Document #1274518
IRB – Immigration and Refugee Board of Canada (Author)
La présente réponse approfondie à la demande d'information sur les questions concernant les Roms de la République tchèque met à jour les renseignements antérieurement fournis dans plusieurs exposés et réponses à des demandes d'information qui sont consultables dans les centres de documentation régionaux de la CISR ainsi que sur le site Internet (www.cisr.gc.ca( de la CISR. Elle traite des événements pertinents qui ont eu lieu entre la fin avril et la fin juillet 1998.
Élections législatives
Les élections pour désigner
les 200 députés du parlement de la République
tchèque se sont déroulées les 19 et 20 juin
1998 (CTK 21 juin 1998c; Guardian Weekly 28 juin 1998, 4;
Central Europe Online 1er juill. 1998). Le Parti
social-démocrate tchèque (Ceska strana socialne
demokratická - CSSD), formation de centre-gauche, a
remporté les élections en recueillant 32,31 p. 100
des voix (CTK 21 juin 1998a; ibid. 22 juin 1998a;
Central Europe Online 1er juill. 1998; Guardian
Weekly 28 juin 1998, 4; AFP 22 juin 1998), suivi du Parti
démocratique civique (Obcanská demokratická
strana - ODS), formation de centre-droite, qui a obtenu 27,74 p.
100 des suffrages (ibid.; CTK 21 juin 1998a; Central
Europe Online 1er juill. 1998; Guardian Weekly 28
juin 998, 4). Trois autres partis, soit le Parti communiste de la
Bohême et de la Moravie (Komunistická strana Cech a
Moravy - KSCM), l'Union chrétienne démocratique-Parti
populaire tchécoslovaque (Krest'anská a
democratická unie-Ceskoslovenská strana lidová
- KDU-CSL) et l'Union de la liberté (Unie svobody), ont
également réussi à obtenir au moins 5 p. 100
des voix, seuil électoral à franchir pour s'assurer
le mandat parlementaire représentatif (CTK 21 juin 1998c;
ibid., 22 juin 1998a; AFP 22 juin 1998). Selon des
observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la
coopération en Europe (OSCE), le mécanisme
électoral s'est déroulé de façon
[traduction] « irréprochable » (CTK 21 juin
1998b). Le 22 juillet 1998, dans le cadre d'une entente avec l'ODS,
le CSSD, parti d'opposition, a pris le pouvoir à titre de
gouvernement minoritaire (VOA 22 juill. 1998; Central Europe
Online 20 juill. 1998). Aux termes de l'entente, l'ODS
s'engage à ne pas [traduction] « introduire ni appuyer
de motion de censure contre le gouvernement durant son mandat de
quatre ans. Il sera alors impossible aux autres partis d'avoir
l'appui nécessaire pour faire adopter une motion de censure
» (Central Europe Online 20 juill. 1998; VOA 17
juill. 1998).
Monika Horáková,
présidente rom de la Commission interministérielle
tchèque des affaires roms, s'est fait élire au
parlement sous la bannière de l'Union de la liberté
(CTK 18 mai 1998a; ibid. 21 juin 1998d). L'Union de la
liberté, dirigée par l'ancien ministre de
l'Intérieur Jan Ruml, a recueilli 8,6 p. 100 des suffrages
aux élections, ce qui lui a valu 19 sièges au
parlement (AFP 22 juin 1998; CTK 21 juin 1998a). Selon Ivan Vesely,
vice-président de l'Initiative civique rom, l'Union de la
liberté est le parti [traduction] « le plus favorable
» aux Roms (CTK 21 juin 1998d). Cette formation politique
prône la discrimination à rebours à l'endroit
des Roms, ainsi que des primes pour les firmes qui emploient des
Roms (The Economist 30 mai 1998; voir également
Central Europe Online 7 mai 1998; The Gazette 5
juill. 1998). Un autre Rom, Ladislav Body, était candidat du
KDU-CSL aux législatives, mais il n'a pas réussi
à obtenir de siège (CTK 15 juin 1998; ERRC 9 juill.
1998).
