Document #1038906
IRB – Immigration and Refugee Board of Canada (Author)
Situation générale des Bosniaques
Selon le recensement de mars 2002, il y a
environ 136 000 Bosniaques en Serbie; le Comité Helsinki
pour les droits de l'homme en Serbie a souligné que de ces
Bosniaques, environ 134 000 demeurent dans la région du
Sandjak (Comité Helsinki oct. 2004, 67-68). Le bosniaque est
la langue officielle dans trois des six municipalités du
Sandjak, à savoir Novi Pazar, Sjenica et Tutin
(ibid.).
En septembre 2003, le Centre pour la paix dans les Balkans (Centre for Peace in the Balkans) a cité le dirigeant des musulmans de Serbie, Hamdija Effendi Jusufspahic, lequel a déclaré que la situation des musulmans en Serbie s'était améliorée depuis la fin de la guerre en Bosnie-Herzégovine, mais que la situation des musulmans au Kosovo était [traduction] « encore déplorable » (7 sept. 2003).
Même si nombre de Bosniaques du Sandjak appréhenderaient la possibilité que le Monténégro devienne un État indépendant en 2006, divisant ainsi le Sandjak en deux et augmentant les difficultés économiques des négociants et des entrepreneurs bosniaques, la majorité des Bosniaques du Monténégro seraient en faveur de la séparation, en partie parce que le Monténégro est considéré comme plus tolérant envers les minorités que la Serbie (OPNNR 2 févr. 2005).
Études
Le Comité Helsinki a signalé
que la qualité de l'instruction offerte aux Bosniaques du
Sandjak diminue depuis 2000; les étudiants se plaignent de
ne pouvoir étudier dans leur langue maternelle, tandis que
d'autres minorités, comme les Croates de Voïvodine,
peuvent suivre des cours dans leur propre langue (oct. 2004, 71).
Toutefois, il faut souligner que le bosniaque et le serbe sont deux
langues très similaires (Comité Helsinki oct. 2004,
71) et, qu'avec le croate, elles étaient
considérées comme une seule langue avant d'être
séparées pour des raisons politiques (ibid.,
69). Le mufti du Sandjak, Muamer Zukorlic, a déclaré
que l'on encourageait l'assimilation des élèves
musulmans de Serbie en leur demandant, par exemple, de participer
à des cérémonies chrétiennes
orthodoxes, de faire des présentations sur les
églises et les écoles serbes ou de s'inscrire
à des concours littéraires ayant pour thème
[traduction] « [l']unification des Serbes »
(Politika 1er févr. 2004).
En octobre 2000, un chercheur du Centre pour l'étude de la démocratie (Center for the Study of Democracy) de l'université Queen's de Kingston a cité un historien serbe ayant déclaré que les livres d'histoire récents dans les écoles primaires et secondaires apprenaient aux élèves à se méfier des Croates, des Albanais et des Bosniaques, groupes considérés comme [traduction] « traîtres et menaçants à l'égard des intérêts de la nation serbe » (Southeast European Politics oct. 2000, 30).
Incidents concernant des Bosniaques
Beaucoup d'incidents interethniques tendus
se sont produits durant des événements sportifs; par
exemple, lors d'un match de football entre les équipes de
Rad et de Novi Pazar en septembre 2002, la foule a scandé
des épithètes antiserbes (Comité Helsinki oct.
2004, 66). Durant le même mois, l'Agence France-Presse (AFP)
a mentionné que des affrontements violents avaient
éclaté entre les amateurs de sports serbes et
musulmans à Novi Pazar (10 sept. 2002). Durant ces
incidents, environ 800 Bosniaques et 200 Serbes (qui
célébraient une victoire de la Yougoslavie au
basket-ball) se sont affrontés, ont bloqué des
chemins et ont lancé des pierres (AFP 10 sept. 2002). La
police a tenté d'apaiser les tensions, mais plusieurs
policiers ont été blessés (ibid.).
