Document #1072826
IRB – Immigration and Refugee Board of Canada (Author)
Définitions de la collaboration
Selon Human Rights Watch (HRW),
jusqu’en 2001, il existait trois sortes principales de
[traduction] « collaborateurs » dans les Territoires
occupés (Cisjordanie et bande de Gaza) (HRW nov. 2001, sect.
6) : [traduction] « l’informateur », qui donne
aux forces de sécurité d’Israël de
l’information sur les activités des militants
palestiniens; [traduction] « l’agent
d’infiltration », qui s’insinue dans des
organismes palestiniens; et le [traduction] « marchand de
terres », qui aide les Israéliens à acheter les
terres appartenant à des Palestiniens (ibid.).
D’autres sortes d’informateurs, ([traduction] «
l’intermédiaire », qui aidait les Palestiniens
avec des formalités administratives et des
vérifications de sécurité; le [traduction]
« collaborateur armé », qui aidait les forces
spéciales d’Israël à trouver les
résidences des militants palestiniens; les [traduction]
« collaborateurs économiques », qui
représentaient des compagnies israéliennes et
faisaient la promotion de produits israéliens; et les
[traduction] « collaborateurs politiques », qui
représentaient les intérêts d’Israël
et assumaient parfois un rôle public) étaient plus
actifs avant 1994, mais l’étaient peut-être
encore en 2003 (ibid.). Selon HRW, un Palestinien
soupçonné d’appartenir à l’une des
catégories susmentionnées risque d’être
assassiné ou arrêté (ibid.).
Situation globale des présumés collaborateurs
Selon The Guardian, les
autorités de la Palestine entretiennent souvent des
[traduction] « soupçons justifiés » quant
au niveau général d’infiltration par les
services de renseignement d’Israël dans les Territoires
occupés (2 avr. 2002).
Plusieurs sources ont signalé que, depuis le début de l’Intifada Al-Aqsa en septembre 2000, des dizaines de Palestiniens soupçonnés de collaborer avec Israël ont été exécutés, quelquefois publiquement, dans le but de décourager des futurs collaborateurs (B'Tselem s.d.a; ibid. s.d.b; BBC 19 juill. 2003; The Guardian 2 avr. 2002; Country Reports 2003 25 févr. 2004). Selon B'Tselem, Centre d’information israélien sur les droits de la personne dans les Territoires occupés (Israel Information Center for Human Rights in the Occupied Territories), depuis l’automne 2000, 86 Palestiniens au total ont été tués par d’autres Palestiniens, car ils étaient soupçonnés de collaborer avec Israël; 18 de ceux-ci étaient détenus par les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne (s.d.a). Ces Palestiniens ont été assassinés par des organismes militants, lynchés par des foules et exécutés par l’Autorité palestinienne, soit à la suite de tortures (B'Tselem s.d.b; HRW nov. 2001, sect. 6), soit lorsqu’ils ont tenté de s’échapper (B'Tselem s.d.b). Les présumés collaborateurs ont aussi été enlevés et [traduction] « torturés » par d’autres Palestiniens (ibid.). B'Tselem affirme que le traitement réservé aux personnes soupçonnées de collaboration, particulièrement lorsque ces personnes sont assassinées, viole les quatre Conventions de Genève, ainsi que le Statut de la Cour pénale internationale (s.d.b).
En plus des représailles de l’Autorité palestinienne et de divers groupes militants, les présumés terroristes risquent aussi d’être bannis par leur famille, comme ce fut le cas de Hanna Mansour Salama, qui a été reconnu coupable en janvier 2001 de collaborer avec les forces de sécurité d’Israël et qui a immédiatement été renié par sa famille (HRW nov. 2001, sect. 6).
Raisons de la collaboration avec Israël
Même si le gouvernement
d’Israël n’approuve pas officiellement la pratique
qui consiste à obliger les civils palestiniens à
contribuer à ses activités militaires, des
Palestiniens ont déjà été placés
dans des situations où il leur était très
difficile de refuser d’aider l’armée
israélienne lorsqu’elle le leur demandait, en raison
de la crainte de représailles (Country Reports 2003
25 févr. 2004, intr.). Toutefois, les Palestiniens
placés dans ce genre de situation doivent par la suite
affronter le risque d’être accusés de
collaboration avec Israël, de même que toutes les
conséquences qu’entraîne une telle accusation
(ibid.).