Au début juin 1998, le président Václav Havel a proposé la création d'un bureau gouvernemental chargé des questions relatives aux droits de la personne en République tchèque. Il a annoncé son intention d'en discuter avec le nouveau gouvernement après les élections de juin 1998 (Central Europe Online 2 juin 1998; Radio Prague 2 juin 1998). Le bureau des droits de la personne pourrait être placé sous la direction du premier ministre ou d'un vice-premier ministre (ibid.; Central Europe Online 2 juin 1998). Au moment de rédiger la présente réponse, la Direction des recherches n'avait aucun renseignement sur l'évolution de ce projet du président Havel.
Parti républicain et Miroslav Sládek
Le Rassemblement pour la
République-Parti républicain tchèque
(Sdruzení pro republiku-Republikanská strana
Ceskoslovenska - SPR-RSC), formation d'extrême-droite, a
été exclu du parlement puisque les 3,9 p. 100 des
suffrages populaires qu'il a recueillis à l'échelle
du pays étaient en deçà des 5 p. 100
nécessaires pour s'assurer le mandat parlementaire
représentatif1 (CTK 22 juin 1998b; The Prague
Post 1er juill. 1998; CTK 21 juin 1998f; The
Economist 27 juin 1998, 4). Aux législatives de 1996,
le SPR-RSC a obtenu 18 sièges après avoir recueilli
plus de 8 p. 100 des suffrages (CTK 21 juin 1998f; ibid.
22 juin 1998b). Les chefs de la communauté rom se sont
félicités de l'exclusion du SPR-RSC du parlement (CTK
21 juin 1998d; The Prague Post 1er juill. 1998). Des
analystes de la situation politique ont imputé
l'échec électoral du SPR-RSC au fait que [traduction]
« la xénophobie et le racisme, qui ont marqué
les derniers jours de la campagne des Républicains, ont tout
simplement rebuté les électeurs, plus
particulièrement les anciens partisans, [les analystes]
ajoutant que le parti a prôné l'intolérance, la
haine et la violence au lieu de proposer des solutions » (CTK
21 juin 1998e; ibid. 21 juin 1998f; voir également
The Prague Post 1er juill. 1998).
La campagne électorale du SPR-RSC et
de son chef Miroslav Sládek a soulevé une vive
controverse dans la période précédant les
élections de juin 1998. La campagne était axée
sur l'opposition du SPR-RSC à l'OTAN et aux programmes
gouvernementaux qui favoriseraient les Roms (Central Europe
Online 7 mai 1998; Radio Prague 8 mai 1998). Dans la
publicité électorale du SPR-RSC à la
télévision et à la radio, les Roms
étaient qualifiés de [traduction] « groupe
ethnique parasite » et on y prétendait que
[traduction] « les Tsiganes tuent, violent et volent
impunément les citoyens respectables » (Radio Prague
10 juin 1998). Jaroslava Balázová, journaliste rom
à la radio, a annoncé son intention de poursuivre le
SPR-RSC en justice pour cette publicité qui, selon elle,
[traduction] « frise le racisme » (ibid.). Le
quotidien tchèque Lidove Noviny a lui aussi
intenté une action contre le SPR-RSC pour des motifs
semblables (ibid.). Au moment de rédiger la
présente réponse, la Direction des recherches n'avait
pris connaissance d'aucun autre renseignement sur l'état
d'avancement des poursuites.
Le 9 mai 1998, le chef du SPR-RSC Miroslav
Sládek a été agressé par deux hommes
roms lors d'un rassemblement électoral dans la ville de
Nový Bor, située en Bohême septentrionale (CTK
12 mai 1998b). Jan Tancoš et son frère Josef auraient
giflé Sládek, qui a subi de légères
contusions par suite de cet incident (ibid.; The
Edmonton Journal 26 mai 1998). Les deux frères ont
accusé Sládek d'avoir insulté le
président de la République Václav Havel et son
épouse, et d'avoir tenu des propos racistes dans son
discours (CTK 12 mai 1998a; ibid. 12 mai 1998b). Les
hommes ont été immédiatement
arrêtés et inculpés de voies de fait et
d'atteinte à la paix publique. La police a entrepris des
démarches pour garder les hommes en détention
préventive jusqu'à leur comparution en justice, et
ce, [traduction] « pour "les empêcher d'influencer les
témoins" » (The Prague Post 20 mai 1998c; CTK
11 mai 1998a; voir également The Edmonton Journal
26 mai 1998).