Certains manifestants ont déclaré avoir
été provoqués par les [traduction] «
symboles nationalistes » sur les autos des Serbes
(ibid.; voir aussi RFE/RL 28 nov. 2002), mais Radio Free
Europe/Radio Liberty (RFE/RL) a ajouté que le conseil du
district avait rejeté le blâme sur les [traduction]
« extrémistes de la police locale » qui
collaboraient avec des tiers afin d'augmenter les tensions
(ibid.).
En janvier 2004, l'Associated Press (AP) a publié un article sur la montée de l'ultranationalisme et la distribution de brochures dans deux villes serbes ayant une importante population musulmane; sur ces brochures ont pouvait lire [traduction] « "[v]ous serez un autre Srebrenica" », faisant allusion au massacre de 8 000 musulmans par des Serbes de Bosnie qui s'est produit en 1995 (17 janv. 2004).
Des sources ont mentionné que, durant la nuit du 17 au 18 mars 2004, des sites religieux islamiques en Bosnie ont été ciblés en réponse à la violence contre les Serbes au Kosovo : une mosquée de Belgrade aurait été pillée et brûlée par une foule de milliers de personnes et une mosquée de Nis a aussi été incendiée (International Religious Freedom Report 2004 15 sept. 2004, sect. III; AP 23 juill. 2004; HRW janv. 2005). En tout, le Comité Helsinki a signalé 40 attaques contre des propriétés appartenant à des Albanais et à des Bosniaques de Voïvodine entre le 17 et le 21 mars 2004 (International Religious Freedom Report 2004 15 sept. 2004, sect. III).
Le 2 avril 2004, une mosquée de Belgrade, qui avait déjà été incendiée, a été pillée par des personnes non identifiées (SRNA 3 avr. 2004). Même si un article a mentionné que la police avait lancé une enquête (ibid.), aucune information sur les résultats de cette enquête n'a été trouvée parmi les sources consultées par la Direction des recherches.
Traitement réservé par l'État
La Serbie-et-Monténégro
garantit la liberté religieuse, droit
généralement respecté par le gouvernement
(International Religious Freedom Report 2004 15 sept.
2004, sect. II). Cependant, l'International Religious Freedom
Report 2004 a aussi signalé certains écarts; par
exemple, l'armée n'a pu satisfaire les exigences
alimentaires de tous les soldats musulmans et la communauté
islamique de Belgrade s'est plainte des difficultés qu'elle
éprouvait à obtenir des terres pour construire un
cimetière islamique (15 sept. 2004, sect. II).
Même s'il ne mentionne pas particulièrement les Bosniaques de Serbie, un article de l'agence de presse BETA souligne que la plupart des personnes victimes de violence en raison de leur race, de leur religion ou de leur origine ethnique ne portent pas plainte par crainte de représailles; nombre d'organisations non gouvernementales (ONG) signalent aussi que les procureurs traitent avec peu d'efficacité les cas concernant des crimes haineux (7 mars 2003).
Traitement réservé par la police
RFE/RL a mentionné que les
Bosniaques du Sandjak sont parfois passés à tabac par
des policiers serbes en civil du Kosovo lorsqu'ils tentent de
traverser le pont de la rivière Ibar afin de se rendre dans
la partie sud de Mitrovica pour y faire des affaires avec des
Albanais de souche (28 nov. 2002).
Selon un article publié en 2003 par Amnesty International (AI), il y a eu des [traduction] « allégations de torture et de mauvais traitements généralisés à l'égard d'un grand nombre de musulmans du Sandjak par la police au cours des dix dernières années » (1er mai 2003). AI a ajouté que
[traduction]
[...] jusqu'à maintenant, il n'y a eu aucune enquête approfondie et impartiale sur ces graves allégations et les policiers qui seraient responsables ont opéré et continuent d'opérer dans un climat d'impunité, et font encore partie du corps policier du Sandjak (1er mai 2003).
Aucune information corroborant les allégations de torture à l'égard des Bosniaques du Sandjak n'a pu être trouvée par la Direction des recherches dans les délais prescrits.
