Libya: Treatment of members of the Zintani tribe in Tobruk City; presence of Gaddafi supporters in Tobruk; presence and operational strength of the organization of Islamic State (IS) in Tobruk; ability of Libyans fleeing conflict in other parts of the country to relocate to Tobruk and reside there safely; whether Tobruk airport is operational (2014-August 2016) [LBY105631.E]

Libye : information sur le traitement réservé aux membres de la tribu des Zintanis dans la ville de Tobrouk; la présence de partisans de Kadhafi à Tobrouk; la présence et la force opérationnelle du groupe État islamique à Tobrouk; la capacité des Libyens fuyant le conflit dans d’autres régions du pays de s’installer à Tobrouk et d’y vivre en sécurité; information indiquant si l’aéroport de Tobrouk est opérationnel (2014-août 2016)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Traitement réservé aux membres de la tribu des Zintanis dans la ville de Tobrouk

La tribu des Zintanis est majoritairement installée dans la ville de Zintan, située dans l’Ouest du pays (CNN 4 mars 2011; ISW nov. 2011, 14) et comptant environ 25 000 habitants (ibid.). Un article publié par CNN signale que la tribu a de [traduction] « [l’]influence » et qu’elle était « alliée à la tribu de Kadhafi » avant de se joindre à l’opposition (4 mars 2011). En 2011, dans un article publié par Spiegel Online, la ville de Zintan a été qualifiée [traduction] « de cœur de la rébellion » contre Kadhafi dans l’Ouest (Spiegel Online 26 juill. 2011).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur la présence de membres de la tribu des Zintanis à Tobrouk ou sur le traitement qui leur y est réservé.

2. Présence de partisans de Kadhafi à Tobrouk

Des sources signalent que deux gouvernements distincts affirment leur légitimité en Libye; l’un d’entre eux est établi à Tripoli, il s’agit du Congrès national général (General National Congress- GNC), et l’autre, à savoir la Chambre des représentants, est reconnu à l’échelle internationale et établi à Tobrouk (Nations Unies oct. 2015, 3-4; Freedom House 2016). En 2014, le GNC et la Chambre des représentants se sont divisés en deux [traduction] « camps politiques et militaires rivaux » (ibid.). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une analyste principale pour la Libye au sein de l’International Crisis Group, qui se rend en Libye afin de rencontrer des gens de diverses coalitions politiques et militaires, y compris dans l’Est du pays et à Tobrouk en particulier, et qui a fourni des renseignements à titre personnel dans ce rôle, a affirmé que

[traduction]

Tobrouk est actuellement sous le contrôle d’une faction militaire dirigée par [le général] Khalifa Haftar, et elle entretient des liens avec des partisans de l’ancien régime de Kadhafi. Plusieurs membres haut placés de l’ancien régime sont retournés à Tobrouk au cours des derniers mois, et ils dominent les scènes militaire et politique à Tobrouk (analyste principale 16 sept. 2016).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant de CESVI, une organisation de développement et d’aide humanitaire active depuis 2011 en Libye, y compris dans l’Est du pays [1], a expliqué que, sous le régime de Kadhafi, certains aspects de la participation de l’État découlaient des relations tribales et que la plupart étaient issues des principales tribus de la Libye, à savoir celles de Kadhafi, de Werfalla, de Wershefana (de l’Ouest) et celles de Barasi, d’Obeidat, de Magharba, d’Awagir et de Dresaa (de l’Est) (CESVI 14 sept. 2016). En outre, la source a expliqué, sans donner davantage de détails, que, après 2014, le gouvernement de Tobrouk a pris des initiatives liées à la possibilité de retour d’anciennes figures du régime de Kadhafi (ibid.). Tobrouk est devenu la première ville à accueillir des personnes déplacées à l’intérieur du pays, et la communauté locale s’est réjouie du retour de certaines de ces communautés tribales de toutes les régions de la Libye, dont certains membres travaillent au parlement et au gouvernement, et il a été souligné que [traduction] « chaque classe vit selon sa situation économique et [que ces classes] ont en commun qu’elles soutiennent l’ancien régime » (ibid.). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun autre renseignement sur la présence de partisans de Kadhafi à Tobrouk.