Toutefois, le président Havel a gracié les inculpés presque immédiatement (CTK 11 mai 1998a; The Edmonton Journal 26 mai 1998). Tout en déclarant qu'il ne pouvait tolérer les actes de violence, le président Havel a remercié les hommes d'avoir tâché de défendre son honneur ainsi que celui de sa femme (CTK 11 mai 1998b). Le bureau du président a justifié ce geste controversé en affirmant que le président avait [traduction] « "suffisamment d'information" sur l'incident pour prendre une décision en connaissance de cause » (The Prague Post 20 mai 1998b). Selon un article du Prague Post, la porte-parole du président a déclaré que [traduction] « la police locale, qui devait mener l'enquête sur les accusations de voies de fait, "n'aurait pas pu le faire de façon objective" » (ibid.; Smith 22 mai 1998). [Traduction] « "Entre 1990 et 1997, [l'ONG] HOST a signalé au moins 28 agressions racistes en Bohême du Nord, et seulement huit condamnations. Les frères Tancoš ont été arrêtés puis inculpés le même jour, [...] [ce qui montre que] la police [en Bohême septentrionale] ne traite pas de la même façon les crimes commis par les Roms et ceux commis par les Blancs" » (The Prague Post 20 mai 1998b). Pour en savoir davantage sur cet incident, voir l'article du Prague Post et la déclaration de Christopher Smith qui sont annexés à la présente réponse.
Décisions concernant le mur d'Ústí nad Labem et le ghetto de Plzen
En mai 1998, les conseillers municipaux
d'Ústí nad Labem, ville située en Bohême
septentrionale, ont décidé d'ériger un mur
haut de 4,5 mètres autour de certains immeubles
résidentiels principalement occupés par des Roms
(Guardian Weekly 31 mai 1998; The Prague Post 20
mai 1998a; The Globe and Mail 16 mai 1998). Selon The
Economist, le mur devait être sous surveillance
policière jour et nuit (30 mai 1998; The Gazette 5
juill. 1998). Les autorités municipales soutiennent que le
projet d'ériger un mur répond aux [traduction]
« plaintes constantes des habitants du quartier concernant
les conditions "insalubres" à l'intérieur et à
l'extérieur des deux immeubles résidentiels »
(Guardian Weekly 31 mai 1998; voir également
The Gazette 5 juill. 1998; The Economist 30 mai
1998). Les résidents du quartier affirment que les Roms qui
habitent les immeubles troublent la paix, [traduction] «
jettent des déchets dans la rue et se rassemblent sur les
trottoirs pour parler, chanter et parfois boire jusque tard dans la
nuit » (CTK 30 mai 1998; The Economist 30 mai 1998).
Les chefs de la communauté rom s'opposent fermement à
la construction du mur, et ont demandé à la police de
poursuivre en justice les responsables de cette décision
(CTK 2 juin 1998). L'ancien ministre de l'Intérieur Jan Ruml
a taxé le projet de scandaleux (Guardian Weekly 31
mai 1998). Marta Tulejová de l'Initiative civique rom avoue
que les familles roms d'Ústí nad Labem sont pauvres
et [traduction] « ont indiscutablement des problèmes.
Mais elles n'ont pas besoin de murs; elles ont besoin de
travailleurs sociaux » (The Gazette 5 juill. 1998).
Selon Tulejová, si on érige un mur, [traduction]
« d'autres villes suivront l'exemple d'Ústí.
Bientôt, nous aurons des ghettos partout, comme ceux que les
nazis ont construits pour les Juifs » (ibid.).
Le maire d'Ústí nad Labem,
Ladislav Hruška, soutient que le racisme n'a pas joué
dans la décision d'ériger le mur. Selon lui,
[traduction] « le mur n'a pas pour but de séparer les
gens de races différentes, mais plutôt "des locataires
respectables de ceux qui ne le sont pas" » (Radio Prague 4
juin 1998). Hruška aurait indiqué que le mur ne
serait pas érigé si les locataires roms montrent, au
cours des trois prochains mois, qu'ils peuvent [traduction] «
respecter les normes de base en matière d'hygiène
» (ibid.). Selon un article paru dans le quotidien
montréalais The Gazette, la construction du mur
d'Ústí nad Labem a été reportée
jusqu'au mois d'août, et un fonctionnaire municipal aurait
déclaré que [traduction] « si tout reste
tranquille, il se peut que la ville ne le construise pas du tout
» (5 juill. 1998). Le 9 juillet 1998, le représentant
du Centre européen des droits des roms (European Roma Rights
Centre - ERRC) en République tchèque a toutefois
précisé que les autorités municipales
n'avaient toujours pas officiellement annoncé qu'elles
n'érigeraient pas le mur (ERRC 9 juill. 1998).