L'International Religious Freedom Report 2004 a mentionné que la police avait arrêté 110 personnes relativement à l'attaque susmentionnée contre une mosquée de Belgrade pendant la nuit du 17 au 18 mars 2004 (15 sept. 2004, sect. III). Cependant, Human Rights Watch (HRW) a signalé que le nombre de policiers envoyés pour protéger les mosquées de Belgrade et de Nis durant les incidents de mars 2004 était insuffisant pour contrôler les émeutiers (janv. 2005). En outre, HRW a mentionné que, le 17 mars 2004, le ministre de l'Intérieur de la Serbie, Vladan Jocic, aurait promis à une foule que la [traduction] « police n'utiliserait pas la force contre "son propre peuple" » (janv. 2005). HRW a ajouté que la trentaine d'émeutiers arrêtés pour avoir participé aux attaques de Nis et de Belgrade ont été accusés d'appartenir à un groupe violent et non pas d'avoir usé de violence fondée sur l'origine ethnique (ibid.). Le soir du 17 mars 2004, la police n'aurait pas réagi lorsque des manifestants ont attaqué un centre communautaire islamique ainsi que des pâtisseries et des boulangeries musulmanes à Novi Sad (ibid.).
La police n'a pu trouver les responsables de la lapidation d'une librairie islamique de Monténégro en mars 2004 mais, à Podgorica, elle a détenu 10 hommes, qui auraient menacé de brûler la mosquée centrale de la ville (International Religious Freedom Report 2004 15 sept. 2004, sect. III).
Aida Corovic, coordinatrice du Club pour une société civique (Club for Civic Society), ONG établie à Novi Pazar, était désappointée que des policiers et des soldats fassent partie des nationalistes qui ont provoqué le conflit entre les amateurs de sport serbes et bosniaques à Novi Pazar en septembre 2002 (RFE/RL 28 nov. 2002). Elle a ajouté que certains politiciens du Sandjak continuaient d'exacerber le conflit ethnique (ibid.). Le ministre des communautés nationales et ethniques de la Yougoslavie a souligné que, même si le système juridique du Sandjak était en train de devenir plus équitable, le corps de police régional comptait presque exclusivement des Serbes de souche (ibid.).
Pour obtenir davantage de détails sur le traitement des Bosniaques en Serbie-et-Monténégro, veuillez consulter les pages 63 à 74 du document In Conflict With a State Ethnic Identity: National Minorities in Serbia, publié par le Comité Helsinki en octobre 2004, à http://www.helsinki.org.yu/doc/reports/eng/Minorities-Study.pdf.
Traitement des Bosniaques au Kosovo
Le dirigeant des musulmans de Serbie a
signalé que la situation des non-Albanais, y compris des
musulmans, était plus difficile au Kosovo en raison de la
présence du mouvement nationaliste albanais (Centre for
Peace in the Balkans 7 sept. 2003).
Dans un article sur la situation des droits de la personne au Kosovo, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a exprimé ses inquiétudes relativement au traitement des groupes ethniques non albanais, entre autres les Bosniaques, qui sont victimes chaque jour de violence aux mains de certains groupes albanais de souche, comme l'armée nationale albanaise (Albanian National Army - ANA); les non-Albanais, y compris les Bosniaques, seraient aussi victimes de discrimination, notamment dans le système judiciaire, et le Conseil de l'Europe a déclaré que la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) n'avait pas su protéger suffisamment les minorités non albanaises du Kosovo (Conseil de l'Europe 9 sept. 2003).
Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.
Références
Agence France-Presse (AFP). 10 septembre
2002. « Basketball Victory Prompts Ethnic Violence in Serbian
Town ». (Dialog)
Amnesty International (AI). 1er mai
2003. « Serbia and Montenegro (1): Legal Loopholes Allow
Impunity for Torturers in the Sandzak ». http://web.amnesty.org/library/index/engeur700022003
[Date de consultation : 22 mars 2005]
Associated Press (AP). 23 juillet 2004.