3. Présence et puissance de Daech à Tobrouk

Le représentant de CESVI a affirmé que, selon les renseignements dont dispose l’organisation, [traduction] « [l]e groupe État islamique ne mène aucune activité publique à Tobrouk » (14 sept. 2016). Compte tenu des renseignements portés à sa connaissance, l’analyste principale a soutenu qu’elle ne croyait pas à l’existence d’une [traduction] « présence importante du groupe État islamique à Tobrouk et dans les environs », mais elle a précisé que le groupe État islamique était très présent aux alentours de Derna, situé à environ 150 kilomètres de Tobrouk, jusqu’à il y a quelques mois (16 sept. 2016). Selon un article publié dans la Libyan Gazette, les autorités locales de Derna ont soutenu que Daech a été chassé de la ville en avril 2016 (22 juin 2016).

4. Capacité des Libyens fuyant le conflit, y compris des membres de la tribu des Zintanis, de s’installer à Tobrouk, et cas où cela s’est produit

Selon un rapport de suivi concernant les déplacements intérieurs en Libye, publié en janvier 2016 par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), il y a plus de 400 000 personnes déplacées à l’intérieur de la Libye (OIM janv. 2016, 2); cependant, dans la version du même rapport publiée en août 2016, il est écrit que le nombre de personnes déplacées a diminué pour s’établir à 348 372 personnes (ibid. août 2016, 4). La même source fait observer que, en janvier 2016, les cinq endroits d’où provenaient le plus grand nombre de personnes déplacées étaient : Benghazi (35,5 p. 100), Tawergha (12,7 p. 100), Derna (10,5 p. 100), Sirte (9,6 p. 100) et Awbari (7,4 p. 100) (ibid. janv. 2016, 4). En août 2016, les trois principaux lieux d’origine des personnes déplacées à l’intérieur du pays étaient Tawergha, Sirte et Benghazi (ibid. août 2016, 6).

En janvier 2016, parmi les lieux de résidence ayant accueilli le plus grand nombre de personnes déplacées à l’intérieur de la Libye figurait Tobrouk, qui accueille 6,4 p. 100 des déplacés intérieurs identifiés par l’OIM, c’est-à-dire environ 17 205 personnes (ibid. janv. 2016, 4). D’après le même rapport, les personnes déplacées vers Tobrouk venaient principalement de Derna (ibid., 5). En août 2016, Benghazi, Bani Waled, Ajdabiya, Abu Salim, Al Bayda, Alzintan et Tarhounah étaient les principaux lieux de résidence des personnes déplacées à l’intérieur du pays et le nombre de personnes déplacées avait diminué pour s’établir à 11 530 personnes accueillies à Tobrouk (ibid. août 2016, 7). L’analyste principale a expliqué que

[traduction]

[d]e nombreuses personnes qui ont fui les régions de la Libye dominées par les islamistes (y compris Tripoli) ou les zones [touchées par la] guerre ont trouvé refuge à Tobrouk au cours des dernières années [parce que] la ville était considérée comme un endroit paisible, où il n’y avait aucun affrontement militaire. De façon générale, il est plus facile pour une personne ayant des liens familiaux ou tribaux avec des personnes vivant à Tobrouk de [s’installer dans cette ville], de sorte que les gens qui s’installent à cet endroit viennent habituellement de l’Est de la Libye et qui ont des liens avec la tribu dominante dans cette région, celle d’Obeidat (16 sept. 2016).

Le représentant de CESVI est d’avis que la ville de Tobrouk est [traduction] « sécuritaire dans une certaine mesure » et qu’elle n’est pas touchée par des problèmes de sécurité d’origine tribale, et il a affirmé que, sur le plan de la sécurité, les personnes déplacées à Tobrouk se trouvaient dans une situation semblable à celle des habitants de la ville (CESVI 14 sept. 2016). Selon l’OIM, en ce qui concerne la situation générale des personnes déplacées interrogées en Libye, 84 p. 100 des ménages déplacés vivent dans des logements privés ou sont hébergés chez des gens de leur famille ou non, alors que 16 p. 100 vivent dans des [traduction] « lieux informels ou collectifs » (OIM août 2016, 10). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens ni aucun renseignement additionnel concernant les personnes déplacées à Tobrouk. Une carte de la Libye, produite par l’OIM, montrant les principaux mouvements des personnes déplacées de leur région d’origine vers leur région de résidence actuelle depuis 2011 et représentant environ 80 p. 100 de la population déplacée en Libye (OIM janv. 2016, 5), est annexée à la présente réponse.