Également en mai 1998, le conseil municipal de Plzen (Pilsen), ville située en Bohême occidentale, a annoncé un projet de [traduction] « construction d'un ghetto à l'extérieur de la ville pour [...] "les citoyens inadaptés sur le plan social" » (Radio Prague 18 mai 1998a; The Economist 30 mai 1998). Le maire de Plzen nie que le racisme ait joué dans la décision du conseil : [traduction] « le ghetto serait pour les "fauteurs de trouble" de toute race qui refusent de payer leur loyer régulièrement ou qui dérangent leurs voisins en refusant de respecter les règlements en matière de bruit et d'hygiène. [...] il incomberait à un tribunal de décider si une telle personne devrait être reléguée au ghetto » (Radio Prague 18 mai 1998a). Selon Radio Prague, des gens politiques tchèques redoutent que la colonie proposée ne devienne inévitablement un ghetto rom (ibid.). Par ailleurs, le maire de Plzen affirme dans une télécopie envoyée à un représentant de l'ERRC en République tchèque qu'aucune décision sur la création d'un ghetto n'a été prise (ERRC 9 juill. 1998). De même, le Prague Post signale que les autorités de Plzen essaient de [traduction] « se distancier » du présumé ghetto projeté, et elles ont nié envisager un tel projet (24 juin 1998).
Expulsion d'un citoyen
Le 28 mai 1998, un article publié
dans le quotidien tchèque Mlada Fronta Dnes a
signalé qu'un jeune Rom de nationalité
tchèque, Milan Sivak, serait déporté en
Slovaquie en raison de crimes commis en République
tchèque avant qu'il obtienne la nationalité
tchèque. Sivak a acquis la nationalité tchèque
en février 1998. Il est né en République
tchèque de parents slovaques, et était de
nationalité slovaque à la naissance. Selon un juge du
tribunal du district de Teplice, Sivak était citoyen
slovaque au moment de commettre le crime, et [traduction] «
il est dans le meilleur intérêt des habitants de la
République tchèque qu'un tel homme soit
expulsé. Le tribunal n'est pas tenu de respecter la
décision des fonctionnaires [du ministère de
l'Intérieur, qui lui ont octroyé la
citoyenneté] (ibid.; Ústecký
Deník 28 mai 1998). Dans une déclaration
concernant cette affaire envoyée à la Direction des
recherches, Mark Thieroff de la Fondation de la tolérance
souligne que la loi tchèque sur la nationalité
[traduction]
accorde au ministère de l'Intérieur la compétence exclusive en matière de décisions concernant les demandes de citoyenneté, et le ministère avait octroyé la nationalité à l'inculpé au mois de février, pendant que ce dernier attendait son procès. Pour justifier sa décision extraordinaire (et illégale), le juge, en évoquant la loi sur la nationalité, a déclaré qu'il incombe aux tribunaux et non aux bureaucrates d'interpréter les lois (Thieroff 9 juin 1998).
À la mi-juin 1998, l'appel interjeté par Milan Sivak était toujours en instance (ibid. 15 juin 1998).
