Document #1282987
IRB – Immigration and Refugee Board of Canada (Author)
Entrevue avec la directrice du Groupe
guatémaltèque des femmes (Grupo Guatemalteco de
Mujeres—GGM) réalisée à Guatemala le 13
mars 1997. Le GGM est une organisation non gouvernementale qui
vient en aide aux femmes victimes de violence domestique. Le GGM
est la seule organisation non gouvernementale
guatémaltèque qui possède un refuge pour
femmes victimes de mauvais traitements. Les opinions
exprimées dans ce texte sont celles de la directrice.
Types de services offerts par le Grupo Guatemalteco de Mujeres
Le GGM a été fondé en
1988 avec l'objectif de venir en aide aux femmes victimes de
violence domestique en leur offrant des recours légaux,
sociaux, psychologiques. Le GGM ouvrira très bientôt
le premier refuge pour ces femmes au Guatemala (Latinamerica
Press rapporte dans son édition du 24 avril 1997 que ce
refuge a ouvert ses portes le 4 avril 1997). Au départ, le
refuge pourra accueillir jusqu'à cinq femmes et leurs
enfants (maximum de cinq enfants par femme). Le GGM n'a pas
seulement pour objectif d'héberger ces femmes mais aussi de
leur donner les moyens de pouvoir changer leur situation en leur
expliquant les raisons et les causes de la violence domestique dont
elles sont la cible. Nous voulons leur donner les outils leur
permettant de prendre la décision de quitter un foyer
où elles sont victimes de violence pour aller vivre seule ou
avec d'autres femmes qui ont connu la même expérience.
Le GGM a mis sur pied un réseau de solidarité avec
d'autres ONG guatémaltèques pour venir en aide aux
femmes analphabètes victimes de violence domestique afin
d'une part, de leur offrir une éducation leur permettant de
bien comprendre leurs droits et, d'autre part, de les
représenter devant les institutions chargées de les
protéger. Nous recevons également une assistance de
la part de médecins et d'avocats. Il est très
difficile pour la population guatémaltèque en
général d'obtenir justice et encore plus pour les
femmes.
La violence domestique atteint les femmes
de toutes les classes sociales au Guatemala mais le GGM traite
surtout des cas de femmes de classe moyenne-inférieure.
Toutefois, le GGM a également traité des cas de
femmes mariées à des millionaires et faisant partie
de la très haute bourgeoisie du pays. Tous les services
offerts par le GGM aux femmes victimes de violence domestique sont
gratuits. Nous payons les coûts de photocopie des documents
nécessaires à l'évaluation du cas par un juge,
les frais d'avocats et de consultation d'un médecin, le cas
échéant, et nous allons jusqu'à assumer les
coûts de transport pour certaines femmes qui n'ont même
pas les moyens de prendre le transport en commun. Nous demandons en
contrepartie aux femmes des classes moyenne-supérieure et
supérieure qui sont aussi victimes de mauvais traitements
une contribution financière pour appuyer nos
activités et aider les femmes qui sont sans ressources.
Processus de présentation d'une plainte relative à la violence domestique auprès du GGM
Le GGM reçoit la plainte de la femme
et lui offre une consultation juridique afin qu'elle comprenne bien
quels sont ses droits à l'intérieur du mariage et
quels sont les documents légaux (carte d'identité,
acte de naissance, contrat de mariage) que lui demandera le
tribunal de la famille pour évaluer sa plainte. Or, peu de
femmes détiennent ces documents. Sans eux, ni les tribunaux
de justice ni le bureau du Procureur général de la
République ne peuvent se saisir du cas et effectuer un suivi
efficace de la plainte. Le GGM les sensibilise donc à
l'importance de toujours avoir ces documents avec elles peu importe
qu'elles soient victimes de violence domestique ou qu'elles l'aient
été. À prime abord, il peut sembler curieux
que les femmes ne détiennent pas ces documents juridiques de
base mais au Guatemala les femmes en général n'ont
jamais été sensibilisées à l'importance
de les avoir en leur possession. Nombre de mariages ne sont pas
enregistrés ni reconnus au Guatemala parce que le certificat
de mariage n'existe tout simplement pas. Le manque
d'éducation généralisé fait en sorte
que la plupart des couples négligent de rencontrer un avocat
afin de faire certifier légalement leur union. Plusieurs
femmes passent donc des années mariées de fait sans
l'être légalement. Lorsqu'une femme se présente
au bureau du GGM, des représentants de l'organisme se
rendent donc avec elle au registre civil pour vérifier son
acte de mariage. Lorsque celui-ci n'y apparaît pas, nous nous
adressons au Collège des avocats afin que l'on
remédie à la situation et que la femme reçoive
un document qu'elle pourra soumettre à un juge.