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur des cas où des membres de la tribu des Zintanis se sont installés à Tobrouk. L’analyste principale est d’avis que, même si elle n’a pas eu connaissance de cas de Zintanis vivant à Tobrouk,

[traduction]

[l]es membres de la communauté des Zintanis appuient la coalition militaire dirigée par [le général] Haftar, qui est très puissant à Tobrouk [… et qui] regroupe de nombreux membres des forces de sécurité qui étaient actifs sous le régime de Kadhafi (16 sept. 2016).

Il ressort d’un article publié par la Libyan Gazette que les brigades de Zintan sont [traduction] « loyales à la Chambre des représentants et à sa milice, dirigée par Haftar » (26 mai 2016). Un autre article publié par la Libyan Gazette signale que Haftar [traduction] « a obtenu l’appui des brigades de Zintan dans l’Ouest, lesquelles défendent la même cause anti-islamiste, » et que [traduction] « [l]a majorité de ceux qui l’appuient se sentaient menacés par la progression des forces islamistes qui tentaient d’éliminer toutes traces de l’ancien régime de Kadhafi » (ibid. 22 juin 2016). Pour obtenir de plus amples renseignements sur les brigades de Zintan, y compris ses zones d’activité, ses relations avec le gouvernement et son implication dans des violations des droits de la personne, veuillez consulter la Réponse à la demande d’information LBY104472 publiée en juin 2013.

L’analyste principale est d’avis que [traduction] « Tobrouk serait considérée comme un endroit relativement sûr où peuvent vivre les Zintanis compte tenu du réseau actuel d’alliances et du paysage militaire » (16 sept. 2016). Cependant, en 2014, Human Rights Watch a écrit [traduction] « [qu’]il y a un manque d’accès à l’information en Libye, de sorte qu’il faut procéder à une évaluation personnalisée du risque » et est d’avis que « quiconque est déplacé de force dans n’importe quelle partie de la Libye serait exposé à un véritable risque de subir un préjudice grave » (Human Rights Watch 5 déc. 2014). La position du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur les retours en Libye, publiée en octobre 2015, est la suivante :

[version française des Nations Unies]

Le HCR exhorte tous les États à suspendre les retours forcés vers la Libye, y compris vers Tripoli, jusqu’à ce que la situation de la sécurité et des droits humains soit considérablement améliorée. Compte tenu de la volatilité de la situation, la fragmentation du contrôle et de la pléthore de groupes armés, le HCR estime que, dans les circonstances actuelles, la pertinence et le caractère raisonnable des critères pour les lieux de fuite ou de réinstallation interne sont peu susceptibles d’être remplis (Nations Unies oct. 2015, 14).

Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements sur la capacité des Libyens fuyant le conflit de s’installer à Tobrouk.

5. Aéroport de Tobrouk

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches le 9 septembre 2016, un directeur régional de l’Association du transport aérien international (International Air Transport Association - IATA) [2] a affirmé que, selon la Division de la sécurité (Safety Division) de l’organisation, il y a seulement deux vols par jour à destination de Tobrouk, et ceux-ci proviennent de Tripoli (IATA 9 sept. 2016). La même source a ajouté qu’aucun survol international n’était permis et qu’il n’y avait [traduction] « aucun [avis aux navigants (NOTAM)] actif » touchant l’aéroport de Tobrouk au moment où la communication écrite a été transmise (ibid.). La source a expliqué qu’un NOTAM était un [traduction] « avis visant à avertir les pilotes des dangers potentiels le long d’un itinéraire de vol ou à un endroit en particulier, qui pourraient nuire à la sécurité du vol » (ibid.). Le directeur régional de l’IATA a également signalé que la situation à l’aéroport de Tobrouk pouvait évoluer en fonction des conditions dans le pays (ibid. 3 oct. 2016). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a pas trouvé d’autres renseignements allant dans le même sens, ni aucun renseignement additionnel.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] CESVI fournit de l’aide, notamment du financement et un soutien psychologique, un appui au renforcement de la société civile et à l’enregistrement des immigrants auprès du HCR (CESVI 14 sept. 2016). L’organisation a des bureaux et des centres dans deux villes importantes de la Libye et elle s’est associée à des projets menés en collaboration avec l’UNICEF, le HCR et le gouvernement de la Suisse (ibid.). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant a fourni des renseignements fondés sur des entretiens avec des personnes vivant à Tobrouk et sur l’expérience de CESVI dans l’Est de la Libye (ibid.).