Aide aux rapatriés roms
Dans une lettre datée du 25 juin
1998 et adressée à la Direction des recherches, un
employé du bureau du HCR à Prague a fourni des
renseignements sur l'aide accordée aux rapatriés roms
qui avaient cherché asile à l'étranger. Les
renseignements qui suivent ont été communiqués
au HCR par Mme Bernatová de la Commission gouvernementale
interministérielle des affaires roms de la République
tchèque. Selon Mme Bernatová,
[traduction]
la majorité des familles qui [sont] revenues ne demandent pas d'aide pour se loger, soit parce qu'elles ont leur propre appartement, soit qu'elles s'installent chez des parents. Toutefois, il y a eu jusqu'ici une vingtaine de familles qui ont demandé de l'aide à la Commission gouvernementale interministérielle des affaires roms. La Commission a jusqu'ici réglé trois de ces vingt cas. Puisqu'il n'existe aucun programme d'aide gouvernemental ni de mesures gouvernementales générales, la Commission interministérielle doit examiner chaque cas séparément et chercher de l'aide au niveau municipal. Toutefois, les bureaux municipaux n'ont pas de lignes directrices en cette matière (le ministère du Travail et des Affaires sociales est actuellement en train d'en rédiger), et ils n'ont pas non plus les ressources nécessaires pour fournir des logements à ceux qui sont revenus au pays.
Vladimír Mlynár, ministre
sans portefeuille et chef de la Commission
interministérielle, mène depuis quelque temps des
négociations avec le ministère du Travail et des
Affaires sociales en vue de mettre sur pied un programme de
logement. Ces négociations n'ont cependant porté
aucun fruit jusqu'ici [...] L'échec des négociations
tient surtout au fait que la plupart des appartements vendus par
les Roms avant de quitter le pays ne leur appartenaient pas : ils
appartenaient plutôt à l'État, et les Roms n'en
étaient que les locataires. Les Roms n'avaient donc pas le
droit de les vendre, et s'ils les ont vendus, ils l'ont fait de
façon illégale.
Pour ce qui de l'emploi, la situation de
ceux qui rentrent au pays est beaucoup mieux. Le ministère
du Travail et des Affaires sociales a établi une commission
[...] responsable de trouver un emploi aux [rapatriés] [...]
On procure un emploi à tous les postulants dans un
délai de trois mois. Cela devrait favoriser leur
réinsertion sociale (HCR 25 juin 1998).
Le 30 juillet 1998, le conseiller juridique du bureau du HCR à Prague a envoyé à la Direction des recherches la version anglaise d'un document de la Commission interministérielle des affaires roms, intitulée Report on the Fulfillment of the Tasks Ensuing from the Government Resolution No. 686/1997 'On the Situation of the Romany Community in the Czech Republic2. Dans ce rapport, publié en juin 1998, on examine les mesures prises par divers ministères pour résoudre le problème de la réinsertion sociale et d'autres problèmes courants auxquels se heurtent de nombreux rapatriés à leur retour en République tchèque (République tchèque juin 1998). Pour en savoir davantage, consulter l'extrait de trois pages ci-annexé. La version intégrale du rapport est consultable aux centres de documentation régionaux de la CISR.
Violences extrémistes
Milan Lacko, Rom âgé de 40
ans, est mort le 17 mai 1998 à la suite d'une bagarre avec
un groupe de skinheads à Orlova, en Moravie septentrionale
(CTK 18 mai 1998a; Radio Prague 18 mai 1998b; The
Economist 30 mai 1998). Lacko se promenait avec sa fille
lorsque des skinheads l'ont passé à tabac et l'ont
laissé sur la route, où par la suite un camion l'a
mortellement heurté (CTK 18 mai 1998a; ibid. 22 mai
1998b; The Economist 30 mai 1998). Quatre skinheads ont
été arrêtés et inculpés de voies
de fait causant des lésions corporelles graves (Radio Prague
18 mai 1998b; CTK 18 mai 1998b). Monika Horáková,
présidente de la Commission interministérielle des
affaires roms, aurait réussi à dissuader les
communautés roms d'Orlova de mettre sur pied des groupes
d'autodéfense ou de justiciers armés à la
suite de la mort de Lacko (CTK 18 mai 1998a; voir également
Radio Prague 21 mai 1998). Les chefs roms d'Orlova ont instamment
demandé au ministre sans portefeuille Vladimír
Mlynár d'assurer [traduction] « la protection qui
s'impose aux familles roms qui habitent les zones dites dangereuses
et [de mener] une campagne en règle contre le racisme et la
xénophobie » (Radio Prague 21 mai 1998). Au moment de
rédiger la présente réponse, la Direction des
recherches n'avait aucune information sur la réponse de
Mlynár à la revendication des Roms.
