Document #1338411
HRW – Human Rights Watch (Author)
(Bruxelles, le 18 janvier 2017) – Les réfugiés, les demandeurs d’asile et les autres migrants en situation de handicap ne sont pas correctement identifiés comme tels et n’ont pas un égal accès aux services dans les centres d’accueil de Grèce, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Avec les milliers d’autres migrants et demandeurs d’asile, ils restent privés de protection face aux températures glaciales.
L’accord très insatisfaisant de l’UE avec la Turquie – visant à renvoyer les demandeurs d’asile en Turquie, la fermeture des frontières le long de la route des Balkans, une mauvaise gestion ainsi qu’un manque de coordination entre les gouvernements européens ont bloqué 62 700 demandeurs d’asile et autres migrants en Grèce. D’après la Commission Européenne, à la date du 12 janvier 2017, seulement 7 448 personnes ont été relocalisées, ou sont en cours de l’être, en vertu du mécanisme de relocalisation de l’UE – soit environ 12% des 66 400 places promises en 2015. Celles qui sont restées en Grèce vivent dans des conditions déplorables et instables, privées de services et d’hébergement adéquats. Des milliers de réfugiés à travers la Grèce souffrent des conditions hivernales très dures, vivant sous de frêles tentes, dans un froid atteignant -14°C. Ceux qui ont des handicaps sont particulièrement exposés.
Les enquêtes menées par Human Rights Watch en Grèce, sur le continent comme dans les îles, en octobre 2016 et janvier 2017, ainsi que les entretiens téléphoniques réalisés en décembre 2016 et janvier 2017 montrent que les demandeurs d’asile et réfugiés handicapés ne sont pas correctement identifiés comme tels en Grèce, notamment en raison d’un processus d’enregistrement bâclé et d’un manque d’instruction du personnel. En l’absence de compréhension de l’étendue et de la nature des besoins, la réponse des organisations d’aide humanitaire ne peut être efficace.
Les services de santé mentale, indispensables dans le cas des demandeurs d’asile et des autres migrants, sont aussi très inadaptés. La moitié des 40 migrants interviewés par Human Rights Watch ont déclaré qu’eux-mêmes ou les membres de leur famille souffrent de traumatisme, d’anxiété ou de dépression dus à la violence subie dans leur pays d’origine, à leur dangereux périple, à la séparation d’avec leurs proches ou encore à l’incertitude et l’insécurité qui règnent dans les camps.Depuis 2015, la Commission européenne a octroyé plus de 125 millions d’euros au gouvernement grec et presque 370 millions d'euros aux agences d’aide et aux organisations internationales, y compris le HCR. Mais le gouvernement grec et le HCR ont été critiqués pour ne pas avoir su utiliser les fonds européens de façon à améliorer suffisamment les conditions du camp avant l’arrivée de l’hiver, laissant des milliers de personnes dormir dans un froid glacial.
Les autorités grecques, avec le soutien d’autres États-membres, du HCR et des associations humanitaires, devraient immédiatement s’assurer que les personnes handicapées et les autres groupes à-risque, y compris les enfants, aient un accès équitable à l’assistance fournie dans les centres et les camps de réfugiés et de migrants, notamment l’eau et l’hygiène, la distribution de nourriture, l’hébergement et les soins médicaux – dont les soins de santé mentale et le soutien psychosocial. Tout manquement dans ce sens est discriminatoire et viole la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU, ainsi que le droit européen.
Le HCR et le gouvernement grec devraient donner des instructions claires à leur personnel de terrain en vue de l’identification et de l’enregistrement des personnes porteuses de handicaps, y compris ceux qui ne sont pas facilement identifiables, comme les handicaps intellectuels ou les maladies mentales. Les services d’accueil et d’identification, ainsi que les responsables des procédures d’asile, devraient être formés pour savoir comment identifier et répondre correctement aux besoins des personnes handicapées, tout en leur garantissant un accès aux services pendant le processus. Enfin les réfugiés, les demandeurs d’asile et les autres migrants handicapés devraient être intégrés et consultés lors de la mise en place de ces actions.
Compte tenu des conditions hivernales, le gouvernement grec, avec le soutien du HCR, devrait en priorité transférer d’urgence toutes les personnes présentant un handicap – de même que les autres personnes à risque, comme les femmes enceintes, les enfants ou les personnes âgées – et vivant encore sous tente vers des logements préfabriqués chauffés avec accès à l’eau chaude. Toutes les personnes vivant actuellement sous tente devraient être transférées vers des logements adéquats dès que possible.
À plus long terme, les autorités grecques, avec le soutien de l’UE et du HCR, devraient mettre fin au système de camps et fournir à tous un hébergement au sein de la communauté. Vivre dans un camp favorise la persistance du traumatisme du départ et augmente d’autres risques importants liés à la protection, comme les violences physiques et sexuelles ou les problèmes de santé.
« D’après l’ONU, les personnes en situation de handicap représentent un septième de la population mondiale, et pourtant l’ONU et les autres institutions les négligent quand il faut répondre à des crises humanitaires », a déclaré Shanta Rau Barriga. « La situation désespérée des demandeurs d’asile et des migrants handicapés en Grèce est un appel pour que l’ONU et de l’UE prennent enfin le problème au sérieux ».
18 January 2017 | HRW – Human Rights Watch (Author)
Greece
Greece: Refugees with Disabilities Overlooked, Underserved - Identify People with Disabilities; Ensure Access to Services (Appeal or News Release, English)