Le GGM procède à la
rédaction de la plainte de la personne sur un formulaire (la
Direction des recherches possède un échantillon du
formulaire-type utilisé par le GGM pour documenter une
plainte de violence conjuguale ainsi que la liste des organisations
guatémaltèques pouvant venir en aide aux femmes
victimes de mauvais traitements) où sont également
inscrites les diverses mesures à prendre pour que cette
femme ne subisse plus de mauvais traitements de la part de son
conjoint. Parmi ces mesures, notons celles qui touchent à la
protection ou à la sécurité de la victime en
interdisant au conjoint de s'approcher du domicile de la femme ou
d'y entrer sous peine d'être incarcéré s'il
refuse d'obtempérer.
Le GGM demande également que
d'autres mesures soient prises comme celles du paiement d'une
pension alimentaire. Il demande en outre que l'on mette en place
une procédure de divorce ou un acte de séparation.
Ces demandes sont soumises à un juge compétent qui
appelle les parties afin de résoudre le problème. Il
ne faut pas oublier qu'étant donné l'absence de
refuge au Guatemala, la femme victime de violence domestique
dépose sa plainte alors qu'elle vit toujours avec son
conjoint, ce qui la place parfois dans une situation
vulnérable.
Mesures pouvant être prises contre l'agresseur
Selon la loi sur la violence familiale (la
Direction des recherches possède une copie en espagnol de la
« Loi visant à prévenir, à sanctionner
et à éliminer la violence intrafamiliale » dont
l'article n° 7 prévoit une série de mesures
punitives contre l'agresseur), qui est en vigueur depuis le mois de
décembre 1996, la police peut désormais se rendre au
domicile d'un père ou d'un mari violent et procéder
à son arrestation après que la conjointe de ce
dernier eut dûment déposé une plainte.
Malheureusement, les policiers n'ont pas reçu la
sensibilisation nécessaire à la violence domestique
pour qu'ils interviennent efficacement. Dans la pratique, la police
traite encore les cas de violence conjugale comme des actes
privés qui surviennent à l'intérieur du
domicile et qui ne regardent que l'homme et sa conjointe. L'article
16 de la constitution du Guatemala interdit à la police
d'entrer dans le domicile d'un particulier. Plusieurs hommes
violents empêchent leur conjointe de sortir à
l'extérieur du domicile familial. Nous utilisons le
recurso de exhibición personal qui est une
procédure par laquelle la police peut s'introduire dans un
domicile sur ordre judiciaire pour vérifier si une femme
victime de violence domestique s'y trouve. Si la femme a subi des
lésions physiques, lesquelles demeurent visibles pendant une
période excédant une dizaine de jours, son conjoint
pourrait être condamné à un séjour en
prison. Le GGM ne peut en appeler à la MINUGUA puisque la
violence domestique n'est pas de son ressort. Toutefois, elle peut
intervenir de façon indirecte en réprimandant le
policier pour ne pas avoir rempli son devoir en ne prenant aucune
mesure dans un cas de violence domestique. Dans la plupart des cas,
une femme qui se rend directement au bureau de la MINUGUA pour
aller chercher de l'aide sera référée au GGM
ou au ministère public.
Cette réponse ne prétend pas
être un traitement exhaustif du pays étudié, ni
apporter de preuves concluantes quant au fondement d'une demande
d'asile ou de statut de réfugié.
Références
Grupo Guatemalteco de Mujeres (GGM),
Guatemala. 13 mars 1997. Entrevue avec la directrice.
Latinamerica Press [Lima]. 24
avril 1997.
Grupo Guatemalteco de Mujeres-GGM (Guatemalan Women's Group) [GTM28722.FE] (Response, English)