Voici quelques autres incidents qui ont
été signalés. Le 13 juin 1998, deux skinheads
ivres ont physiquement et psychologiquement torturé un jeune
[traduction] « à peau brune » pendant plusieurs
heures à Sumperk, en Moravie septentrionale (CTK 23 juin
1998). Le 14 juin 1998, un skinhead a agressé un jeune Rom
de 24 ans dans une gare de Prague (CTK 15 juin 1998). Le Rom a subi
des contusions au rein gauche et a été
hospitalisé (ibid.). Quant au skinhead, il a
été arrêté et inculpé de
hooliganisme et de voies de fait causant des lésions
corporelles graves (ibid.). Le 8 mai 1998, deux Indiens
ont été agressés par cinq skinheads dans le
métro de Prague (CTK 9 mai 1998a). Une des victimes a eu le
nez cassé, et l'autre a subi une commotion
cérébrale (ibid.). Les cinq skinheads ont
été arrêtés et inculpés de voies
de fait causant des lésions corporelles, d'usage de la
violence à l'endroit de personnes et d'atteinte à la
paix (ibid.). Le 7 mai 1998, dans une station de
métro de Prague, un Algérien a été
poignardé aux reins par un skinhead inconnu qui criait
[traduction] « espèce de salaud noir, on va te tuer
» (CTK 9 mai 1998b).
Deux hommes3 inculpés du
meurtre d'une Rom en février 1998 (voir la réponse
à la demande d'information CZE29313.E du 27 avril 1998) ne
seront pas inculpés de délit à
caractère raciste (Radio Prague 26 juin 1998; CTK 26 juin
1998). Selon le procureur du ministère public, il n'y a rien
qui prouve le caractère raciste de l'incident, étant
donné que la femme avait volé 200
couronnes4 à l'un des hommes (ibid.;
Radio Prague 26 juin 1998). Selon le quotidien The
Gazette, toutefois, les hommes ont tenu des propos racistes
pendant qu'ils jetaient la femme dans la rivière (5 juill.
1998). Les hommes ont été inculpés d'extorsion
causant la mort et d'atteinte à la paix (CTK 26 juin
1998).
En janvier 1998, à Krnov (Moravie
septentrionale), un logement rom a été la cible d'une
bombe incendiaire qui a grièvement blessé une Rom.
Vers la fin mai 1998, on n'avait toujours pas accumulé de
preuves suffisantes dans le cadre de l'enquête sur cet
incident pour pouvoir traduire les accusés devant le
tribunal (CTK 1er juin 1998). Selon une dépêche de
l'agence CTK, [traduction] « bien que la police ait
interrogé plus de 40 témoins, elle n'a toujours pas
suffisamment de preuves pour poursuivre les trois jeunes skinheads
accusés de l'attentat et détenus depuis janvier
» (ibid.).
Selon un rapport présenté au gouvernement
tchèque par le ministère de l'Intérieur Cyril
Svoboda, il y a eu 93 crimes racistes en République
tchèque entre le 1er janvier 1998 et le 15 mai 1998 (CTK 17
juin 1998; République tchèque juin 1998)5.
Le rapport signale que le plus grand nombre de crimes racistes ont
été perpétrés dans le district
d'Olomouc (Moravie septentrionale), ainsi qu'à
Ústí nad Labem, à Brno, à Hradec
Kralove et dans les régions de Prague et d'Ostrava
(ibid.; CTK 17 juin 1998). Toujours selon ce même
rapport, [traduction] « à plusieurs reprises, le
gouvernement a pris des mesures pour contrer la violence raciste.
Toutefois des démarches ne se sont pas avérées
assez efficaces » (République tchèque juin
1998). La principale mesure visant à régler de
manière convenable cette situation est la résolution
192 du gouvernement de la République tchèque du 19
mars 1998, annexée au rapport sur la procédure que
doivent suivre les organismes administratifs de l'État pour
poursuivre en justice les auteurs d'actes criminels à
caractère raciste ou xénophobe, ou encore les membres
de groupes extrémistes qui commettent de tels
crimes6
.
