenne] pour l’indépendance (BBC 10 juill. 2018). La guerre d’indépendance, menée par le Front de libération de l’Érythrée (Eritrean Liberation Front – ELF), a duré 30 ans (Weldemichael 22 nov. 2013, 872). L’Érythrée a obtenu l’indépendance en 1993 (BBC 10 juill. 2018; Last et Markakis 31 août 2018). Des Érythréens fuyant le conflit ont commencé à arriver au Soudan au milieu des années 1960, leur nombre augmentant jusqu’à 500 000 au milieu des années 1980 (Nations Unies 29 janv. 2002).

2. Délivrance des passeports

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, Awet T. Weldemichael, professeur agrégé du Département d’histoire de l’Université Queen’s qui se spécialise en recherche sur la Corne de l’Afrique (Queen’s University s.d.), a écrit que depuis les années 1960, les gouvernements de la Somalie et du Soudan délivrent des passeports aux Érythréens (Weldemichael 12 juin 2018).

2.1 Soudan

La loi réglementant l’asile (Regulation of Asylum Act) au Soudan, qui régit la délivrance des passeports aux réfugiés, prévoit ce qui suit :

[traduction]

Sous réserve de la loi sur les passeports et l’immigration (Passports and Immigration Act) de 1961, le ministre, ou toute personne autorisée par lui, peut à sa discrétion délivrer un passeport à tout réfugié qui en fait la demande. Le ministre des Affaires étrangères peut, dans des circonstances exceptionnelles prévues par lui par décret, délivrer un passeport diplomatique à un réfugié (Soudan 1974, art. 12).

Selon Weldemichael, la réponse du Soudan à la demande d’aide de l’Érythrée dans sa lutte contre l’Éthiopie s’est manifestée, entre autres, par la délivrance de passeports à certains dirigeants et [traduction] « membres de niveau intermédiaire » de l’ELF (Weldemichael 12 juin 2018). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

2.2 Somalie

Dans le chapitre qu'il a rédigé sur les relations de l’Érythrée avec la Somalie, Hussein M. Adam [1] affirme que les

[traduction]

régimes somaliens ont tous fait preuve de beaucoup d’empressement pour délivrer des passeports somaliens à des Érythréens, y compris des passeports diplomatiques à certains éléments de la direction. Ces passeports ont permis à des Érythréens de voyager pour s’instruire et travailler. […] La direction a également été en mesure de voyager aux fins et dans l’intérêt de l’organisation (Adam 1994, 146).

Dans son article sur la diplomatie du mouvement d’indépendance de l’Érythrée, Weldemichael a souligné que

[traduction]

[d]ès novembre 1961, à la demande [du chef de l’ELF Osman Saleh] Sabbe, le ministère des Affaires étrangères de la Somalie a délivré des passeports à des militants érythréens en Arabie saoudite après la révocation de leurs passeports par l’Éthiopie. Depuis ce temps et tout au long de la guerre, presque tous les combattants de l’indépendance ont parcouru le globe muni de passeports réguliers ou diplomatiques somaliens (Weldemichael 22 nov. 2013, 879).

Selon Weldemichael,

[traduction]

en raison de l’éloignement géographique et des différences linguistiques et culturelles entre les Érythréens et les Somaliens, l’Érythréen moyen ne s’est pas enfui et ne s’est pas réfugié en Somalie. Par conséquent, la Somalie a délivré des passeports seulement aux Érythréens affiliés au mouvement d’indépendance approuvés par le mouvement et pour qui le mouvement a activement demandé des passeports somaliens (Weldemichael 12 juin 2018).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

3. Marche à suivre et aspect

Weldemichael a affirmé qu’à sa connaissance, l’aspect des passeports délivrés aux réfugiés érythréens par le Soudan et la Somalie n’est pas différent de ceux délivrés aux citoyens de ces pays (Weldemichael 12 juin 2018). Selon cette même source,

[traduction]

au Soudan, les Érythréens ordinaires suivent le processus normal suivi par les citoyens soudanais : commencer à un bureau local ou provincial avec un certificat de naissance, une ou des pièces d’identité, un formulaire de demande et payer les frais exigés. La façon dont les membres du mouvement de libération de l’Érythrée ont obtenu leurs passeports n’est pas claire, car ils n’avaient probablement pas les documents nécessaires. Je sais que quelques cas ont été traités par de hauts responsables du gouvernement […].

En Somalie – étant donné que, à ma connaissance, tous les Érythréens détenant un passeport somalien sont membres du mouvement d’indépendance –, ce dernier a utilisé son propre mécanisme à des niveaux plus élevés du gouvernement dans les ambassades à l’étranger (Weldemichael 12 juin 2018).

Selon la même source,

[traduction]

[d]ès le départ, les Érythréens (en particulier en Somalie) devaient prendre des noms à consonance musulmane (s’ils étaient des Érythréens chrétiens avec des noms à consonance manifestement chrétienne). Vers les années 1980, toutefois, les Érythréens obtenant un passeport somalien pouvaient conserver leurs prénoms ou prendre un pseudonyme non musulman ou qui n’est pas à consonance musulmane (Weldemichael 12 juin 2018).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l’aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n’apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d’une demande d’asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d’information.

Note

[1] Hussain Mohammad Adan était un universitaire, un professeur de science politique auCollege of the Holy Cross à Worcester, au Massachusetts et un fondateur du Somali Studies International Association (Hiiraan Online 16 janv. 2017).

Références

Adam M. Hussein. 1994. « Eritrea, Somalia, Somaliland and the Horn of Africa ». Dans Eritrea and Ethiopia: From Conflict to Cooperation.Sous la direction d’Amare Tekle. The Red Sea Press : Lawrenceville, NJ.

British Broadcasting Corporation (BBC). 10 juillet 2018. « Eritrea Profile – Timeline ». [Date de consultation : 19 sept. 2018]

Hiiraan Online. 16 janvier 2017. « Remembering Somali Scholar Dr. Hussein Tanzania ». [Date de consultation : 30 août 2018]

Last, Geoffrey Charles et John Markakis. 31 août 2018. « Eritrea ». Encyclopaedia Britannica Online. [Date de consultation : 19 sept. 2018]

Nations Unies. 29 janvier 2002. Haut Commissariat pour les réfugiés. « Background Note on Eritrean Refugees in Sudan ». [14 août 2018]

Queen’s University. S.d. « Awet T. Weldemichael ». [Date de consultation : 14 juin 2018]

Soudan. 1974. The Regulation of Asylum Act 1974 . [Date de consultation : 14 juin 2018]

Weldemichael, Awet T. 12 juin 2018. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Weldemichael, Awet T. 22 novembre 2013. « African Diplomacy of Liberation: The Case of Eritrea’s Search for an "African India" ». Cahier d’études africaines. Vol. 212. [Date de consultation : 21 sept. 2018]

Autres sources consultées

Sources orales :cinq universitaires spécialistes de l’histoire et des études sur les réfugiés de la Corne de l’Afrique.

Site Internet, y compris :Awate; États-Unis – Department of State; Nations Unies – Haut-Commissariat aux droits de l’homme; Roma Tre University –Somali Archive.

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