« Work Begins to Rebuild Mosque Torched by Serb Mobs Over
Kosovo Ethnic Violence ». (Dialog)
_____. 17 janvier 2004. William J. Kole.
« Serbia, Swinging to Right, Still Plagued by Milosevic-Style
Vendetta Violence ». (Dialog)
BETA. 7 mars 2003. Marija Prijic Sladic.
« Racial Violence in Serbia: The Fear is There ».
(Media Diversity Institute) http://www.media-diversity.org/beta%20articles/Racial%20violence%20in%20Serbia.htm
[Date de consultation : 29 mars 2005]
Center for Peace in the Balkans. 7
septembre 2003. « Muslims in Serbia "In Better Position"
». http://www.balkanpeace.org/hed/archive/sep03/hed5988.shtml
[Date de consultation : 29 mars 2005]
Comité Helsinki pour les droits
de l'homme en Serbie. Octobre 2004. « Bosniaks ».
In Conflict With a State Ethnic Identity: National Minorities
in Serbia. http://www.helsinki.org.yu/doc/reports/eng/Minorities-Study.pdf
[Date de consultation : 22 mars 2005]
Conseil de l'Europe. 9 septembre 2003.
Assemblée parlementaire. « The Human Rights Situation
in Kosovo ». http://assembly.coe.int/Documents/WorkingDocs/Doc03/EDOC9896.htm
[Date de consultation : 22 mars 2005]
Human Rights Watch (HRW). Janvier 2005.
« Serbia and Montenegro ». Human Rights Watch World
Report 2005. http://hrw.org/english/docs/2005/01/13/serbia9859.htm
[Date de consultation : 15 mars 2005]
International Religious Freedom
Report 2004. 15 septembre 2004. « Serbia and Montenegro
». Département d'État des États-Unis.
Washington, DC. http://www.state.gov/g/drl/rls/irf/2004/35482.htm
[Date de consultation : 8 mars 2005]
Organisation des peuples et des nations
non représentés (OPNNR). 2 février 2005. Amela
Bajrovic. « Sanjak: Border Threatens Bosniak Community
». http://www.unpo.org/news_detail.php?arg=45&par=1981
[Date de consultation : 15 mars 2005]
Politika [Belgrade, en serbe].
1er février 2004. « Sandzak Muslim Community Protests
at Serbian Orthodox Celebrations in Schools ». (BBC
International Reports 4 févr. 2004/Dialog)
Radio Free Europe/Radio Liberty
(RFE/RL). 28 novembre 2002. Jolyon Naegele. « Yugoslavia:
Bosniaks in Sandzak Region Seek Recognition (Part 1) ». http://www.reliefweb.int/rw/rwb.nsf/0/322bcd0da3862fb3c1256c8000596c2a?OpenDocument
[Date de consultation : 4 avr. 2005]
Southeast European Politics
[Budapest]. Octobre 2000. Vol. 1, no 1. Dejan Guzina. «
Nation-Building Vs. Minority-Destroying: Majority-Minority
Relations in the Post-Socialist Serbia ». http://www.seep.ceu.hu/volume11/guzina.pdf
[Date de consultation : 22 mars 2005]
SRNA [Bijeljina, en
bosniaque/croate/serbe]. 3 avril 2004. « Serbia: Belgrade
Mosque, Set Ablaze at Height of Kosovo Unrest, Robbed ». (BBC
International Reports/Dialog)
Autres sources consultées
Source orale : Comité
Helsinki pour les droits de l'homme en Serbie, Belgrade.
Sites Internet, y compris :
Blic, Le Courrier des Balkans, European Country
of Origin Information Network (ECOI), Fédération
internationale Helsinki (IHF), Freedom House, International Crisis
Group (ICG), ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni
- Country Information, Organisation pour la sécurité
et la coopération en Europe (OSCE), World News Connection
(WNC).
Update to YUG34406.E of 19 May 2000 on the treatment of Bosniaks (Muslims) living in Serbia by the state and society in general (May 2000-March 2005) [SCG43443.E] (Response, English)