Certains Palestiniens peuvent collaborer avec les services de renseignement d’Israël pour obtenir de l’argent (souvent pour des montants [traduction] « ne dépassant pas quelques centaines de dollars »), parce que les Israéliens les font chanter après les avoir arrêtés ou parce qu’ils s’opposent à certains membres de groupes militants (The Guardian 2 avr. 2003). B'Tselem maintient que certains membres des forces de sécurité demandent la collaboration de Palestiniens en échange de permis permettant à ces derniers de travailler et de recevoir des soins médicaux en Israël (s.d.b).
Traitement par l’Autorité palestinienne
Le 15 mars 2004, l’Autorité
palestinienne a annoncé que depuis le début de
l’Intifada, en septembre 2000 (BBC 19 juill. 2003), elle
avait arrêté au moins 140 Palestiniens
soupçonnés de collaboration (Jerusalem Post
15 mars 2004). Le Service de sécurité
préventive (Preventative Security Service — PSS) de
l’Autorité palestinienne a procédé
à la majorité des arrestations (ibid.). Des
onze hommes traduits en justice pour haute trahison, dix avaient
déjà été condamnés à mort
(ibid.). Selon des fonctionnaires palestiniens,
l’Autorité palestinienne recommencera à
exécuter de présumés collaborateurs afin de
réduire la criminalité manifeste qui a envahi une
grande partie de la bande de Gaza (ibid.).
Dans un article de novembre 2001 sur le système de justice palestinien, HRW a publié l’information suivante : depuis le début de la deuxième Intifada en septembre 2000, l’Autorité palestinienne a été impliquée dans de [traduction] « graves abus » contre de présumés collaborateurs, y compris la torture de certains suspects afin d’obtenir des confessions forcées et la télédiffusion de ces confessions (HRW nov. 2001, sect. 6). La plupart des personnes reconnues coupables sont condamnées à mort (ibid.). Lors d’une amnistie de 45 jours qui a débuté en janvier 2001, l’Autorité palestinienne a offert d’accorder son pardon aux collaborateurs qui se livreraient d’eux-mêmes et qui feraient une confession publique complète; toutefois, peu de personnes ont participé à cette [traduction] « amnistie » (ibid.).
Selon les Country Reports 2003, plusieurs organisations de défense des droits de la personne ont signalé que le traitement réservé aux présumés collaborateurs avec Israël dans les prisons de l’Autorité palestinienne était pire que celui réservé à la moyenne des autres détenus (25 févr. 2004, sect. 1c). Le service de renseignement militaire de l’Autorité palestinienne a arrêté deux hommes à Gaza en 2001 et en 2002 pour collaboration avec Israël (Country Reports 2003 25 févr. 2004, sect. 1d). Malgré une décision du 17 mai 2003 de la Haute Cour de justice de l’Autorité palestinienne qui exigeait la libération de ces hommes en raison d’un manque de preuves, ils étaient toujours en prison à la fin de 2003 (ibid.). Les Country Reports 2003 ajoutent qu’un nombre incalculable de personnes soupçonnées de collaborer avec Israël étaient souvent détenues dans les prisons de l’Autorité palestinienne sans preuve concluante et que le problème était aggravé par le fait que nombre d’entre elles avaient été empêchées de communiquer avec leur avocat, leur famille ou leur médecin (ibid.).
Conformément à la loi sur l’Autorité palestinienne, les Palestiniens soupçonnés de collaborer avec Israël peuvent être exécutés (Toronto Star 29 févr. 2004; The Guardian 2 avr. 2002). Le 13 janvier 2001, l’Autorité palestinienne a assassiné un présumé collaborateur devant une centaine de personne rassemblées dans la cour du principal immeuble de l’administration, à Nablus (HRW nov. 2001, sect. 11).
Traitement par les groupes militants palestiniens
HRW a signalé que parfois les
groupes militants palestiniens obligent les présumés
collaborateurs à attaquer des cibles israéliennes
afin de prouver leur loyauté envers la Palestine (2004).