En mai 1998, le chef de la police de la Bohême septentrionale a signalé que 16 délits racistes avaient été commis dans cette région depuis le début de 1998, ce qui représente une augmentation considérable par rapport aux six délits racistes qui ont été signalés à pareille époque l'an dernier (CTK 22 mai 1998a). Selon le chef de police, 17 des victimes étaient des Tchèques [traduction] « "blancs" », cinq étaient des Roms, et trois étaient originaires du Sri Lanka (ibid.). Le chef de police soutient que l'augmentation du nombre d'incidents tient principalement à [traduction] « "l'atmosphère créée par la situation sociale des Roms" » (ibid.).
Commentaires de la Commission on Security and Cooperation in Europe (CSCE) des États-Unis
Le 22 mai 1998, Christopher Smith, député au Congrès des États-Unis et coprésident de la Commission on Security and Cooperation in Europe (CSCE) des États-Unis, a rendu publique une analyse (exemplaire ci-annexé) qui fait le procès de l'intolérance et de la violence raciales qui sévissent en République tchèque. En outre, la CSCE, dans une présentation faite devant le Congrès américain le 21 juillet 1998, a sévèrement critiqué le gouvernement de la République tchèque relativement à la situation des Roms dans la société tchèque (CTK 22 juill. 1998; Radio Prague 22 juill. 1998). Selon l'agence CTK, le ministre Mlynár a réagi en déclarant que [traduction] « la critique faite par le Congrès n'est pas nouvelle et est fondée sur des arguments sérieux, et pour nous, il s'agit d'une forme de sommation pour que nous réglions ce problème » (22 juill. 1998). Mlynár a ajouté qu'il était [traduction] « content que les députés du Congrès ont constaté une légère amélioration de la situation » (ibid.).
Commentaires de l'ERRC présentés au Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale
En mars 1998, l'ERRC a
présenté au Comité des Nations Unies pour
l'élimination de la discrimination raciale une liste de
préoccupations concernant les obligations de la
République tchèque en matière de
discrimination raciale. Un résumé des
préoccupations de l'ERRC se trouve dans le numéro du
printemps 1998 de la publication Roma Rights, consultable
à la Bibliothèque de la Direction des recherches de
la CISR à Ottawa ainsi qu'au site Web de l'ERRC à
l'adresse www.errc.com. L'ERRC qualifie
d'insuffisantes les mesures prises par le gouvernement
tchèque pour satisfaire aux obligations que lui impose la
Convention internationale sur l'élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (Roma Rights printemps
1998). En particulier l'ERRC s'inquiète des points suivants
qui seraient, selon elle, des violations de la Convention :
[traduction]
[...] vingt-neuf ans après l'entrée en vigueur de la Convention sur le territoire de la République tchèque, la discrimination envers les Roms demeure généralisée, et le gouvernement n'a toujours pas adopté de loi ou de règlement administratif pour interdire expressément la discrimination raciale. Par conséquent, malgré les dispositions constitutionnelles et les sections du Code criminel qui visent principalement les propos et la propagande racistes, les victimes de la discrimination raciale n'ont aucun recours civil ou criminel relativement aux actes de discrimination comme tels [...]
[...] des pouvoirs publics importants continuent de répandre des propos racistes et préconisent notamment qu'il faut loger les Roms dans des zones séparées, et de préférence à l'extérieur de la République tchèque.
[...] le gouvernement n'a pas réussi à faire en sorte que les Roms et les autres minorités raciales jouissent de la protection égale de la loi. La discrimination envers les Roms est répandue au sein du système judiciaire, et ceux-ci sont victimes d'une montée de violence non contrôlée aux mains des autorités chargées de l'application des lois, des skinheads et d'autres groupes. Les restaurants, les brasseries et d'autres établissements semblables ferment couramment leurs portes aux Roms, mais le gouvernement n'a toujours pas adopté de loi pour entériner le droit d'entrée dans les établissements publics sans menace de discrimination. La discrimination est particulièrement marquée dans le système d'éducation, où un nombre de Roms hors de toute proportion [...] sont aiguillés vers des écoles spéciales sans débouchés, conçues pour les élèves étiquetés comme des enfants « intellectuellement déficients ». Dans le domaine de l'emploi, la discrimination envers les Roms est généralisée, et les dispositions de protection juridique actuelles sont inefficaces (ibid.).