[2] L’IATA est [traduction] « l’association commerciale des transporteurs aériens du monde; elle représente quelque 265 transporteurs aériens qui effectuent 83 p. 100 des voyages aériens. [L’IATA] soutient de nombreux domaines de l’activité de l’aviation et contribue à l’élaboration des politiques de l’industrie touchant des questions essentielles du domaine de l’aviation » (IATA s.d.).

Références

Analyste principale, International Crisis Group. 16 septembre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Cable News Network (CNN). 4 mars 2011. Moni Basu. « Libya’s Tribes Rise up Against Gadhafi ». [Date de consultation : 28 sept. 2016]

CESVI. 14 septembre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

Freedom House. 2016. « Libya ». Freedom in the World 2016. [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Human Rights Watch. 5 décembre 2014. « Libya: Countries Should Suspend Forcible Returns ». [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Institute for the Study of War (ISW). Novembre 2011. Anthony Bell, Spencer Butts et David Witter. The Libyan Revolution: The Tide Turns (Part 4). [Date de consultation : 28 sept. 2016]

International Air Transport Association (IATA). 3 octobre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un directeur régional pour les régions du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.

International Air Transport Association (IATA). 9 septembre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un directeur régional pour les régions du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.

International Air Transport Association (IATA). S.d. « About Us ». [Date de consultation : 24 sept. 2016]

Libyan Gazette. 22 juin 2016. « General Khalifa Haftar and the Libyan National Army ». [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Libyan Gazette. 26 mai 2016. « Haftar Diverting Libyan Army’s Focus Away from ISIS ». [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Nations Unies. Octobre 2015. Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR). UNHCR Position on Returns to Libya – Update I. [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Organisation internationale pour les migrations (OIM). Août 2016. Displacement Tracking Matrix – DTM Round 5 – Libya. [Date de consultation : 30 sept. 2016]

Organisation internationale pour les migrations (OIM). Janvier 2016. Displacement Tracking Matrix – DTM Round 1 – Libya. [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Spiegel Online. 26 juillet 2011. Mathieu von Rohr. « Settling Old Scores: Tribal Rivalries Complicate Libyan War ». [Date de consultation : 29 sept. 2016]

Autres sources consultées

Sources orales : African Airlines Association; Agence d’aide à la coopération technique et au développement; Commission africaine de l’aviation civile; Danish Refugee Council; Human Rights Watch; Internal Displacement Monitoring Centre; Lawyers for Justice in Libya; Libye – Civil Aviation Authority, ambassades de la Libye à Ottawa et à Washington; Libyan League for Human Rights; Nations Unies – Haut Commissariat pour les réfugiés; Organisation internationale pour les migrations; Organisation mondiale contre la torture.

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Al-Monitor; Amnesty International; BBC; ecoi.net; États-Unis – Department of State; European Council on Foreign Relations; Internal Displacement Monitoring Centre; Jamestown Foundation; Libya Herald; Libya Observer; Nations Unies – Refworld, ReliefWeb; Organisation internationale pour les migrations.

Document annexé

Organisation internationale pour les migrations (OIM). Janvier 2016. « IDP Movement from Areas of Origin to Areas of Current Residence ». Displacement Tracking Matrix – DTM Round 1 – Libya. [Date de consultation : 25 sept. 2016]

Associated documents