Un membre du PSS a été enlevé, battu et torturé par six membres du Hamas pour présumée collaboration avec Israël (BBC International Reports 21 sept. 2003). Par la suite, le PSS a arrêté sept membres du Hamas (ibid.). Dans un article publié par l’Agence France-Presse (AFP), un Palestinien, exaspéré par les actes du Hamas contre Israël, a déclaré qu’il ne pouvait exprimer ses préoccupations au Hamas par crainte d’être qualifié de collaborateur et ensuite exécuté (30 juin 2003).
Durant la première Intifada, qui a duré de 1987 à 1993, les Palestiniens auraient tué plus de 800 compatriotes soupçonnés de collaborer avec Israël (The Guardian 2 avr. 2002; HRW nov. 2001, sect. 11). Moins de personnes ont été assassinées dans les rues pendant la deuxième Intifada, qui a débuté en septembre 2000 (ibid.).
En 2003 seulement, des tireurs palestiniens, habituellement anonymes, ont tué au moins huit autres Palestiniens qu’ils soupçonnaient de collaborer avec Israël (Country Reports 2003 25 févr. 2004, sect. 1a). Quelques responsables des assassinats étaient reconnus pour appartenir à des groupes militants, mais personne n’a été arrêté (ibid.). L’Autorité palestinienne n’a pas encore traduit en justice les responsables de ces assassinats (HRW 2004).
Le 3 avril 2003, le quotidien libanais L'Orient-Le Jour mentionnait que deux tireurs masqués avaient assassiné un homme à Ramallah, apparemment car ils le soupçonnaient de collaboration. Le 7 août 2003, l’AFP a souligné que trois membres de la Brigade des martyrs Al-Aqsa (Al-Aqsa Martyrs' Brigade) avaient exécuté un homme dans le centre-ville de Ramallah. Durant le même mois, une femme soupçonnée de collaboration par des militants a été assassinée, il s’agissait de la première exécution d’une femme relativement à ce genre d’accusations (BBC 19 juill. 2003). En octobre, deux Palestiniens ont été tué par balles pour présumée collaboration et, par la suite, leurs corps ont été exposés sur une place publique à Tulkarem, en Cisjordanie (La Presse canadienne 23 oct. 2003).
Selon The Guardian, le 1er avril 2002, près d’une dizaine de prisonniers détenus par l’Autorité palestinienne pour présumée collaboration avec Israël ont été fusillés au moment où les forces israéliennes s’apprêtaient à entrer en Cisjordanie (2 avr. 2002). Aucune des personnes fusillées n’avait été jugée pour ses présumés crimes (The Guardian 2 avr. 2002). La Brigade des martyrs Al-Aqsa a traîné un homme dans les rues de Bethléem avant de le tuer par balles dans un stationnement voisin de la place de la Mangeoire (ibid.). Sept des hommes tués cette journée-là étaient détenus par le service de renseignement de la Palestine dans un appartement de Tulkarem (ibid.). Lorsque des membres de la Brigade des martyrs Al-Aqsa sont entrés dans l’appartement afin d’amener les hommes dans la rue où ces derniers ont par la suite été fusillés, les policiers ou les gardes ne leur ont opposé aucune résistance (ibid.). Quelques semaines avant les événements du 1er avril 2002, considérés comme l’attaque la plus meurtrière contre des présumés collaborateurs depuis le début de la deuxième Intifada, le corps d’un présumé collaborateur a été suspendu par les chevilles dans un carrefour giratoire du centre-ville de Ramallah afin de dissuader les futurs collaborateurs (ibid.).
Des fonctionnaires ont aussi été qualifiés de collaborateurs à l’occasion (BBC 19 juill. 2003; The Independent 26 nov. 2003). Le 19 juillet 2003, plusieurs membres de la Brigade des martyrs Al-Aqsa ont enlevé le gouverneur de Jenin pour présumée collaboration avec Israël (BBC 19 juill. 2003). Les militants ont détenu le gouverneur pendant plusieurs heures avant de le libérer sur ordre de Yasser Arafat (ibid.). En novembre 2003, des militants anonymes ont fait feu sur l’automobile de Ghassan Shaka, maire de Nablus, tuant ainsi le frère du maire, et ils ont laissé des pamphlets accusant M. Shaka de collaborer avec Israël (The Independent 26 nov. 2003).