L'ERRC a exhorté le gouvernement
tchèque :
à adopter et à appliquer des lois pour interdire expressément tout acte de discrimination raciale et pour prévoir des recours civils, criminels et administratifs, à abolir la ségrégation raciale dans l'éducation, à prendre des mesures efficaces pour réprimer et sanctionner les manifestations de discrimination raciale dans le système judiciaire, et à intensifier les efforts pour promouvoir la tolérance raciale, par le biais notamment de campagnes de sensibilisation et médiatiques visant à familiariser le grand public avec la Convention et ses normes (ibid.)
Rapport du Comité Helsinki tchèque
En juin 1998, le Comité Helsinki
tchèque (Ceský helsinký výbor - CHV) a
publié la version anglaise de son rapport de 1997 sur la
situation des droits de la personne en République
tchèque, intitulée Report on the State of Human
Rights in the Czech Republic 1997. Ce document, dont la
version anglaise s'étend sur 146 pages, constitue une
étude approfondie de la situation des droits de la personne
en République tchèque en 1997. Dans les pages 7
à 40 de la version anglaise, on examine le racisme, la
xénophobie et la situation des Roms en République
tchèque. À l'origine, cette section a
été rédigée par le Comité
Helsinki tchèque à l'intention du Comité des
Nations Unies pour l'élimination de la discrimination
raciale. Le rapport du Comité Helsinki tchèque
critique sévèrement [traduction] «
l'état actuel des choses en République tchèque
dans le domaine des minorités nationales [...] En adoptant
certains règlements juridiques et en omettant de mettre en
place les règlements appropriés dans la pratique, la
République tchèque contrevient à des
conventions internationales dont il est signataire » (1998,
8). Les auteurs du rapport du Comité Helsinki tchèque
signalent en particulier que le pays déroge à la
Convention internationale sur l'élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (ibid., 13).
Toujours selon le rapport du Comité
Helsinki tchèque,
[traduction]
le problème fondamental de la République tchèque demeure celui de la sauvegarde des droits des minorités ethniques, surtout dans les contextes difficiles qui sont typiques de la situation des Roms en République tchèque [...] Les outrages raciaux, la xénophobie latente ou apparente de la majorité des citoyens tchèques, l'exode des Roms, les problèmes - toujours non résolus - concernant la nationalité tchèque de nombreuses personnes d'origine rom qui habitent le territoire tchèque depuis leur naissance, la ségrégation à l'école élémentaire, la situation sociale pénible de nombreuses familles roms, le taux de chômage catastrophique chez les Roms et le taux de criminalité rom qui en résulte sont autant de faits qui sont toujours monnaie courante (1998, 7).
La version anglaise de ce rapport, Report on the State of Human Rights in the Czech Republic 1997, publiée par le Comité Helsinki tchèque en 1998, est consultable aux centres de documentation régionaux de la CISR ainsi qu'au site Web du Comité Helsinki tchèque à l'adresse www.helcom.cz.
Rapport du ministère tchèque des Affaires étrangères sur l'élimination de la discrimination raciale
En juin 1998, le Bureau des droits de la
personne du ministère tchèque des Affaires
étrangères a rédigé un rapport sur
l'élimination de la discrimination raciale envers les Roms
en République tchèque. La traduction anglaise de ce
rapport, intitulée Situation in the Field of Elimination
of Racial Discrimination in the Czech Republic with Respect to the
Roma Community, est consultable aux centres de documentation
régionaux de la CISR.
Dans ce document, dont la version anglaise
comprend 34 pages, on résume et examine les obligations du
gouvernement tchèque relativement aux questions roms. On y
donne également un aperçu des divers programmes et
résolutions élaborés par le gouvernement en
vue de s'attaquer aux problèmes de la discrimination, du
racisme, de l'intolérance, de la citoyenneté, de la
ségrégation et de la criminalité raciste en
République tchèque.
Le rapport comprend en annexe une copie de
plusieurs résolutions et lois dont il est question dans le
texte. La dernière annexe est une copie de la loi
établissant la Commission interministérielle des
affaires roms, qui a commencé son travail en janvier
1998.
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile ou de statut de réfugié.
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NOTES :
1 Les Républicains ont su conserver l'appui de leurs partisans en Bohême septentrionale, où ils ont obtenu 6,11 p. 100 des suffrages (CTK 22 juin 1998b).Update on issues affecting Roma [CZE29764.EX] (Response, English)