On signale des cas où des accusations de collaboration ont été utilisées afin de justifier des meurtres à la suite de conflits familiaux ou personnels (HRW nov. 2001). Toutefois, selon Mahmoud Aloul, gouverneur de la région de Nablus, en Cisjordanie, la police de l’Autorité palestinienne fait parfois preuve de négligence lorsqu’il s’agit d’emprisonner des présumés criminels palestiniens dans les Territoires occupés, par crainte d’être accusée à son tour de collaborer avec Israël (IHT 19 juill. 2003).
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Références
Agence France-Presse (AFP). 7 août
2003. Chris Otton. « Israel Tears Down Roadblocks in Bid to
Restore Confidence in Peace Process ». (Dialog)
_____. 30 juin 2003. Sophie Claudet.
« À Beit Hanoun, le soulagement après le
retrait des forces israéliennes ». (Courrier AFP)
BBC. 19 juillet 2003. « Militants
Beat Up Jenin Governor ». http://news.bbc.co.uk/2/hi/middle_east/3079931.stm
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
BBC International Reports. 21 septembre
2003. « Palestinian Security Agent Says Hamas Men Tortured
Him - Israeli Paper ». (Dialog)
B'Tselem. S.d.a. « Fatalities in
the Al-Aqsa Intifada: 29 Sept. 2000 - 10 March 2004 ». http://www.btselem.org/english/Statistics/Al_Aqsa_Fatalities.asp
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
_____. S.d.b. « Harm to
Palestinians Suspected of Collaborating with Israel ». http://www.btselem.org/english/Collaboration_Suspects/index.asp
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
Country Reports on Human Rights
Practices for 2003. 25 février 2004. Département
d’État des États-Unis. Washington, DC. http://www.state.gov/g/drl/rls/hrrpt/2003/27929.htm
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
The Guardian [Londres]. 2 avril
2002. Peter Beaumont. « Palestinians Kill Suspected
Collaborators ». http://www.guardian.co.uk/Archive/Article/0,4273,4385558,00.html
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
Human Rights Watch (HRW). 2004.
Human Rights Watch World Report 2003. http://www.hrw.org/wr2k3/mideast5.html
[Date de consultation : 19 avr. 2004]
_____. Novembre 2001. « Justice
Undermined: Balancing Security and Human Rights in the Palestinian
Justice System ». http://www.hrw.org/reports/2001/pa/index.htm
[Date de consultation : 19 avr. 2004]
The Independent [Londres]. 26
novembre 2003. « West Bank: Assassination Attempt on West
Bank Mayor ». (Dialog)
The International Herald
Tribune (IHT) [Londres]. 19 juillet 2003. James Bennet.
« Street Violence Tears Palestinian Fabric ».
(Dialog)
The Jerusalem Post. 15 mars
2004. Khaled Abu Toameh. « More than 140 "Collaborators"
Arrested by PA ». (Independent Media Review and Analysis
(IMRA/Kokhaviv)). http://www.kokhavivpublications.com/2004/israel/03/0403161652.html
[Date de consultation : 20 avr. 2004]
L'Orient-Le Jour [Beyrouth]. 3
avril 2003. « Territoires occupés - Des milliers
d'habitants délogés de leurs habitations avant
d'être contrôlés ».
La Presse canadienne [Montréal].
23 octobre 2003. « Deux collaborateurs présumés
d'Israël exécutés à Tulkarem,
l'armée enquête sur le raid de Nousseirat ».
(Dialog)
The Toronto Star. 29
février 2004. « In Gaza, the Tunnels Lead to Death
». (Dialog)
Autres sources consultées
Sites Internet, y compris :
Al-Ahram, Al-Jazeera, Amnesty International (AI),
Direction de l’immigration et de la nationalité du
ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni,
European Country of Origin Information Network (ECOI),
Ha'aretz, Jordan Times, Middle East
Times, Palestinian Center for Rapprochement Between People
(PCR), Palestinian Human Rights Monitoring Group (PHRMG), Palestine
News Agency - Wafa, Palestine Times, World News Connection
(WNC).